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11/07/2012 | FRANCE | N°11-17240

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 11 juillet 2012, 11-17240


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu selon l'arrêt attaqué (Paris, 1er mars 2011), que M. X..., engagé, le 22 avril 1985, par la société Pacema, aux droits de laquelle est venue la société Weinerbeger France, a été victime d'un accident du travail, le 5 février 1993 ; qu'à l'issue de son arrêt de travail, il a été reclassé par son employeur au mois d'avril 1996, dans le cadre d'un mi-temps thérapeutique ; qu'à compter du 16 février 2005, il a cessé de se présenter à son poste de travail ; que l'employeur l'a mis en demeure, par

lettre recommandée en date du 8 mars 2005, revenue avec la mention "non-réc...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu selon l'arrêt attaqué (Paris, 1er mars 2011), que M. X..., engagé, le 22 avril 1985, par la société Pacema, aux droits de laquelle est venue la société Weinerbeger France, a été victime d'un accident du travail, le 5 février 1993 ; qu'à l'issue de son arrêt de travail, il a été reclassé par son employeur au mois d'avril 1996, dans le cadre d'un mi-temps thérapeutique ; qu'à compter du 16 février 2005, il a cessé de se présenter à son poste de travail ; que l'employeur l'a mis en demeure, par lettre recommandée en date du 8 mars 2005, revenue avec la mention "non-réclamée", de justifier son absence dans le délai de 48 heures ; que le salarié a été licencié, le 30 mars 2005, pour faute grave résultant d'une absence injustifiée depuis le 16 février 2005 ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident de l'employeur, qui est préalable :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de constater la nullité du licenciement et de le condamner à payer au salarié des sommes à titre de dommages-intérêts, d'indemnité de préavis et d'indemnité légale de licenciement, alors, selon le moyen, que constitue une faute grave le fait pour un salarié de ne plus se présenter à son poste sans en justifier et de demeurer absent pendant une période prolongée sans davantage informer l'employeur, qui, sans réponse à une mise en demeure d'exposer les raisons de l'absence constatée, est dès lors fondé à licencier son salarié pour faute grave, peu important l'existence d'arrêts de travail antérieurs ou l'absence de désorganisation caractérisée de l'entreprise ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que le salarié ne justifiait pas avoir averti son employeur de la nouvelle prolongation de son arrêt de travail, qu'il ne s'était plus présenté à son poste de travail à compter du 16 février 2005, que l'employeur l'avait mis en demeure, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 8 mars 2005 demeurée sans réponse, de justifier de son absence et que le salarié ne s'était pas présenté à l'entretien préalable auquel il avait été convoqué le 17 mars 2005 pour le 25 mars suivant ; qu'en retenant, pour dire nul le licenciement notifié le 30 mars 2005, que l'employeur connaissait les arrêts de travail antérieurs d'une part, ne prouvait pas la désorganisation de l'entreprise d'autre part, la cour d'appel a violé les articles L. 1226-9, L. 1226-13 et L. 1234-1 du code du travail ;
Mais attendu, qu'après avoir relevé que le salarié ne justifiait pas avoir avisé dans les meilleurs délais son employeur de la prolongation de son arrêt maladie, la cour d'appel, qui fait ressortir que l'employeur ne pouvait ignorer la raison de l'absence du salarié, dès lors qu'il résultait des certificats médicaux produits par celui-ci qu'il avait été en prolongation d'arrêt de travail lié à l'accident de travail dont il avait victime en 1993, de manière continue depuis janvier 2004, a légalement justifié sa décision ;
Sur les deux moyens réunis du pourvoi principal du salarié :
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de limiter la somme qui lui a été allouée à titre de dommages-intérêts en réparation de la nullité de son licenciement et de le débouter de sa demande de rappels de salaires dus durant la période couverte par la nullité, alors, selon le moyen :
1°/ que le salarié licencié au cours d'une période de suspension de son contrat de travail provoquée par un accident du travail dont il a été victime, qui ne demande pas sa réintégration a droit, au titre de la violation du statut protecteur, à une indemnité au moins égale à la rémunération qu'il aurait dû percevoir entre la date de la rupture et la date de la décision de justice prononçant la nullité du licenciement ; qu'en fixant l'indemnité réparant l'intégralité du préjudice résultant du caractère illicite du licenciement à l'équivalent de six mois de salaire, la cour d'appel a violé les articles L. 1226-9 et L. 1226-13 du code du travail, ensemble le principe de la réparation intégrale du préjudice ;
2°/ que tout jugement doit être motivé à peine de nullité ; que le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; qu'en l'espèce, le salarié faisait valoir, dans ses conclusions d'appel que l'indemnité représentant six mois de salaire ne réparait pas l'intégralité de son préjudice ; qu'il convenait de tenir compte du fait qu'il avait travaillé au sein de l'entreprise pendant vingt années, que depuis son accident du travail survenu le 25 février 1993, son état de santé s'était dégradé progressivement ; qu'il avait subi de multiples hospitalisations et avait été opéré à cinq reprises ; que compte tenu des séquelles irréversibles et très invalidantes de cet accident du travail, il s'était trouvé dans l'impossibilité de retrouver un emploi et ne percevait qu'une allocation d'insertion à hauteur de 311,24 euros ; qu'en se bornant à retenir que, compte tenu des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée au salarié, de son âge, de sa capacité à trouver un nouvel emploi au regard de sa formation et de son expérience professionnelle, de son ancienneté dans l'entreprise, les premiers ont exactement apprécié le préjudice de M. X... à la somme de 6 964,44 euros, la cour d'appel a omis de répondre au moyen soulevé devant elle de nature à établir que l'indemnité allouée par les premiers juges n'assurait pas la réparation intégrale du préjudice et ainsi violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ que, le salarié licencié au cours d'une période de suspension de son contrat de travail provoquée par un accident du travail dont il a été victime, qui ne demande pas sa réintégration a droit, au paiement du salaire qu'il aurait dû recevoir pendant la période couverte par la nullité ; qu'en déboutant le salarié de sa demande de rappel de salaire après constaté la nullité de son licenciement, la cour d'appel a violé les articles L. 1226-9 et L. 1226-13 du code du travail ;
Mais attendu que le salarié dont le licenciement est nul en application des articles L. 1226-9 et L. 1226-13 du code du travail et qui ne demande pas sa réintégration ne peut prétendre qu'au paiement des indemnités de rupture et d'une indemnité réparant le préjudice causé par le caractère illicite du licenciement d'un montant au moins égal à celui prévu par l'article L. 1235-3 dudit code ;
Et attendu qu'ayant relevé que le salarié n'avait pas demandé sa réintégration, la cour d'appel, qui a fait une appréciation souveraine des éléments de fait et de preuve produits, a alloué au salarié à titre de dommages-intérêts en réparation de la nullité de son licenciement une somme d'un montant au moins égal à six mois de salaire ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois principal et incident ;
Laisse à chacune des parties la charge des dépens afférents à son pourvoi ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze juillet deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. X..., demandeur au pourvoi principal
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir, après avoir constaté la nullité du licenciement dont Monsieur Ahmed X... a fait l'objet, limité la somme qui lui a été allouée à titre de dommages et intérêts à la somme de 6.964,44 € ;
Aux motifs propres qu'au soutien de son appel, Monsieur Ahmed X... reproche aux premiers juges de ne lui avoir alloué que le somme de 6.964,44 € représentant six mois de salaire alors qu'il estime son préjudice à la somme de 20.893,32 €, ce qui équivaut à 18 mois de salaire, compte tenu de la dégradation progressive de son état de santé directement lié à l'accident du travail dont il a été victime (multiples hospitalisations et interventions chirurgicales) ; que compte tenu des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée au salarié, de son âge, de sa capacité à trouver un nouvel emploi au regard de sa formation et de son expérience professionnelle, de son ancienneté dans l'entreprise, la Cour estime que les premiers ont exactement apprécié le préjudice de Monsieur Ahmed X... à la somme de 6.964,44 € représentant six mois de salaire ;
Et aux motifs adoptés des premiers juges que, compte tenu des pièces versées aux débats par le demandeur sur sa situation personnelle et financière, il y a lieu de condamner la Société Wienerberger France à payer à Monsieur Ahmed X... la somme de 6964, 44 €, représentant six mois de salaire, à titre de dommages-intérêts pour nullité du licenciement, la demande en paiement d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, qui ne peut se cumuler avec la première, devant être rejetée (Jugement entrepris, p. 4) ;
Alors que, d'une part, le salarié licencié au cours d'une période de suspension de son contrat de travail provoquée par un accident du travail dont il a été victime, qui ne demande pas sa réintégration a droit, au titre de la violation du statut protecteur, à une indemnité au moins égale à la rémunération qu'il aurait dû percevoir entre la date de la rupture et la date de la décision de justice prononçant la nullité du licenciement ; qu'en fixant l'indemnité réparant l'intégralité du préjudice résultant du caractère illicite du licenciement à l'équivalent de six mois de salaire, la Cour d'appel a violé les articles L. 1226-9 et L. 1226-13 du Code du travail, ensemble le principe de la réparation intégrale du préjudice ;
Alors que d'autre part et à titre subsidiaire, tout jugement tout jugement doit être motivé à peine de nullité ; que le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; qu'en l'espèce, le salarié faisait valoir, dans ses conclusions d'appel que l'indemnité représentant six mois de salaire ne réparait pas l'intégralité de son préjudice ; qu'il convenait de tenir compte du fait qu'il avait travaillé au sein de l'entreprise pendant vingt années, que depuis son accident du travail survenu le 25 février 1993, son état de santé s'était dégradé progressivement ; qu'il avait subi de multiples hospitalisations et avait été opéré à cinq reprises ; que compte tenu des séquelles irréversibles et très invalidantes de cet accident du travail, il s'était trouvé dans l'impossibilité de retrouver un emploi et ne percevait qu'une allocation d'insertion à hauteur de 311,24 € (Conclusions d'appel de Monsieur X..., p. 7) ; qu'en se bornant à retenir que, compte tenu des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée au salarié, de son âge, de sa capacité à trouver un nouvel emploi au regard de sa formation et de son expérience professionnelle, de son ancienneté dans l'entreprise, les premiers ont exactement apprécié le préjudice de Monsieur Ahmed X... à la somme de 6.964,44 €, la Cour d'appel a omis de répondre au moyen soulevé devant elle de nature à établir que l'indemnité allouée par les premiers juges n'assurait pas la réparation intégrale du préjudice et ainsi violé l'article 455 du Code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir, après avoir constaté la nullité du licenciement dont Monsieur Ahmed X... a fait l'objet, débouté celui-ci de sa demande en paiement de la somme de 29.018,50 € à titre des salaires dus pendant la période couverte par la nullité ;
Aux motifs que dès lors qu'il n'a jamais sollicité sa réintégration, Monsieur X... doit être déclaré mal fondé à solliciter la somme de 29.018,50 € à titre de rappel de salaires pendant la période couverte par la nullité ;
Alors que, le salarié licencié au cours d'une période de suspension de son contrat de travail provoquée par un accident du travail dont il a été victime, qui ne demande pas sa réintégration a droit, au paiement du salaire qu'il aurait dû recevoir pendant la période couverte par la nullité ; qu'en déboutant le salarié de sa demande de rappel de salaire après constaté la nullité de son licenciement, la Cour d'appel a violé les articles L. 1226-9 et L. 1226-13 du Code du travail.

Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Wienerberger France, demanderesse au pourvoi incident
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR constaté la nullité du licenciement de monsieur Ahmed X... et d'AVOIR en conséquence condamné la société WIENERBERGER FRANCE à lui verser 6.964,44 € à titre de dommages intérêts, 2.321,48 € euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 4.642,96 € au titre de l'indemnité légale de licenciement, et 1.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
AUX MOTIFS PROPRES QU' « à compter du 16 février 2005, monsieur Ahmed X... ne s'est plus présenté à son poste ; que par lettre recommandée avec demande d'avis de réception en date du 8 mars 2005, revenue avec la mention ‘non réclamée-Retour à l'envoyeur', la SAS WIENERBERGER FRANCE venant aux droits de la SA PACEMA a mis en demeure monsieur X... de justifier de son absence dans un délai de 48 heures ; qu'après avoir été convoqué par lettre recommandée avec demande d'avis de réception en date du 17 mars 2005 (revenue également avec la mention ‘non réclamée – Retour à l'envoyeur'), à un entretien préalable auquel il ne s'est pas présenté, monsieur Ahmed X... a été licencié pour faute grave par lettre recommandée avec demande d'avis de réception présentée le 30 mars 2005 ; que la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige est ainsi libellée : « Depuis le 16 février 2005, vous ne vous êtes pas présenté à votre poste de travail. La SAS WIENERBERGER France vous a adressé un courrier par lettre recommandée en date du 9 mars 2005 pour vous demander de nous transmettre les pièces justificatives relatives à votre absence. Sans réponse au courrier du 9 mars 2005 et compte tenu de votre absence injustifiée à votre poste depuis le 16 février 2005 et du fait qu'aucune information n'ait été transmise à la SAS WIENERBERGER France, nous sommes contraints de vous notifier par la présente votre licenciement pour faute grave qui prend effet immédiatement dès la première présentation de cette lettre. Ce licenciement est privatif du préavis et de votre indemnité de licenciement ». Au soutien de son appel, Monsieur Ahmed X... invoque la nullité de son licenciement au motif qu'il est intervenu alors que son contrat de travail était suspendu par suite de ses arrêts de travail dont il prétend les avoir toujours transmis à son employeur dans les délais impartis. L'article L 1226-9 du Code du Travail dispose qu'au cours des périodes de suspension du contrat de travail, l'employeur ne peut rompre ce dernier que s'il justifie soit d'une faute grave du salarié, soit de son impossibilité de maintenir le contrat pour un motif étranger à l'accident ou à la maladie, la faute grave étant celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits, imputable au salarié, constituant une violation des obligations s'attachant à son emploi, d'une telle importance qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise. L'article L 1226-13 du même Code énonce que toute rupture du contrat prononcée en méconnaissance du texte susvisé est nulle, la conséquence de cette nullité étant la réintégration du salarié ou l'allocation à son profit, de dommages-intérêts. De l'examen des pièces versées aux débats et notamment des arrêts de travail datés des 12 janvier, 9 et 25 février 2005, il ressort qu'entre le 16 février et le 30 mars 2005, Monsieur Ahmed X... était effectivement en arrêt de travail et par voie de conséquence en période de suspension de son contrat de travail. Si Monsieur Ahmed ne justifie pas suffisamment par l'attestation de Monsieur B..., collègue de travail, avoir avisé dans les meilleurs délais son employeur de la nouvelle prolongation de ses arrêts de travail, un tel comportement ne saurait en l'espèce être constitutif d'une faute grave ; en effet, la SAS WIENERBERGER FRANCE ne saurait sérieusement soutenir avoir ignoré la raison de cette absence dès lors que Monsieur Ahmed X... démontre par des certificats médicaux avoir été en prolongation d'arrêt de travail lié à l'accident du travail dont il avait été victime en 1993, de manière continue depuis janvier 2004. En outre, SAS WIENERBERGER France venant aux droits de la SA PACEMA ne rapporte aucune preuve de la désorganisation que cette absence prolongée aurait pu générer au sein de l'entreprise, ni du préjudice éventuellement subi de ce fait. Dans ces conditions, en l'absence de faute grave caractérisée, le jugement déféré doit être confirmé en ce qu'il a jugé que le licenciement dont Monsieur Ahmed X... a fait l'objet est nul » ;
AUX MOTIFS EVENTULELLEMENT ADOPTES QUE « L'article L 1226-9 du Code du Travail dispose qu'au cours des périodes de suspension du contrat de travail, l'employeur ne peut rompre ce dernier que s'il justifie soit d'une faute grave du salarié, soit de son impossibilité de maintenir le contrat pour un motif étranger à l'accident ou à la maladie, la faute grave étant celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits, imputable au salarié, constituant une violation des obligations s'attachant à son emploi, d'une telle importance qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis. L'article L 1226-13 du même Code énonce que toute rupture du contrat prononcée en méconnaissance du texte susvisé est nulle, la conséquence de cette nullité étant la réintégration du salarié ou l'allocation à son profit, de dommages-intérêts. Il résulte, par ailleurs, des dispositions de l'article L. 1235-3 du même Code que si le licenciement survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le tribunal octroie au salarié une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois, laquelle ne peut se cumuler avec une autre indemnité, notamment pour inobservation des formes du licenciement. En l'espèce, la SAS WIENERBERGER France a notifié à Monsieur Ahmed X..., par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 29 mars 2005, son licenciement pour faute grave dans les termes suivants : « Depuis le 16 février 2005, vous ne vous êtes pas présenté à votre poste de travail. La SAS WIENERBERGER France vous a adressé un courrier par lettre recommandée en date du 9 mars 2005 pour vous demander de nous transmettre les pièces justificatives relatives à votre absence. Sans réponse au courrier du 9 mars 2005 et compte tenu de votre absence injustifiée à votre poste depuis le 16 février 2005 et du fait qu'aucune information n'ait été transmise à la SAS WIENERBERGER France, nous sommes contraints de vous notifier par la présente votre licenciement pour faute grave qui prend effet immédiatement dès la première présentation de cette lettre. Ce licenciement est privatif du préavis et de votre indemnité de licenciement ». Toutefois, il résulte des pièces versées aux débats et notamment des arrêts de travail datés des 12 janvier, puis 9 et 25 février 2005, qu'entre le 16 février et 30 mars 2005, Monsieur Ahmed X... était effectivement en arrêt de travail et, par voie de conséquence en période de suspension de son contrat de travail. En outre, s'il n'est pas contestable que Monsieur Ahmed X... n'a pas, dans les meilleurs délais, informé son employeur de la nouvelle prolongation de ses arrêts de travail, l'attestation établie par Monsieur B... à cet égard ne pouvant être valablement retenue en l'absence de témoignage précis et circonstancié mais également de la copie de sa pièce d'identité, et la télécopie en date du 14 avril 2005 n'étant pas suffisamment explicite, force est, néanmoins, de constater qu'un tel comportement, même habituel, n'est pas constitutif d'une faute grave, la SAS WIENERBERGER France ne rapportant, au demeurant, aucune preuve de la désorganisation que cela aurait pu générer au sein de l'entreprise ni du préjudice éventuellement subi de ce fait. Au vu de l'ensemble de ces éléments ainsi que des textes susvisés, et en l'absence de faute grave, il doit être considéré, indépendamment de l'existence ou non d'une cause réelle et sérieuse, que le licenciement dont Monsieur Ahmed X... a fait l'objet est nul ».
ALORS QUE constitue une faute grave le fait pour un salarié de ne plus se présenter à son poste sans en justifier et de demeurer absent pendant une période prolongée sans davantage informer l'employeur, qui, sans réponse à une mise en demeure d'exposer les raisons de l'absence constatée, est dès lors fondé à licencier son salarié pour faute grave, peu important l'existence d'arrêts de travail antérieurs ou l'absence de désorganisation caractérisée de l'entreprise ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a constaté que le salarié ne justifiait pas avoir averti son employeur de la nouvelle prolongation de son arrêt de travail, qu'il ne s'était plus présenté à son poste de travail à compter du 16 février 2005, que l'employeur l'avait mis en demeure, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 8 mars 2005 demeurée sans réponse, de justifier de son absence et que le salarié ne s'était pas présenté à l'entretien préalable auquel il avait été convoqué le 17 mars 2005 pour le 25 mars suivant ; qu'en retenant, pour dire nul le licenciement notifié le 30 mars 2005, que l'employeur connaissait les arrêts de travail antérieurs d'une part, ne prouvait pas la désorganisation de l'entreprise d'autre part, la Cour d'appel a violé les articles L 1226-9, L 1226-13 et L 1234-1 du Code du travail ;


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-17240
Date de la décision : 11/07/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 01 mars 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 11 jui. 2012, pourvoi n°11-17240


Composition du Tribunal
Président : M. Chollet (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.17240
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