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11/07/2012 | FRANCE | N°11-15459

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 11 juillet 2012, 11-15459


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à Mme X... du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Maaf assurances ;
Sur le moyen unique :
Vu l'article 1147 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Pau, 8 février 2011), que Mme X... a confié à M. Y... l'édification sur trois côtés, d'un mur de clôture de sa propriété ; qu'un voisin s'étant plaint d'un empiétement sur sa propriété, une expertise a été ordonnée ; qu'après expertise, une décision de référé a condamné Mme X...

à démolir le mur qui empiétait sur la propriété voisine et à payer la somme de 1 000 euros à...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à Mme X... du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Maaf assurances ;
Sur le moyen unique :
Vu l'article 1147 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Pau, 8 février 2011), que Mme X... a confié à M. Y... l'édification sur trois côtés, d'un mur de clôture de sa propriété ; qu'un voisin s'étant plaint d'un empiétement sur sa propriété, une expertise a été ordonnée ; qu'après expertise, une décision de référé a condamné Mme X... à démolir le mur qui empiétait sur la propriété voisine et à payer la somme de 1 000 euros à son voisin ; que Mme X... ayant exécuté cette décision, a assigné en responsabilité M. Y... sur le fondement des articles 1147 et 1792 du code civil pour obtenir la démolition puis la reconstruction du mur sous astreinte ;
Attendu que pour débouter Mme X... de ses demandes et la condamner à payer à M. Y... la somme de 13 491, 77 euros, l'arrêt retient que M. Y... qui agit sur instructions du maître de l'ouvrage n'est pas tenu d'une obligation d'information juridique ou de mise en garde sur les limites séparatives du fonds sur lequel il doit édifier un mur de clôture et que Mme X... ne rapporte pas la preuve des manquements de M. Y... à ses obligations professionnelles ;
Qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si l'entrepreneur, contractuellement chargé d'édifier un mur en limite séparative du fonds, avait pris la précaution de s'enquérir de l'emplacement de cette limite, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 8 février 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Pau ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Pau, autrement composée ;
Condamne M. Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. Y... à payer à Mme X... la somme de 2 500 euros ; rejette la demande de M. Y... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze juillet deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Barthélemy, Matuchansky et Vexliard, avocat aux Conseils, pour Mme Z..., épouse X...

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué, confirmatif de ces chefs, D'AVOIR débouté madame X..., maître d'ouvrage, de sa demande dirigée contre monsieur Y..., entrepreneur, en remboursement du coût de démolition d'un mur édifié par ce dernier et de sa demande en dommages et intérêts au titre de la reconstruction du mur et de l'avoir condamnée à payer à l'entrepreneur une somme de 13.491,77 € en principal, outre intérêts.
AUX MOTIFS PROPRES QUE monsieur Y..., en sa qualité d'artisan maçon, était tenu à l'égard du maître de l'ouvrage d'une obligation de résultat quant à la qualité des prestations fournies qui devaient être conformes aux règles de l'art et qu'il était également tenu d'une obligation d'information et de conseil en relation avec la technicité de sa spécialité ; qu'en vertu du marché en date du 19 janvier 2007, monsieur Y... avait été chargé de l'édification d'un mur de clôture sur trois côtés en « limites séparatives » ; qu'il résultait de l'expertise de monsieur A..., géomètre-expert, désigné par le juge des référés du tribunal de grande instance de Pau par ordonnance du 2 mai 2007, que l'un des murs empiétait de 6 m² sur la propriété voisine appartenant à monsieur B... et que l'autre mur avait été édifié en recul, à une dizaine de mètres à l'intérieur du fonds de madame X... ; qu'il s'agissait donc d'erreurs d'implantation de l'ouvrage, sans rapport avec les règles de l'art auxquelles était tenu un maçon ; que ce dernier qui agissait sur instructions du maître de l'ouvrage n'était pas tenu d'une obligation d'information juridique ou de mise en garde sur les limites séparatives du fonds sur lequel il devait édifier un mur de clôture ; qu'il ne pouvait donc lui être reproché d'avoir agi sans s'assurer d'un bornage préalable, ce qui constituait à l'évidence une obligation du maître de l'ouvrage, propriétaire du fonds ; que le procès-verbal de constat établi par huissier le 5 février 2010, non seulement confirmait les empiétements déjà constatés par l'expert judiciaire mais encore, ajoutait que le mur contigu à la propriété Laffite n'était pas parallèle au sol ; que l'huissier indiquait en effet : « je constate que la ligne formée par le chapeau du mur n'est pas parallèle au sol … je constate encore la présence d'un tracé rouge sur les parpaings ; madame Z... (X...) me précise que cette ligne a été tracée par l'expert chargé de l'expertise » ; que selon l'huissier « ce phénomène était très visible à proximité de l'angle où le mur descend de façon très visible » ; que madame X... en concluait le manquement aux règles de l'art ; que cependant, d'une part, un huissier n'était ni un expert, ni un professionnel de la construction et ses constatations n'étaient pas corroborées par l'avis d'un homme de l'art ; que d'autre part, elles n'étaient pas été établies au contradictoire de monsieur Y... qui en contestait la réalité ; qu'enfin, ce prétendu défaut qui selon l'huissier était très visible, n'avait fait l'objet d'aucune réserve lors de la réception des travaux le 15 févier 2007 ; que, dans ces conditions, il apparaissait que madame X... ne rapportait pas la preuve des manquements de monsieur Y... à ses obligations professionnelles de sorte que le jugement du tribunal de grande instance de Pau serait confirmé en ce qu'il avait débouté madame X... de l'ensemble de ses demandes et l'avait condamné à payer le solde de la facture de monsieur Y... (arrêt, p. 5, § 11 et 12, p. 6, § 1 à 3) ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE le marché de travaux signé par les parties ne contenait aucune précision quant à l'implantation exacte du mur à construire ; que monsieur Y... soutenait, sans être contredit par madame Z..., que cette dernière lui avait donné pour instruction d'implanter le mur sur l'emplacement d'une haie vive qu'il était également chargé d'arracher ; que, par procès-verbal du 15 février 2007, madame Z... avait déclaré accepter sans réserve les travaux dont il s'agissait ; que cette réception sans réserve purgeait l'ouvrage des vices apparents qui pouvaient l'affecter ; qu'il suivait que madame Z... n'était pas fondée à invoquer les dispositions des articles 1792 et suivants du code civil dès lors qu'une erreur d'implantation constituait nécessairement un vice apparent, le propriétaire, maître de l'ouvrage, n'étant pas fondé à invoquer l'ignorance dans laquelle il se trouverait de la délimitation exacte de son fonds, pour soutenir que l'erreur d'implantation constituerait un vice caché ; qu'en ce qui concernait le manquement allégué du professionnel à son devoir de conseil, il convenait en premier lieu de relever que ce manquement ne pouvait, en toutes hypothèse, concerner que le mur est empiétant sur le fonds des voisins, puisqu'il n'était pas démontré que la construction côté sud, à l'intérieur du fonds de madame Z..., procédait d'une erreur d'implantation, alors que l'ouvrage avait été réceptionné sans réserve, et que cette implantation ne préjudiciait pas au droit des tiers ; que si l'entrepreneur était certes tenu à un devoir de renseignement et de conseil, cette obligation ne s'étendait pas aux faits qui étaient de la connaissance de tous, tels que l'interdiction d'édifier un mur sur la propriété de son voisin ; qu'il ne saurait donc être reproché à l'entrepreneur de n'avoir pas rappelé cette évidence à madame Z..., et qu'il appartenait au contraire à cette dernière de lui donner des instructions précises pour qu'il implante le mur à l'intérieur de sa propriété ou à la limite de celle-ci, ce qu'elle ne soutenait pas et a fortiori ne démontrait pas ; qu'il ne saurait pas plus être exigé de l'entrepreneur, chargé de la construction d'un mur, d'inviter le propriétaire à procéder préalablement à un bornage, un tel conseil, de nature juridique, excédant la compétence de l'artisan ; qu'il suivait qu'aucune faute ne pouvait utilement être reprochée à monsieur Y... (jugement, p. 6, § 6 à 9, p. 7, § 1 à 5) ;
ALORS, D'UNE PART, QUE le maçon, chargé, aux termes d'un contrat d'entreprise, d'édifier un mur de clôture en limite séparative du fonds du maître de l'ouvrage ne doit, en sa qualité de professionnel de la construction tenu d'une obligation de mise en garde, accepter cette mission que si lui sont fournis des éléments ou pièces rendant à tout le moins vraisemblable le droit de propriété du maître de l'ouvrage sur la bande de terrain sur laquelle celui-ci lui donne instruction d'implanter la construction concernée ; que les instructions du maître de l'ouvrage concernant l'implantation du mur ne sont donc pas, à elles seules, de nature à exonérer l'entrepreneur de son obligation de mise en garde ; qu'en retenant le contraire qua l'instruction donnée par le maître de l'ouvrage exonérait à elle seule l'entrepreneur de toute responsabilité du fait de la mauvaise implantation du mur, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil ;
ALORS, QU'EN TOUT ETAT DE CAUSE, QU'en ne recherchant pas, comme l'y avait pourtant invitée le maître de l'ouvrage (conclusions de madame X... du 16 août 2010, p.6, §5 et 10, p.7, §5 à 7), si l'entrepreneur, contractuellement chargé d'édifier un mur en limite séparative du fonds, avait pris la précaution élémentaire de s'enquérir de l'emplacement de ladite limite séparative, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE l'immixtion fautive du maître de l'ouvrage, cause d'exonération de l'entrepreneur, ne peut être retenue qu'en l'état d'une compétence notoire de ce dernier en matière de construction ; qu'en se bornant à retenir, pour écarter toute responsabilité de l'entrepreneur, que ce dernier avait agi sur instructions de madame X..., sans caractériser une compétence notoire du maître de l'ouvrage en matière de construction, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 11-15459
Date de la décision : 11/07/2012
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Pau, 08 février 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 11 jui. 2012, pourvoi n°11-15459


Composition du Tribunal
Président : M. Terrier (président)
Avocat(s) : SCP Barthélemy, Matuchansky et Vexliard, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.15459
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