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11/07/2012 | FRANCE | N°11-12096

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 11 juillet 2012, 11-12096


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., exerçant à compter du 2 mai 2001 au profit de la société Financière Philippe (la société) des fonctions de comptable, a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail, puis a été licenciée le 6 juin 2008 ;
Sur le premier moyen :
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., exerçant à compter du 2 mai 2001 au profit de la société Financière Philippe (la société) des fonctions de comptable, a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail, puis a été licenciée le 6 juin 2008 ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la société fait grief à l'arrêt de la condamner au paiement de diverses sommes au titre de la résiliation judiciaire du contrat de travail, alors, selon le moyen :
1°/ que la gérance de fait est exclusive de la qualité de salarié ; que la société Financière Philippe faisait précisément valoir que Mme Véronique X... était gérante de fait, qualité incompatible avec la qualité de salariée ; qu'en laissant sans réponse ce moyen déterminant des écritures d'appel de la salariée, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
2°/ qu'en toute hypothèse, la qualification du contrat de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties, ni de la dénomination de leur convention mais des conditions dans lesquelles la prestation de travail s'est exécutée ; qu'en présence d'un contrat de travail apparent dont le caractère fictif était invoqué par la société Financière Philippe, la cour d'appel ne pouvait refuser de rechercher si cette dernière n'apportait pas la preuve de l'absence de tout lien de subordination et partant de tout contrat de travail ; qu'en se bornant à relever que la société Financière Philippe avait procédé au licenciement de Mme Véronique X... sans aucunement rechercher si les conditions effectives d'exercice de son activité par Mme Véronique X... n'étaient pas comme le soutenait la société Financière Philippe exclusives de tout lien de subordination et partant de tout contrat de travail, la cour d'appel a violé les articles 1134 du code civil et L. 1221-1, L. 1221-3 du code du travail ;
Mais attendu qu'ayant constaté que les parties étaient liées par un contrat de travail apparent et que la société avait imposé à Mme X... un changement de son lieu de travail et réduit ses tâches concernant l'établissement des chèques, la cour d'appel a, par une décision motivée, légalement justifié sa décision ;
Mais sur le second moyen :
Vu l'article L. 1234-1 du code du travail ;
Attendu, selon ce texte, que le salarié dont le licenciement n'est pas motivé par une faute grave a droit à un préavis de deux mois s'il justifie chez le même employeur d'une ancienneté de services continus d'au moins deux ans, sauf si la loi, la convention ou l'accord collectif de travail, le contrat de travail ou les usages prévoient un préavis ou une condition d'ancienneté de services plus favorable pour le salarié ;
Attendu que pour condamner l'employeur au paiement d'une somme de 11 582 euros à titre d'indemnité de préavis, l'arrêt retient, par motifs adoptés, que le montant de cette indemnité est fixé par référence à une ancienneté de sept années et un salaire brut mensuel de 3 860, 95 euros, ce qui correspond à trois mois de salaire ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, s'il existait une convention, un accord collectif ou un usage plus favorables justifiant un préavis de trois mois, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Et attendu qu'il convient de condamner la société qui succombe pour l'essentiel, aux dépens de l'instance ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Financière Philippe à payer à Mme X... la somme de 11 582 euros à titre d'indemnité compensatrice préavis et 1 158, 20 euros au titre des congés payés afférents, l'arrêt rendu le 7 décembre 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la société Financière Philippe aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Financière Philippe à verser la somme de 2 500 euros à Mme X... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze juillet deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils, pour la société Financière Philippe.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que Madame Véronique X... était salariée de la société FINANCIERE PHILIPPE et d'avoir condamné la société FINANCIERE PHILIPPE au paiement de dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat de travail, d'une indemnité compensatrice de préavis, des congés payés y afférents, de dommages-intérêts en réparation du préjudice lié aux difficultés d'exécution du jugement, d'une indemnité de licenciement, d'un rappel de salaires correspondant à la période de mise à pied conservatoire et des congés payés y afférents.
AUX MOTIFS QUE Véronique X... indique qu'elle s'est occupée de la comptabilité des restaurants " CHEZ FÉLIX " et " PÉPITA " qui appartenaient à Monsieur Y...
Z..., gérant de la société FINANCIERE PHILIPPE, en qualité de prestataire de service, d'avril 1999 à avril 2001 ; qu'elle est devenue salariée de la holding FINANCIÈRE PHILIPPE, en qualité de comptable des trois restaurants de la société, à compter du 2 mai 2001, à la suite du rachat par M.
Z...
du restaurant " CAMILLE " en avril 2001 ; que la société FINANCIERE PHILIPPE conteste la qualité de salariée de Mme X... ; qu'elle soutient qu'elle n'emploie pas de salariés, son rôle se limitant à celui de société de gestion des participations qu'elle détient dans le capital social d'autres sociétés exerçant leur activité dans le domaine de la restauration ; que c'est à la demande de Véronique X... que des bulletins de salaire auraient été établis " pour son activité de comptable " à compter du mois de mai 2001 ; que le gérant de la société soutient que Mme X... assumait la gestion de fait des trois sociétés à raison de la particularité tenant à ce que lui-même, gérant de droit, ne sait ni lire ni écrire, situation dont il souligne qu'elle ne l'a pas empêché de rencontrer des succès dans le monde des affaires mais qu'elle nécessitait qu'il s'entourât de personnes de confiance ; qu'il ajoute s'être rendu compte tardivement que la confiance mise en Mme X... était mal placée ; que la société FINANCIERE PHILIPPE soutient qu'aucun lien de subordination n'est susceptible d'être mis en évidence entre la société et Véronique X... qui caractériserait l'existence d'un contrat de travail. Il fait valoir qu'au cas d'espèce, l'intéressée ne se verra pas reconnaître la qualité de salariée dans la mesure où, selon ses propres termes :- elle a prélevé sur les comptes de la société des sommes importantes et ce sans y être autorisée et alors que ces prélèvements ne présentent pas de rapport avec l'activité des sociétés,- elle s'octroyait des primes au titre de sa rémunération sans autorisation,- elle a dénié au gérant de droit la faculté de reprendre ladite gestion (choix de l'expert-comptable, celui d'effectuer les règlements),- elle est allée jusqu'à choisir le lieu de travail dans lequel elle devait exercer ses fonctions,- elle signait, en utilisant une griffe ou directement avec sa propre signature l'ensemble des documents concernant la gestion de l'entreprise, celle-ci ayant la signature des comptes bancaires des trois sociétés ; mais qu'en engageant, à l'encontre de Véronique X..., une procédure de licenciement lui reprochant notamment " le non-respect de directives ", la société FINANCIERE PHILIPPE reconnaît par là-même la qualité de salariée de sa comptable, dès lors que le licenciement a vocation à opérer la rupture d'un contrat de travail et qu'au surplus, l'existence d'un lien de subordination-déniée par ailleurs-se trouve établie par le grief fait à Véronique X... de ne pas prendre en compte les " directives " du gérant ; que, dans ces conditions, il n'y a pas lieu de reprendre de manière systématique les éléments-au demeurant contestés-invoqués par la société FINANCIERE PHILIPPE pour tenter d'étayer la thèse du défaut de contrat de travail ; qu'il importe en revanche d'apprécier les conditions et la légitimité de la rupture de ce contrat dont chacune des parties a pris l'initiative.

ALORS QUE la gérance de fait est exclusive de la qualité de salarié ; que la société FINANCIERE PHILIPPE faisait précisément valoir que Madame Véronique X... était gérante de fait, qualité incompatible avec la qualité de salariée ; qu'en laissant sans réponse ce moyen déterminant des écritures d'appel de la salariée, la Cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du Code de procédure civile.
ET ALORS en toute hypothèse QU'la qualification du contrat de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties, ni de la dénomination de leur convention mais des conditions dans lesquelles la prestation de travail s'est exécutée ; qu'en présence d'un contrat de travail apparent dont le caractère fictif était invoqué par la société FINANCIERE PHILIPPE, la Cour d'appel ne pouvait refuser de rechercher si cette dernière n'apportait pas la preuve de l'absence de tout lien de subordination et partant de tout contrat de travail ; qu'en se bornant à relever que la société FINANCIERE PHILIPPE avait procédé au licenciement de Monsieur Véronique X... sans aucunement rechercher si les conditions effectives d'exercice de son activité par Madame Véronique X... n'étaient pas comme le soutenait la société FINANCIERE PHILIPPE exclusives de tout lien de subordination et partant de tout contrat de travail, la Cour d'appel a violé les articles 1134 du Code civil et L. 1221-1, L. 1221-3 du Code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société FINANCIERE PHILIPPE au paiement de la somme de 11. 582 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et de la somme de 1. 158, 20 au titre des congés payés y afférents.
AUX MOTIFS QUE le jugement sera confirmé en ce qu'il a alloué à Véronique X... une indemnité compensatrice de préavis ; qu'une somme de 1. 158, 20 euros lui sera encore attribuée à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis.
ET AUX MOTIFS adoptés QUE le Conseil considère Madame X... recevable en sa demande et fixe, de la manière suivante, les indemnités à lui verser au titre de la rupture du contrat, qui est arrivé à son terme à la date du 10 juin 2008 : une indemnité compensatrice de préavis d'un montant de 11 582 euros, fixée par référence à une ancienneté de 7 années et un salaire brut mensuel de 3 860, 95 euros.
ALORS QUE lorsque le licenciement n'est pas motivé par une faute grave, le salarié a droit, s'il justifie chez le même employeur d'une ancienneté de services continus d'au moins deux ans, à un préavis de deux mois ; qu'à défaut de dispositions conventionnelles plus favorables, ce seul texte doit être appliqué ; qu'en allouant à Madame Véronique X... la somme de 11. 582 euros correspondant à trois mois du salaire de référence fixé par la Cour à 3. 860, 95 euros, et la somme de 1. 158, 20 euros au titre des congés payés y afférents, la Cour d'appel a violé l'article L. 1234-1 du Code du travail.
ALORS surtout QU'il était soutenu que Madame X... ne justifiait d'aucune disposition lui donnant droit à un préavis supérieur à deux mois ; qu'en ne s'expliquant pas sur le fondement de la condamnation prononcée, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard desdites dispositions.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-12096
Date de la décision : 11/07/2012
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 07 décembre 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 11 jui. 2012, pourvoi n°11-12096


Composition du Tribunal
Président : M. Linden (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Boutet, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.12096
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