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10/07/2012 | FRANCE | N°11-22983

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 10 juillet 2012, 11-22983


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 14 juin 2011), que la société Groupe Mitsiu (la société Mitsiu) a conclu un contrat, avec la société Sécuritas alert services (la société Sécuritas), portant sur des prestations de télésurveillance et d'assistance intervention, pour la protection de ses locaux, par ailleurs assurés pour le risque vol auprès de la Compagnie AGF courtage iard entreprises, devenue société Allianz ; qu'ayant été victime de deux vols de marchandises et

estimant que la responsabilité de la société Sécuritas était engagée, la soci...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 14 juin 2011), que la société Groupe Mitsiu (la société Mitsiu) a conclu un contrat, avec la société Sécuritas alert services (la société Sécuritas), portant sur des prestations de télésurveillance et d'assistance intervention, pour la protection de ses locaux, par ailleurs assurés pour le risque vol auprès de la Compagnie AGF courtage iard entreprises, devenue société Allianz ; qu'ayant été victime de deux vols de marchandises et estimant que la responsabilité de la société Sécuritas était engagée, la société Mitsiu et son assureur ont fait assigner la société Sécuritas et la Compagnie XL insurance company limited (la compagnie XL) en vue d'obtenir leur condamnation, in solidum, à payer certaines sommes au titre de ces deux sinistres ;
Attendu que la société Sécuritas et la compagnie XL font grief à l'arrêt d'avoir accueilli cette demande alors, selon le moyen :
1°/ qu'en s'abstenant de se prononcer sur le moyen de défense pris de la nullité du contrat soulevé par la société Sécuritas et la société XL pour s'opposer à la demande de condamnation à des dommages et intérêts fondée sur ce contrat, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
2°/ qu 'en jugeant que la société Sécuritas devait provoquer une intervention sur place à chaque alarme après avoir relevé que le contrat ne précisait pas les consignes devant être appliquées par le prestataire en cas de réception d'une alarme, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article 1134 du code civil ;
3°/ que, subsidiairement, la proposition de contrat indiquait : «si le contrat le prévoit, en cas de réception d'une information dont la nature exige un déplacement, la télésurveillance Sécuritas missionne aussitôt un agent d'intervention qui se rendra sur le site, dans les plus brefs délais» et les conditions générales du contrat prévoyaient : «En cas de réception d'une alarme ou d'un défaut technique, le prestataire appliquera les consignes particulières définies par le client conformément aux procédures de télésurveillance détaillées dans le présent contrat. (…) L'ensemble des "consignes" et détails de la prestation spécifique du prestataire doit obligatoirement être précisé, actualisé et approuvé dans un document contresigné par les deux parties» ; qu'à supposer que la cour d'appel ait considéré qu'il résultait de ces stipulations qu'une alarme constituait une information dont la nature exigeait un déplacement, quand elles prévoyaient que la consigne à tenir en cas d'alarme serait définie par le client, ce qu'il n'avait pas fait, la cour d'appel a dénaturé la proposition et les conditions générales du contrat en violation de l'article 1134 du code civil ;
4°/ qu 'en retenant que, faute de pouvoir justifier de consignes particulières, le prestataire devait provoquer une intervention sur place à chaque alarme, la cour d'appel, qui a fait peser sur le débiteur la preuve de l'étendue de l'obligation contractuelle prétendument inexécutée, a violé l'article 1315 du code civil ;
5°/ qu 'en tout état de cause, dans leurs conclusions d'appel, les exposantes faisaient valoir que l'accord de la société Groupe Mitsiu sur l'absence de déplacement sur site en cas de déclenchement d'alarme infra rouge était établie par une attestation de M. X... -qui avait mis en contact la société Groupe Mitsiu et les sociétés STA et Sécuritas-, par une lettre de la société STA du 7 octobre 2004 à la société Groupe Mitsiu, par un e-mail du 16 décembre 2004 adressé par le responsable de l'agence locale de la société Sécuritas aux services internes de suivi des consignes et, enfin, par la circonstance que la société Groupe Mitsiu n'avait, en toute connaissance de cause, formulé aucune réclamation lorsqu'antérieurement aux vols litigieux, les alarmes infrarouge s'étaient déclenchées sans que la société Sécuritas provoque une intervention sur site ; qu'en se bornant, pour juger que l'accord allégué n'était pas établi, à énoncer que la preuve de l'envoi du courrier du 7 octobre 2004, par la société STA à la société Mitsiu n'était pas rapportée, la cour d'appel, qui a insuffisamment répondu aux conclusions dont elle était saisie, a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
6°/ qu 'en tout état de cause, ne se prononçant pas, même succinctement, sur les éléments de preuve, autres que la lettre du 7 octobre 2004, produits par les sociétés exposantes, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
7°/ que la société Sécuritas et la société XL avaient fait valoir que le vol du 15 mai 2005 avait été rendu possible par le masquage des systèmes infrarouges, les détecteurs n'étant pas dotés de protection anti-masque, en méconnaissance de la réglementation applicable et que la société Groupe Mitsiu, contractuellement chargée de l'installation et de la maintenance des matériels indispensables à l'exécution du contrat, était responsable de cette non-conformité du système aux normes en vigueur ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
8°/ que la société Sécuritas et la société XL avaient fait valoir que la société Groupe Mitsiu avait participé, de par sa négligence, à la réalisation du dommage en ne signalant pas l'existence de grands crus stockés sur le site, ce qui aurait conduit à une prestation différente de surveillance, au-delà du «risque normal» contractuel avec Sécuritas ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu, en premier lieu, que les conclusions litigieuses sollicitant, de façon imprécise et contradictoire, la nullité de la convention au visa de l'article 1134, alinéa 3, du code civil et ne soutenant pas que loyalement informée sur la valeur des marchandises à surveiller la société Sécuritas n'aurait pas conclu le contrat, la cour d'appel n'était pas tenue de répondre à un moyen dépourvu de portée juridique ;
Attendu, en deuxième lieu, que c'est par une interprétation souveraine, exclusive de dénaturation, que la cour d'appel a retenu, au terme d'un rapprochement de la proposition et des conditions générales du contrat de télésurveillance rendu nécessaire par leur imprécision, que le prestataire devait provoquer une intervention sur place à chaque alarme ;
Attendu, en troisième lieu, que c'est sans inverser la charge de la preuve, et dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de preuve, que la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation et de s'expliquer sur tous les éléments écartés, a retenu que le prestataire ne justifiait pas de consignes particulières l'autorisant à se soustraire à son obligation d'intervention sur place à chaque alarme ;
Et attendu, en dernier lieu, qu'ayant relevé que la mission du prestataire ne consistait pas à empêcher les vols, mais à provoquer la venue sur site d'un agent d'intervention lors des déclenchements d'alarme, en vue d'en limiter les conséquences, et retenu que lors des deux sinistres le prestataire avait failli à ses obligations, la cour d'appel n'était pas tenue de répondre à des moyens que ces constatations et appréciations rendaient inopérants ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Sécuritas alert services et la société XL insurance company limited aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, les condamne à payer à la société Allianz la somme globale de 2 500 euros et rejette leur demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix juillet deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour la société Sécuritas alert services et la société XL insurance company limited.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société Sécuritas Alert Services et la compagnie XL Insurance Company Limited à payer au Groupe Mitsiu la somme de 39.540 euros et à la compagnie Allianz la somme de 118.083,50 euros ;
AUX MOTIFS QU'il ressort de la proposition et du contrat de télésurveillance, risque courants, qu'en cas de réception d'une information dont la nature exige un déplacement, la télésurveillance Sécuritas missionne aussitôt un agent d'intervention qui se rendra sur le site, dans les plus brefs délais ; qu'au terme des conditions générales du contrat, il est prévu qu'en cas de réception d'une alarme ou d'un défaut technique, le prestataire appliquera les consignes particulières définies par le client conformément aux procédures de télésurveillance détaillées dans un document qui doit obligatoirement être précisé, actualisé et approuvé et contresigné par les deux parties ; qu'or, il est constant que ce document n'a jamais été établi ; que la société de surveillance explique qu'il était convenu que les barrières étaient paramétrées en mode pré-alarme pour éviter les déclenchements intempestifs ; qu'elle en veut pour preuve le courrier que la société STA, qui a mis les parties en relation, aurait adressé à la société Mitsiu le 7 octobre 2004 ; que cette dernière ne reconnaît pas avoir reçu ce courrier et le prestataire ne justifie pas de sa réception ou même de son envoi à la société Mitsiu ; que, par voie de conséquence, faute de pouvoir justifier de consignes particulières, le prestataire devait provoquer une intervention sur place à chaque alarme ; que, s'agissant du premier sinistre, il est constant que, le 4 février 2005, le prestataire a reçu des alarmes provenant des barrières à faisceaux infrarouges, qu'il a considérées comme des pré-alarmes, et qu'il n'a provoqué aucune intervention ; que le lendemain, la société Mitsiu constatait l'effraction de son bâtiment et des disparitions de vins de valeur ; que le prestataire, qui ne peut justifier de consignes particulières à cet égard, a failli à ses obligations ; que, s'agissant du deuxième sinistre, il est constant que, dans la nuit du 15 au 16 mai 2005, le prestataire a reçu trois alarmes provenant d'un détecteur situé à l'intérieur du local cambriolé, qu'il a immédiatement demandé à son sous-traitant STA une intervention sur site, que l'agent d'intervention a effectué sa ronde sans constater de traces d'effraction alors que le lendemain la société Mitsiu déplorera la disparition de vins de prix et constatera que le rideau métallique protégeant l'accès à son local était découpé sur environ 2 m² ; qu'il ressort des opérations d'expertise que, en dépit du fait que le rideau métallique fracturé était masqué par trois rangs de palot, remplis de pavés, si l'agent d'intervention avait effectué correctement sa ronde, il n'aurait pas manqué de voir le rideau éventré en braquant le faisceau de sa lampe dans les interstices qui existaient entre les rangées de palot ; que la responsabilité du prestataire est engagée du fait des négligences de son sous-traitant ; que sur l'indemnisation des préjudices, la mission du prestataire ne consistait pas d'empêcher les vols, mais bien seulement à provoquer la venue sur site d'un agent d'intervention lors des déclenchements d'alarme ; que c'est pourquoi la société Mitsiu ne peut prétendre qu'à l'indemnisation de la perte de chance d'avoir empêché un vol et/ou d'en avoir limité les conséquences ; que cette perte de chance sera arbitrée à 50 % du préjudice réclamé ;
1°) ALORS QU 'en s'abstenant de se prononcer sur le moyen de défense pris de la nullité du contrat soulevé par la société Sécuritas et la société XL Insurance Company Limited (concl. p. 25 à 35) pour s'opposer à la demande de condamnation à des dommages et intérêts fondée sur ce contrat, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
2°) ALORS QU 'en jugeant que la société Sécuritas devait provoquer une intervention sur place à chaque alarme après avoir relevé que le contrat ne précisait pas les consignes devant être appliquées par le prestataire en cas de réception d'une alarme, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article 1134 du code civil ;
3°) ALORS QUE , subsidiairement, la proposition de contrat indiquait : « si le contrat le prévoit, en cas de réception d'une information dont la nature exige un déplacement, la télésurveillance Sécuritas missionne aussitôt un agent d'intervention qui se rendra sur le site, dans les plus brefs délais » et les conditions générales du contrat prévoyaient : « En cas de réception d'une alarme ou d'un défaut technique, le prestataire appliquera les consignes particulières définies par le client conformément aux procédures de télésurveillance détaillées dans le présent contrat. (…) L'ensemble des "consignes" et détails de la prestation spécifique du prestataire doit obligatoirement être précisé, actualisé et approuvé dans un document contresigné par les deux parties » ; qu'à supposer que la cour d'appel ait considéré qu'il résultait de ces stipulations qu'une alarme constituait une information dont la nature exigeait un déplacement, quand elles prévoyaient que la consigne à tenir en cas d'alarme serait définie par le client, ce qu'il n'avait pas fait, la cour d'appel a dénaturé la proposition et les conditions générales du contrat en violation de l'article 1134 du code civil ;
4°) ALORS QU 'en retenant que, faute de pouvoir justifier de consignes particulières, le prestataire devait provoquer une intervention sur place à chaque alarme, la cour d'appel, qui a fait peser sur le débiteur la preuve de l'étendue de l'obligation contractuelle prétendument inexécutée, a violé l'article 1315 du code civil ;
5°) ALORS QU 'en tout état de cause, dans leurs conclusions d'appel (p. 39), les exposantes faisaient valoir que l'accord de la société Groupe Mitsiu sur l'absence de déplacement sur site en cas de déclenchement d'alarme infra rouge était établie par une attestation de monsieur X... -qui avait mis en contact la société Groupe Mitsiu et les sociétés STA et Sécuritas-, par une lettre de la société STA du 7 octobre 2004 à la société Groupe Mitsiu, par un e-mail du 16 décembre 2004 adressé par le responsable de l'agence locale de la société Sécuritas aux services internes de suivi des consignes et, enfin, par la circonstance que la société Groupe Mitsiu n'avait, en toute connaissance de cause, formulé aucune réclamation lorsqu'antérieurement aux vols litigieux, les alarmes infrarouge s'étaient déclenchées sans que la société Sécuritas provoque une intervention sur site ; qu'en se bornant, pour juger que l'accord allégué n'était pas établi, à énoncer que la preuve de l'envoi du courrier du 7 octobre 2004, par la société STA à la société Mitsiu n'était pas rapportée, la cour d'appel, qui a insuffisamment répondu aux conclusions dont elle était saisie, a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
6°) ALORS QU 'en tout état de cause, ne se prononçant pas, même succinctement, sur les éléments de preuve, autres que la lettre du 7 octobre 2004, produits par les sociétés exposantes, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
7°) ALORS QUE la société Sécuritas et la société XL Insurance Company Limited avaient fait valoir que le vol du 15 mai 2005 avait été rendu possible par le masquage des systèmes infrarouges, les détecteurs n'étant pas dotés de protection anti-masque, en méconnaissance de la réglementation applicable et que la société Groupe Mitsiu, contractuellement chargée de l'installation et de la maintenance des matériels indispensables à l'exécution du contrat, était responsable de cette non-conformité du système aux normes en vigueur (concl. p. 43) ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
8°) ALORS QUE la société Sécuritas et la société XL Insurance Company Limited avaient fait valoir que la société Groupe Mitsiu avait participé, de par sa négligence, à la réalisation du dommage en ne signalant pas l'existence de grands crus stockés sur le site, ce qui aurait conduit à une prestation différente de surveillance, au-delà du « risque normal » contractuel avec Sécuritas (concl. p. 46) ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 11-22983
Date de la décision : 10/07/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux, 14 juin 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 10 jui. 2012, pourvoi n°11-22983


Composition du Tribunal
Président : M. Espel (président)
Avocat(s) : SCP Baraduc et Duhamel, SCP Didier et Pinet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.22983
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