LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche ;
Vu l'article 1382 du code civil, ensemble l'article 809 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la commune de Marmande a fait assigner devant le juge des référés la société Dataxy, qui exploitait depuis le mois de juin 2004 un site dénommé "Marmande.fr", hébergeant différents annonceurs ;
Attendu que pour constater l'absence de trouble manifestement illicite et dire n'y avoir lieu à référé, l'arrêt retient qu'en juin 2004, il n'existait aucune protection du nom des communes et que les dispositions de l'article L.711-4 h du code la propriété intellectuelle protègent les collectivités territoriales contre un dépôt de marque et ne concernent pas les noms de domaine ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, l'existence d'un trouble manifestement illicite résultant d'un risque de confusion dans l'esprit du public, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 14 juin 2011, entre les parties, par la cour d'appel d'Agen ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;
Condamne la société Dataxy aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à la commune de Marmande, prise en la personne de son maire, représentant légal, la somme de 2 500 euros et rejette sa demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix juillet deux mille douze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Boullez, avocat aux Conseils, pour la commune de Marmande représentée par son maire en exercice.
Le pourvoi fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR écarté la demande que la Commune de Marmande avait formée contre la société DATAXY afin qu'elle condamnée sous astreinte à supprimer le nom de domaine qu'elle utilise sous la dénomination ‘‘marmande.fr'' et de voir ordonner le blocage du nom de domaine ‘‘marmande.fr'' ;
AUX MOTIFS QUE, pour infirmer l'ordonnance entreprise et rejeter la requête de la Commune de MARMANDE, il suffira de relever que si la loi nouvelle s'applique immédiatement aux effets à venir des situations juridiques non contractuelles en cours au moment où elle entre en vigueur elle ne peut, contrairement à ce que soutient l'intimée, remettre en cause la validité d'une situation régulièrement constituée à cette date ; que lorsque la SARL DATAXY a enregistré en juin 2004 auprès de l'Association Française pour le Nommage Internet en Coopération (AFNIC) le nom de domaine "marmande.fr", il n'existait aucune protection du nom des communes et que, par suite, la SARL DATAXY était parfaitement en droit d'enregistrer à son profit le nom de domaine "marmande.fr" ; que les dispositions réglementaires postérieures instituant une telle protection ne sont pas de nature à remettre en cause une situation régulièrement constituée ; que les dispositions de l'article L. 711- 4 h protègent les collectivités territoriales contre un dépôt de marque et ne concernent pas les noms de domaine, qui font l'objet d'une réglementation spécifique ; que par suite, il n'apparaît pas que l'usage du nom de domaine litigieux par la SARL DATAXY soit constitutif d'un trouble manifestement illicite que le Juge des Référés pourrait faire cesser ; que l'équité justifie l'allocation à l'appelante d'une indemnité de procédure de 600 €.
1. ALORS QUE l'enregistrement par un tiers du nom d'une collectivité territoriale comme nom de domaine constitue à l'égard de cette dernière un acte de concurrence déloyale et lui cause un trouble manifestement illicite qu'il appartient au juge des référés de faire cesser dès lors que le choix de ce nom de domaine a pour objet ou pour effet d'induire une confusion dans l'esprit du public ; qu'en affirmant cependant qu'il n'existerait aucune protection du nom des communes, en dehors de l'article 711-4 h du Code de la propriété intellectuelle ou de l'article R 20-44-43 du Code des postes et des télécommunications qui n'avaient pas vocation à s'appliquer au dépôt par la société DATAXY du nom de domaine ‘‘marmande.fr'', sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si l'utilisation du nom de la Commune de Marmande n'était pas constitutif à son égard d'un acte de concurrence déloyale et, par voie de conséquence, d'un trouble manifestement illicite, en raison du risque de confusion qui pouvait en résulter dans l'esprit du public, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 809 du Code de procédure civile et de l'article 1382 du Code civil ;
2. ALORS QUE la Commune de Marmande a rappelé dans ses conclusions que le dépôt de son nom par la société DATAXY comme nom de domaine constituait un acte de concurrence déloyale en raison du risque de confusion existant dans l'esprit du public qui était susceptible de croire en l'existence du site officiel de la Commune de Marmande (conclusions, p. 4) ; qu'en s'abstenant de répondre à un moyen aussi pertinent fondé sur le droit commun de la concurrence déloyale, la Cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du Code de procédure civile.