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03/07/2012 | FRANCE | N°11-16984

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 03 juillet 2012, 11-16984


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 8 février 2011, RG n° 10/ 02912), que la SAS Rochemare (la société Rochemare), dont les actionnaires étaient M. et Mme X..., exploitait une maison de retraite dans un immeuble appartenant à la SCI du Château de la Roche (la SCI), dont 98 parts sur 100 appartenaient à la société Rochemare et les deux autres à M. et Mme X... ; que, le 8 juin 2005, M. et Mme X... ont signé, sous conditions suspensives assorties d'une clause de dédit, une promesse synallagmatique de

cession de la totalité des actions de la société Rochemare au pro...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 8 février 2011, RG n° 10/ 02912), que la SAS Rochemare (la société Rochemare), dont les actionnaires étaient M. et Mme X..., exploitait une maison de retraite dans un immeuble appartenant à la SCI du Château de la Roche (la SCI), dont 98 parts sur 100 appartenaient à la société Rochemare et les deux autres à M. et Mme X... ; que, le 8 juin 2005, M. et Mme X... ont signé, sous conditions suspensives assorties d'une clause de dédit, une promesse synallagmatique de cession de la totalité des actions de la société Rochemare au profit de M. Y... ou de toute personne substituée ; que, le 20 juillet 2005, M. et Mme X... ont conclu avec M. Z... un protocole de cession de la totalité de leurs actions de la société Rochemare au profit de l'Eurl Colombier santé, substituée à M. Z... ; que, par arrêt du 16 décembre 2008, la cour d'appel a dit que la cession des actions de la société Rochemare au profit de l'Eurl Setimo, constituée par M. Y... pour se substituer à lui, était parfaite et opposable à la société Rochemare, à M. Z... et à l'Eurl Colombier santé, l'arrêt rendu valant acte de cession définitif à l'égard de l'Eurl Setimo ; que les pourvois formés par l'Eurl Colombier santé, la société Rochemare, M. Z..., M. et Mme X... contre cet arrêt ont été déclarés non admis le 25 février 2010 ; que, les 21 et 22 janvier 2009, la SAS Cap santé et la SCI, créancières de la société Rochemare, ont formé tierce opposition à l'arrêt du 16 décembre 2008 ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. Z..., l'Eurl Colombier santé, la SCI, la SAS Cap santé, la société Rochemare font grief à l'arrêt d'avoir déclaré la tierce opposition de la SCI du Château de la Roche irrecevable, alors, selon le moyen :
1°/ qu'est recevable à former tierce opposition toute personne qui y a intérêt, dès lors qu'elle n'a été ni partie ni représentée au jugement qu'elle attaque ; qu'en retenant que la SCI était représentée par M. Z..., son gérant et associé, après avoir pourtant constaté que ce dernier était expressément intervenu en seule " qualité de cessionnaire des actions de la société Rochemare ", ce dont il résultait qu'il n'avait pas représenté la SCI, la cour d'appel a violé l'article 583 du code de procédure civile ;
2°/ qu'est recevable à former tierce opposition toute personne qui y a intérêt, dès lors qu'elle n'a été ni partie ni représentée au jugement qu'elle attaque ; qu'en retenant que la SCI était représentée par M. X..., son dirigeant au jour de la cession contestée, là où, n'étant plus dirigeant au jour de l'introduction de l'instance, il n'avait pu la représenter, la cour d'appel a violé l'article 583 du code de procédure civile ;
3°/ que le droit effectif à un juge implique qu'un créancier puisse former tierce opposition à une décision mettant en péril ses droits ; qu'en déclarant irrecevable la tierce opposition formée par la SCI au seul motif qu'elle avait été représentée par son débiteur la société Rochemare, la cour d'appel a violé l'article 583 du code de procédure civile, ensemble l'article 6 § 1 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme ;
4°/ que les créanciers peuvent former tierce opposition lorsqu'ils invoquent un moyen qui leur est propre ; qu'en retenant que le moyen tiré de la violation du bail commercial ne constitue pas un moyen propre à la SCI puisqu'il aurait pu être soutenu par M. Z... ou par M. X..., quand ces derniers, qui ne la représentaient pas, n'avaient pas qualité pour présenter un tel moyen, la cour d'appel a violé l'article 583 du code de procédure civile ;
5°/ que le juge ne peut déclarer une demande irrecevable en fondant sa décision sur des motifs portant sur son bien-fondé ; qu'en retenant, pour déclarer irrecevable la tierce opposition formée par la SCI, que l'arrêt du 16 décembre 2008 n'a pas validé une cession de droit au bail ou de fonds de commerce mais une cession d'actions et, qu'en outre, l'acte du 8 juin 2005 ne prévoyait aucune condition suspensive imposant l'agrément ou l'autorisation du bailleur, la cour d'appel, qui a statué par des motifs inopérants tenant au fond du droit, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 583 du code de procédure civile ;
6°/ qu'est recevable à former tierce opposition toute personne qui y a intérêt, dès lors qu'elle n'a été ni partie ni représentée au jugement qu'elle attaque ; que la simple communauté d'intérêts ne suffit pas à constituer cette représentation ; qu'en retenant que la SCI a une communauté d'intérêts avec M. Z... et l'Eurl Colombier santé, la cour d'appel, qui a statué par un motif inopérant, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 583 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'après avoir relevé que la SCI, qui se prétend créancière chirographaire de la société Rochemare, était représentée par celle-ci qui est son débiteur, tandis qu'elle n'invoquait aucune fraude, ni aucun moyen propre dans la mesure où l'arrêt du 16 décembre 2008 n'avait pas validé la cession du droit au bail ou du fonds de commerce mais uniquement la cession des actions de la société Rochemare en date du 8 juin 2005, la cour d'appel, par une décision motivée et abstraction faite des motifs surabondants critiqués par les première, deuxième et sixième branches, a retenu à bon droit que la tierce opposition formée par la SCI n'était pas recevable ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu que M. Z..., l'Eurl Colombier santé, la SCI, la SAS Cap santé, la société Rochemare font grief à l'arrêt d'avoir déclaré la tierce opposition de la SAS Cap santé irrecevable, alors, selon le moyen :
1°/ qu'est recevable à former tierce opposition toute personne qui y a intérêt, dès lors qu'elle n'a été ni partie ni représentée au jugement qu'elle attaque ; qu'en déclarant irrecevable la tierce opposition formée par la SAS Cap santé au motif qu'elle est l'unique associée de l'EURL Colombier santé et qu'elle a été représentée par elle dans l'instance ayant donné lieu à l'arrêt du 16 décembre 2008, après avoir pourtant constaté que la SAS Cap santé, créancière de la société Rochemare, avait un intérêt personnel qui n'avait pu être représenté par l'EURL Colombier santé, la cour d'appel a violé l'article 583 du code de procédure civile ;
2°/ que le droit effectif à un juge implique qu'un créancier chirographaire puisse former tierce opposition à une décision mettant en péril ses droits ; qu'en retenant, pour déclarer irrecevable la tierce opposition formée par la SAS Cap santé, qu'elle avait été représentée par son débiteur la société Rochemare, la cour d'appel a violé l'article 583 du code de procédure civile, ensemble l'article 6 § 1 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme ;
3°/ qu'est recevable à former tierce opposition toute personne qui y a intérêt, dès lors qu'elle n'a été ni partie ni représentée au jugement qu'elle attaque ; que la simple communauté d'intérêts ne suffit pas à constituer cette représentation ; qu'en retenant que la SAS Cap santé a une communauté d'intérêts avec M. Z... et l'EURL Colombier santé, la cour d'appel, qui a statué par un motif inopérant, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 583 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'après avoir relevé que la SAS Cap santé, unique associée de l'Eurl Colombier santé, était représentée par cette dernière dans l'arrêt du 16 décembre 2008, tandis qu'en sa qualité prétendue de créancier chirographaire de la société Rochemare, elle était également représentée par cette société conformément au principe selon lequel les créanciers chirographaires sont représentés par leur débiteur en vertu de leur droit de gage général et que la SAS Cap santé n'invoquait aucune fraude, ni aucun moyen qui lui fût propre, la cour d'appel, par une décision motivée et abstraction faite des motifs surabondants critiqués par la troisième branche, a retenu à bon droit que la tierce opposition formée par la SAS Cap santé n'était pas recevable ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Z..., l'Eurl Colombier santé, la SCI Château de la Roche, la SAS Cap santé et la société Rochemare aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trois juillet deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Peignot, Garreau et Bauer-Violas, avocat aux Conseils, pour M. Z..., l'entreprise Colombier santé, les sociétés du Château de la Roche, Cap santé et Rochemare.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré la tierce opposition de la SCI du Château de la Roche irrecevable ;
AUX MOTIFS QUE « la SCI du Château de la Roche, qui se prétend elle aussi créancière chirographaire de la société Rochemare, était représentée par celle-ci qui est son débiteur ; qu'elle était également représentée par M. Z..., son gérant et associé – aux termes des extraits Kbis de la SCI du Château de la Roche produits en date des 29 janvier et 22 juin 2009 – lequel était partie à l'instance en sa qualité de « cessionnaire de l'ensemble des actions de la SAS Rochemare » ou bien par M. X..., son dirigeant au moment de la cession contestée ; qu'elle n'invoque aucune fraude ; que le moyen tiré de la violation du bail commercial ne constitue pas un moyen propre puisqu'il aurait pu être soutenu par M. Z... ou par M. X..., étant au demeurant observé que l'arrêt du 16 décembre 2008 n'a pas validé une cession de droit au bail ou de fonds de commerce mais un cession d'actions et, qu'en outre, l'acte du 8 juin 2005 ne prévoyait aucune condition suspensive imposant l'agrément ou l'autorisation du bailleur » ;
Et AUX MOTIFS, ENSUITE, QUE « M. Z... et l'EURL Colombier Santé, qui se sont joints aux écritures des deux tiers opposants, ont une communauté d'intérêts avec ceux-ci tendant à remettre en cause la cession du 8 juin 2005 » ;
ALORS, D'UNE PART, QU'est recevable à former tierce opposition toute personne qui y a intérêt, dès lors qu'elle n'a été ni partie ni représentée au jugement qu'elle attaque ; qu'en retenant que la SCI du Château de la Roche était représentée par M. Z..., son gérant et associé, après avoir pourtant constaté que ce dernier était expressément intervenu en seule « qualité de cessionnaire des actions de la société ROCHEMARE », ce dont il résultait qu'il n'avait pas représenté la SCI, la Cour d'appel a violé l'article 583 du code de procédure civile ;
ALORS, D'AUTRE PART, QU'est recevable à former tierce opposition toute personne qui y a intérêt, dès lors qu'elle n'a été ni partie ni représentée au jugement qu'elle attaque ; qu'en retenant que la SCI du Château de la Roche était représentée par M. X..., son dirigeant au jour de la cession contestée, là où, n'étant plus dirigeant au jour de l'introduction de l'instance, il n'avait pu la représenter, la Cour d'appel a violé l'article 583 du code de procédure civile ;
ALORS, DE PLUS, QUE le droit effectif à un juge implique qu'un créancier puisse former tierce opposition à une décision mettant en péril ses droits ; qu'en déclarant irrecevable la tierce opposition formée par la SCI du Château de la Roche au seul motif qu'elle avait été représentée par son débiteur la société ROCHEMARE, la Cour d'appel a violé l'article 583 du code de procédure civile, ensemble l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme ;
ALORS, ENCORE, QUE les créanciers peuvent former tierce opposition lorsqu'ils invoquent un moyen qui leur est propre ; qu'en retenant que le moyen tiré de la violation du bail commercial ne constitue pas un moyen propre à la SCI du Château de la Roche puisqu'il aurait pu être soutenu par M. Z... ou par M. X..., quand ces derniers, qui ne la représentaient pas, n'avaient pas qualité pour présenter un tel moyen, la Cour d'appel a violé l'article 583 du code civil ;
ALORS, AU SURPLUS, QUE le juge ne peut déclarer une demande irrecevable en fondant sa décision sur des motifs portant sur son bien-fondé ; qu'en retenant, pour déclarer irrecevable la tierce opposition formée par la SCI du Château de la Roche, que l'arrêt du 16 décembre 2008 n'a pas validé une cession de droit au bail ou de fonds de commerce mais une cession d'actions et, qu'en outre, l'acte du 8 juin 2005 ne prévoyait aucune condition suspensive imposant l'agrément ou l'autorisation du bailleur, la Cour d'appel, qui a statué par des motifs inopérants tenant au fond du droit, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 583 du code civil ;
ALORS, ENFIN, QU'est recevable à former tierce opposition toute personne qui y a intérêt, dès lors qu'elle n'a été ni partie ni représentée au jugement qu'elle attaque ; que la simple communauté d'intérêts ne suffit pas à constituer cette représentation ; qu'en retenant que la SCI du Château de la Roche a une communauté d'intérêts avec Monsieur Z... et l'EURL Colombier Santé, la Cour d'appel, qui a statué par un motif inopérant, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 583 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré la tierce opposition de la société CAP SANTE irrecevable ;
AUX MOTIFS QUE « la SAS CAP SANTE, qui est l'unique associée de l'EURL Colombier Santé, était représentée par cette dernière dans l'arrêt du 16 décembre 2008 ; qu'en sa qualité prétendue de créancier chirographaire de la société Rochemare, elle était également représentée par cette société conformément au principe selon lequel les créanciers chirographaires sont représentés par leur débiteur en vertu de leur droit de gage général ; qu'elle n'invoque aucune fraude, ni aucun moyen qui lui soit propre » ;
ET QUE « M. Z... et l'EURL Colombier Santé, qui se sont joints aux écritures des deux tiers opposants, ont une communauté d'intérêts avec ceux-ci tendant à remettre en cause la cession du 8 juin 2005 » ;
ALORS, D'UNE PART, QU'est recevable à former tierce opposition toute personne qui y a intérêt, dès lors qu'elle n'a été ni partie ni représentée au jugement qu'elle attaque ; qu'en déclarant irrecevable la tierce opposition formée par la société CAP SANTE au motif qu'elle est l'unique associée de la société Colombier Santé et qu'elle a été représentée par elle dans l'instance ayant donné lieu à l'arrêt du 16 décembre 2008, après avoir pourtant constaté que la société CAP SANTE, créancière de la société ROCHEMARE, avait un intérêt personnel qui n'avait pu être représenté par la société Colombier Santé, la Cour d'appel a violé l'article 583 du code de procédure civile ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE le droit effectif à un juge implique qu'un créancier chirographaire puisse former tierce opposition à une décision mettant en péril ses droits ; qu'en retenant, pour déclarer irrecevable la tierce opposition formée par la société CAP SANTE, qu'elle avait été représentée par son débiteur la société ROCHEMARE, la Cour d'appel a violé l'article 583 du code de procédure civile, ensemble l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme ;
ALORS, ENFIN, QU'est recevable à former tierce opposition toute personne qui y a intérêt, dès lors qu'elle n'a été ni partie ni représentée au jugement qu'elle attaque ; que la simple communauté d'intérêts ne suffit pas à constituer cette représentation ; qu'en retenant que la société CAP SANTE a une communauté d'intérêts avec Monsieur Z... et l'EURL Colombier Santé, la Cour d'appel, qui a statué par un motif inopérant, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 583 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 11-16984
Date de la décision : 03/07/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 08 février 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 03 jui. 2012, pourvoi n°11-16984


Composition du Tribunal
Président : M. Espel (président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Peignot, Garreau et Bauer-Violas

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.16984
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