La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

27/06/2012 | FRANCE | N°10-27173

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 27 juin 2012, 10-27173


Sur le moyen unique :
Vu l'article 1134 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé par la société Sprintlink France en qualité de responsable des ventes nouveaux clients à compter du 8 décembre 2004 ; que, contestant le montant des commissions contractuelles qui lui avaient été versé au titre de l'année 2005, ce qui selon lui, caractérisait une exécution fautive du contrat de travail, il a pris acte de la rupture de son contrat de travail le 2 mai 2006 et saisi la juridiction prud'homale afin de faire juger que la rupture produisait les eff

ets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et obtenir le pai...

Sur le moyen unique :
Vu l'article 1134 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé par la société Sprintlink France en qualité de responsable des ventes nouveaux clients à compter du 8 décembre 2004 ; que, contestant le montant des commissions contractuelles qui lui avaient été versé au titre de l'année 2005, ce qui selon lui, caractérisait une exécution fautive du contrat de travail, il a pris acte de la rupture de son contrat de travail le 2 mai 2006 et saisi la juridiction prud'homale afin de faire juger que la rupture produisait les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et obtenir le paiement d'un rappel de salaire sur commissions ;
Attendu que pour faire droit à ces demandes, l'arrêt retient, d'une part, que le salarié avait parfaitement compris que les commissions pour les objectifs " B end " seraient plafonnées à 200 % des objectifs, qu'il a le 28 février 2005 accepté le plan, après discussion ainsi qu'il l'a relevé lui-même, d'autre part, qu'en proposant un plafonnement de ses commissions pour l'année 2005 sur le " B end " correspondant aux commissions relatives aux contrats internationaux gérés administrativement et comptablement via le siège des USA, l'employeur a manifestement voulu limiter le montant des commissions susceptibles d'être versées conformément aux plans de rémunération antérieurs si les négociations engagées avec Motorola devaient aboutir ; que ce comportement, confirmé par le refus d'envisager une compensation particulière lors de la présentation de la requête formée hors plan par M. X..., caractérise une exécution fautive du contrat de travail, dès lors que l'employeur a anticipé les conséquences que la conclusion du contrat pouvait avoir sur la rémunération du salarié en mettant au point un plan de rémunération susceptible d'empêcher que la conclusion de ce contrat exceptionnel ne soit l'occasion d'une augmentation sensible de la rémunération du salarié ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté l'accord du salarié sur le plan de commissionnement pour 2005, par des motifs impropres à caractériser une exécution fautive du contrat de travail par l'employeur, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 21 octobre 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept juin deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils, pour la société Sprintlink France
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que la prise d'acte de la rupture doit avoir les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'AVOIR condamné la société SPRINTLINK FRANCE à verser à Monsieur X... la somme de 350. 000 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution fautive du contrat de travail, la somme de 220. 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, la somme de 78. 655 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement, la somme de 43. 401, 39 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, la somme de 4. 340, 13 euros au titre des congés payés afférents et la somme de 4. 500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QUE « En toute hypothèse, et nonobstant ces dispositions figurant dans le plan de rémunération de 2005, M. X..., qui avait d'abord été embauché par la société américaine, avant d'être engagé par la filiale française, n'avait jamais connu de plafonnement de commissions comparable à celui qui lui a été proposé pour l'année 2005. Par ailleurs, il ressort des courriels échangés et tout spécialement d'un courriel rédigé par Y..., à l'intention de M. Z..., le 9 juin 2005, que l'opportunité d'un contrat important avec Motorola a été identifiée par Mark A... en 2004. L'auteur de ce courriel précise que " Mark et son homologue européen, Paul X..., ont fait un travail remarquable en vendant cette solution extrêmement complexe à un client des plus exigeants ". Dans la demande de paiement d'une compensation financière hors plan pour le contrat Motorola, M. X... a rappelé que des réunions avec le directeur senior des réseaux mondiaux et de l'équipe EMEA de Motorola ont eu lieu pendant le dernier trimestre de l'année 2004 et le premier trimestre de l'année 2005 pour préparer les demandes de propositions chiffrées. Ainsi, il apparaît que même si le contrat Motorola dont l'enjeu était de l'ordre de 30 millions de dollars n'a été finalisé qu'en juin 2005, la direction du groupe avait conscience des pourparlers engagés, des enjeux financiers en cours et de l'importance du travail des équipes et notamment de l'équipe européenne de M. X... pour remporter ce contrat. En proposant un plafonnement de ses commissions pour l'année 2005 sur le " B end ", correspondant aux commissions relatives aux contrats internationaux gérés administrativement et comptablement via le siège des USA, l'employeur a manifestement voulu limiter le montant des commissions susceptibles d'être versées conformément aux plans de rémunération antérieurs si les négociations engagées avec Motorola devaient aboutir. Ce comportement confirmé par le refus d'envisager une compensation particulière lors de la présentation de la requête formée hors plan par M. X... caractérise une exécution fautive du contrat de travail, dès lorsque l'employeur a anticipé les conséquences que la conclusion du contrat pouvait avoir sur la rémunération du salarié en mettant au point un plan de rémunération susceptible d'empêcher que la conclusion de ce contrat exceptionnel ne soit l'occasion d'une augmentation sensible de la rémunération du salarié. Cette exécution fautive du contrat est à l'origine d'un préjudice réel et certain pour le salarié dès lors que les modalités de sa rémunération ont changé pour empêcher que la rémunération du salariée soit impactée par la conclusion de cet important contrat avec Motorola. M. X... estime que son préjudice peut être fixé à la somme de 607. 006 € ce chiffre ayant été calculé par un représentant du groupe en tenant compte de l'objectif annuel du revenu de l'équipe fixé à312. 500 €, de l'objectif effectivement atteint soit 2. 275. 982 €, du facteur d'accélération, des sommes déjà versées au titre des commissions du " B end " soit 39. 455 €, la somme de 3. 605 € versée par la société au titre du solde des commissions " B End " en application du plan de rémunération de 2005. S'il est patent qu'aux termes de l'article VII du contrat de travail il était prévu que la rémunération fixe annuelle brute de M. X... était arrêtée à la somme de 84. 000 €, qu'une rémunération variable serait susceptible de lui être versée en fonction des résultats de son activité, laquelle rémunération variable pourrait atteindre 50 % de la rémunération fixe, force est de constater que l'employeur admettait que cette limitation n'avait pas vocation à être appliquée puisque le cumul des commissions " A end et B end " versées effectivement a dépassé le seuil de 50 % de la rémunération brute. En effet, d'après les documents produits par les deux parties, en application du plan de commission 2005, M. X... a perçu 77. 455 € au total. Par ailleurs, figure dans le plan de rémunération de 2005 une clause ainsi libellée " le montant maximum d'intéressement compensatoire que vous pouvez gagner en une seule année est de 500000 $, étant observé que cette limitation annuelle figurait déjà dans le plan de rémunération de 2004 et qu'une telle clause ne pouvait trouver à s'appliquer si la rémunération variable était limitée à 50 % de la rémunération brute. Dans ces conditions, et en tenant compte de l'ensemble de ces éléments, la cour dispose d'éléments suffisants pour fixer à 350. 000 € le montant des dommages-intérêts à revenir au salarié à raison du préjudice subi par lui du fait de l'exécution fautive du contrat par l'employeur. » ;
ET QUE « la prise d'acte de la rupture des relations contractuelles formulées par un salarié a les effets d'une démission ou d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse selon qu'elle est justifiée ou non par des manquements suffisamment graves de la part de l'employeur. Aux termes de la lettre de rupture du 2 mai 2006, M. X... rappelle qu'en dépit de ses demandes réitérées, l'employeur a refuse de lui verser une commission proportionnée à la réalisation et au large dépassement de son objectif B, en alléguant d'un plafond de commissions hors de proportion avec les modalités habituelles de fixation au sein de l'entreprise. Ainsi qu'il a été précédemment analysé, le changement intervenu dans les modalités de la rémunération variable alors que le groupe connaissait l'existence des pourparlers engagés avec un client potentiel important conforté par le refus de verser au salarié une compensation appropriée hors plan caractérisent une volonté manifeste de l'employeur de limiter le montant de la rémunération à revenir au salarié en tenant compte du chiffre susceptible d'être atteint par la conclusion de ce contrat important de la part de l'employeur et de le priver d'une part de la rémunération qui lui serait revenue sans l'application jusqu'alors inédite d'un plafond des commissions à 200 % des objectifs. Dans ces conditions, la prise d'acte de la rupture est justifiée par les manquements graves de la part de l'employeur et doit avoir des effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse. »
1. ALORS QUE lorsque l'employeur et le salarié ont défini d'un commun accord les modalités de calcul de la rémunération variable prévue au contrat, cet accord s'impose aux parties comme au juge ; que l'employeur ne commet aucun manquement à ses obligations contractuelles en faisant application de ces modalités de calcul de la rémunération variable définies d'un commun accord ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que le contrat de travail de Monsieur X... prévoyait le versement d'une rémunération variable pouvant atteindre 50 % de sa rémunération fixe d'un montant annuel de 84. 000 euros, qu'au début de l'année 2005 la société SPRINTLINK FRANCE lui a proposé un plan de rémunération variable pour l'année 2005 prévoyant le versement de commissions sur deux types d'objectifs dénommés « A End » et « B end » et le plafonnement des commissions sur l'objectif « B End » à 200 % de ces objectifs, qu'après avoir sollicité des explications sur ce plafonnement et obtenu une réponse claire et non équivoque, Monsieur X... a accepté ce plan sans émettre la moindre réserve ni condition, le 28 février 2005, que son consentement n'était en outre entaché d'aucun vice et que la rédaction de ce plan en langue anglaise, sa langue maternelle, ne le lui rendait pas inopposable ; qu'il en résultait que ce plan de rémunération variable et, en particulier, le plafonnement des commissions de Monsieur X... sur les objectifs « B End » à 200 % de ces objectifs constituait la loi des parties ; qu'en jugeant néanmoins que le plafonnement des commissions versées à Monsieur X... sur les objectifs « B End » pour l'année 2005 à l'équivalent de 200 % de ces objectifs caractérisait une exécution fautive du contrat de la part de la société SPRINTLINK FRANCE, la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil et l'article L. 1221-1 du Code du travail ;
2. ALORS QU'en retenant que le plafonnement des commissions sur les objectifs « B end », tel qu'il était prévu par le plan de rémunération proposé par l'employeur et accepté par le salarié, caractérisait une exécution fautive du contrat de la part de l'employeur, sans viser aucune stipulation contractuelle ni règle de droit relative à la conclusion, au contenu ou à l'exécution du contrat de travail, la cour d'appel a privé sa décision de tout fondement et violé les articles 1134 du Code civil et 12 du Code de procédure civile ;
3. ALORS QUE le salaire, contrepartie du travail, est fixé librement par accord des parties, sous réserve du respect des dispositions d'ordre public et des minimas légaux et conventionnels ; qu'aucune règle d'ordre public, ni l'exigence de bonne foi contractuelle n'interdisent à l'employeur de proposer au salarié une modification des modalités de calcul de sa rémunération variable incluant un plafonnement de cette dernière, même lorsqu'il anticipe une évolution favorable des résultats de l'entreprise ; qu'en retenant, pour dire que la société SPRINTLINK FRANCE a commis une inexécution fautive du contrat, qu'en proposant à Monsieur X... un plan de rémunération variable comportant un plafond sur les commissions liées aux objectifs « B End », la société SPRINTLINK FRANCE avait manifestement voulu éviter que la conclusion d'un important contrat avec la société MOTOROLA, alors en cours de négociation, ne conduise à une augmentation exorbitante de sa rémunération, cependant qu'il résultait de ses constatations que Monsieur X... avait la capacité de refuser ou de négocier le contenu de ce plan de rémunération et qu'il l'avait néanmoins accepté, de manière claire et non équivoque, tout en ayant conscience de l'existence de ce plafonnement sur les objectifs « B end » et de son incidence sur ses droits à rémunération variable liés à la conclusion du contrat avec la société MOTOROLA à la négociation de laquelle il participait, la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil et, à supposer qu'elle se soit fondée sur l'exigence de bonne foi, l'article L. 1222-1 du Code du travail ;
4. ALORS QU'en vertu du principe à travail égal, salaire égal si l'employeur peut accorder des avantages particuliers à certains salariés, c'est à la condition que tous les salariés de l'entreprise placés dans une situation identique au regard de l'avantage octroyé puissent en bénéficier ; qu'en l'espèce, la société SPRINTLINK FRANCE faisait valoir que le plan de rémunération variable pour l'année 2005 de tous les membres de l'équipe commerciale qui avaient participé à la négociation du contrat exceptionnel avec la société MOTOROLA était établi sur un même modèle et prévoyait un plafonnement des commissions sur les objectifs « B End » à 200 % et qu'aucun de ces salariés n'avait perçu de commission au-delà de ce plafond, de sorte qu'elle n'avait aucune raison d'accorder cet avantage à Monsieur X... ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen déterminant des conclusions de l'exposante, la cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-27173
Date de la décision : 27/06/2012
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 21 octobre 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 27 jui. 2012, pourvoi n°10-27173


Composition du Tribunal
Président : M. Gosselin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:10.27173
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award