LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 8 mars 2011), que M. X..., employé depuis le 1er mars 2001 en qualité de chef de projet informatique puis de responsable du service informatique par la société YBC aux droits de laquelle se trouve la société Helpevia, a été licencié le 14 mai 2009 pour faute grave ;
Sur le premier moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Et sur le second moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de l'avoir condamné à payer diverses sommes au titre de la rupture, alors, selon le moyen :
1°/ que les fichiers et messages créés par un salarié grâce à l'outil informatique sont présumés avoir un caractère professionnel de sorte que l'employeur peut y avoir accès hors sa présence ; qu'en décidant que le règlement intérieur s'oppose à la consultation des fichiers et messages contenus sur l'ordinateur du salarié, en son absence, quand la présence de l'intéressé n'est requise que pour la consultation des données personnels, la cour d'appel qui n'a pas recherché, ainsi qu'elle y était invitée, si les fichiers et messages ouverts sur le matériel mis à sa disposition par l'employeur avaient été identifiées comme personnels par le salarié, a privé sa décision de base légale au regard des articles 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, 9 du code civil, 9 du code de procédure civile et L. 1121-1 du code du travail ;
2°/ que l'employeur est en droit de consulter librement sur l'ordinateur qu'il avait mis à la disposition du salarié les données confidentielles de l'entreprise que ce dernier s'est indûment appropriées en les copiant sur son ordinateur au mépris de son obligation de loyauté ; que la SAS Helpevia rappelait que le salarié avait profité de ses fonctions de responsable du service informatique pour récupérer sur l'ordinateur du président des données confidentielles relatives, d'une part, à l'évolution de son salaire, et, d'autre part, à la grille de proposition des augmentations des salaires des années 2005, 2006, 2007 et 2008 ; qu'en retenant que le règlement intérieur interdisait à l'employeur de consulter ces documents qu'il avait copiés sur son ordinateur avant de les effacer, en l'absence de l'intéressé, quand ils présentaient tant par leur origine que par leur nature un caractère professionnel qui en autorisait la consultation par l'employeur, en l'absence du salarié, d'autant qu'ils étaient sa propriété, la cour d'appel a violé les articles 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, 9 du code civil, 9 du code de procédure civile et L. 1121-1 du code du travail ;
Mais attendu que les courriels adressés ou reçus par le salarié à l'aide de l'outil informatique mis à sa disposition par l'employeur pour les besoins de son travail sont présumés avoir un caractère professionnel en sorte que l'employeur est en droit de les ouvrir hors la présence de l'intéressé, sauf s'ils sont identifiés comme personnels ; que le règlement intérieur peut toutefois contenir des dispositions restreignant le pouvoir de consultation de l'employeur, en le soumettant à d'autres conditions ;
Et attendu que la cour d'appel, qui n'avait pas à procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, a relevé par motifs propres et adoptés que le règlement intérieur de l'entreprise prévoyait que les messageries électroniques des salariés ne pouvaient être consultées par la direction qu'en présence du salarié ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Helpevia aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer la somme de 2 500 euros à M. X... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six juin deux mille douze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Boullez, avocat aux Conseils pour la société Helpevia
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le pourvoi fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR condamné la SAS HELPEVIA à payer à M. X... des dommages-intérêts d'un montant de 50.000 € pour rupture abusive du contrat de travail, une indemnité de préavis de 18.495 €, une indemnité conventionnelle de licenciement de 16.440 €, un rappel de salaire sur mise à pied d'un montant de 2.854,24 € outre la somme de 285,42 € à titre de congés sur mise à pied et celle de 228,34 € ; à titre de rappel sur prime d'ancienneté ;
AUX MOTIFS QUE la lettre de licenciement est annexée à l'arrêt ; que M. X... fait remarquer à juste titre que son licenciement pour faute grave est nécessairement disciplinaire alors que la plupart des griefs invoqués relèvent d'une insuffisance professionnelle qui ne revêt pas de caractère fautif : retard dans la mise en oeuvre des chantiers, absence de visibilité sur l'évolution et les réalisations du service informatique, absence de documentation et de procédure de gestion, logiciel et système insuffisamment sécurisés, pilotage de l'équipe très déficient par manque d'anticipation, de coordination et de formalisme, absence de documents de management d'équipe et de réunions régulières, carence de pilotage du service et de l'équipe informatique, défaut d'information de la direction des difficultés rencontrées par certains clients ;
ALORS QUE l'employeur, à condition de respecter les règles de procédure applicables à chaque cause de licenciement, peut invoquer dans la lettre de licenciement des motifs différents de rupture inhérents à la personne du salarié, dès lors qu'ils procèdent de faits distincts ; qu'en refusant de se prononcer sur différents motifs de la lettre de licenciement qui étaient susceptibles de caractériser une insuffisance professionnelle, après avoir décidé que le licenciement d'un salarié pour faute grave interdisait à l'employeur d'invoquer dans la lettre de licenciement d'autres faits qui ne présentent pas de caractère fautif, la cour d'appel a violé les articles 1235-1 et L. 1232-6 du code du travail ;
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Le pourvoi fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR condamné la SAS HELPEVIA à payer à M. X... des dommages-intérêts d'un montant de 50.000 € pour rupture abusive du contrat de travail, une indemnité de préavis de 18.495 €, une indemnité conventionnelle de licenciement de 16.440 €, un rappel de salaire sur mise à pied d'un montant de 2.854,24 € outre la somme de 285,42 € à titre de congés sur mise à pied et celle de 228,34 € à titre de rappel sur prime d'ancienneté ;
AUX MOTIFS QUE le seul fait présentant un caractère fautif est d'avoir « utilisé votre fonction » pour « récupérer dans la boîte de votre PDG » (sic) le bilan personnel de l'évolution de votre salaire et… l'ensemble des grilles de proposition des augmentations des salaires de 2005, 2006, 2007 et 2008 et que vous avez transmis à votre avocat (pour une action à notre encontre !) » ; que cependant, les circonstances de l'ouverture de la messagerie du salarié, le 30 avril 2009, ne sont pas précisées alors en outre qu'il résulte du compte-rendu de l'entretien préalable au licenciement de M. X... rédigé par Mme Aurélie Y... qui l'avait assisté : « Xavier dénonce le piratage de sa boîte mail sans sa présence. Aurélie Y... stipule que dans le règlement intérieur il est mentionné que les boîtes mail des salariés pourront être consultées par la direction en présence du salarié. Marina informe que l'ouverture de la messagerie de Xavier s'est faite en présence d'un huissier ainsi que de l'équipe informatique. Xavier nie avoir vidé sa boîte mail, et ne comprend pas pourquoi celle-ci est complètement vidée. Peut-être qu'Eric pourrait demander à JALIX SERVICES la raison ? Eric annonce qu'ils ont remonté une sauvegarde avec les données aux 29/04 et que de cette sauvegarde il a pu récupérer les mails dont il se sert pour les accusations » ; que par ailleurs, M. Z..., membre du service informatique atteste : « Le jeudi 30 avril 2009, à mon arrivée, notre service a été convoqué par M. A... sans la présence de M. X... qui était absent… M. A... nous a informés que la société JALIX SERVICES prenait les commandes du service. Ces derniers ont changé le mot de passe de M. X... et du compte administrateur en milieu de matinée… Après réinitialisation du mot de passe de M. X... PAR M. B..., celui-ci a ouvert le compte de messagerie de M. X.... A l'ouverture celui-ci a constaté que la boîte mail était vide. M. A... a fait intervenir un huissier de justice, qui est intervenu l'après-midi même, pour constater que la boîte aux lettres était vide. Après le départ de l'huissier de justice, JALIX SERVICES a fait remonter une sauvegarde de la boîte aux lettres datant du 29 avril 2009 et l'a remise en main propre à M. A.... La consultation du contenu de la boîte aux lettres ne s'est dont pas faite en présence de moi-même ou de mon service » ; que M. X... était absent au moment où M. A... a pris connaissance des messages contenus dans sa boîte mail de sorte que la société s'est donc constituée un moyen de preuve illicite qui ne peut étayer le dernier grief ; que le licenciement est donc sans cause réelle et sérieuse. Le Conseil de prud'hommes a fait une juste évaluation du préjudice du salarié compte tenu notamment des circonstances de la rupture. Le jugement sera donc confirmé également sur les autres conséquences financières du licenciement ;
1. ALORS QUE les fichiers et messages créés par un salarié grâce à l'outil informatique sont présumés avoir un caractère professionnel de sorte que l'employeur peut y avoir accès hors sa présence ; qu'en décidant que le règlement intérieur s'oppose à la consultation des fichiers et messages contenus sur l'ordinateur de M. X..., en son absence, quand la présence de l'intéressé n'est requise que pour la consultation des données personnels, la Cour d'appel qui n'a pas recherché, ainsi qu'elle y était invitée, si les fichiers et messages ouverts sur le matériel mis à sa disposition par l'employeur avaient été identifiées comme personnels par le salarié, a privé sa décision de base légale au regard des articles 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, 9 du code civil, 9 du code de procédure civile et L. 1121-1 du code du travail ;
2. ALORS QUE l'employeur est en droit de consulter librement sur l'ordinateur qu'il avait mis à la disposition de l'entreprise, les données confidentielles de l'entreprise que ce dernier s'est indûment appropriées en les copiant sur son ordinateur au mépris de son obligation de loyauté ; que la SAS HELPEVIA rappelait que M. X... avait profité de ses fonctions de responsable du service informatique pour récupérer sur l'ordinateur du Président, des données confidentielles relatives d'une part à l'évolution de son salaire, et, d'autre part, à la grille de proposition des augmentations des salaires des années 2005, 2006, 2007 et 2008 ; qu'en retenant que le règlement intérieur interdisait à l'employeur de consulter ces documents qu'il avait copiés sur son ordinateur avant de les effacer, en l'absence de l'intéressé, quand ils présentaient tant par leur origine que par leur nature un caractère professionnel qui en autorisait la consultation par l'employeur, en l'absence de l'employeur, d'autant qu'ils étaient sa propriété, la cour d'appel a violé les articles 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, 9 du code civil, 9 du code de procédure civile et L. 1121-1 du code du travail.