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21/06/2012 | FRANCE | N°11-16050

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 21 juin 2012, 11-16050


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa quatrième branche :
Vu l'article 119 du code civil ;
Attendu que, selon ce texte, les droits acquis sans fraude, sur le fondement de la présomption d'absence, ne sont pas remis en cause lorsque le décès de l'absent vient à être établi ou judiciairement déclaré, quelle que soit la date retenue pour le décès ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le juge des tutelles a, par jugement du 15 novembre 1999, constaté la présomption d'absence de Roland X... et dési

gné pour le représenter dans l'exercice de ses droits et l'administration de ses...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa quatrième branche :
Vu l'article 119 du code civil ;
Attendu que, selon ce texte, les droits acquis sans fraude, sur le fondement de la présomption d'absence, ne sont pas remis en cause lorsque le décès de l'absent vient à être établi ou judiciairement déclaré, quelle que soit la date retenue pour le décès ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le juge des tutelles a, par jugement du 15 novembre 1999, constaté la présomption d'absence de Roland X... et désigné pour le représenter dans l'exercice de ses droits et l'administration de ses biens, sa fille Isabelle X... ; qu'un jugement déclaratif a constaté le décès à la date du 11 juin 1999 ; que la Caisse nationale de retraite du bâtiment, des travaux publics et des industries graphiques et la caisse de retraite du bâtiment et des travaux publics ont saisi un tribunal de grande instance d'une demande de remboursement des pensions de retraite versées depuis le 1er juillet 1999 ;
Attendu que pour accueillir cette demande, l'arrêt énonce que l'article 119 du code civil ne vise qu'à assurer la sécurité juridique des tiers de bonne foi auxquels ne peuvent être assimilés les enfants du présumé disparu à l'origine de la procédure de présomption d'absence et de déclaration de décès, et qui en toute connaissance de cause, ont continué de percevoir en ses lieu et place des fonds dont ils savaient pertinemment qu'il ne pouvait en avoir l'usage ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si les enfants du disparu n'avaient pas perçu de bonne foi les arrérages des pensions de retraite de leur père pendant la période antérieure au jugement déclaratif de décès, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 3 janvier 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Reims ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;
Condamne la Caisse nationale de retraite du bâtiment, des travaux publics et des industries graphiques ainsi que la caisse de retraite du bâtiment et des travaux publics aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne ensemble les deux caisses à payer la somme globale de 2 500 euros à Mmes Isabelle et Régine X... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un juin deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Boullez, avocat aux Conseils, pour Mmes Isabelle et Régine X....
Le pourvoi fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR condamné in solidum Mmes Isabelle et Régine X... à payer à la Caisse Nationale de Retraite du Bâtiment, des Travaux Publics et des Industries Graphiques, la somme de 93.880,74 € et à la Caisse de Retraite du Bâtiment et des Travaux Publics, la somme de 37.603,55 €, outre les intérêts légaux qui seront eux-mêmes capitalisés dans les conditions de l'article 1154 du Code civil ;
AUX MOTIFS QUE par jugement rendu le 19 septembre 2002, confirmé par la Cour d'appel de Metz le 20 avril 2004, le Tribunal de Grande Instance de Metz a déclaré M. Roland X... décédé le 11 juin 1999 à PORT MAHON (MINORQUE ESPAGNE) ;
Qu'il est indifférent à cet égard que le jugement déclaratif de décès n'ait été transcrit au service central de l'état civil à NANTES que le 19 avril 2006 ;
Attendu en effet que contrairement à ce qu'a pu soutenir Mme Isabelle X... dans ses courriers adressés à la PRO BTP les 7 août 2006, 18 juin et 9 juillet 2007 et ainsi que l'a rappelé la Cour d'appel de Metz, au demeurant saisie par Isabelle, Régine et Didier X..., c'est bien à la date de la disparition que doit être fixée la date du décès de l'intéressé, et non pas à la date de la décision de justice, quand bien même la fixation de la date du décès aurait pour conséquence d'entraîner le remboursement par les ayants droits des pensions ou avantages perçus du chef de M. X... ;
Attendu en effet que suite à cet arrêt, Mme Isabelle X... a considéré dans un premier temps que seules pouvaient lui être réclamées les sommes versées par les caisses appelantes postérieurement à la transcription du jugement déclaratif ;
Attendu surtout que pour refuser à présent tout paiement, les consorts X... se prévalent des dispositions de l'article 119 du Code civil ainsi libellé : « les droits acquis sans fraude sur le fondement de la présomption d'absence ne sont pas remis en cause lorsque le décès de l'absent vient à être établi ou judiciairement déclaré, quelle que soit la date retenue pour le décès » ;
Mais attendu que ce texte ne vise qu'à assurer la sécurité juridique des tiers de bonne foi, auxquels ne peuvent être assimilés les enfants du présumé disparu, à l'origine de la procédure de présomption d'absence et de déclaration de décès, et qui en toute connaissance de cause, ont continué de percevoir en ses lieu et place des fonds dont ils savaient pertinemment qu'il ne pouvait avoir usage ;
Attendu ensuite que Madame Régine X... entend à titre subsidiaire se prévaloir de l'article L. 355-3 du Code de la sécurité sociale qui édicte que toute demande de remboursement de trop-perçu en matière de prestation de vieillesse et d'invalidité est prescrite par un délai de deux ans à compter du paiement desdites prestations dans les mains du bénéficiaire ;
Qu'il est toutefois constant que ces dispositions ne concernent que le régime général de sécurité sociale et ne peuvent être étendues, à défaut de dispositions le prévoyant, aux régimes complémentaires de retraite et de prévoyance ;
Attendu que la CNRBTPIG et la Caisse BTP RETRAITE sont en l'espèce deux institutions de retraite complémentaire paritaires et à but non lucratif, et ne sont pas soumises, par suite, à cette prescription abrégée ;
Attendu qu'il s'ensuit qu'à bon droit les caisses susnommées sollicitent le remboursement par Mesdames Isabelle et Régine X... des sommes versées à feu leur père à compter du mois de juillet 1999 soit selon décomptes non contestés figurant en pièces 11 et 12, 93.880,74 € pour la CNRBTPIG et 37.603,55 € pour la Caisse BTP RETRAITE ;
Que ces sommes produiront intérêts au taux légal à compter du 2 mai 2007, date de mise en demeure, rien ne s'opposant par ailleurs à ce qu'il soit fait application de l'article 1154 du Code civil permettant la capitalisation desdits intérêts par année entière ;
Que le jugement déféré doit être infirmé en toutes ses dispositions de fond ;
1. ALORS QU'aux termes de l'article 119 du Code civil, « les droits acquis sans fraude, sur le fondement de la présomption d'absence, ne sont pas remis en cause lorsque le décès de l'absent vient à être établi ou judiciairement déclaré, quelle que soit la date retenue pour le décès » ; que dans le silence du législateur, les dispositions précitées s'appliquent autant aux droits acquis par les tiers de bonne foi qu'à ceux acquis aux successeurs du présumé absent du chef de leur auteur dans l'ignorance de son décès ;qu'en décidant, à l'inverse, que l'article 119 précité n'a été adopté qu'au profit des tiers de bonne foi afin d'assurer leur sécurité juridique auxquels ne peuvent être assimilés les enfants du présumé absent, bien qu'aucune disposition de texte ne vise les droits acquis à des tiers, la Cour d'appel a violé la disposition précitée ;
2. ALORS QU'il résulte du jugement déclaratif de décès du 19 septembre 2002 et de l'arrêt confirmatif du 20 avril 2004 que Mmes Isabelle et Régine X... se sont opposées à la constatation du décès de M. Roland X... dont le corps n'a jamais été retrouvé ; qu'en affirmant que Mmes Isabelle et Régine X... seraient à l'origine du jugement déclarant leur père décédé, la Cour d'appel a dénaturé les termes du jugement du 19 septembre 2002 et l'arrêt confirmatif du 20 avril 2004 ; qu'ainsi, elle a violé l'article 4 du Code de procédure civile ;
3. ALORS QUE celui qui a disparu de son domicile et déclaré présumé absent doit être tenu pour vivant, en sorte que, jusqu'au jugement déclaratif d'absence, la personne désignée pour le représenter doit continuer à percevoir les allocations de retraite, celle-ci étant la contrepartie des cotisations versées au cours de son activité professionnelle ; qu'en affirmant péremptoirement que Mmes Isabelle et Régine X... ont continué à percevoir en ses lieu et place des fonds dont elles savaient que leur père ne pouvait en avoir l'usage, quand les allocations de retraite étaient dues sur le fondement de la présomption d'absence, la Cour d'appel a violé l'article 112 du Code civil ;
4. ALORS QUE les droits acquis sans fraude, sur le fondement de la présomption d'absence, ne sont pas remis en cause lorsque le décès de l'absent vient à être établi ou judiciairement déclaré, quelle que soit la date retenue pour le décès ; qu'en énonçant, dans un second temps, que Mmes Isabelle et Régine X... ne pourraient pas se prévaloir des dispositions de l'article 119 du Code civil dès lors qu'elles sont à l'origine de la procédure de présomption d'absence et de déclaration de décès et qu'elles avaient, en toute connaissance de cause, continué à percevoir en ses lieu et place des fonds dont elles savaient pertinemment qu'il ne pouvait avoir l'usage, la Cour d'appel s'est déterminée par des motifs impropres à caractériser la fraude de Mmes Isabelle et Régine X... qui ignoraient si leur père était mort, disparu ou bien encore vivant jusqu'à ce que son décès soit constaté par le Tribunal de Grande Instance de Metz, à la requête de sa compagne ; qu'ainsi, elle a privé sa décision de base légale au regard de l'article 119 du Code civil, ensemble le principe selon lequel la fraude corrompt tout.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 11-16050
Date de la décision : 21/06/2012
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Analyses

SECURITE SOCIALE, ASSURANCES SOCIALES - Vieillesse - Pension - Paiement - Personne présumée absente - Droits acquis - Bénéficiaires - Conditions - Détermination - Portée

SECURITE SOCIALE, ASSURANCES SOCIALES - Vieillesse - Pension - Arrérages - Arrérages reçus de bonne foi - Bénéficiaires - Enfants du disparu - Portée ABSENCE - Présomption d'absence - Personne présumée absente - Droits acquis - Bénéficiaires - Conditions - Détermination - Portée

Selon l'article 119 du code civil, les droits acquis sans fraude, sur le fondement de la présomption d'absence, ne sont pas remis en cause lorsque le décès de l'absent vient à être établi ou judiciairement déclaré, quelle que soit la date retenue pour le décès. Prive sa décision de base légale au regard de ce texte, la cour d'appel qui ne recherche pas si les enfants du disparu n'avaient pas reçu de bonne foi les arrérages de pension de retraite de leur père pendant la période antérieure au jugement déclaratif de décès


Références :

article 119 du code civil

Décision attaquée : Cour d'appel de Reims, 03 janvier 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 21 jui. 2012, pourvoi n°11-16050, Bull. civ. 2012, II, n° 114
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2012, II, n° 114

Composition du Tribunal
Président : M. Loriferne
Rapporteur ?: Mme Olivier
Avocat(s) : SCP Boullez, SCP Defrenois et Levis

Origine de la décision
Date de l'import : 05/09/2013
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.16050
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