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13/06/2012 | FRANCE | N°10-21196

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 13 juin 2012, 10-21196


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article R. 1452-6 du code du travail ;
Attendu que la règle de l'unicité de l'instance résultant de ce texte n'est applicable que lorsque l'instance précédente s'est achevée par un jugement sur le fond ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mmes X..., Y...et Z..., MM. A...et B...(les salariés), employés par l'association Chelles loisirs enfance, ont été licenciés pour motif économique après autorisation de l'inspecteur du travail ; que le tribunal administratif de Melun ay

ant annulé la décision de l'inspecteur du travail, les cinq salariés ont de...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article R. 1452-6 du code du travail ;
Attendu que la règle de l'unicité de l'instance résultant de ce texte n'est applicable que lorsque l'instance précédente s'est achevée par un jugement sur le fond ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mmes X..., Y...et Z..., MM. A...et B...(les salariés), employés par l'association Chelles loisirs enfance, ont été licenciés pour motif économique après autorisation de l'inspecteur du travail ; que le tribunal administratif de Melun ayant annulé la décision de l'inspecteur du travail, les cinq salariés ont demandé leur réintégration ; que le mandataire-liquidateur les a informés de l'impossibilité de les réintégrer du fait de la liquidation judiciaire de l'association intervenue le 20 octobre 1999 ; que les salariés ont saisi la juridiction prud'homale aux fins, notamment de fixation de leurs créances au passif de la liquidation judiciaire de l'association ; que par arrêt du 8 novembre 2007, la cour d'appel de Paris a déclaré les demandes irrecevables en raison de la péremption d'instance ; que les salariés ont à nouveau saisi la juridiction prud'homale par requête du 21 novembre 2007 ;
Attendu que pour déclarer irrecevables les demandes formées par les salariés, l'arrêt énonce que non seulement elles dérivent du même contrat de travail que celles ayant fait l'objet de la décision constatant la péremption, mais encore que ce sont les mêmes et qu'elles se heurtent donc à la règle de l'unicité de l'instance ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'aucune décision sur le fond n'avait été rendue, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Vu l'article 627 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions l'arrêt rendu le 25 mai 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
Dit n'y avoir lieu à renvoi du chef de la recevabilité des demandes ;
Dit que les demandes de Mmes X..., Y...et Z..., MM. A...et B...sont recevables ;
Renvoie la cause et les parties devant la cour d'appel de Paris, autrement composée, pour qu'il soit statué au fond ;
Condamne la commune de Chelles et M. C..., ès qualités, aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, les condamne à payer aux salariés la somme globale de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize juin deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils, pour MM. B...et A... et Mmes Z..., X...et Y...

Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR déclaré irrecevables les demandes formées par les salariés, et de les AVOIR condamnés au paiement des dépens de première instance et d'appel, ainsi qu'à payer « in solidum » à la Commune de CHELLES une somme de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QUE l'article R. 1452-6 du code du travail prescrit que « toutes les demandes dérivant du contrat de travail entre les mêmes parties font, qu'elles émanent du demandeur ou du défendeur, l'objet d'une seule instance. Cette règle n'est pas applicable lorsque le fondement des prétentions est né ou révélé postérieurement à la saisine du Conseil de prud'hommes. », c'est le principe de l'unicité de l'instance ; que pour s'opposer à l'application de ce principe, les intimés soutiennent sa contrariété avec l'article 6 § 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés qui consacre le droit d'accès au juge ; qu'ils ajoutent qu'en l'espèce le droit commun de la procédure civile est inapplicable, au motif que la péremption d'instance décidée en première instance éteint l'instance et non l'action et qu'aucune décision concernant les demandes en cause n'a été rendue au fond ; que l'appelante s'oppose à ces prétentions et conclut que le principe de l'unicité de l'instance doit s'appliquer en l'espèce, où sont en cause les mêmes parties et le même contrat de travail, que dans l'instance touchée par la péremption ; qu'elle ajoute qu'en tout état de cause, il ne peut être considéré que les intimés n'ont pas eu accès au juge alors que ladite décision de péremption est fondée sur la carence des parties elles-mêmes ; qu'il est constant qu'en l'espèce les demandes présentées non seulement dérivent du même contrat de travail que celles ayant fait l'objet de la décision de péremption précitée mais encore sont les mêmes ; que cette décision de péremption a été rendue le 19 janvier 2006, à la suite d'une décision de radiation datée du 24 novembre 2003, au motif d'un défaut de communication de pièces de la part des salariés dans le délai fixé au 6 décembre 2002 ; que les salariés qui avaient saisi le Conseil de prud'hommes en septembre 2002 ont donc eu un accès effectif au juge pour statuer sur leur cause ; qu'en ne répondant pas aux injonctions du juge dans le délai raisonnable que celui-ci leur avait imparti, ils se sont euxmêmes privés d'une décision sur le fond ; que c'est donc en raison de leur carence que les règles prévisibles de la péremption d'instance et du principe du contradictoire se sont appliquées, mettant un terme définitivement à leur action près de 4 ans après que celle-ci a été introduite ; que dans ces conditions les salariés sont mal venus de se prévaloir de l'article 6 § 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés qui n'a pas pour vocation de suppléer à la carence des parties dans la conduite qu'elles font de leur procès, au regard des règles qui leur sont applicables ; qu'il se déduit de ce qui précède que la règle de l'unicité de l'instance rend irrecevables les demandes des salariés sans que puisse être opposée une prétendue violation de l'article 6 § 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés ; que le jugement déféré est, en conséquence, infirmé ;
ALORS QUE l'article R. 1452-6 du code du travail, imposant le regroupement en une seule instance de toutes les demandes dérivant du contrat de travail, n'est pas lorsque l'instance précédente s'est achevée par un jugement sur le fond ; qu'en l'espèce, lors de l'instance initiale, les juges ont constaté la péremption de l'instance sans qu'aucune décision concernant les demandes en cause n'ait été rendue au fond ; qu'en considérant néanmoins que les demandes formées par les salariés étaient irrecevables en application du principe de l'unicité de l'instance, la Cour d'appel a violé l'article R. 1452-6 du code du travail ;
ALORS aussi QUE l'article 6 § 1 de la Convention Européenne de sauvegarde des Droits de l'Homme et des libertés fondamentales prévoit que « chacun a droit à ce que sa cause soit entendue » ; que la Cour Européenne des Droits de l'Homme estime que le droit d'accès à un tribunal ainsi garanti comprend non seulement le droit d'engager une action, mais aussi « le droit à une solution juridictionnelle du litige » ; que dès lors, en considérant que les salariés demandeurs ne pouvaient se prévaloir d'une violation de l'article 6 § 1 précité du seul fait qu'ils « avaient eu un accès effectif au juge pour statuer sur leur cause », sans constater que lesdits salariés avaient obtenu une solution définitive à leur litige, la Cour d'appel a violé l'article 6 § 1 de la Convention Européenne de sauvegarde des Droits de l'Homme et des libertés fondamentales.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-21196
Date de la décision : 13/06/2012
Sens de l'arrêt : Cassation partiellement sans renvoi
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 25 mai 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 13 jui. 2012, pourvoi n°10-21196


Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats (président)
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:10.21196
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