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12/06/2012 | FRANCE | N°11-85714

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 12 juin 2012, 11-85714


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

- La société La Parisienne, partie intervenante,

contre l'arrêt de cour d'appel de PARIS, chambre 2-4, en date du 5 avril 2011, qui, dans la procédure suivie contre M. Patrick X..., du chef de blessures involontaires, a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu les mémoires en demande, en défense et les observations complémentaires produits ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 1382 du code civil, 591 et 593 du c

ode de procédure pénale ;

"en ce que la cour d'appel a condamné M. X... à payer à M. Y....

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

- La société La Parisienne, partie intervenante,

contre l'arrêt de cour d'appel de PARIS, chambre 2-4, en date du 5 avril 2011, qui, dans la procédure suivie contre M. Patrick X..., du chef de blessures involontaires, a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu les mémoires en demande, en défense et les observations complémentaires produits ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 1382 du code civil, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

"en ce que la cour d'appel a condamné M. X... à payer à M. Y... la somme de 1 915 915,48 euros, dont 285 447,94 euros en réparation de ses pertes de gains professionnels futurs ;

"aux motifs que M. Y... a fait l'objet d'une décision de réforme pour inaptitude définitive prise le 19 janvier 2010 par la Caisse de coordination des assurances sociales de la RATP avec effet au 22 mars 2010 ; que la société La Parisienne est mal fondée à soutenir que M. Y... n'est pas totalement inapte à tout emploi alors même qu'il a été reconnu définitivement inapte à tout emploi au sens de la RATP pas même à des fonctions administratives ; que c'est l'employeur qui a prononcé cette réforme sans bénéfice de l'assurance invalidité au motif que son salarié est incapable de rester à son service conformément aux dispositions du décret du 30 juin 2008 ce qui signifie qu'aucun reclassement n'est possible eu égard à ses acquis de compétence ; que dès lors que l'incapacité professionnelle est totale, les pertes de gains futurs doivent être calculées selon trois périodes :
- entre la date de consolidation le 1er janvier 2009 et l'effectivité de la réforme de M. Y... le 22 mars 2010, soit 14 mois et 21 jours,
- entre la date de la réforme et l'âge de la retraite du personnel roulant de la RATP à 56 ans, soit 2033,
- après 2033, à titre viager, soit avec un euro de rente pour un homme de 56 ans de 16,325 ;
- que les documents produits par la RATP, la Caisse des retraites de la RATP et par M. Y... ne constituent pas comme le soutient à tort la société d'assurances appelante, d'hypothétiques relevés de carrière et projection de salaires et de retraites dès lors que les salariés de la RATP ont un statut obéissant à des règles de progression de carrières précises et prévisibles permettant en outre de calculer l'évolution des retraites correspondantes ; c'est donc sur la base de ces documents que seront calculées les pertes de gains futurs de M. Y... dont seront déduites les sommes déjà perçues et qu'il percevra effectivement, c'est-à-dire en net et non en brut, au titre d'une part de la rente accident du travail et d'autre part, de la pension de retraite ; arrérages des pertes de gains entre le 1er janvier 2009 et le 21 mars 2010 : la somme de 2 027,42 euros demandée par la victime sera retenue dès lors qu'elle correspond au niveau médian entre les deux échelons de carrière ;
que la perte s'élève donc à la somme de 2 027,42 euros x 14 mois + 2/3 mois = 29.735,49 euros,
perte de gains entre le 22 mars 2010 et septembre 2033 : 496 694 euros selon le décompte de la RATP sous le numéro 75 des pièces jointes de M. Y... ;
pertes de pensions de retraite viagère :
la perte nette de pension mensuelle est de 2 136 euros en 2033 ;
la perte capitalisée est donc de 2 136 euros x 12 mois x 16,325 = 418 442,40 euros ;
que le montant total des pertes de gains futurs est donc de :
29 735,49 + 496 694 + 418 442,40 = 944 871,89 euros
dont à déduire les arrérages échus depuis le 2 janvier 2009 et à échoir de la rente accident du travail servie par la RATP, soit 510 113,26 euros et les arrérages échus et à échoir de la pension versée par la Caisse de retraite du personnel de la RATP depuis le 21 mars 2010, soit :
- arrérages échus au 31 mars 2011 : (504,16 euros x 12 mois) + 149,91 euros = 6 199,83 euros
- arrérages à échoir (504,16 euros x 9 mois) + (504,16 euros x 12 mois x 22,905) = 143 110,86 euros
le montant total des arrérages échus et à échoir des prestations servies à M. Y... est donc de 510 113,26 + 6 199,83 + 143 110,86 = 659 423,95 euros Il sera donc alloué à M. Y... en réparation des pertes de gains futurs la somme totale de 944 871,89 euros – 659 423,95 euros = 285 447,94 euros ;

"1°) alors qu'en jugeant qu'il convenait, pour évaluer la perte de gains professionnels futurs subie par M. Y... entre le 1er janvier 2009 et le 22 mars 2010, de retenir comme base la somme mensuelle de 2 027,42 euros « dès lors qu'elle correspond au niveau médian entre les deux échelons de carrière », quand il résultait du relevé établi par la RATP sur lequel la cour d'appel s'est fondée (pièce n° 75 produite par la victime) et des propres conclusions d'appel de la victime, que jusqu'en 2010 le salaire net de la victime était inférieur à 2 000 euros, la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction de motifs et a violé les textes visés au moyen ;

"2°) alors qu'en fixant le préjudice subi par la victime entre le 1er janvier 2009 et le 22 mars 2010 à la somme de 29 735,49 euros (2 027,42 euros x 14 mois + 2/3 de mois), quand pour cette période, la victime ne demandait l'allocation que d'une somme totale de 29 567,11 euros, la cour d'appel a dénaturé les termes du litige et a violé les textes visés au moyen ;

"3°) alors que, la cour d'appel a alloué à la victime, d'une part, la somme de 29 735,49 euros au titre de la perte de gains subie entre le 1er janvier 2009 et le 22 mars 2010, soit 14 mois et 21 jours et, d'autre part, pour la période antérieure à la date de sa retraite, en septembre 2033, la somme de « 496 694 euros selon le décompte de la RATP » qui déterminait la perte de revenus subie par M. Y... entre le 1er février 2010 et le mois de septembre 2033 ; que la cour d'appel a, ainsi, réparé deux fois le préjudice subi par la victime au titre de sa perte de gains professionnels futurs entre le 1er février 2010 et le 22 mars 2010 et a violé les textes visés au moyen ;

"4°) alors que, le tableau établi par la RATP pour déterminer la perte de gains professionnels futurs subie par la victime, produit par M. Y... (pièce n° 75), sur lequel s'est fondée la cour d'appel, chiffrait sa perte de gain à la somme de 496.694 euros pour la période entre le 1er février 2010 et septembre 2033 ; qu'en jugeant que « les pertes de gains entre le 22 mars 2010 et septembre 2003 s'élèvent à 496 694 euros selon le décompte de la RATP sous le numéro 75 des pièces jointes par M. Y... », la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction de motifs et a violé les articles visés au moyen" ;

Attendu qu'en évaluant, comme elle l'a fait, la réparation du préjudice résultant pour M. Y... de l'atteinte à son intégrité physique, la cour d'appel n'a fait qu'user de son pourvoir d'apprécier souverainement, dans les limites des conclusions des parties, l'indemnité propre à réparer le dommage né de l'infraction ;

D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 1382 du code civil, L. 376-1 du code de la sécurité sociale et 591 et 593 du code de procédure pénale ;

"en ce que la cour d'appel a condamné M. X... à payer à la RATP la somme totale de 1 204 955,24 euros en deniers ou quittances au titre des différentes prestations versées et à verser à M. Y... ;

"aux motifs qu'il sera fait droit aux demandes de la RATP ; que M. X... sera condamné à lui rembourser en deniers ou quittances, les sommes de :
- 44 745,06 euros au titre des salaires maintenus durant l'interruption temporaire de travail,
- 123 134,99 euros au titre des frais médicaux et pharmaceutiques déjà exposés,
- 300 893,56 euros au titre des prestations futures,
- 226 068,56 euros au titre de la majoration tierce personne,
- 510 113,26 euros au titre de la rente accident du travail,
soit au total la somme de 1 204 955,24 euros au titre des prestations versées et futures ;

"alors que, les organismes sociaux ne sont admis à poursuivre, contre l'auteur de l'accident, que le remboursement des sommes qu'elles ont effectivement déboursées ; qu'en imposant, en l'espèce, à M. X... et à son assureur, sans leur accord, le paiement immédiat, au profit de la RATP, de sommes correspondant pour partie à un remboursement anticipé de prestations non encore versées par cet organisme, la cour d'appel a violé les textes visés au moyen" ;

Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 1382 du code civil, L. 376-1 du code de la sécurité sociale, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

"en ce que la cour d'appel a condamné M. X... à payer à la Caisse de retraite du personnel du groupe RATP la somme de 112 613,32 euros, au titre des pensions servies et à servir à M. Y..., avec intérêts au taux légal à compter du jour de la demande ;

"aux motifs qu'il sera fait droit à la demande formée par la Caisse ; que M. X... sera condamné à lui rembourser la somme de 112 613,32 euros au titre des pensions servies et à servir à M. Y... ;

"alors que les tiers payeurs ne sont admis à poursuivre, contre l'auteur de l'accident, que le remboursement des sommes qu'elles ont effectivement déboursées ; qu'en imposant, en l'espèce, à M. X... et à son assureur, sans leur accord, le paiement immédiat, au profit de la Caisse de retraite du personnel du groupe RATP, de sommes correspondant pour partie à un remboursement anticipé de prestations non encore versées par cet organisme, la cour d'appel a violé les textes visés au moyen" ;

Les moyens étant réunis ;

Vu les articles L. 376-1 du code de la sécurité sociale et 30 de la loi du 5 juillet 1985 ;

Attendu qu'il résulte de ces textes que, sauf accord du tiers responsable sur le paiement immédiat d'un capital représentatif des frais futurs ou d'un capital constitutif d'une rente servie à la victime, les tiers payeurs ne peuvent prétendre au remboursement de ces frais et arrérages qu'au fur et à mesure de leur engagement ;

Attendu que, statuant sur l'indemnisation de M. Y..., blessé lors d'un accident de la circulation dont M. X... avait été déclaré responsable, la cour d'appel a condamné le prévenu à payer à la RATP, qui intervenait en qualité d'organisme de sécurité sociale, et à la Caisse de retraite du personnel de la RATP, outre les arrérages échus des rentes allouées par ces dernières , les capitaux constitutifs des arrérages à échoir et représentatifs de frais futurs ;

Mais attendu qu'en prononçant ainsi, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés et le principe ci-dessus rappelé ;

D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;

Par ces motifs :

CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Paris, en date du 5 avril 2011, en ses seules dispositions relatives au recours subrogatoire de la RATP et de la Caisse de retraite du personnel de la RATP sur les postes indemnisant les frais futurs et les pertes de gains professionnels futurs, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Paris, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

DIT n'y avoir lieu à application des demandes présentées au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Paris, sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, M. Pers conseiller rapporteur, M. Arnould conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Téplier ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 11-85714
Date de la décision : 12/06/2012
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 05 avril 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 12 jui. 2012, pourvoi n°11-85714


Composition du Tribunal
Président : M. Louvel (président)
Avocat(s) : Me Blondel, SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Roger et Sevaux

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.85714
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