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05/06/2012 | FRANCE | N°11-12114

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 05 juin 2012, 11-12114


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Angers, 14 décembre 2010), que M. X..., engagé à compter du 16 juin 2004 par la société Saga Angers en qualité de vendeur de véhicules, a été licencié pour faute grave le 20 février 2008 ; qu'il a contesté son licenciement ;
Sur le premier moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande de sursis à statuer, alors, selon le moyen, que justifiant avoir porté plainte en se constituant partie civile devant le juge d'instruction, plainte

que celui-ci était tenu de communiquer au procureur de la République, afin q...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Angers, 14 décembre 2010), que M. X..., engagé à compter du 16 juin 2004 par la société Saga Angers en qualité de vendeur de véhicules, a été licencié pour faute grave le 20 février 2008 ; qu'il a contesté son licenciement ;
Sur le premier moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande de sursis à statuer, alors, selon le moyen, que justifiant avoir porté plainte en se constituant partie civile devant le juge d'instruction, plainte que celui-ci était tenu de communiquer au procureur de la République, afin que ce dernier prenne ses réquisitions, une instance pénale était en cours ; qu'en se prononçant de la sorte, la cour d'appel, à laquelle il appartenait, dès lors, l'action publique ayant ainsi été mise en mouvement, de se prononcer, en opportunité, sur la demande de sursis à statuer, a violé les articles 4, 85 et 86 du code de procédure pénale ;
Mais attendu que le sursis à statuer ne peut être ordonné en application de l'article 4 du code de procédure pénale que si l'action publique est en cours et qu'il appartient à la partie qui sollicite une telle mesure, dans le cas du dépôt d'une plainte avec constitution de partie civile, de justifier de la consignation fixée ou de sa dispense en application de l'article 88 du code précité ; que la cour d'appel a constaté que l'employeur ne produisait que la lettre adressée au juge d'instruction ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de déclarer le licenciement sans cause réelle et sérieuse et de le condamner, en conséquence, au paiement de diverses sommes, alors, selon le moyen, que le salarié est tenu vis-à-vis de son employeur d'une obligation de loyauté ; que manque à ce devoir et commet une faute de nature à justifier son licenciement le salarié qui se livre à une activité concurrente de celle de l'employeur pour son propre compte ; que tel est le cas du vendeur d'une concession automobile qui oriente les candidats à l'acquisition d'un véhicule non vers l'établissement financier avec lequel son employeur a conclu un contrat dont il tire une partie significative de ses revenus mais vers un autre établissement financier, en contrepartie d'une rémunération occulte ; qu'en se prononçant de la sorte, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, au regard de l'article 1134 du code civil, ensemble les articles L. 1232-1, L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail, qu'elle a ainsi violés ;
Mais attendu qu'ayant relevé que l'employeur reconnaissait que de telles pratiques étaient courantes et généralement admises dans l'entreprise à une certaine époque, et qu'il ne justifiait pas de consignes précises mettant fin à celles-ci de façon formelle et impérative avant les faits reprochés au salarié, la cour d'appel a pu en déduire qu'il n'était pas démontré qu'il avait manqué à son obligation de loyauté ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Saga Angers aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Saga Angers et la condamne à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du cinq juin deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour la société Saga Angers.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit n'y avoir lieu de surseoir à statuer sur l'issue de la procédure pénale, déclaré que le licenciement de Monsieur Christophe X... était sans cause réelle et sérieuse et condamné la SAS SAGA à lui verser les sommes de 21. 000 euros à titre de dommages et intérêts, 10. 500 euros au titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 1. 050 euros de congés payés y afférents, 1. 735 euros à titre de salaire durant la mise à pied, 2. 800 euros à titre d'indemnité de licenciement, avec intérêt au taux légal à compter du 25 août 2008 pour les créances salariales et à compter du jour du jugement pour les créances indemnitaires, ainsi qu'à rembourser aux organismes concernés les éventuelles indemnités de chômage versées à Monsieur Christophe X... dans la limite de 2 mois ;
AUX MOTIFS, sur la demande de sursis à statuer, QUE, la société SAGA ANGERS expose avoir déposé une plainte avec constitution de partie civile devant le juge d'instruction contre Monsieur Christophe X... pour des faits d'abus de confiance et demande à la cour de surseoir à statuer sur le caractère réel et sérieux des motifs sur lesquels repose le licenciement jusqu'à l'aboutissement de cette procédure pénale ; qu'il n'est pas démontré, par la seule production de la lettre adressée au juge d'instruction, qu'une instance pénale est en cours ; la demande de sursis à statuer doit être rejetée ;
ALORS QUE la société SAGA ANGERS justifiant avoir porté plainte en se constituant partie civile devant le juge d'instruction, plainte que celui-ci était tenu de communiquer au Procureur de la République, afin que ce dernier prenne ses réquisitions, une instance pénale était en cours ; qu'en se prononçant de la sorte, la Cour d'appel, à laquelle il appartenait, dès lors, l'action publique ayant ainsi été mise en mouvement, de se prononcer, en opportunité, sur la demande de sursis à statuer, a violé les articles 4, 85 et 86 du Code de procédure pénale.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré que le licenciement de Monsieur Christophe X... était sans cause réelle et sérieuse et condamné la SAS SAGA ANGERS à lui verser la somme de 21. 000 euros à titre de dommages et intérêts, 10. 500 euros au titre d'indemnité compensatrice de préavis et 1. 050 euros de congés payés y afférents, 1. 735 euros au titre de salaire durant la mise à pied, 2. 800 euros au titre d'indemnité de licenciement, 2. 500 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, avec intérêt au taux légal à compter du 25 août 2008 pour les créances salariales et à compter du jour du jugement pour les créances indemnitaires et d'avoir condamné la société SAGA ANGERS à rembourser aux organismes concernés les éventuelles indemnités de chômage versées à Monsieur Christophe X... dans la limite de 2 mois. Condamné la société SAGA ANGERS à verser à Monsieur Christophe X... la somme de 1300 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE la société SAGA ANGERS reproche à son salarié d'avoir servi ses propres intérêts au détriment de ceux de son employeur, en ne respectant pas les consignes qui lui avaient été donnée de vendre de manière préférentielle, voire exclusive, des financements par la société DAIMLER CHRYSLER FINANCIAL SERVICES ; elle prétend que si avant 2004 des gratifications sous forme de voyages étaient offertes par les organismes financiers aux vendeurs de voitures, depuis cette année là, le financement ayant pris une place prépondérante dans les profits qu'elle tire de son activité, elle a attiré l'attention de ses commerciaux sur la nécessité de vendre du financement DAIMLER CHRYSLER FINANCIAL SERVICES, et l'interdiction de proposer des financements auprès d'autres établissements bancaires. Sur les nombreux tableaux versés aux débats, qui, pour la plupart d'entre eux, ni datés ni renseignés, ne présentent aucun intérêt dans le débat ouvert devant la cour, seuls 3 concernent monsieur Christophe X... ; ils font apparaître qu'au cours du 1er semestre 2007, il a vendu véhicules, réalisant une marge de 2. 687, 47 euros, et passé 10 commandes du 1er septembre au 30 novembre 2006 ; le seul tableau relatif au financement ne porte pas mention du nom de monsieur Christophe X.... Le rapport de synthèse du 2ème semestre 2006, évoque le financement des ventes sous l'angle des indicateurs de satisfaction de la clientèle sans apporter d'éléments opérants dans le litige qui oppose la société SAGA ANGERS à monsieur Christophe X.... La convention DGV que la société SAGA ANGERS invoque pour démontrer qu'elle se trouvait soumise à des obligations précises envers la société DAIMLER CHRYSLER FINANCIAL SERVICES n'est pas versée aux débats, et il n'est pas établi qu'elle a été notifiée aux commerciaux, dont monsieur Christophe X.... La première information dont il est justifié à destination du personnel commercial, relativement aux contraintes qu'impose la société DAIMLER CHRYSLER FINANCIAL SERVICES à la société SAGA ANGERS aux termes de leur partenariat, a été fournie le 8 mars 2007 sous forme de rappel, l'employeur ayant indiqué que le financement est un enjeu important et essentiel pour la concession, et que le manquement de production de financement avec la société DAIMLER CHRYSLER FINANCIAL SERVICES engendre des coûts financiers importants sur le stock ; la deuxième date du 12 avril 2007, à l'occasion d'une réunion au cours de laquelle monsieur Ronan Z...a insisté sur le partenariat de la société SAGA ANGERS avec la société DAIMLER CHRYSLER FINANCIAL SERVICES et l'impérieuse nécessité de ‘ faire du financement'avec elle en relevant que le financement fait partie des fonctions du vendeur et que l'entreprise, a, à cet égard une obligation de résultat ; la troisième en date du 13 septembre 2007 revient à la notion d'obligation de résultat envers le constructeur qui est notre seul et unique partenaire en matière de financement et insiste sur le faible taux de pénétration de ce financeur en prononçant l'interdiction de faire venir une banque extérieure et de recevoir des chèques cadeaux de celle-ci et la menace d'un licenciement en cas d'infraction à la consigne ; ce n'est que par le message électronique du 9 novembre 2007, que monsieur A...confirme à monsieur Christophe X... qu'il ne lui est possible de solliciter un autre financement que dans le cas d'un refus écrit du financement DAIMLER CHRYSLER FINANCIAL SERVICES par le client et lui notifie l'interdiction de percevoir des chèques cadeaux. La société SAGA ANGERS soutient l'allégation de manque de loyauté de monsieur Christophe X... par le fait qu'il a perçu, ce qu'il reconnaît, 1. 900 points, valant 0, 10 euro chacun, en 2005, 600 points en 2006 de la part de LIXXBAIL et 1. 090 euros en 2005, 2. 700 euros en 2006 et 1. 786 euros en 2007 de la banque BNP Paribas Lease Group ; il ne peut s'en déduire que monsieur Christophe X... a perçu quelque somme que ce soit après le 9 novembre 2007, date de la première injonction précise et comminatoire. En retenant, à juste titre, que la société SAGA ANGERS reconnaît que de telles pratiques étaient courantes et généralement admises dans l'entreprise à une certaine époque, et qu'elle ne justifie pas d'informations précises mettant, de façon formelle et impérative, fin à celles-ci avant le 9 novembre 2007, le conseil de prud'hommes a fait une juste appréciation des éléments de la cause. En l'état des informations livrées aux vendeurs par l'employeur et des efforts de sensibilisation auxquels il s'est livré pour les impliquer, à défaut de consignes précises, dans le fonctionnement d'un partenariat fructueux pour l'entreprise, dont il est justifié aux termes des comptes rendu de réunion versés aux débats, l'allégation de défaut de loyauté reprochée à monsieur Christophe X... n'est pas démontrée. C'est donc à bon droit que les premiers juges, dont la décision doit être confirmée, ont jugé que le licenciement de monsieur Christophe X... était sans cause réelle et sérieuse.
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE la SAS SAGA ANGERS a licencié pour faute grave Monsieur Christophe X..., au motif qu'il a proposé des financements à ses clients, auprès d'organismes bancaires en échange de rétributions financières personnelles et occultes. Monsieur Christophe X... ne niant pas les faits, soutient que depuis son embauche la pratique du financement par des organismes bancaires tels que BNP PARIBAS LEASE, était de pratique courante, voire même encouragée par sa Direction, et s'opérait au vu et au su de la hiérarchie. La société SAGA ANGERS n'a pu nous fournir la preuve qu'elle avait à cet égard défini une politique claire et précise. Monsieur Christophe X... n'a jamais été destinataire d'informations précises mettant un terme aux pratiques antérieures dans ce domaine, avant le 9 novembre 2007 par un courriel explicite qui lui a été adressé par Monsieur A...: « Je vous confirme que dans le cadre d'un refus écrit de Daimler Chrysler Finance pour un financement client (à condition identique période et apport), il vous est possible de solliciter un autre financier en partant du principe que si il y a une rémunération complémentaire elle soit faite sur l'affaire directement et donc dans la rentabilité et non en chèque cadeau ». Monsieur Christophe X... soutient par lette du 12 novembre 2007 adressée à la Société BNP PARIBAS LEASE, qu'il met un terme à tout contact avec cette dernière. La SAS SAGA ne produit aucune preuve stipulant que Monsieur Christophe X... n'a pas appliqué la nouvelle politique clairement définie. Monsieur Christophe X..., soutient n'avoir jamais reçu de contrepartie financière de la Société BNP PARIBAS LEASE, mais des chèques points-cadeaux échangeables auprès de commerçants autorisés, et ce en tout état de cause antérieurement au 9 novembre 2007. Le Conseil de Prud'hommes constate qu'aucune faute n'a pu être établie à l'encontre de Monsieur Christophe X... et en conséquence considère que le licenciement de Monsieur Christophe X... est sans cause réelle et sérieuse.
ALORS QUE le salarié est tenu vis à vis de son employeur d'une obligation de loyauté ; que manque à ce devoir et commet une faute de nature à justifier son licenciement le salarié qui se livre à une activité concurrente de celle de l'employeur pour son propre compte ; que tel est le cas du vendeur d'une concession automobile qui oriente les candidats à l'acquisition d'un véhicule non vers l'établissement financier avec lequel son employeur a conclu un contrat dont il tire une partie significative de ses revenus mais vers un autre établissement financier, en contrepartie d'une rémunération occulte ; qu'en se prononçant de la sorte, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, au regard de l'article 1134 du Code civil, ensemble les articles 1232-1, 1234-1, 1234-5 et 1234-9 du Code du travail, qu'elle a ainsi violés.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-12114
Date de la décision : 05/06/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Angers, 14 décembre 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 05 jui. 2012, pourvoi n°11-12114


Composition du Tribunal
Président : M. Bailly (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.12114
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