LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu selon les arrêts attaqués (Paris, 15 mars 2007, 7 juin 2007, 26 février 2009 et 10 février 2011) que M. X... et Mme Y... se sont mariés le 26 avril 1997 et ont eu deux enfants ; que Mme Y... a assigné son époux en divorce sur le fondement de l'article 242 du code civil ;
Sur les premier, deuxième, troisième, quatrième, cinquième et sixième moyens :
Attendu que ces moyens ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Sur le septième moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de dommages-intérêts formée sur le fondement de l'article 1382 du code civil ;
Attendu que, répondant aux conclusions invoquées, la cour d'appel a estimé que M. X... ne démontrait pas que les fautes commises par son conjoint aient été sources pour lui d'un préjudice particulier distinct de celui résultant de la dissolution du mariage ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. X... et le condamne à payer à Mme Y... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois mai deux mille douze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par Me Haas, avocat aux Conseils pour M. X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 15 mars 2007 D'AVOIR attribué à Mme Y... la jouissance du domicile conjugal à titre gratuit et une pension alimentaire mensuelle de 1.000 euros au titre du devoir de secours, D'AVOIR augmenté le montant de la contribution de M. X... à l'entretien et l'éducation de ses enfants à compter du 14 mars 2006 et D'AVOIR condamné M. X... à payer à Mme Y... la somme de 2.000 euros à titre de provision pour frais d'instance ;
AUX MOTIFS QUE M. X..., qui exerce la profession d'avocat, se borne à soutenir que les demandes de pension alimentaire sont exorbitantes dans la mesure où elles conduiraient, si elles étaient satisfaites, à lui enlever la quasi-totalité de son revenu disponible après paiement des impôts et taxes, et indique, de façon incidente, que son épouse tire des revenus de ses fonctions d'administrateur d'une société et bénéficie de la part de ses parents de multiples avantages matériels et patrimoniaux, et que « le budget moyen d'une famille monoparentale s'élève à 18.175 euros » ; qu'il verse aux débats exclusivement un document qui établit que son épouse a séjourné une semaine en Suisse dans un hôtel au prix élevé, l'avis d'imposition sur le revenu de l'année 2004 mentionnant pour lui un revenu de 79.732 euros, la déclaration de revenus de l'année 2005 mentionnant au même titre un revenu de 82.262 euros et un contrat de bail en date du 18 mai 2006 concernant un appartement dont le loyer s'élève à 1.440 euros ; que Mme Y... perçoit un salaire moyen de l'ordre de 3.900 euros, et doit faire face aux frais de la vie courante de trois personnes ; qu'elle expose que son époux, après avoir exercé sa profession à Londres pendant un an, collabore à Paris à l'activité du cabinet White et Case LLP situé à Paris, et verse aux débats diverses notes mensuelles d'honoraires établies au nom de M. X..., non contestées ni commentées par ce dernier, dont les montants s'élèvent à 9.169,34 euros en 2004 et 10.465 euros à 13.985 euros en 2005 ; qu'il convient, compte tenu de l'opacité entretenue par l'époux quant à ses ressources, aux revenus de l'épouse et aux pièces qu'elle verse aux débats, de dire qu'à compter du 14 mars 2006, l'épouse bénéficiera, au titre du devoir de secours de la jouissance gratuite du domicile conjugal ainsi que d'une pension alimentaire mensuelle de 1.000 euros, et de fixer la contribution paternelle à l'entretien et l'éducation de chaque enfant à la somme de 800 euros ;
ALORS, 1°), QU'en matière de divorce, les mesures provisoires prises en application de l'article 255 du code civil n'ont d'effet que pour l'avenir et sont exécutoires de droit dès leur prononcé ; qu'en accordant à Mme Y..., au titre du devoir de secours, la jouissance gratuite du domicile conjugal ainsi qu'une pension alimentaire mensuelle de 1.000 euros, et en fixant la contribution paternelle à l'entretien et l'éducation de chaque enfant à la somme de 800 euros, le tout à compter du 14 mars 2006, date de la décision de première instance qu'elle infirmait de ces différents chefs, la cour d'appel a violé l'article 255 du code civil :
ALORS, 2°), QUE, tenus de motiver leur décision, les juges du fond doivent analyser, même de façon sommaire, les éléments de preuve sur lesquels ils se fondent ; qu'en considérant que les revenus de M. X... étaient opaques, sans s'expliquer sur les éléments lui ayant permis de parvenir à une telle conclusion, après avoir constaté que le mari avait versé aux débats son avis d'imposition pour l'année 2004 et sa déclaration de revenus pour l'année 2005, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 15 mars 2007 D'AVOIR fixé la résidence principale des enfants chez leur mère ;
AUX MOTIFS QUE M. X..., qui sollicite l'organisation d'une garde alternée, pour la première fois le 17 janvier 2007, sans aucune précision quant aux relations qu'il entretient avec les enfants pendant son séjour à Londres ni depuis la séparation, ni aucune référence aux sentiments des enfants quant à cette demande qui les concerne au premier chef, en sera débouté ;
ALORS QUE, dans toutes les décisions qui concernent les enfants, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ; qu'en se déterminant par des considérations sans rapport avec l'intérêt supérieur des enfants, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 3.1 de la Convention de New York du 26 janvier 1990 sur les droits de l'enfant.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 7 juin 2007 D'AVOIR, au travers d'une rectification du dispositif de son précédent arrêt du 15 mars 2007, condamné M. X... aux dépens d'appel ;
ALORS QUE la cassation de l'arrêt du 15 mars 2007, qui remettra en cause l'appréciation portée sur la charge des dépens, entraînera, par voie de conséquence, en application de l'article 625 du code de procédure civile, l'annulation de l'arrêt rectificatif du 7 juin 2007 qu'y rattache par un lien de dépendance nécessaire.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 26 février 2009 D'AVOIR débouté M. X... de sa demande tendant à voir dire que la jouissance du domicile conjugal par Mme Y... donnera lieu à une indemnité de 550 euros par mois ;
AUX MOTIFS QUE Mme Y..., chef de service de cessions des droits des Editions Gallimard, déclare un salaire mensuel moyen net imposable d'environ 4.407 euros en 2007 et 4.150 euros en mai 2008 (avis d'imposition de 2007 : 52.895 euros, cumul net imposable de mai 2008 : 20.747 euros), outre des revenus d'actions et parts déclarés imposables pour un montant de 1.560 euros en 2007 soit par mois environ 130 euros ; que les enfants ouvrent droit à des allocations familiales d'environ 120 euros ; qu'elle continue à se prévaloir de frais et charges d'environ 95.489 euros par an soit 7.957 euros par mois dont 19.983 euros soit 1.665 euros par mois au titre des seules dépenses couvrant toutes les activités et l'éducation et l'entretien des enfants et 10.020 euros couvrant ses dépenses personnelles, tandis que 65.486 euros soit par mois 5.457 euros concernent les impôts et taxes, les dépenses liées au fonctionnement et à l'entretien de la maison et les dépenses courantes ; que l'évolution professionnelle de M. X... s'inscrit depuis 2005 dans une instabilité que rien ne permet de rattacher à une nécessité ; que cependant son dernier choix est pris en considération en ce qu'il affecte ses obligations alimentaires, non en leur principe, mais en ce qu'elles couvrent des dépenses de train de vie manifestement exorbitantes qui n'ont pas à être couvertes par un appauvrissement des patrimoines respectifs des époux et par l'épargne constituée au cours des années précédentes alors que ses revenus actuels ne lui permettent plus de les assumer ; que les rapports financiers des époux sont dépendants de cette évolution qu'elle ait été à la hausse entre 2004 et 2005 ou à la baisse depuis 2007 ; que les actuels éléments de ressources des parties et les besoins de Mme Y... conduisent à fixer l'exécution du devoir de secours de M. X... à son égard par la gratuité de la jouissance du logement familial qui lui est attribuée et la suppression de la pension alimentaire fixée à ce titre à compter du 5 septembre 2007, date de la demande de suppression formée par M. X..., les effets de son changement de situation au 19 août 2007 n'étant réels qu'à compter du mois de septembre ;
ALORS, 1°), QUE le devoir de secours n'existe qu'autant que l'un des époux se trouve dans le besoin ; qu'en condamnant M. X... à exécuter son devoir de secours par la gratuité de la jouissance du logement familial attribuée à Mme Y... après avoir pourtant relevé que cette dernière percevait des revenus mensuels cumulés s'élevant à 4.400 euros et qu'elle se prévalait d'un titre de vie manifestement exorbitant, ce dont il ressortait que Mme Y... n'était nullement dans le besoin, la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles 212 et 255 du code civil.
ALORS, 2°), QU'en tout état de cause, en condamnant M. X... à exécuter son devoir de secours sans caractériser l'état de besoin dans lequel se trouvait Mme Y..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 212 et 215 du code civil.
CINQUIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 10 février 2011 D'AVOIR prononcé le divorce aux torts partagés des époux ;
AUX MOTIFS QU'il résulte des pièces produites par les parties et en particulier des attestations précises et concordantes présentées par Mme Y... et des nombreux mails échangés entre les époux et non contestés par l'épouse que la situation conjugale s'est fortement dégradée au cours de l'été 2004 et plus particulièrement dans l'année 2005, M. X... exerçant la profession d'avocat à Londres sans l'accord explicite de son épouse, et Mme Y... se refusant à être présente lors de ses retours durant les fins de semaine au domicile conjugal, chacun d'eux instituant ainsi des relations conflictuelles, agressives et déloyales l'un envers l'autre ; qu'en conséquence, nonobstant les griefs soit non démontrés soit non pertinents, sont ainsi établis à l'encontre de chaque époux, des faits qui ne s'excusent pas entre eux, constituant une violation grave et renouvelée des devoirs et obligations du mariage rendant intolérable le maintien de la vie commune ;
ALORS QU'en subordonnant le droit de M. X... d'exercer son activité professionnelle à Londres au cours de l'année 2005 à l'accord explicite de son épouse, la cour d'appel, qui a ajouté à la loi une condition qu'elle ne prévoit pas, a violé les articles 215 et 242 du code civil.
SIXIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 10 février 2011 D'AVOIR condamné M. X... à verser à Mme Y... la somme de 36.000 euros à titre de prestation compensatoire et D'AVOIR débouté M. X... de sa demande de prestation compensatoire ;
AUX MOTIFS QUE le mariage a duré 14 années à ce jour et la vie commune 8 ans ; que les époux sont âgés respectivement de 39 ans ; qu'ils ont deux enfants ; qu'ils ne font état d'aucun problème de santé ; qu'ils ont produit leurs déclaration sur l'honneur ; qu'ils ont durant la vie commune tous deux perçus des revenus de leur travail et que leur qualification est sensiblement identique ; que le patrimoine commun se compose d'un bien immobilier ayant constitué le domicile conjugal situé à Saint-Mandé, et de différents comptes, notamment de retraite ou d'épargne, dont le solde sera positif en considération du passif à acquitter et qui a vocation à être partagé entre les époux ; que M. X..., qui exerce la profession de juriste à la direction juridique et fiscale de la Caisse des dépôts et consignations, perçoit une rémunération de l'ordre de 6.000 euros par mois (contrat de travail du 20 mai 2007) ; que Mme Y... est employée en qualité de chef de service par les Editions Gallimard et perçoit une rémunération de l'ordre de 4.400 euros par mois (bulletin de salaire de décembre 2009) ; qu'au vu de l'ensemble de ces éléments, c'est par une appréciation du temps consacré par Mme Y... à l'éducation des enfants et de la différence de revenus perçus par les époux au cours de la vie commune que le premier juge a fixé à un capital de 36.000 euros la prestation compensatoire que M. X... devrait verser à Mme Y... en compensation de la disparité créée par la rupture du mariage dans les conditions respectives des époux et a rejeté toutes autres demandes sur ce point ; que ni M. X... ni Mme Y... n'apportent devant la cour d'éléments nouveaux de nature à remettre en cause ces chefs de décisions ;
ALORS, 1°), QUE l'un des époux ne peut être tenu de verser à l'autre une prestation compensatoire que si la rupture du mariage crée une disparité dans les conditions de vie respectives des époux ; qu'en prenant en compte, pour apprécier la situation respective des époux, les salaires bruts de M. X... et, parallèlement, les salaires nets de Mme Y..., la cour d'appel, qui n'a pas traité les époux sur un pied d'égalité, a violé les articles 6.1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, les articles 270 et 271 du code civil ;
ALORS, 2°), QU'en matière de prestation compensatoire, le juge doit prendre en compte les besoins de l'époux à qui elle est versée ainsi que les ressources de l'autre au jour du prononcé du divorce et dans un avenir prévisible, déduction faite des charges auxquelles l'époux débiteur doit faire face ; qu'en se bornant à récapituler les revenus respectifs des époux sans prendre en compte, comme elle y avait été invitée, les charges de M. X..., en particulier celles résultant de son loyer et de sa contribution à l'entretien et à l'éducation des deux enfants communs qui avait été fixée à 600 euros pour chacun des enfants, et qui devaient venir en déduction de ses ressources, la cour d'appel a violé les articles 270 et 271 du code civil ;
ALORS, 3°), QUE de la même façon, en ne se prononçant pas, comme elle y était pourtant invitée, sur les revenus que Mme Y... avait tirés de la cession d'actions qu'elle détenait dans des sociétés familiales ou encore sur les donations-partages dont elle avait été bénéficiaire de la part de ses parents, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 270 et 271 du code civil ;
ALORS, 4°), QUE, pour apprécier l'existence d'une disparité ou évaluer la prestation compensatoire, le juge doit se placer à la date du prononcé du divorce ; qu'en se fondant, pour allouer à Mme Y... la somme de 36.000 euros à titre de prestation compensatoire, sur la différence de revenus perçus par les époux au cours de la vie commune, la cour d'appel a violé les articles 270 et 271 du code civil.
SEPTIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à de la cour d'appel de Paris du 10 février 2011 D'AVOIR rejeté la demande de dommages-intérêts présentée par M. X... sur le fondement de l'article 1382 du code civil ;
AUX MOTIFS QUE Mme Y... et M. X... ne démontrent pas que les fautes commises par leur conjoint aient été la source pour eux d'un préjudice particulier distinct de celui résultant de la dissolution du mariage ;
ALORS QUE, dans ses conclusions d'appel (p. 25), M. X... faisait valoir que son épouse avait, au moment même où la cour d'appel devait statuer sur les mesures provisoires, dissimulé l'ampleur actuelle et prévisible de son patrimoine à défaut d'avoir fait état de la cession, pour une somme supérieure à trois millions d'euros des parts d'une entreprises familiale dont elle était actionnaire et administrateur ; qu'en ne répondant pas à ce moyen opérant dès lors que la dissimulation par un des époux de sa situation patrimoniale est nécessairement déterminante dans la fixation des conséquences pécuniaires du divorce, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code procédure civile.