LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Attendu, selon le jugement attaqué, que M. X..., qui est l'auteur d'une photographie dont il a cédé les droits de reproduction pour la réalisation d'une affiche destinée à dénoncer les franchises médicales, a découvert que M. Y... avait publié sur son blog un article intitulé "Franchises médicales , l‘arnaque ?", illustré par la reproduction de l'affiche, et l'a assigné en contrefaçon devant la juridiction de proximité ;
Attendu que pour déclarer M. X... irrecevable à agir en réparation de l'atteinte portée à ses droits patrimoniaux, le jugement relève que l'affiche reproduite est une oeuvre composite et que l'auteur de la photographie a cédé ses droits pour la réalisation de l'affiche ;
Qu'en statuant ainsi, sans rechercher si la cession intervenue couvrait la reproduction de l'affiche réalisée par un tiers pour illustrer un site internet, la juridiction de proximité n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen unique :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a déclaré M. X... irrecevable à agir en défense de ses droits patrimoniaux, le jugement rendu le 6 avril 2010, entre les parties, par la juridiction de proximité de Paris 3e ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant la juridiction de proximité de Paris 4e ;
Condamne M. Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. Y... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du seize mai deux mille douze et signé par M. Charruault, président, et par Mme Laumône, greffier de chambre qui a assisté au prononcé de l'arrêt.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Gadiou et Chevallier, avocat aux Conseils pour M. X....
IL EST FAIT GRIEF AU JUGEMENT ATTAQUE d'avoir déclaré l'action de Monsieur X... irrecevable en ce qui concerne ses droits d'auteur patrimoniaux,
AUX MOTIFS QUE « l'affiche du Parti Communiste Français comprenant les mentions « franchises médicales, coupables d'être malades » ajoutées sur la photographie de Monsieur X... a été reproduite intégralement par Monsieur Y... ; Le présent litige concerne donc la reproduction d'une oeuvre composite dont les droits d'auteur patrimoniaux du photographe ont été cédés à l'auteur de l'affiche. Monsieur X... sera déclaré irrecevable en son action tendant à se voir indemniser d'un préjudice lié à ses droits patrimoniaux. » ;
ALORS D'UNE PART QUE la transmission des droits de l'auteur est subordonnée à la condition que chacun des droits cédés fasse l'objet d'une mention distincte dans l'acte de cession et que le domaine d'exploitation des droits cédés soit délimité quant à son étendue et à sa destination, quant au lieu et à sa durée ; Qu'en la présente espèce, l'exposant soulignait en page 4 de ses conclusions (prod.) qu'il n'avait jamais autorisé quiconque à diffuser sa photographie sur un site internet sans son accord préalable ; Qu'en déclarant l'action de l'exposant irrecevable en ce qui concerne ses droits d'auteur patrimoniaux au seul motif que c'est l'affiche du Parti Communiste Français qui a été reproduite intégralement par Monsieur Y..., de sorte que le présent litige concerne la reproduction d'une oeuvre composite dont les droits d'auteur patrimoniaux du photographe ont été cédés à l'auteur de l'affiche, sans constater que la cession audit auteur aurait autorisé l'utilisation de la photographie par un tiers et sur d'autres supports qu'une affiche (internet en l'espèce), la juridiction de proximité n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L.131-3 et L.131-6 du Code de la propriété intellectuelle ;
ALORS D'AUTRE PART QUE l'exposant se prévalait en page 5 de ses conclusions des dispositions de l'article L.113-4 du Code de la propriété intellectuelle pour soutenir qu'en sa qualité d'auteur de l'oeuvre préexistante reprise dans l'oeuvre composite qu'était l'affiche du Parti Communiste Français, il était resté titulaire sur son oeuvre d'un droit de propriété intellectuelle opposable à tous, ce qui rendait son action recevable ; Qu'en déclarant l'action de l'exposant irrecevable en ce qui concerne ses droits d'auteur patrimoniaux au seul motif que c'est l'affiche du Parti Communiste Français, oeuvre composite dont les droits patrimoniaux du photographe ont été cédés à son auteur, qui a été reproduite intégralement par Monsieur Y..., la juridiction de proximité n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L.113-4 du Code de propriété intellectuelle.