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11/05/2012 | FRANCE | N°10-25620

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 11 mai 2012, 10-25620


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen, pris en ses diverses branches :
Vu les articles 1134 du code civil et 1492 du code de procédure civile dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 13 janvier 2011, ensemble l'article 455 du même code ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Ajinomoto a fait l'acquisition de plusieurs couronnes abat-mousses auprès de la société Ekato Ruhr Und Mischtechnik Gmbh , qu'un sinistre est survenu après leur installation par la société Friedlander, que l

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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen, pris en ses diverses branches :
Vu les articles 1134 du code civil et 1492 du code de procédure civile dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 13 janvier 2011, ensemble l'article 455 du même code ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Ajinomoto a fait l'acquisition de plusieurs couronnes abat-mousses auprès de la société Ekato Ruhr Und Mischtechnik Gmbh , qu'un sinistre est survenu après leur installation par la société Friedlander, que les sociétés Nipponkoa Insurance company Europe Ltd, Tokio Marine Europe Insurance Ltd, Sompo Japan Insurance Co of Europe Ltd, se présentant comme subrogées dans les droits de la société Ajinomoto, ont assigné, devant le tribunal de grande instance d'Amiens, la société Ekato Ruhr Und Mischtechnik Gmbh et la société Friedlander pour obtenir la condamnation à paiement de celle-là ; que la société Ekato Ruhr Und Mischtechnik Gmbh ayant opposé, à titre principal l'existence d'une clause d'arbitrage, à titre subsidiaire une clause attributive de juridiction au profit d'un tribunal allemand par application des dispositions du règlement CE 44/2001 du 22 décembre 2000, à titre infiniment subsidiaire la compétence du tribunal de commerce d'Amiens par application de l'article L. 721-3 du code de commerce, le juge de la mise en état a rejeté les deux premières exceptions d'incompétence, s'est déclaré incompétent et a renvoyé l'affaire au tribunal de commerce d'Amiens ;
Attendu que, pour refuser de donner effet à la clause d'arbitrage figurant aux conditions générales de vente, dont l'existence est mentionnée dans la confirmation de commande de la société Ekato Ruhr Und Mischtechnik Gmbh, l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, qu'il n'est pas démontré que la société Ajinomoto ait eu connaissance de l'existence de la clause compromissoire au moment de la conclusion du contrat, la référence à cette clause, fondue dans des conditions générales séparées, rédigées en langue anglaise et en caractères à peine visible, n'apparaissant pas clairement au recto de la confirmation de commande ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il ressort de l'arrêt attaqué que la confirmation de commande de la société Ekato Ruhr Und Mischtechnik Gmbh comporte une référence aux conditions générales de vente qui stipulent une clause compromissoire portée à la connaissance de la société Ajinomoto qui a, fût-ce par son silence, accepté cette référence, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et attendu qu'en application de l'article L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire, la Cour de cassation est en mesure, en cassant sans renvoi, de mettre fin au litige par application de la règle de droit appropriée ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 6 mai 2010 par la cour d'appel d'Amiens ;
Dit n'y avoir lieu à renvoi ;
Renvoie les parties à mieux se pourvoir ;
Dit que les dépens afférents aux instances au fond seront supportés par les sociétés Nipponkoa Insurance Company Europe Ltd, Tokio Marine Europe Insurance ltd, Sompo Japan Insurance Co of Europe Ltd ;
Condamne les sociétés Nipponkoa Insurance company Europe Ltd, Tokio Marine Europe Insurance Ltd et Sompo Japan Insurance Co of Europe Ltd aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze mai deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils pour la société Ekato Ruhr Und Mischtechnik Gmbh
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté l'exception d'incompétence formée par la société Ekato au profit du Tribunal arbitral, dit que le Tribunal de commerce d'Amiens est compétent pour connaître du litige et d'avoir ordonné en conséquence le renvoi de l'affaire devant le Tribunal de commerce d'Amiens ;
AUX MOTIFS PROPRES ET ADOPTES DE L'ORDONNANCE DEFEREE QU'il est constant en application de l'article 48 du Code de procédure civile que les clauses attributives de compétence doivent pour s'appliquer dès lors qu'elles sont dérogatoires aux compétences juridictionnelles définies par les conventions internationales, les règlements communautaires ou les lois nationales, recueillir l'accord même implicite des cocontractants ; qu'en l'espèce, la Cour relève que les cocontractants en cause à savoir la société Ajinmoto et la société Ekato opposent la clause attributive de compétence figurant dans les éléments contractuels qu'elles ont élaborés (Tribunal de grande instance d'Amiens dans les conditions générales d'achat de la société Ajinmoto et Tribunal arbitral dans les conditions générales de vente de la société Ekato) et qui désignent des juridictions différentes ; que ces éléments démontrant qu'aucune de ces clauses attributives de compétence n'a recueilli l'accord des deux parties, c'est avec pertinence que le juge de la mise en état a rejeté l'application de l'une ou l'autre de ces clauses, la compétence devant alors être définie selon les règles de droit commun ; que la clause attributive de juridiction invoquée par les trois demanderesses n'est pas opposable à la société Ekato car si les conditions générales du contrat d'achat de la société Ajinomoto comportent une clause attributive de juridiction, la commande prévoit expressément que le cocontractant doit manifester son acceptation de la commande aux dites conditions générales en retournant impérativement sous huit jours le deuxième exemplaire revêtu de son cachet et de sa signature ; qu'or la société Ekato soutient n'avoir jamais retourné l'exemplaire dûment signé comportant l'approbation des conditions générales ;
ALORS, D'UNE PART, QUE si la clause attributive de compétence doit recueillir l'accord au moins implicite des parties, en revanche, en matière d'arbitrage international, la clause compromissoire est valable lorsque la partie à laquelle on l'oppose a, fût-ce par son silence, accepté la référence à cette clause ; qu'en subordonnant en l'espèce la validité de la clause compromissoire litigieuse faussement qualifiée de clause attributive de compétence, à un accord au moins implicite des parties, l'arrêt attaqué a violé les articles 1492 et 1134 du Code civil et par fausse application l'article 48 du Code de procédure civile ;
ALORS, D'AUTRE PART, QU'en se fondant pour dire que la clause compromissoire n'avait pas recueilli l'accord de la société Ajinomoto, sur la stipulation par cette dernière, dans ses propres conditions générales d'achat, d'une clause attributive de compétence au profit du Tribunal de grande instance d'Amiens, après avoir constaté par adoption des motifs de l'ordonnance déférée, que la société Ajinomoto avait subordonné l'application de cette clause attributive de compétence à l'acceptation expresse de la société Ekato, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations de fait au regard des articles 1492 et 1134 du Code civil qu'elle a violé ;
ALORS, EN TROISIÈME LIEU, QU'en statuant comme elle l'a fait après avoir constaté que non seulement la société Ekato n'avait pas donné son accord expresse sollicité à la clause attributive de juridiction, mais qu'elle avait bien au contraire fait référence en réponse dans la confirmation de la commande, à une clause compromissoire, ce dont il résulte que la société Ajinomoto qui avait gardé le silence à la réception de ce document, avait nécessairement renoncé à invoquer l'application de sa clause attributive de compétence et accepté la clause compromissoire, la Cour d'appel a encore violé l'article 1134 du Code civil ;
ALORS ENFIN QU'en ne répondant pas aux conclusions de la société Ekato qui pour démontrer la connaissance et l'acceptation de la clause compromissoire par la société Ajinomoto, faisait valoir que la référence à la clause compromissoire est récurrente dans ses rapports contractuelles avec la société Ajinomoto et était déjà contenue dans les précédentes confirmations de commandes adressées à cette dernière, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.
ET AUX MOTIFS ADOPTÉS DE L'ORDONNANCE DÉFÉRÉE QUE la clause compromissoire par référence à un document qui la stipule est valable lorsque la partie à laquelle on l'oppose en a eu connaissance au moment de la conclusion du contrat ; qu'en l'espèce, seule la confirmation de commande de la société Ekato comporte la mention « The General Conditions LW 188 apply », les conditions générales précitées ne figurent pas au verso du contrat mais sont retranscrites sur un document de cinq pages rédigé en langue anglaise sur lequel figure la clause numéro 13 intitulée « Arbitration and law applicable » que la clause compromissoire ou la référence à celle-ci n'apparaît pas clairement au recto de la confirmation de commande mais se trouve fondue dans les conditions générales séparées rédigées en langue anglaise et en caractères à peine lisibles ; que la société Ekato ne saurait valablement se prévaloir de ce que ces conditions ont été publiées et sont consultables sur Internet ; qu'en effet cette circonstance n'est pas de nature à démontrer que la société Ajinomoto dans les droits de laquelle sont subrogés les trois assureurs ait eu connaissance de l'existence de la clause compromissoire au moment de la conclusion du contrat ;
ALORS, QU'en matière d'arbitrage international, la clause compromissoire par simple référence à un document qui la stipule est valable lorsque la partie à laquelle on l'oppose en a eu connaissance au moment de la conclusion du contrat et qu'elle a, fût-ce par son silence, accepté cette référence ; qu'il n'est pas nécessaire que cette clause figure de façon très apparente dans l'engagement de la partie à qui elle est opposée ; qu'en refusant de faire application de la clause compromissoire après avoir constaté que la confirmation de commande de la société Ekato portée à la connaissance de la société Ajinomoto qui a gardé le silence comporte une référence aux conditions générales LW 188 (qui sont des conditions élaborées par la Commission Economique pour l'Europe des Nations Unies diffusées sur Internet) et que ces conditions stipulent l'application d'une clause compromissoire, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations au regard des articles 1492 et 1134 du Code civil qu'elle a violés.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté l'exception d'incompétence formée par la société Ekato à titre subsidiaire au profit du Landgericht de Waldshut-Tiengen, dit que le Tribunal de commerce d'Amiens est compétent pour connaître du litige et d'avoir ordonné en conséquence le renvoi de l'affaire devant le Tribunal de commerce d'Amiens ;
AUX MOTIFS QUE si l'article 2 du Règlement communautaire n° 44/2001 dispose que les personnes domiciliées sur le territoire d'un Etat membre sont attraites quelle que soit leur nationalité devant les juridictions de cet Etat, l'article 5 1) a) prévoit par exception qu'une personne domiciliée sur le territoire d'un Etat membre peut être attraite dans un autre Etat membre en matière contractuelle devant le tribunal du lieu où l'obligation qui sert de base à la demande a été ou doit être exécutée ; qu'en l'espèce, la responsabilité contractuelle de la société Ekato est recherchée par les assureurs de la société Ajinomoto sur le fondement du contrat de commande des couronnes abat-mousse du 3 mars 2006 dont la livraison était prévue à Amiens ainsi que de la prestation de supervision de leur installation du 22 juin 2006 dont l'exécution était à Amiens ; que dès lors en application de cette disposition communautaire, les juridictions d'Amiens ont vocation à être compétentes ;
ALORS, D'UNE PART, QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; qu'en soulevant d'office les dispositions de l'article 5 du règlement communautaire n° 44/2001 du 22 décembre 2000 selon lesquelles sont compétentes en matière contractuelle les juridictions du lieu de l'Etat membre où en vertu du contrat, les marchandises ont été ou auraient dû être livrées, sans avoir mis préalablement les parties en mesure de présenter leurs observations, la Cour d'appel a violé l'article 16 du Code de procédure civile ;
ALORS, D'AUTRE PART, QU'en matière contractuelle, une personne domiciliée sur le territoire d'un Etat membre peut être attraite dans un autre Etat membre, devant le tribunal du lieu où l'obligation qui sert de base à la demande a été ou doit être exécutée ; qu'en se déterminant sur le fondement du lieu de la supervision du montage des couronnes abatmousse, quand aucune demande n'avait été formée contre la société Friedlander qui avait réalisé la prestation de montage, de sorte que cette obligation ne servait pas de base à la demande, la Cour d'appel a violé l'article 5 1) a) du règlement communautaire 44/2001 du 22 décembre 2000 ;
ET AUX MOTIFS ÉVENTUELLEMENT ADOPTÉS DU JUGEMENT QU'il résulte des articles 5 et 6 du règlement 44/2001 qu'une personne domiciliée sur le territoire d'un Etat membre « peut aussi être attraite s'il y a plusieurs défendeurs, devant le tribunal du domicile de l'un d'eux à condition que les demandes soient liées entre elles par un rapport si étroit qu'il y a intérêt à les instruire et à les juger ensemble afin d'éviter des solutions qui pourraient être inconciliables si elles étaient jugées séparément » ; qu'en l'espèce, il n'est pas contestable que la société Freidlander qui a procédé au montage des abat-mousse livrés par la société Ajinomoto a son siège social à Amiens ; que même s'il n'est formulé à ce stade de la procédure aucune demande particulière contre la société Friedlander il apparaît que celle-ci a été mandatée directement par Ajinomoto pour procéder au montage du matériel livré par cette dernière ce qui justifie la compétence territoriale des tribunaux d'Amiens ;
ALORS, D'UNE PART, QUE si une personne domiciliée sur le territoire d'un Etat membre peut aussi être attraite, s'il y a plusieurs défendeurs, devant le tribunal du domicile de l'un d'eux, c'est à condition que les demandes soient liées entre elles par un rapport si étroit qu'il y a intérêt à les instruire et à les juger en même temps afin d'éviter des solutions qui pourraient être inconciliables si les causes étaient jugées séparément ; qu'en se fondant pour retenir la compétence du Tribunal d'Amiens sur l'affirmation qu'il n'est pas contestable que la société Freidlander a son siège social à Amiens, tout en constatant qu'aucune demande n'était formée contre cette société, la Cour d'appel a violé l'article 6 du règlement communautaire n° 44/2001 du 22 décembre 2000 ;
ALORS, D'AUTRE PART, QU'il y a mandat et par conséquent représentation, lorsque des personnes chargent une autre d'accomplir pour leur compte un acte juridique et non des actes matériels ; que les opérations de montage constituent des actes matériels ; qu'en énonçant que Friedlander aurait été mandatée directement pour procéder au montage du matériel livré, ce qui justifierait la compétence des tribunaux d'Amiens, la Cour d'appel a violé l'article 1984 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 10-25620
Date de la décision : 11/05/2012
Sens de l'arrêt : Cassation sans renvoi
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Amiens, 06 mai 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 11 mai. 2012, pourvoi n°10-25620


Composition du Tribunal
Président : M. Charruault (président)
Avocat(s) : SCP Baraduc et Duhamel, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:10.25620
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