LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal d'instance de Lyon, 30 juin 2011), que Mme X..., délégué du personnel, salariée d'une agence relevant antérieurement de l'établissement "Est" de la branche "industrie" de la société Ranstad, laquelle comprend sept établissements, a été élue membre du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) relevant de cet établissement le 22 mars 2011 ; que la société Ranstad a saisi le tribunal d'une demande d'annulation de cette désignation aux motifs que l'agence dans laquelle Mme X... exerce ses fonctions a été transférée à un établissement de la branche "experts et pro" à compter du 1er janvier 2010 ;
Attendu que Mmes X... et Y... et le syndicat FO font grief au jugement d'annuler cette désignation, alors, selon le moyen :
1°/ que dès lors que le salarié remplit les conditions pour être membre du collège désignatif d'un comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, il remplit également les conditions pour être membre du même comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail ; qu'il résulte des constatations du tribunal que Mme X... est membre du collège désignatif des représentants du personnel au CHSCT Est de la branche industrie de la société Randstad ; qu'en considérant néanmoins qu'elle ne pouvait pas être membre du même comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, le tribunal a violé l'article L. 4613-1 du code du travail ;
2°/ que l'employeur ne peut priver le salarié de son droit d'être éligible en se prévalant d'une décision arbitraire et injustifiée par des motifs objectifs ; que les exposants avaient soutenu que l'employeur ne pouvait se prévaloir du simple changement d'intitulé de l'agence dans laquelle travaille Mme X... pour la priver de son droit d'être éligible au CHSCT de l'établissement "Est" de la branche Industrie, ce changement étant arbitraire et dénué de toute justification objective ; que le tribunal, qui n'a pas recherché si le changement d'intitulé de l'agence dans laquelle Mme X... travaillait, dont l'employeur excipait pour la priver de son droit d'être éligible au CHSCT de l'établissement "Est" de la branche Industrie, était justifié par des critères objectifs, a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard de l'article 1134 du code civil, L. 1222-1 et L. 4613-1 du code du travail ;
Mais attendu que, sauf accord collectif, un même CHSCT ne peut regrouper des salariés dépendant de plusieurs établissements dotés chacun d'un comité d'établissement, en sorte que seuls les salariés de l'établissement concerné peuvent être désignés au sein du CHSCT de cet établissement ;
Et attendu qu'ayant constaté, d'une part, que par accord du 24 janvier 2011, une nouvelle répartition des CHSCT a été décidée entre la direction et les organisations syndicales, et, d'autre part, que le comité central de l'unité économique et sociale travail temporaire du groupe Ranstad France a été consulté lors d'une réunion extraordinaire du 19 mars 2010 sur le projet "convergences 2010-2012" comportant un volet relatif au rapprochement d'agences, de même que le comité d'établissement de la branche "industrie" de la société Ranstad le 7 avril 2010, le comité d'établissement "experts et pro" les 27 mars 2010 et 25 février 2011 et celui de la société Védiorbis le 24 mars 2010, mentionnant clairement une fusion d'agences à Dijon, l'agence où travaille Mme X... relevant désormais de la branche "experts et pro", le tribunal, qui a ainsi fait ressortir la réalité de la réorganisation de la société Ranstad, a exactement décidé que Mme X... n'étant plus salariée au sein de l'établissement dans lequel a été constitué le CHSCT ne pouvait y être élue en qualité de représentant du personnel, peu important qu'elle ait été convoquée en tant que membre de son collège désignatif ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix mai deux mille douze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils pour Mmes Y... et X... et le syndicat Force ouvrière
Le moyen reproche au jugement attaqué d'AVOIR annulé la désignation de Madame Françoise X... en qualité de représentants du personnel au CHSCT de la branche industrie est de la société RANDSTAD ;
AUX MOTIFS QU'il est de jurisprudence constante que tout salarié d'un établissement d'une entreprise peut être désigné membre d'un CHSCT correspondant au sein de l'établissement à un secteur d'activité dans lequel il ne travaille pas ; il est justifié par le protocole d'accord relatif à la mise en place des nouveaux CHSCT de l'UES travail temporaire signé le 24 janvier 2011 entre la direction de la société RANDSTAD et cinq organisations syndicales, dont la validité n'est pas contestée, que tout salarié peut être désigné en tant que membre du CHSCT dès lors qu'il est rattaché à l'établissement où le CHSCT est constitué ; pour la branche industrie, cinq CHSCT sont constitués et pour la branche experts et pro, deux CHSCT sont constitués ; lors de la réunion du collège désignatif du 22 mars 2011, Françoise X..., présentée sur une liste force ouvrière, a été déclaré élue au titre du premier collège intérimaire des membres du personnel du CHSCT de la zone est de la branche industrie ; ses bulletins de paye mentionnent qu'elle est salariée de la société RANDSTAD et qu'elle relève de l'agence experts et pro de Dijon ; il est également justifié que Françoise X... est membre du collège désignatif des représentants du personnel au CHSCT Est de la branche industrie de la société RANDSTAD puisqu'elle est déléguée du personnel de la zone Est de la branche industrie ; il est justifié que le comité central de l'unité économique et sociale travail temporaire du groupe RANDSTAD France a été consulté lors d'une réunion extraordinaire du 19 mars 2010 sur le projet « convergences 2010 - 2012 » comportant un volet relatif au rapprochement d'agences, de même que le comité d'établissement de la branche industrie de la société RANDSTAD le 7 avril 2010, le comité d'établissement experts et pro de la société RANDSTAD le 27 mars 2010 et encore le 25 février 2011 et celui de la société Vediorbis le 24 mars 2010, mentionnant clairement une fusion d'agences à Dijon, l'agence relevant désormais de la branche experts et pro ; la société RANDSTAD justifie qu'elle a dûment informé ses salariés permanents de l'agence de Dijon de leur nouvelle affectation à compter du 1er janvier 2010 au sein de l'agence experts et pro de l'automobile et de l'industrie de Dijon ; la société RANDSTAD verse aux débats deux décisions de l'inspection du travail du 11 janvier 2007 relatives au transfert de deux salariés représentants du personnel, d'une branche à une autre de la même société du groupe, aux termes desquels l'inspecteur du travail a considéré qu'en l'absence de modifications dans la situation juridique de l'employeur, il ne s'agissait pas du transfert d'un contrat de travail et que l'autorisation préalable de l'inspection du travail n'était pas nécessaire ; il est justifié que malgré le nouveau rattachement au 1er janvier 2010 de l'agence de Dijon à la branche experts et pro et non plus à la branche industrie, Françoise X... a conservé son mandat de déléguée du personnel au sein de la branche industrie ; dès lors, le changement dans l'organisation interne de la société RANDSTAD, relevant du pouvoir de direction de l'employeur, sans incidence sur l'existence du mandat de représentation du personnel dont est titulaire Françoise X..., n'est pas critiquable en soi ; son rattachement à la branche experts et pro, constitutive d'un établissement distinct, ne lui permet pas de se porter candidate à un poste de représentant du personnel à un CHSCT relevant d'une autre branche de la société, constitutive d'un autre établissement distinct ; en conséquence, la désignation de Françoise X... en qualité de représentant du personnel au CHSCT est de la branche industrie de la société RANDSTAD sera annulée ;
ALORS QUE dès lors que le salarié remplit les conditions pour être membre du collège désignatif d'un comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, il remplit également les conditions pour être membre du même comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail ; qu'il résulte des constatations du Tribunal que Madame Françoise X... est membre du collège désignatif des représentants du personnel au CHSCT Est de la branche industrie de la société RANDSTAD ; qu'en considérant néanmoins qu'elle ne pouvait pas être membre du même comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, le Tribunal a violé l'article L. 4613-1 du Code du travail ;
ALORS QUE l'employeur ne peut priver le salarié de son droit d'être éligible en se prévalant d'une décision arbitraire et injustifiée par des motifs objectifs ; que les exposants avaient soutenu que l'employeur ne pouvait se prévaloir du simple changement d'intitulé de l'agence dans laquelle travaille Madame X... pour la priver de son droit d'être éligible au CHSCT de l'établissement « EST » de la branche Industrie, ce changement étant arbitraire et dénué de toute justification objective ; que le Tribunal, qui n'a pas recherché si le changement d'intitulé de l'agence dans laquelle Madame X... travaillait, dont l'employeur excipait pour la priver de son droit d'être éligible au CHSCT de l'établissement « EST » de la branche Industrie, était justifié par des critères objectifs, a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard de l'article 1134 du Code Civil, L 1222-1 et L. 4613-1 du Code du travail.