LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu les principes posés par la convention n° 158 de l'Organisation internationale du travail (OIT) sur le licenciement adoptée à Genève le 22 juin 1982 et entrée en vigueur en France le 16 mars 1990 et la dérogation prévue en son article 2 paragraphe 2 b) ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée le 14 mars 2006 par la caisse régionale de crédit agricole mutuel Pyrénées-Gascogne, en qualité d'assistante commerciale, ayant pour fonctions d'accueillir et d'orienter la clientèle, dont elle devait identifier les besoins pour lui donner, notamment en prenant en compte la procédure du traitement du risque, une réponse adaptée ; que son contrat de travail stipulait l'obligation d'accomplir, conformément à l'article 10 de la convention collective, une période de stage de six mois ; que l'employeur ayant mis fin à son stage le 29 août 2006, la salariée a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes en paiement de sommes à titre notamment de dommages-intérêts et d'indemnités de rupture ;
Attendu que pour débouter la salariée de ses demandes, l'arrêt retient que la période de stage de six mois prévue pour les agents de catégorie A à E, par l'article 10 de la convention collective du Crédit agricole, n'apparaît pas excessive dès lors qu'eu égard à la définition du poste de la salariée, les fonctions qu'elle devait remplir nécessitaient, pour être évaluées dans leur efficacité, une appréciation dans la durée, l'évaluation à mi-parcours permettant à l'employeur de vérifier que la salariée était apte à tenir compte des observations qui lui étaient faites sur la qualité de son travail et à la salariée de rectifier ses carences professionnelles afin d'obtenir sa titularisation ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'est déraisonnable, au regard de la finalité de la période d'essai et de l'exclusion des règles du licenciement durant cette période, une période d'essai dont la durée est de six mois, la cour d'appel a violé la Convention internationale susvisée ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 4 janvier 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Pau ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;
Condamne la caisse régionale de crédit agricole mutuel Pyrénées-Gascogne aux dépens ;
Vu les articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix mai deux mille douze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Boulloche, avocat aux Conseils pour Mme X...
Le moyen de cassation fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Madame X... de ses demandes contre la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Pyrénées-Gascogne de paiement de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'indemnité compensatrice de préavis et de dommages-intérêts pour préjudice distinct, Aux motifs que « la période d'essai est destinée à permettre à l'employeur d'apprécier la valeur professionnelle de la salariée et à celle-ci de prendre l'exacte mesure de ce qui lui est demandé dans le cadre de son contrat de travail ;
Que l'article 10 de la convention collective de la CRCAM prévoit " Les agents embauchés seront d'abord appelés à accomplir un stage pendant une période de six mois pour les agents dont les emplois relèvent des catégories A à E. Si le stage est concluant, l'agent est titularisé et ses fonctions lui sont alors confirmées. Dans le cas contraire la direction met fin au contrat. " ;
Que Madame X..., qui relevait de cette catégorie, a été embauchée en qualité d'assistante commerciale, " point de qualification de l'emploi 340 " ;
Que la convention collective précise qu'il est demandé au salarié, recruté à ce niveau, de traiter " en autonomie des situations voisines, voire différentes ", pour lesquelles il peut apporter un support. Les missions confiées l'amènent à mettre en oeuvre des connaissances opérationnelles et des savoirs pratiques variés qu'il développe et nécessitent de rechercher l'adhésion, voire de conseiller ;
Qu'aux termes de la convention collective il incombait à la salariée dans le cadre de ses fonctions d'" accueillir la clientèle et d'orienter la clientèle, d'identifier les besoins de la clientèle, d'adapter la réponse aux besoins, notamment par la prise en compte de la procédure de traitement du risque et le choix du canal de distribution, assurer le suivi des opérations ;
Qu'une évaluation a été faite à mi-période d'essai, notifiée à la salariée le 15 juin 2006, de laquelle il ressort qu'elle avait " des difficultés à intégrer les procédures en place ", ce qui engendrait quelques problèmes relationnels avec l'équipe ;
Qu'en outre il était précisé à la salariée que l'organisation de son travail était à parfaire en terme de planification de l'activité et il était demandé à madame X... pour pouvoir valider sa titularisation " une augmentation sensible de l'activité commerciale, une évolution du comportement et une maîtrise des limites de l'emploi d'agent commercial " ;
Que l'appréciation de l'employeur comprenait des réserves telles à mi-stage, que Madame X... ne pouvait considérer que sa titularisation était acquise à cette date ;
Que cependant, la durée du stage pouvait lui permettre de rectifier les carences soulignées et lui être bénéfique ;
Que tel n'a pas été le cas, puisque par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 29 août 2006, l'employeur signifiait à la salariée qu'il mettait un terme à son contrat de travail à compter du 29 septembre 2006, après un préavis d'un mois, tel que prévu à l'article 2 du contrat de travail.
Considérant que la loi du 25 juin 2008 n'est pas applicable en l'espèce car postérieure à la fin du contrat et que l'article 10 alinéa 1 de la convention collective de la CRCAM n'apparaît pas incompatible avec les exigences de la convention n° 158 de l'Organisation Internationale du Travail ;
Qu'en effet, la durée de la période d'essai, dès lors comme c'est le cas en l'espèce, qu'une évaluation intervenait à mi-parcours, était de nature à permettre à l'employeur de vérifier que la salariée était apte à tenir compte des observations qui lui étaient faites sur la qualité de son travail et à la salariée de rectifier ses carences professionnelles afin d'obtenir sa titularisation ;
Qu'à la fin de la période d'essai c'est un bilan très complet de son travail qui a été présenté à Madame X..., laquelle n'a pas contesté point par point les griefs formulés mais a noté dans le cadre de ses observations " Pas d'accord avec un certain nombre d'appréciations " sans jamais formuler plus précisément ses critiques ;
Qu'il était notamment fait grief à Madame X... de ne pas savoir apporter aux clients des réponses rapides et pertinentes par défaut de maîtrise des connaissances techniques de base, de ne pas avoir d'esprit de synthèse, d'avoir des temps d'écoute trop longs, générant des pertes de temps, de transférer vers ses collègues la fin des tâches, de rester sur ses certitudes et de ne pas avoir tenu compte de l'évaluation faite au milieu de la période d'essai ;
Qu'eu égard à la définition du poste de la salariée, les fonctions qu'elle devait remplir nécessitaient, pour être évaluées dans leur efficacité, une appréciation dans la durée ;
Que la période de six mois prévue au contrat n'apparaît pas dans de telles conditions excessive ;
Que les conditions d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ne sont pas réunies ;
Que pendant la période d'essai, les règles du licenciement ne sont pas applicables ;
Que contrairement à ce qu'elle soutient. Madame X... n'établit pas que l'employeur a été à son égard d'une coupable légèreté car d'une part l'évaluation faite au milieu de la période d'essai lui rappelait que sa titularisation était loin d'être acquise, d'autre part la période d'essai ne se terminait que le 16 septembre 2006 et elle a été prévenue dans les délais contractuels, le préavis pouvant se situer après la fin de la période d'essai, dès lors qu'il est mis un terme à la période d'essai dans les délais prévus au contrat ;
Que Madame X... enfin, ne rapporte pas la preuve qu'elle a donné congé à son propriétaire parce que son employeur lui avait assuré qu'elle bénéficierait d'un logement de fonction ;
Qu'ainsi que cela ressort de son propre fax, non daté, en toute hypothèse, l'attribution d'un éventuel logement de fonction dépendait de sa titularisation, or elle a écrit à sa propriétaire pour résilier son bail le 19 juin 2006 alors qu'elle venait de prendre connaissance de l'évaluation très réservée concernant son aptitude professionnelle et des aléas qui pesaient sur sa titularisation ;
Que les attestations d'Ariette Z..., de Françoise Y... et d'Annie X... ne rapportent pas la preuve qu'à la date à laquelle Madame X... a résilié son bail, son employeur s'était engagé à lui fournir un logement de fonction ;
Que l'appelante n'établit pas que les difficultés qu'elle a pu rencontrer, en raison de la résiliation de sa mutuelle résulte d'une faute de son employeur ;
Qu'en conséquence, la décision déférée sera confirmée et Madame X... sera déboutée de toutes ses demandes », Alors que est déraisonnable, au regard de la finalité de la période d'essai et de l'exclusion des règles du licenciement durant cette période, la durée de 6 mois de stage prévu par la convention collective nationale du Crédit agricole pour les agents engagés par contrat à durée indéterminée, avant leur titularisation, en qualité d'assistante commerciale ;
qu'en l'espèce, Mme X... a été engagée comme assistante commerciale, par contrat prévoyant une période d'essai de six mois, et percevait environ 1600 € bruts mensuels ; qu'en retenant que cette période n'était pas d'une durée excessive, la cour d'appel a violé les principes posés par la Convention internationale n° 158 de Genève du 22 juin 1982 et la dérogation prévue en son article 2 § 2 b, ensemble l'article 10 de la convention collective nationale du Crédit agricole.