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02/05/2012 | FRANCE | N°10-28250

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 02 mai 2012, 10-28250


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article 1147 du code civil ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 12 octobre 2010), que, par deux actes du 6 mai 2003, la SCI Les Chalets de la Vallée d'Or et la SCI Les Hameaux de la Vallée d'Or (les SCI) ont conclu avec la société Mer et Montagne une "convention de partenariat" en vue de la réalisation et de l'exploitation d'une résidence de tourisme ; que ces conventions stipulaient notamment que l'exploitant s'engageait à assurer la gestion de la rÃ

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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article 1147 du code civil ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 12 octobre 2010), que, par deux actes du 6 mai 2003, la SCI Les Chalets de la Vallée d'Or et la SCI Les Hameaux de la Vallée d'Or (les SCI) ont conclu avec la société Mer et Montagne une "convention de partenariat" en vue de la réalisation et de l'exploitation d'une résidence de tourisme ; que ces conventions stipulaient notamment que l'exploitant s'engageait à assurer la gestion de la résidence en vertu d'un bail commercial de 9 ans, sans faculté de résiliation triennale, que les lots de copropriété, vendus en l'état futur d'achèvement ainsi que les lots invendus seraient donnés à bail commercial à l'exploitant pour 9 ans et 2 mois, le bailleur se portant fort de faire souscrire un bail à chacun des acquéreurs et que la résidence devrait être classée en "résidence de tourisme 4 étoiles", ce classement devant être maintenu pendant toute le durée du bail ; qu'invoquant l'impossibilité de poursuivre l'exploitation, la société Mer et Montagne a résilié au 30 avril 2008 les baux principaux conclus avec les SCI et ceux passés avec les acquéreurs de lots ; que les SCI l'ont assignée en réparation du préjudice subi du fait de la résiliation des baux ;

Attendu que pour accueillir les demandes d'indemnisation de la SCI Les Hameaux de la Vallée d'Or et de la SCI Les Chalets de la Vallée d'or, l'arrêt retient que le classement en résidence 4 étoiles ne peut toujours pas être obtenu plus de 5 ans après la réception, que les parties ont ignoré que le classement provisoire avait été supprimé par un arrêté du 14 février 1986, que les SCI se voient opposer la fin de contrat pour une raison qui ne leur est pas imputable et qui est due à une impossibilité tenant à une erreur commune, que pour ces sociétés l'exploitation pendant 9 ans et deux mois était une condition substantielle pour permettre de bénéficier de l'avantage fiscal promis aux investisseurs acquéreurs des locaux dont le bail se trouvait résilié et que la décision de la société Mer et Montagne de se dispenser partiellement de fournir sa prestation libère ses cocontractants de l'obligation d'assurer la leur ;

Qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme il lui était demandé, si l'impossibilité de classement en résidence 4 étoiles ne résultait pas des malfaçons, non conformités et non-finitions affectant l'immeuble et de l'impossibilité subséquente pour les SCI de fournir les documents nécessaires à l'obtention de ce classement, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné la société Mer et Montagne à payer à la SCI Les Chalets de la Vallée d'or la somme de 583 249 euros et à la SCI Les Hameaux de la Vallée d'Or la somme de 223 652 euros, l'arrêt rendu entre les parties le 12 octobre 2010 par la cour d'appel de Chambéry, remet, sur ces points, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Chambéry, autrement composée ;

Condamne les SCI Les Hameaux de la Vallée d'Or et Les Chalets de la Vallée d'Or aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne les SCI Les Hameaux de la Vallée d'Or et Les Chalets de la Vallée d'Or à payer à la société Mer et Montagne la somme de 2 500 euros ; rejette la demande des SCI Les Hameaux de la Vallée d'Or et Les Chalets de la Vallée d'Or ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du deux mai deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils pour la société Mer et Montagne.

Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné la SAS MER et MONTAGNE à payer à la SCI LES CHALETS DE LA VALLEE D'OR la somme de 583.249 € et à la SCI LES HAMEAUX DE LA VALLEE D'OR celle de 223.652 € ;

AUX MOTIFS QUE, aux termes de l'arrêt attaqué, « l'inexécution ou l'exécution fautive d'un contrat est susceptible de causer un préjudice à un tiers et d'engager à son égard la responsabilité de la partie fautive ; qu'en outre, en l'espèce, par une convention entre les parties, la SAS Mer et Montagne s'est engagée à assurer la gestion de la résidence en vendant à des tiers des séjours de courte et moyenne durée (article 1) et à prendre à bail les appartements composant la résidence pour une durée effective et continue dans le cadre d'un bail commercial de 9 ans et 2 mois (article 2), leur convention contenant un modèle type de bail commercial à conclure entre les acquéreurs des appartements (« investisseurs ») et la SAS Mer et montagne exploitante ; que les appelantes, à l'égard de qui la SAS Mer et montagne n'a pas respecté son engagement, sont donc recevables à lui en demander raison et indemnisation ; que le contrat stipule à son article 5.4 que « l'exploitant prendra en charge le coût d'acquisition du mobilier et des éléments d'équipement des appartements, ainsi que celui du matériel nécessaire à l'exploitation de la résidence tel que ceux-ci sont définis en annexe 7. L'exploitant en demeurera seul propriétaire et en assurera l'entretien courant ainsi que le remplacement. A cet effet, afin de faire face à ses frais, le Promoteur s'engage à régler à l'exploitant une prise à bail d'un montant forfaitaire maximum de 5.500 € HT par logement au prorata des tranches » ; qu'ainsi ce paiement été lié à l'exploitation convenue par Mer et Montagne, le contrat précisant (article 2) que cette exploitation devait avoir une durée minimum de neuf ans et deux mois ; qu'à la suite de la résiliation, la SAS Met et Montagne a enlevé et revendu le mobilier, soit après trois ans d'exploitation, ce qui a donné lieu à un incident devant le juge de la mise en état ; que les appelantes demandent le remboursement des deux tiers des sommes versées à ce titre compte tenu de la durée de l'exploitation effective par l'intimée ; que la SAS Mer et Montagne a fait sommation par huissier aux appelantes le 11 juillet 2006 de lui communiquer l'ensemble des documents nécessaires au classement définitif de la résidence et qu'elle n'a pas obtenu les documents demandés ; que la demande de classement doit être accompagnée de la déclaration d'achèvement des travaux, laquelle ne peut être obtenue alors qu'une procédure oppose les promoteurs aux intervenants à la construction et a donné lieu à une expertise qui a été ordonnée le 19 novembre 2004, mais a été suivie de 12 ordonnances, le rapport n'étant déposé que le 22 septembre 2009 ; qu'il est bien certain que le classement 4 étoiles prenait nécessairement un temps important, et que, pour cette raison évidemment, les parties avaient prévu (article 4) l'obligation pour le promoteur de déposer un dossier en vue du classement provisoire de la résidence en résidence de tourisme 4 étoiles, permettant l'exploitation sous ce classement en attendant qu'il devienne définitif ; que toutefois, elle sont manifestement ignoré que la possibilité de classement provisoire, si elle a existé légalement, avait été supprimée par un arrêté du 14 février 1986 ; que les appelantes ont cru pouvoir y suppléer par des attestations du préfet de la Savoie des 26 décembre 2002 et 15 janvier 2003, certifiant que les installations prévues correspondent au classement 4 étoiles sous certaines conditions, tenant à l'adaptation des lieux aux personnes à mobilité réduite, mais dépourvues de toute portée et que le classement ne peut toujours pas être obtenu plus de cinq ans après la réception ; que la SAS Mer et Montagne, bien qu'elle ne justifie d'aucune difficulté d'exploitation ni des risques allégués et que les appelantes justifient que l'exploitation de la résidence est toujours assurée, par une autre entreprise qui a accepté de payer aux propriétaires des loyers initialement convenus par l'intimée, ne pouvant donc pas exercer son exploitation sous un classement 4 étoiles à qui elle avait conféré un caractère incontestablement déterminant, était fondée à mettre fin au contrat qui la liait aux SCI Hameaux de la vallée d'or et Chalets de la vallée d'or ; que toutefois ces dernières se voient opposer cette fin de contrat pour une raison qui ne leur est pas imputable et qui est due à une impossibilité tenant à une erreur commune ; que pour elles, l'exploitation pendant 9 ans et deux mois, était aussi une condition substantielle dès lors qu'elle était indispensable pour permettre l'avantage fiscal promis aux investisseurs acquéreurs propriétaires des locaux dont le bail, promis par les promoteurs vendeurs, se trouvait résilié ; que la décision de la SA Mer et Montagne de se dispenser partiellement de fournir sa prestation libère ses cocontractants de l'obligation d'assurer la leur ; que c'est donc à bon droit que les appelantes demandent en contrepartie le remboursement de sommes versées en contemplation de la durée du contrat, soit 583.249 € à la SCI Les Chalets de la vallée d'or et 223.652 € à la SCI Les Hameaux de la vallée d'or » ;

ALORS en premier lieu QUE la société MER et MONTAGNE rappelait que la résiliation des baux litigieux avait pour cause, outre la non obtention d'un classement en résidence quatre étoiles, les nombreuses malfaçons, les non conformités, le non respect des réglementations, les non finitions, l'absence d'aire de retournement, tous imputables aux SCI LES CHALETS DE LA VALLEE D'OR et LES HAMEAUX DE LA VALLEE D'OR en leur qualité de promoteur, et que la non obtention du classement quatre étoiles était due à l'impossibilité pour lesdites SCI, compte tenu de ces malfaçons et non finitions, de disposer d'une déclaration d'achèvement des travaux et du certificat de conformité, de telle sorte « qu'à ce jour, soit pas moins de cinq années après la date de livraison contractuellement fixée, les sociétés appelantes ne sont toujours pas en mesure de produire la déclaration d'achèvement des travaux » (conclusions de la société MER et MONTAGNE, p.8§3) et que la résidence ne peut toujours pas être exploitée en quatre étoiles (ibid. p.9§2-3) ; qu'en jugeant, pour condamner la société MER et MONTAGNE, que les SCI LES CHALETS DE LA VALLEE D'OR et LES HAMEAUX DE LA VALLEE D'OR se verraient opposer une fin de contrat « due à une impossibilité tenant à une erreur commune » (arrêt, p.4 § 7) consistant en l'impossibilité d'obtenir un classement provisoire en quatre étoiles depuis un arrêté du 14 février 1986, quand ce dernier arrêté ne justifiait ni l'impossibilité d'obtention, cinq ans après la réception, d'un tel classement, ni les malfaçons, les non conformités, le non respect des réglementations et les non finitions imputables aux SCI promoteurs et ayant justifié les résiliations litigieuses, la Cour d'appel a statué par des motifs inopérants, privant ainsi sa décision de base légale au regard des articles 1147 et 1382 du Code civil ;

ALORS en deuxième lieu QUE l'article 5.4 du contrat de partenariat en vue de la réalisation et de l'exploitation d'une résidence de tourisme stipulant que le promoteur s'engageait à régler à l'exploitant un montant forfaitaire maximum de 5.500 € HT par logement pour lui permettre de faire face à ses frais d'équipement des appartements et d'acquisition du matériel nécessaire à l'exploitation, dont l'exploitant resterait seul propriétaire et donc libre de disposer, n'était pas conditionné à l'obligation de prendre à bail les appartements de la résidence pour une durée de 9 ans et 2 mois prévue à l'article 2 du même contrat ; qu'en jugeant que la résiliation des baux justifiait le remboursement des sommes versées de façon définitive par les SCI LES CHALETS DE LA VALLEE D'OR et LES HAMEAUX DE LA VALLEE D'OR à la société MER et MONTAGNE pour financer les frais d'acquisition des équipements et matériels de la résidence, la Cour d'appel a violé les articles 1134, 1147 et 1151 du Code civil, ensemble l'article 1382 du Code civil ;

ALORS en troisième lieu QUE le tiers à un contrat peut invoquer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, un manquement contractuel dès lors que ce manquement lui a causé un dommage ; qu'en jugeant que la résiliation par la société MER et MONTAGNE des baux auxquels les SCI LES CHALETS DE LA VALLEE D'OR et LES HAMEAUX DE LA VALLEE D'OR n'étaient pas parties leur aurait un causé préjudice dont elles pouvaient demander réparation au motif que l'inexécution ou l'exécution fautive d'un contrat est susceptible de causer un préjudice à un tiers et d'engager à son égard la responsabilité de la partie fautive (arrêt, p.3), sans à aucun moment caractériser la moindre inexécution fautive par la société MER et MONTAGNE des baux résiliés, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1165 et 1382 du Code civil ;

ALORS en quatrième lieu, subsidiairement, QU'en jugeant que la condamnation de la société MER et MONTAGNE pouvait être justifiée à la fois au titre de la règle selon laquelle l'inexécution fautive d'un contrat est susceptible de causer un préjudice à un tiers et d'engager à son égard la responsabilité civile délictuelle de la partie fautive (arrêt, p.3§3) et à la fois au titre d'un manquement de la société MER et MONTAGNE à ses obligations contractuelles envers les SCI LES CHALETS DE LA VALLEE D'OR et LES HAMEAUX DE LA VALLEE D'OR (ibid.§4), sans à aucun moment préciser si en définitive la condamnation prononcée l'était au titre de la responsabilité délictuelle ou de la responsabilité contractuelle de la société MER et MONTAGNE, la Cour d'appel, qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, a violé l'article 12 du Code de procédure civile ;

ALORS en cinquième lieu, subsidiairement, QU'en toute hypothèse, en condamnant la société MER et MONTAGNE à la fois au titre de sa responsabilité civile délictuelle et de sa responsabilité contractuelle, la Cour d'appel a violé le principe de non-cumul des responsabilités, ensemble les articles 1147 et 1382 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 10-28250
Date de la décision : 02/05/2012
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Chambéry, 12 octobre 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 02 mai. 2012, pourvoi n°10-28250


Composition du Tribunal
Président : M. Terrier (président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Nicolaý, de Lanouvelle et Hannotin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:10.28250
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