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11/04/2012 | FRANCE | N°11-12891

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 11 avril 2012, 11-12891


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Amiens, 27 janvier 2011), que la société Rigida (le débiteur), filiale de la société Rigida international bv, a été mise en redressement judiciaire le 26 septembre 2001 ; qu'un plan de continuation a été arrêté le 6 décembre 2002 ; que le débiteur a, pendant son exécution, vendu à la société Rigida international bv un immeuble et des lignes de fabrication qu'il a ensuite pris en location ; qu'il a été ultérieurement mis en liquidation judicia

ire le 23 septembre 2009, M. X... étant désigné liquidateur (le liquidateur)...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Amiens, 27 janvier 2011), que la société Rigida (le débiteur), filiale de la société Rigida international bv, a été mise en redressement judiciaire le 26 septembre 2001 ; qu'un plan de continuation a été arrêté le 6 décembre 2002 ; que le débiteur a, pendant son exécution, vendu à la société Rigida international bv un immeuble et des lignes de fabrication qu'il a ensuite pris en location ; qu'il a été ultérieurement mis en liquidation judiciaire le 23 septembre 2009, M. X... étant désigné liquidateur (le liquidateur) ; que ce dernier estimant que ces opérations de cessions constituaient des modifications substantielles du plan et auraient dû être décidées par le tribunal, a assigné la société Rigida international bv pour obtenir leur annulation ;
Attendu que le liquidateur fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande alors, selon le moyen :
1°/ qu'une modification substantielle dans les objectifs et les moyens du plan ne peut être décidée que par le tribunal, à la demande du chef d'entreprise et sur le rapport du commissaire à l'exécution du plan ; que pour considérer que le liquidateur ne pouvait soutenir que les opérations de lease-back intervenues les 26 juillet 2007 et 31 décembre 2008 constitueraient une modification substantielle des objectifs et des moyens du plan, la cour d'appel s'est fondée sur le fait que le débiteur n'était pas privé de l'usage de ses biens qui étaient restés en sa possession ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher si les cessions intervenues qui avaient eu pour conséquence que le débiteur n'était plus propriétaire de ses moyens de production même si elle en avait encore l'usage, n'avaient pas bouleversé l'économie du plan de continuation de telle sorte que la liquidation judiciaire avait été prononcée peu de mois après ces cessions, caractérisant ainsi une modification substantielle dans les objectifs et les moyens du plan, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 621-69 du code de commerce ;
2°/ que toute modification substantielle des objectifs et des moyens du plan de continuation doit être soumise à l'appréciation des créanciers intéressés ; que le liquidateur exposait dans ses conclusions d'appel que les cessions litigieuses n'avaient pas été soumises à l'appréciation des créanciers qui pensaient que le débiteur était toujours propriétaire des bâtiments d'exploitation et de ses moyens de production ce qui leur garantissait la bonne exécution du plan ; qu'en se bornant à énoncer que lesdites cessions ne constituaient aucunement un paiement préférentiel de la part du débiteur à l'égard de la société Rigida international bv la cour d'appel a statué par un motif inopérant sans rechercher si ces cession occultes à l'égard des créanciers n'avaient pas modifié de façon substantielle les objectifs et moyens du plan de continuation à l'encontre des créanciers et a ainsi privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 621-69 du code de commerce ;
Mais attendu que l'arrêt constate, par des motifs non critiqués, que le jugement arrêtant le plan de continuation avait prévu l'incessibilité de la marque Rigida et des brevets de fabrication et relève que le liquidateur ne démontre ni même n'allègue que le débiteur avait cédé la marque et les brevets susvisés ; que par ces seuls motifs rendant inopérantes les recherches prétendument omises visées au moyen, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X..., ès qualités, aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le conseiller doyen faisant fonction de président, à l'audience publique du onze avril deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par Me Copper-Royer, avocat aux Conseils pour M. X..., ès qualités
MOYEN UNIQUE DE CASSATION
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Maître X... de sa demande en annulation des cessions opérées entre la Société RIGIDA et la Société RIGIDA INTERNATIONAL BV ;
AUX MOTIFS ADOPTES DES PREMIERS JUGES QUE « pour s'opposer à la demande, la société RIGIDA INTERNATIONAL BV fait valoir qu'elle a engagé et perdu beaucoup d'argent pour sauver la société SAS RIGIDA ce qui justifie qu'elle croyait en cette société ;
Qu'au titre des mesures qu'elle a prises, il faut relever :
- La cession de l'actif immobilier le 3 février 2006 pour le prix de 750. 000 euros à la SCI DU CENTRE avec une franchise de loyers pendant deux ans ;- La vente le 26 juillet 2007 des lignes 2 et 3 pour le prix de 227. 069, 57 € ;- La vente de 4 lignes de fabrication à la Société mère RIGIDA INTERNATIONAL BV pour un montant de 387. 780 euros au cours de l'année 2008, que cela a permis de dégager une plus value pour la Société RIGIDA de 132. 330 euros et de limiter la perte à 38. 636 euros ;- L'abandon par la Société RIGIDA INTERNATIONAL BV de son compte courant à hauteur de 370. 000 euros avec une clause de retour à meilleure fortune ;

Que dans sa décision du 6 décembre 2002, le Tribunal de céans avait déclaré incessibles les seuls actifs incorporels pendant la durée du plan ;
Que l'article L. 621-69 du Code de commerce dont se réfère Maître X... ne saurait permettre de faire annuler des contrats conclus après l'adoption du plan alors que la Société SAS RIGIDA était redevenue in bonis ;
Le débiteur qui reprend la disposition de son patrimoine peut aliéner ses biens seul et sans aucune forme. Le prix entre dans son actif. La Cour de cassation l'a confirmé, à propos justement du plan de continuation soumis au régime antérieur à la réforme de 2005 : après l'arrêté du plan, le débiteur redevenu maître de ses biens (in bonis) peut disposer de ceux-ci ainsi que de leur prix, sans avoir à solliciter l'autorisation du Tribunal ou le juge commissaire, ses, créanciers-étant réglés selon les modalités du plan. (Cass. Com, 21 février 2006 ; Bull. Civ IV n° 46) ;
Sur ce,

… que dès l'arrêté du plan, le débiteur redevenu in bonis, devient seul maître de l'administration et la gestion de son entreprise avec pour seule obligation le respect des engagements qu'il souscrits et les inaliénabilités que le tribunal a pu lui imposer ;

… qu'en l'espèce, les actifs litigieux n'ayant pas été déclarés inaliénables dans le jugement arrêtant le plan, il ne saurait être reproché à la SAS RIGIDA de les avoir vendus, serait-ce à sa société mère ;
… que Maître Philippe X..., es qualités, soutient que la cession de ces moyens de production entraînerait une modification dans les moyens du plan qui, selon l'article L. 621-69 ancien du code de commerce aurait due être autorisée par le tribunal ;
… que le transfert de propriété des moyens de production litigieux ne constitue nullement une modification des moyens du plan des lors que la SAS RIGIDA n'a pas été privée de l'usage desdits bien qui sont restés en sa possession, son potentiel de production n'étant en rien affecté par cette cession ;
… qu'il n'est pas allégué qu'il y ait eu modification des objectifs du plan, la demande, formée au visa de l'article L. 621-69 ancien du code de commerce doit être déclarée privée de fondement ;
… que le visa à l'article 108 du décret du 27 décembre 1985 qui concerne des interdictions faites au cessionnaire dans le cas d'un plan de redressement par cession ne saurait trouver application en l'espèce qui concerne un plan de redressement par continuation ;
Qu'il s'ensuit que Maître Philippe X..., es qualités doit être déclaré mal fondé en sa demande à toutes fins qu'elle comporte et en être débouté » (jugement p. 3, alinéas 1 à 3 des motifs et p. 4, alinéas 1 à 10) ;
ET AUX MOTIFS PROPRES QU'« il convient de noter que le jugement du 6 décembre 2002, arrêtant le plan de redressement par voie de continuation de la SAS RIGIDA, avait prévu comme objectifs et moyens de celui-ci 1°) l'incessibilité la marque « Rigida » et des brevets de fabrication de jantes, 2°) la reconstitution des capitaux propres de l'entreprise par incorporation et capitalisation d'une créance bancaire de 1. 225. 607 euros, 3°) l'apurement des 2. 779. 428 euros de passif en trois, cinq et dix ans et ce même jugement désignait Maître Z... membre de la SCP Y...
X...
Z... comme commissaire à l'exécution du plan ;
Or, au soutien de son action, Maître X..., nommé liquidateur judiciaire de la SAS RIGIDA par jugement du 23 septembre 2009, ne démontre ni même n'allègue que la SAS RIGIDA ait cédé la marque et les brevets susvisés, que la SAS RIGIDA n'ait pas procédé à la recapitalisation prévue, que la SAS RIGIDA n'ait pas respecté ses échéances concordataires de décembre 2002 à septembre 2009. Il ne démontre ni même n'allègue que Maître Z..., membre de la SCP Y...
X...
Z..., commissaire à l'exécution du plan, ait, dans le cadre des obligations et pouvoirs que lui conféraient les dispositions de l'article L. 621-68 du Code de commerce, émis des protestations ou réserves sur la manière dont la SAS RIGIDA honorait ses engagements ;
Ainsi, Maître X... ne saurait soutenir que les opérations de lease-back intervenues les 26 juillet 2007 et 31 décembre 2008 constitueraient « une modification substantielle des objectifs et moyens du plan » qui, comme telle et par application de l'article L. 621-69, auraient dû être autorisées pas le tribunal, dès lors 1°) que les opérations critiquées n'étaient ni directement visées au nombre des « objectifs et moyens » du plan arrêté ni ne modifiaient indirectement les « moyens du plan » puisque la SAS RIGIDA n'étaient pas privée de l'usage des dits biens, nécessaires à son exploitation, restés en sa possession, et dès lors 2°) que lesdites opérations relevaient du plein exercice des droits et devoirs de gestion de la SAS RIGIDA redevenue in bonis ;
Le moyen de Maître X... manque donc par le fait sur lequel il prétend se fonder … …
… Maître X... soutient que les deux cessions, intervenues les 26 juillet 2007 et 31 décembre 2008, auraient constitué une sorte de paiement préférentiel de la part de la SAS RIGIDA à l'égard de la Société RIGIDA INTERNATIONAL BV ;
L'argument, au demeurant nouveau, est dépourvu de fondement ;
En effet, non seulement Maître X... n'étaye pas cette prétention (en démontrant d'une part que la SAS RIGIDA était en état de cessation de paiement au 26 juillet 2007 et qu'à cette date elle a éteint une quelconque dette à l'égard de la société RIGIDA INTERNATIONAL BV) mais encore les faits eux-mêmes contredisent cette assertion et démontrent que c'est l'inverse qui s'est passé ;
Il ressort des pièces produites que la Société RIGIDA INTERNATIONAL BV a réglé, de manière effective, à la SAS RIGIDA, les sommes de 227. 069 euros et de 387. 780 euros pour paiement des deux cessions de matériels, tandis que la SAS RIGIDA n'a pas réglé, de manière effective, les loyers dus pour la location des dits matériels » (arrêt p. 7, alinéas 3 à 5 et p. 8, alinéa 1er) ;
ALORS QUE, D'UNE PART, une modification substantielle dans les objectifs et les moyens du plan ne peut être décidée que par le Tribunal, à la demande du chef d'entreprise et sur le rapport du commissaire à l'exécution du plan ; que pour considérer que Maître X... ne pouvait soutenir que les opérations de lease-back intervenues les 26 juillet 2007 et 31 décembre 2008 constitueraient une modification substantielle des objectifs et des moyens du plan, la Cour d'appel s'est fondée sur le fait que la Société RIGIDA n'était pas privée de l'usage de ses biens qui étaient restés en sa possession ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher si les cessions intervenues qui avaient eu pour conséquence que la Société RIGIDA n'était plus propriétaire de ses moyens de production même si elle en avait encore l'usage, n'avaient pas bouleversé l'économie du plan de continuation de telle sorte que la liquidation judiciaire de la Société RIGIDA avait été prononcée peu de mois après ces cessions, caractérisant ainsi une modification substantielle dans les objectifs et les moyens du plan, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 621-69 du Code de commerce ;
ALORS QUE, D'AUTRE PART, toute modification substantielle des objectifs et des moyens du plan de continuation doit être soumise à l'appréciation des créanciers intéressés ; que Maître X... exposait dans ses conclusions d'appel que les cessions litigieuses n'avaient pas été soumises à l'appréciation des créanciers qui pensaient que la Société RIGIDA était toujours propriétaire des bâtiments d'exploitation et de ses moyens de production ce qui leur garantissait la bonne exécution du plan ; qu'en se bornant à énoncer que lesdites cessions ne constituaient aucunement un paiement préférentiel de la part de la Société RIGIDA à l'égard de la Société RIGIDA INTERNATIONAL BV la Cour d'appel a statué par un motif inopérant sans rechercher si ces cession occultes à l'égard des créanciers n'avaient pas modifié de façon substantielle les objectifs et moyens du plan de continuation à l'encontre des créanciers et a ainsi privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 621-69 du Code de commerce.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 11-12891
Date de la décision : 11/04/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Amiens, 27 janvier 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 11 avr. 2012, pourvoi n°11-12891


Composition du Tribunal
Président : M. Gérard (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Copper-Royer, Me Rouvière

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.12891
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