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05/04/2012 | FRANCE | N°11-12931

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 05 avril 2012, 11-12931


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu , selon l'arrêt attaqué ( Paris, 15 décembre 2010) , que Jean X... , poète et aquarelliste, est décédé le 29 janvier 1967, laissant pour héritiers son épouse, Suzanne de Y..., et leurs cinq enfants parmi lesquels M. Dominique X... et M. Vincent X... dit X... de Y...; que par testament olographe du 29 août 1947 , complété par un codicille daté du 23 août 1961, il a "laissé" à sa femme "la totalité de ses manuscrits en vers et en prose" ; que celle-ci , décédée le 7 novembre 1992 , a "

laissé" à M. Vincent X... , par testament olographe du 10 mars 1986, "tous ...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu , selon l'arrêt attaqué ( Paris, 15 décembre 2010) , que Jean X... , poète et aquarelliste, est décédé le 29 janvier 1967, laissant pour héritiers son épouse, Suzanne de Y..., et leurs cinq enfants parmi lesquels M. Dominique X... et M. Vincent X... dit X... de Y...; que par testament olographe du 29 août 1947 , complété par un codicille daté du 23 août 1961, il a "laissé" à sa femme "la totalité de ses manuscrits en vers et en prose" ; que celle-ci , décédée le 7 novembre 1992 , a "laissé" à M. Vincent X... , par testament olographe du 10 mars 1986, "tous les manuscrits et les écrits de son père sur la famille X..." et a ajouté :"qu'on essaye de les publier", en précisant que si aucun des enfants n'était intéressé par les papiers de famille et les écrits de son époux , il conviendrait "de déposer ceux-ci aux Archives d'Auvergne et de Bourgogne" ;

Attendu que M. Vincent X... ayant fait reproduire sous forme de cartes postales, des aquarelles de son père , organisé des expositions et légué certaines des aquarelles à la commune de Saint-Aubin-Châteauneuf, M Dominique X..., l'a assigné en annulation des dispositions testamentaires prises par leur père, et en interdiction de la publication ou de la remise à un musée des aquarelles ou de toute oeuvre non divulguée ;

Sur le premier moyen :

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt confirmatif de débouter M. Dominique X... de son action tendant notamment à voir juger que M. Vincent X... de Y... n'était pas propriétaire des manuscrits du poète Jean X... et qu'il les détenait sans droit ni titre alors, selon le moyen, que, selon l'article 1007 du code civil, tout testament olographe doit, avant d'être mis à exécution, être déposé entre les mains d'un notaire ; qu'en l'espèce, dans ses conclusions d'appel du 20 octobre 2010, M. Dominique X... se prévalait expressément des dispositions de l'article 1007 du code civil et soutenait, sans être contredit sur ce point, que ni le testament olographe de Jean X... en date du 25 août 1947 ni son codicille du 23 août 1961 n'avaient été déposés au rang des minutes d'un notaire, de sorte que leurs dispositions ne pouvaient pas être exécutées ; que dès lors, en décidant que les manuscrits légués par Jean X... à son épouse, aux termes du codicille du 23 août 1961, avaient été valablement légués par celle-ci à M. Vincent X... par testament olographe du 10 mars 1986, sans rechercher, comme elle y était invitée, si les testament et codicille olographes de Jean X... avaient été déposés entre les mains d'un notaire, à défaut de quoi, ils n'avaient pu valablement être mis à exécution, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1007 du code civil.

Mais attendu que la cour d'appel a tiré du contexte des dispositions testamentaires prises par Jean X... puis par Suzanne de Y..., que le verbe "laisser" devait s'entendre comme signifiant "léguer", que les manuscrits de Jean X... avaient dès lors été légués à M. Vincent X... de Y... et que la preuve de l'inexécution des dispositions testamentaires prises par Jean X... n'était pas rapportée , peu important à cet égard l'absence de dépôt du testament et du codicille entre les mains d'un notaire ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt de débouter M. Dominique X... de son action tendant notamment à faire juger que le legs des manuscrits et écrits de Jean X... consenti à son frère Vincent par testament du 10 mars 1986 était assorti de restrictions que celui-ci avait l'obligation de respecter et à lui faire défense de procéder à la remise de ce legs à un musée sans l'accord de tous les ayants- droit ,alors, selon le moyen , que le testament olographe de Suzanne de Y... veuve X... en date du 10 mars 1986 disposait, en termes clairs et précis, que : «Je laisse à Vincent tous les manuscrits et les écrits de son père sur la famille X... et littéraires les laissant plus tard à celui qui s'y intéressera. qu'on essaye de les publier…», en précisant in fine qu'« A mes enfants qui n‘ont pas de descendance je voudrais que tout ce qui vient de nos familles y demeure. Si aucun ne s'y intéresse (papiers de famille) et aux écrits de Jean X..., il faudrait les déposer aux archives d'Auvergne et de Bourgogne» ; qu'aux termes clairs et précis de ce testament, le légataire avait ainsi la charge de conserver les manuscrits de son père pour les léguer plus tard au membre de la famille qui s'y intéresserait ou, à défaut, aux archives d'Auvergne et de Bourgogne ;que dès lors, en déclarant que les dispositions prises par Suzanne de Y... ne recélaient pas une charge grevant les attributions de M. Vincent X... de Y... ou encore une restriction à son droit de propriété, la cour d'appel a dénaturé le testament litigieux, en violation de l'article 1134 du code civil ;

Mais attendu que c'est par une interprétation exclusive de toute dénaturation, rendue nécessaire par l'ambiguïté de leurs termes , que la cour d'appel a retenu que les dispositions testamentaires de Suzanne de Y... ne recelaient pas une charge ou une restriction au droit de propriété , mais exprimaient le souhait de la testatrice de voir les oeuvres de Jean X... remises "plus tard", c'est à dire "après son fils Vincent" , à un membre de la famille intéressé et à défaut , confiées aux archives régionales ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le troisième moyen :

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt de débouter M. Dominique X... de son action tendant à faire juger que conformément aux dispositions de l'article L. 121-2 du Code de la propriété intellectuelle, tous les droits découlant de la propriété incorporelle, notamment le droit de divulgation, appartenaient conjointement et indivisément à tous les héritiers de l'auteur ou à leurs représentants et sollicitant qu'il soit fait défense à son frère Vincent de procéder à la divulgation ou à la remise à un musée des manuscrits et aquarelles de Jean X... sans l'accord de tous les ayants droit , alors, selon le moyen, que le droit moral de l'auteur est dévolu à ses héritiers, selon les règles ordinaires de la dévolution successorale ;qu'en l'espèce, il résulte des propres constatations de l'arrêt que M. Vincent X... de Y... n'était pas seul titulaire de l'exercice du droit de divulgation des oeuvres de son père défunt, lequel était dévolu à l'ensemble des descendants de Jean X... ; que M. Dominique X... faisait grief à son frère Vincent d'avoir remis, sans l'accord des autres héritiers, l'intégralité des manuscrits et aquarelles de Jean X... à la commune de Saint-Aubin-Châteauneuf (87), en vue de leur conservation et de leur présentation au public dans le cadre de la création d'un musée Jean X..., alors que cette commune ne disposait pas des moyens financiers nécessaires pour faire vivre ce musée, et sollicitait, en conséquence, qu'il soit fait défense à M. Vincent X... de Y... de procéder ainsi à la divulgation de l'oeuvre de leur père sans l'accord des autres titulaires de ce droit ; que dès lors, en se déterminant au motif inopérant qu'il n'était pas démontré que M. Vincent X... de Y... ait fait un usage abusif du droit de divulgation ou qu'il ait porté atteinte au respect de l'oeuvre, sans rechercher, comme elle y était invitée, si celui-ci pouvait transmettre seul à un tiers, l'exercice d'un droit moral qu'il partageait conjointement avec les autres héritiers de Jean X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 121-2 du code de la propriété intellectuelle ;

Mais attendu que l'arrêt relève par un motif non critiqué que les initiatives prises par M. Vincent X... de Y... ont participé à la mise en valeur et à la promotion de l'oeuvre , conformément à la personnalité et à la volonté de l'auteur ; que la cour d'appel a pu déduire de ces constatations, sans encourir le grief du moyen, que la seule absence de concertation avec M. Dominique X... avant la communication des oeuvres à la commune de Saint-Aubin-Châteauneuf, ne justifiait pas le prononcé de la mesure d'interdiction sollicitée ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le quatrième moyen :

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué de débouter M. Dominique X... de son action tendant à la condamnation

de M. Vincent X... de Y... à communiquer sous astreinte les manuscrits de Jean X... en sa possession à un mandataire de justice, alors, selon le moyen, qu'en cas de conflit entre les héritiers titulaires du droit de divulgation post mortem, il appartient au juge d'ordonner toute mesure appropriée ; qu'en l'espèce, il était constant qu'un litige opposait M. Dominique X... à son frère Vincent sur l'exercice du droit de divulgation de l'oeuvre de leur auteur feu Jean X..., M. Dominique X... reprochant essentiellement à son frère d'avoir remis, sans son accord, l'intégralité des manuscrits et aquarelles composant l'oeuvre de leur père à la commune de Saint-Aubin-Châteauneuf (87), en vue de la création d'un musée ; que dès lors, en se bornant à affirmer, pour refuser la désignation d'un mandataire de justice chargé de dresser un inventaire de l'oeuvre et d'en assurer la conservation, que M. Vincent X... de Y... alléguait, sans être contredit, n'avoir jamais refusé à ses frères et soeur l'accès aux oeuvres de leur père, sans rechercher, comme elle y était invitée, quel était le moyen approprié afin d'en assurer la conservation et la divulgation, compte tenu du conflit existant entre les héritiers de Jean X..., la cour d'appel, qui n'a pas exercé les prérogatives dévolues par la loi, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 121-3 du code de la propriété intellectuelle.

Mais attendu qu'ayant constaté que M Vincent X... n'était pas contredit lorsqu'il affirmait n'avoir jamais refusé à ses frères et soeur l'accès aux oeuvres de leur père et n'avoir jamais reçu une demande en ce sens de son frère Dominique, la cour d'appel en a déduit que la remise de celles-ci à un mandataire de justice serait dépourvue de toute justification ; qu'elle a ainsi, sans encourir le grief du moyen, légalement justifié sa décision de ce chef ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. Dominique X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq avril deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par laSCP de Chaisemartin et Courjon, avocat aux Conseils pour M. Dominique X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir débouté M. Dominique X... de son action tendant notamment à voir juger que M. Vincent X... de Y... n'était pas propriétaire des manuscrits du poète Jean X... et qu'il les détenait sans droit ni titre ;

AUX MOTIFS QUE, sur le legs des manuscrits, dès lors que, par codicille daté du 23 août 1961, Jean X... a "laissé" à Suzanne de Y... "la totalité de s es manuscrits vers et prose" et que, par testament olographe daté du 10 mars 1986, Suzanne de Y... a "laissé" à son fils Vincent "tous les manuscrits et les écrits de son Père sur la famille X... et littéraires", le terme "laisser" signifiant ici, dans le contexte des dispositions testamentaires, "léguer", il y a lieu de décider que les manuscrits de Jean X... ont été légués à Monsieur Vincent X... ; que M. Dominique X... ne démontre pas que, comme il le prétend, les héritiers auraient renoncé aux dispositions testamentaires de Jean X... ; qu'en effet, d'un commun accord avec Suzanne de Y..., les enfants de Jean X... ont pu décider de ne pas procéder à la liquidation et au partage de la succession de leur père durant la vie de leur mère, sans pour autant qu'il s'en déduise une renonciation au testament et au codicille ; que le fait que Suzanne de Y... n'ait prétendument pas fait publier une oeuvre de Jean X..., contrairement à la volonté exprimée par celui-ci dans son testament, ne saurait signifier que celleci considérait le testament comme étant dépourvu de valeur juridique ; que, par ailleurs, il ne peut être admis qu'en signant l'acte de partage de la succession de leur mère dans lequel le notaire précise que la de cujus "a pris diverses dispositions concernant la répartition entre ses descendants de divers objets mobiliers et souvenirs de famille", les héritiers auraient ainsi reconnu qu'il n'existait aucun legs à leur profit, le terme "prendre des dispositions", loin d'être antinomique avec celui de "legs", étant même en parfaite concordance avec celui-ci, étant observé que M. Dominique X... a lui-même accepté le legs qui lui a été conféré, après avoir indiqué dans une lettre du 11 décembre 1992 qu'il entendait respecter les volontés de sa mère ;

ALORS QUE, selon l'article 1007 du code civil, tout testament olographe doit, avant d'être mis à exécution, être déposé entre les mains d'un notaire ; qu'en l'espèce, dans ses conclusions d'appel du 20 octobre 2010 (cf. p. 4, § 1 à 3), M. Dominique X... se prévalait expressément des dispositions de l'article 1007 du Code civil et soutenait, sans être contredit sur ce point, que ni le testament olographe de Jean X... en date du 25 août 1947 ni son codicille du 23 août 1961 n'avaient été déposés au rang des minutes d'un notaire, de sorte que leurs dispositions ne pouvaient pas être exécutées ; que dès lors, en décidant que les manuscrits légués par Jean X... à son épouse, aux termes du codicille du 23 août 1961, avaient été valablement légués par celle-ci à M. Vincent X... par testament olographe du 10 mars 1986, sans rechercher, comme elle y était invitée, si les testament et codicille olographes de Jean X... avaient été déposés entre les mains d'un notaire, à défaut de quoi, ils n'avaient pu valablement être mis à exécution, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1007 du code civil.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir débouté M. Dominique X... de son action tendant notamment à voir juger que le legs des manuscrits et écrits de Jean X... consenti à son frère Vincent par testament du 10 mars 1986 était assorti de restrictions que celui-ci avait l'obligation de respecter et à lui faire défense de procéder à la remise de ce legs à un musée sans l'accord de tous les ayants droit ;

AUX MOTIFS QUE, sur le legs des manuscrits, (…) les dispositions prises par Suzanne de Y..., selon lesquelles "Je laisse à Vincent tous les manuscrits et les écrits de son Père sur la famille X... et littéraires les laissant plus tard à celui qui s'y intéressera. qu'on essaye de les publier ... A mes enfants qui n‘ont pas de descendance je voudrais que tout ce qui vient de nos familles y demeure. Si aucun ne s y intéresse (aux papiers de famille) et aux écrits de Jean X..., il faudrait les déposer aux archives d'Auvergne et de Bourgogne", ne recèlent pas une charge grevant les attributions ou encore une restriction au droit de propriété, mais expriment seulement le voeu de la testatrice de voir, après son fils Vincent ("plus tard"), les oeuvres de Jean X... remises à un membre de la famille qui s'y intéressera et, à défaut seulement, confiées à des archives régionales ;

ALORS QUE le testament olographe de Suzanne de Y... veuve X... en date du 10 mars 1986 disposait, en termes clairs et précis, que : «Je laisse à Vincent tous les manuscrits et les écrits de son père sur la famille X... et littéraires les laissant plus tard à celui qui s'y intéressera. qu'on essaye de les publier…», en précisant in fine qu'«A mes enfants qui n‘ont pas de descendance je voudrais que tout ce qui vient de nos familles y demeure. Si aucun ne s'y intéresse (papiers de famille) et aux écrits de Jean X..., il faudrait les déposer aux archives d'Auvergne et de Bourgogne» ; qu'aux termes clairs et précis de ce testament, le légataire avait ainsi la charge de conserver les manuscrits de son père pour les léguer plus tard au membre de la famille qui s'y intéresserait ou, à défaut, aux archives d'Auvergne et de Bourgogne ; que dès lors, en déclarant que les dispositions prises par Suzanne de Y... ne recélaient pas une charge grevant les attributions de M. Vincent X... de Y... ou encore une restriction à son droit de propriété, la cour d'appel a dénaturé le testament litigieux, en violation de l'article 1134 du code civil.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir débouté M. Dominique X... de son action tendant à voir juger que conformément aux dispositions de l'article L. 121-2 du Code de la propriété intellectuelle, tous les droits découlant de la propriété incorporelle, notamment le droit de divulgation, appartenaient conjointement et indivisément à tous les héritiers de l'auteur ou à leurs représentants et sollicitant qu'il soit fait défense à son frère Vincent de procéder à la divulgation ou à la remise à un musées des manuscrits et aquarelles de Jean X... sans l'accord de tous les ayants droit ;

AUX MOTIFS QUE, sur le droit moral de Jean X..., tant le droit de divulgation des oeuvres posthumes de Jean X..., en vertu de l'article L. 121-2 du Code de la propriété intellectuelle, que le droit au respect de son oeuvre, en vertu des règles successorales, sont exercés par ses descendants ; que, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, la transmission des oeuvres de Jean X... à son fils Vincent n'a pas emporté la transmission du droit de divulgation ; que toutefois Monsieur Dominique X... ne démontre pas que M. Vincent X... ait fait un usage abusif, au sens de l'article L. 121-3 du code précité, du droit de divulgation ou qu'il ait porté atteinte au respect de l'oeuvre ; qu'en effet, d'une part, au contraire, M. Vincent X... a participé activement à la promotion et à la mise en valeur des manuscrits et des aquarelles de Jean X..., exerçant ainsi le droit de divulgation au service de l'oeuvre, en accord avec la personnalité, la volonté et les convictions de l'auteur telles que révélées et exprimées de son vivant ; que, d'autre part, celui-ci n'est pas contredit lorsqu'il affirme n'avoir jamais refusé à ses frères et soeur l'accès aux oeuvres de leur père et n'avoir jamais reçu une demande en ce sens de son frère Dominique, alors que sa soeur Jeanne et son frère Philippe ont consulté à leur demande les archives de Jean X... ; que, dans ces conditions, la remise des oeuvres à un mandataire de justice serait dépourvue de toute justification ;

ALORS QUE le droit moral de l'auteur est dévolu à ses héritiers, selon les règles ordinaires de la dévolution successorale ; qu'en l'espèce, il résulte des propres constatations de l'arrêt (cf. p. 5, § 4 et 5) que M. Vincent X... de Y... n'était pas seul titulaire de l'exercice du droit de divulgation des oeuvres de son père défunt, lequel était dévolu à l'ensemble des descendants de Jean X... ; que M. Dominique X... faisait grief à son frère Vincent d'avoir remis, sans l'accord des autres héritiers, l'intégralité des manuscrits et aquarelles de Jean X... à la commune de SAINT-AUBIN-CHÂTEAUNEUF (87), en vue de leur conservation et de leur présentation au public dans le cadre de la création d'un musée JEAN X..., alors que cette commune ne disposait pas des moyens financiers nécessaires pour faire vivre ce musée, et sollicitait, en conséquence, qu'il soit fait défense à M. Vincent X... de Y... de procéder ainsi à la divulgation de l'oeuvre de leur père sans l'accord des autres titulaires de ce droit ; que dès lors, en se déterminant au motif inopérant qu'il n'était pas démontré que M. Vincent X... de Y... ait fait un usage abusif du droit de divulgation ou qu'il ait porté atteinte au respect de l'oeuvre, sans rechercher, comme elle y était invitée, si celuici pouvait transmettre seul à un tiers, l'exercice d'un droit moral qu'il partageait conjointement avec les autres héritiers de Jean X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 121-2 du Code de la propriété intellectuelle.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir débouté M. Dominique X... de son action tendant notamment à voir condamner M. Vincent X... de Y... à communiquer sous astreinte les manuscrits de Jean X... en sa possession à un mandataire de justice ;

AUX MOTIFS QUE, sur le droit moral de Jean X..., tant le droit de divulgation des oeuvres posthumes de Jean X..., en vertu de l'article L. 121-2 du Code de la propriété intellectuelle, que le droit au respect de son oeuvre, en vertu des règles successorales, sont exercés par ses descendants ; que, contrairement à ce qu'a jugé le Tribunal, la transmission des oeuvres de Jean X... à son fils Vincent n'a pas emporté la transmission du droit de divulgation ; que toutefois que M. Dominique X... ne démontre pas que M. Vincent X... ait fait un usage abusif, au sens de l'article L. 121-3 du Code précité, du droit de divulgation ou qu'il ait porté atteinte au respect de l'oeuvre ; qu'en effet, d'une part, au contraire, M. Vincent X... a participé activement à la promotion et à la mise en valeur des manuscrits et des aquarelles de Jean X..., exerçant ainsi le droit de divulgation au service de l'oeuvre, en accord avec la personnalité, la volonté et les convictions de l'auteur telles que révélées et exprimées de son vivant ; que, d'autre part, celui-ci n'est pas contredit lorsqu'il affirme n'avoir jamais refusé à ses frères et soeur l'accès aux oeuvres de leur père et n'avoir jamais reçu une demande en ce sens de son frère Dominique, alors que sa soeur Jeanne et son frère Philippe ont consulté à leur demande les archives de Jean X... ; que, dans ces conditions, la remise des oeuvres à un mandataire de justice serait dépourvue de toute justification ;

ALORS QU'en cas de conflit entre les héritiers titulaires du droit de divulgation post mortem, il appartient au juge d'ordonner toute mesure appropriée ; qu'en l'espèce, il était constant qu'un litige opposait M. Dominique X... à son frère Vincent sur l'exercice du droit de divulgation de l'oeuvre de leur auteur feu Jean X..., M. Dominique X... reprochant essentiellement à son frère d'avoir remis, sans son accord, l'intégralité des manuscrits et aquarelles composant l'oeuvre de leur père à la commune de SAINT-AUBIN-CHÂTEAUNEUF (87), en vue de la création d'un musée ; que dès lors, en se bornant à affirmer, pour refuser la désignation d'un mandataire de justice chargé de dresser un inventaire de l'oeuvre et d'en assurer la conservation, que M. Vincent X... de Y... alléguait, sans être contredit, n'avoir jamais refusé à ses frères et soeur l'accès aux oeuvres de leur père, sans rechercher, comme elle y était invitée, quel était le moyen approprié afin d'en assurer la conservation et la divulgation, compte tenu du conflit existant entre les héritiers de Jean X..., la cour d'appel, qui n'a pas exercer les prérogatives dévolues par la loi, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 121-3 du code de la propriété intellectuelle.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 11-12931
Date de la décision : 05/04/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 15 décembre 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 05 avr. 2012, pourvoi n°11-12931


Composition du Tribunal
Président : M. Charruault (président)
Avocat(s) : Me Bouthors, SCP de Chaisemartin et Courjon

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.12931
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