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04/04/2012 | FRANCE | N°10-21605

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 04 avril 2012, 10-21605


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 29 janvier 2010), que la prime de fin d'année accordée par la société Cegelec Nord et Est à ses salariés était exclue du mode de calcul de la rémunération minimale conventionnelle jusqu'au 1er janvier 2003 ; qu'à la suite de l'entrée en vigueur à cette date des avenants n° 2 à la convention collective nationale des ouvriers des travaux publics et n° 18 à la convention collective nationale des ETAM des travaux publics, la prime de fin

d'année a été incluse par l'employeur dans le calcul de la rémunération minima...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 29 janvier 2010), que la prime de fin d'année accordée par la société Cegelec Nord et Est à ses salariés était exclue du mode de calcul de la rémunération minimale conventionnelle jusqu'au 1er janvier 2003 ; qu'à la suite de l'entrée en vigueur à cette date des avenants n° 2 à la convention collective nationale des ouvriers des travaux publics et n° 18 à la convention collective nationale des ETAM des travaux publics, la prime de fin d'année a été incluse par l'employeur dans le calcul de la rémunération minimale conventionnelle ; que le comité d'établissement de la société Cegelec Nord et Est et le syndicat CGT Cegelec Nord et Est ont contesté cette mesure devant le tribunal de grande instance en invoquant l'existence d'un engagement unilatéral de l'employeur d'exclure la prime de la base de calcul du salaire minimum et subsidiairement un usage prévoyant une telle exclusion ;

Attendu que le syndicat CGT Cegelec Nord et Est et le comité d'établissement de la société Cegelec Nord et Est font grief à l'arrêt de débouter ce syndicat de ses demandes, alors, selon le moyen :

1°/ que l'usage d'entreprise ou d'établissement se caractérise comme un avantage accordé à tous les salariés de manière générale, fixe et constante ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt que la société Cegelec Nord et Est avait, de manière générale, fixe et constante, exclu pendant plusieurs années la prime de fin d'année du calcul de la rémunération minimum déterminée par la convention collective applicable, et ce avant que la convention collective nationale des travaux publics du 15 décembre 1992 ait prévu l'exclusion de toutes les primes du salaire minimum conventionnel ; qu'il s'en déduit que cet avantage s'analyse comme un usage à caractère obligatoire, peu important la coexistence du même avantage conventionnel à partir du 15 décembre 1992 ; qu'en retenant l'existence de cet usage tout en lui déniant tout effet juridique compte tenu de l'intervention de la convention collective de 1992, la cour d'appel, qui n'a pas déduit les conséquences légales de ses constatations de fait, a violé, par fausse application, les dispositions de l'article 1134 du code civil ;

2°/ que l'article 4-1-2 alinéa 13 de l'avenant n° 2 du 24 juillet 2002 à la convention collective nationale des travaux publics, relatif au personnel ouvrier, et l'article 3 alinéa 21 de l'avenant n° 18 du 24 juillet 2002 à cette même convention collective, relatif au personnel ETAM, prévoient que leurs dispositions imposant l'inclusion des éléments accessoires de salaire dans la rémunération conventionnelle ne font pas obstacle aux dispositions plus favorables résultant en particulier d'usages préexistants ; qu'en refusant de considérer que l'usage d'entreprise imposant l'exclusion de la prime de fin d'année du salaire minimum conventionnel, dont elle avait constaté l'existence, devait continuer de s'appliquer conformément aux dispositions conventionnelles précitées, aux motifs erronés que cette exclusion avait pour fondement juridique la convention collective nationale des travaux publics du 15 décembre 1992, la cour d'appel a violé, par refus d'application, ces dispositions des articles 4-1-2 alinéa 13 de l'avenant n° 2 du 24 juillet 2002 et 3 alinéa 21 de l'avenant n° 18 du 24 juillet 2002 ;

3°/ qu'en toute hypothèse les articles 4-1-2 alinéa 13 de l'avenant n° 2 du 24 juillet 2002 relatif au personnel ouvrier et 3 alinéa 21 de l'avenant n° 18 du 24 juillet 2002 relatif aux ETAM prévoit que la règle de l'inclusion des primes dans le salaire minimum conventionnel ne faisait pas obstacle aux dispositions plus favorables résultant d'accords d'entreprise (ou d'établissement) ou d'usages préexistants ; qu'en se bornant à relever que la pratique de l'inclusion de la prime de fin d'année dans le salaire minimum était prévue par la convention collective du 15 décembre 1992 pour en déduire qu'elle avait été remise en cause par les avenants n° 2 et 18 du 24 juillet 2002 prévoyant l'inclusion de la prime, sans rechercher si l'usage d'entreprise dont elle avait constaté la réalité n'était pas antérieur au 15 décembre 1992, et si en conséquence, la pratique de l'inclusion de la prime ne trouvait pas son origine dans cet usage de sorte qu'elle devait perdurer postérieurement au 24 juillet 2002, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions précitées des articles 4-1-2 alinéa 13 de l'avenant n° 2 du 24 juillet 2002 relatif au personnel ouvrier et 3 alinéa 21 de l'avenant n° 18 du 24 juillet 2002 relatif aux ETAM ;

Mais attendu que la cour d'appel a retenu que la pratique suivie dans l'entreprise, jusqu'au 1er janvier 2003, d'exclure la prime de fin d'année du mode de calcul des salaires minima ne constituait pas un usage mais résultait de la seule application par l'employeur des dispositions de la convention collective nationale des ETAM des travaux publics du 21 juillet 1965 et de la convention collective nationale des ouvriers des travaux publics du 15 décembre 1992 avant leur modification par avenants du 24 juillet 2002, entrés en vigueur le 1er janvier 2003, ayant prévu l'inclusion de tous les éléments permanents du salaire dans la base de calcul de la rémunération minimale conventionnelle ; que le moyen, qui manque en fait, ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne le comité d'établissement de la société Cegelec Nord et Est et le syndicat Cgt Cegelec Nord et Est aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre avril deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils pour le syndicat Cgt Cegelec Nord et Est et pour le comité d'établissement de la société Cegelec Nord et Est

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté le Syndicat CGT CEGELEC NORD ET EST de sa demande tendant à ce qu'il soit ordonné à la société CEGELEC NORD ET EST d'exécuter son engagement unilatéral d'exclure du calcul du salaire minimum conventionnel la prime de fin d'année, et subsidiairement, d'exécuter l'usage d'entreprise consistant dans cette exclusion ;

AUX MOTIFS QU'une prime de fin d'année (PFA) octroyée depuis plusieurs années par la société Cegelec Nord et Est à ses salariés, reprise dans un accord d'entreprise du 4 mai 1993 qui l'a fixée à 70 % d'un mois de salaire pour les ouvriers et 85 % pour les employés, techniciens et agents de maîtrise (ETAM), a été incluse dans le calcul de la rémunération conventionnelle annuelle minimale (RCAM) à la suite de l'entrée en vigueur des avenants 2 et 18 à la convention collective des travaux publics ;

QUE le syndicat CGT Cegelec Nord et Est soutient en premier lieu que le fait d'exclure les PFA des minima conventionnels résulte d'un engagement unilatéral de l'employeur et, subsidiairement, d'un usage non dénoncé ; qu'un engagement unilatéral se distingue d'un usage en ce qu'il est issu d'une volonté explicitement manifestée de l'employeur ; que pour faire la démonstration de cet engagement, le syndicat CGT invoque d'abord sa reconnaissance par l'employeur dans ses conclusions devant le Tribunal ; que toutefois dans ses écritures visées le 9 mai 2002, la SA Cegelec Nord et Est affirme exactement le contraire : "il n'existe aucun engagement unilatéral et aucune preuve n'est rapportée quant à son existence ; qu'il invoque ensuite un document du 15 janvier 1982 relatif au maintien de la rémunération des salariés transférés de la société Comsip à la CGE Alstom qui annonce, dans le cadre des dispositions transitoires pour l'année 1982, que ceux-ci toucheront une prime exceptionnelle et une prime de fin d'année dont le montant total sera au moins égal à la PFA et qui précise que ces primes ne seront pas prises en compte pour le calcul des minima ; que cependant un tel engagement pris au titre des mesures transitoires d'intégration des salariés issus d'une entité reprise, ne manifeste pas une volonté explicite de ne pas prendre en compte à l'avenir la PFA pour le calcul des minima ; qu'il évoque enfin un accord d'entreprise en date du 4 mai 1993 qui prévoit de porter la PFA des ouvriers de 55% d'un mois de salaire à 70 % de celui-ci, au terme d'une période de 4 années. Cependant le syndicat CGT ne s'appuie pas sur ce document, qui ne dit rien sur l'intégration ou non de la PFA à la base de calcul des minima, mais souligne simplement que cet accord n'a pas remis en cause l'engagement pris en 1982 ; qu'il en résulte que l'engagement unilatéral allégué n'est pas démontré ;

QU'iI est constant que jusqu'au 1er janvier 2003, date d'extension à toutes les entreprises relevant de la convention collective des travaux publics d'un avenant à cette convention conclu le 24 juillet 2002, la PFA attribuée à ses salariés par la société Cegelec Nord et Est n'entrait pas en compte dans le calcul des minima. Celle-ci déclarait d'ailleurs dans ses écritures en première instance qu'il lui était en réalité reproché d'avoir mis cet avenant en application ; que le syndicat CGT fonde sur ce point son argumentation sur le fait que l'accord du 24 juillet 2002 mentionne, in fine de son article 4-1-2 relatif à la rémunération annuelle, que "les présentes dispositions ne font pas obstacle à celles plus favorables résultant d'accords d'entreprise (ou d'établissement) ou d'usages préexistant" ; que toutefois, si la pratique habituellement suivie dans l'entreprise qui revêt les caractères de constance, de généralité et de fixité, constitue un usage, encore faut-il qu'elle formalise un avantage supplémentaire accordé aux salariés, ou à une catégorie de salariés, par rapport à la loi, à la convention collective ou au contrat puisque ce qui est en jeu réside dans la volonté non équivoque de l'employeur d'octroyer un tel avantage ; que la convention collective des ouvriers des travaux publics du 15 décembre 1992, texte modifié par l'avenant du 24 juillet 2002, dispose en son article 4-1-1 que "le salaire mensuel constitue la rémunération des ouvriers des travaux publics (...)" et, en son article 4-1-3 qu'au salaire mensuel s'ajoutent, le cas échéant "les diverses majorations, primes et indemnités (...)" ; que par ailleurs l'accord du 24 juillet 2002 dispose quant à lui dans son article 4-1-2 que "La rémunération annuelle comprend tous les éléments bruts de rémunération acquis dans le cadre d'une année civile, y compris (...) tous les éléments permanents du salaire. En sont exclus les éléments suivants (...) les primes et gratifications ayant un caractère aléatoire ou exceptionnel" ; qu'on ne peut soutenir utilement que la prime de fin d'année, qui s'apparente à un treizième mois et qui est versée chaque année à hauteur d'un pourcentage fixe du salaire, aurait un caractère aléatoire ou exceptionnel. Le syndicat CGT déplore dans ses écritures que la PFA "est fixée par l'employeur en début d'année, soit J/12éme par rapport au salaire de base", alors que selon lui, elle devrait être "de l/12eme de la rémunération perçue par le salarié et ne devrait être chiffrée qu'a posteriori" et de conclure "il est en réalité impossible de définir à l'avance la PFA. Elle n'est ni fixe ni constante", alors même que sa constance et sa fixité découlent précisément des modalités de calcul qu'il critique ; que c'est donc à tort que l'appelant soutient que la pratique suivie par l'entreprise Cegelec Nord et Est constitue un usage dont la dénonciation serait soumise à l'obligation d'information préalable des salariés ainsi que de leurs institutions représentatives et au respect d'un délai de prévenance, l'employeur s'étant contenté, avant comme après le 1er janvier 2003, d'appliquer les dispositions conventionnelles en vigueur ;

ALORS, D'UNE PART, QUE l'usage d'entreprise ou d'établissement se caractérise comme un avantage accordé à tous les salariés de manière générale, fixe et constante ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt que la société CEGELEC NORD ET EST avait, de manière générale, fixe et constante, exclu pendant plusieurs années la prime de fin d'année du calcul de la rémunération minimum déterminée par la convention collective applicable, et ce avant que la convention collective nationale des travaux publics du 15 décembre 1992 ait prévu l'exclusion de toutes les primes du salaire minimum conventionnel ; qu'il s'en déduit que cet avantage s'analyse comme un usage à caractère obligatoire, peu important la coexistence du même avantage conventionnel à partir du 15 décembre 1992 ; qu'en retenant l'existence de cet usage tout en lui déniant tout effet juridique compte tenu de l'intervention de la convention collective de 1992, la cour d'appel, qui n'a pas déduit les conséquences légales de ses constatations de fait, a violé, par fausse application, les dispositions de l'article 1134 du code civil ;

ALORS, D'AUTRE PART, QUE l'article 4-1-2 alinéa 13 de l'avenant n° 2 du 24 juillet 2002 à la convention c ollective nationale des travaux publics, relatif au personnel ouvrier, et l'article 3 alinéa 21 de l'avenant n° 18 du 24 juillet 2002 à cette même convention collective, relatif au personnel ETAM, prévoient que leurs dispositions imposant l'inclusion des éléments accessoires de salaire dans la rémunération conventionnelle ne font pas obstacle aux dispositions plus favorables résultant en particulier d'usages préexistants ; qu'en refusant de considérer que l'usage d'entreprise imposant l'exclusion de la prime de fin d'année du salaire minimum conventionnel, dont elle avait constaté l'existence, devait continuer de s'appliquer conformément aux dispositions conventionnelles précitées, aux motifs erronés que cette exclusion avait pour fondement juridique la convention collective nationale des travaux publics du 15 décembre 1992, la cour d'appel a violé, par refus d'application, ces dispositions des articles 4-1-2 alinéa 13 de l'avenant n° 2 du 24 juillet 2002 et 3 alinéa 21 de l'avenant n° 18 du 24 juillet 2002 ;

ET ALORS EN TOUTE HYPOTHESE QUE les articles 4-1-2 alinéa 13 de l'avenant n° 2 du 24 juillet 2002 relatif au personnel ouvrier et 3 alinéa 21 de l'avenant n° 18 du 24 juillet 2002 re latif aux ETAM prévoit que la règle de l'inclusion des primes dans le salaire minimum conventionnel ne faisait pas obstacle aux dispositions plus favorables résultant d'accords d'entreprise (ou d'établissement) ou d'usages préexistants ; qu'en se bornant à relever que la pratique de l'inclusion de la prime de fin d'année dans le salaire minimum était prévue par la convention collective du 15 décembre 1992 pour en déduire qu'elle avait été remise en cause par les avenants n° 2 et 18 du 24 juillet 2002 prévoyant l'inclusion de la prime, sans rechercher si l'usage d'entreprise dont elle avait constaté la réalité n'était pas antérieur au 15 décembre 1992, et si en conséquence, la pratique de l'inclusion de la prime ne trouvait pas son origine dans cet usage de sorte qu'elle devait perdurer postérieurement au 24 juillet 2002, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions précitées des articles 4-1-2 alinéa 13 de l'avenant n° 2 du 24 juillet 2002 relatif au personnel ouvrier et 3 alinéa 21 de l'avenant n° 18 du 24 juillet 2002 relatif aux ETAM.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-21605
Date de la décision : 04/04/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 29 janvier 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 04 avr. 2012, pourvoi n°10-21605


Composition du Tribunal
Président : Mme Mazars (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:10.21605
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