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03/04/2012 | FRANCE | N°11-14328

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 03 avril 2012, 11-14328


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu l'article 640 du code civil ;
Attendu que les fonds inférieurs sont assujettis envers ceux qui sont plus élevés à recevoir les eaux qui en découlent naturellement sans que la main de l'homme y ait contribué ; que le propriétaire inférieur ne peut point élever de digue qui empêche cet écoulement ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 1er février 2002), que les époux X..., dont le fonds surplombe la parcelle de M. Y..., ont assigné ce dernier en rétablissement

de l'écoulement naturel des eaux de pluie, lui reprochant notamment d'avoir obst...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu l'article 640 du code civil ;
Attendu que les fonds inférieurs sont assujettis envers ceux qui sont plus élevés à recevoir les eaux qui en découlent naturellement sans que la main de l'homme y ait contribué ; que le propriétaire inférieur ne peut point élever de digue qui empêche cet écoulement ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 1er février 2002), que les époux X..., dont le fonds surplombe la parcelle de M. Y..., ont assigné ce dernier en rétablissement de l'écoulement naturel des eaux de pluie, lui reprochant notamment d'avoir obstrué l'extrémité d'une buse ; que les époux Z..., propriétaires du fonds situé en contrebas, sont intervenus volontairement à l'instance ;
Attendu que pour rejeter la demande des époux X..., l'arrêt retient que les inondations dont ils se plaignent résultent exclusivement de la topographie des lieux, l'entrée de leur cave étant située dans un point bas de leur terrain et plus précisément dans une cuvette où l'eau s'accumule et ne peut s'évacuer de façon naturelle, et non d'une violation de la servitude grevant le fonds voisin ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait relevé que, selon les constatations de l'expert, l'ardoise mise en place par M. Y... à l'extrémité de la buse présentait une saillie de quelques centimètres par rapport au niveau naturel du terrain qui ne permettait pas le libre écoulement des eaux de ruissellement, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a débouté les parties de leur demande de dommages-intérêts, l'arrêt rendu le 1er février 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, sur le surplus, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rennes, autrement composée ;
Condamne M. Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trois avril deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils pour les époux X...

Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté le propriétaire d'un fonds dominant (M. et Mme X...) de sa demande de condamnation du propriétaire du fonds servant (M. Y...) à réaliser et financer des travaux permettant de respecter une servitude d'écoulement des eaux ;
AUX MOTIFS QUE la parcelle YK 64 appartenant aux époux X... surplombait la parcelle YK 176 appartenant à M. Y..., laquelle était elle-même supérieure au fonds YK 177 appartenant aux époux Z... ; que les époux X..., dont l'entrée de la cave subissait régulièrement des inondations, reprochaient à M. Y... d'avoir, d'un côté, comblé un fossé et remblayé son terrain, de l'autre, obstrué l'extrémité d'une buse, ce qui, selon eux, portait atteinte à la servitude d'écoulement naturel des eaux de pluie dont ils bénéficiaient ; qu'ils ne pouvaient cependant reprocher à M. Y... d'avoir comblé le fossé qui longeait leur fonds puisque, en creusant ce fossé, les époux X... avaient aggravé la servitude d'écoulement naturel des eaux de pluie, de sorte qu'ils ne pouvaient en exiger le rétablissement ; que l'expert avait également constaté que l'ardoise mise en place par M. Y... à l'extrémité de la buse présentait une saillie de quelques centimètres par rapport au niveau du terrain naturel, ce qui ne permettait pas le libre écoulement des eaux de ruissellement ; qu'il en résultait que les époux X... étaient en droit d'exiger l'enlèvement de cette ardoise, mais qu'une telle mesure, qui n'était pas sollicitée, ne pouvait être ordonnée ; que dès lors que les inondations affectant le terrain des époux X... ne résultaient pas d'une violation de la servitude grevant le fonds voisin, mais uniquement de la configuration de leur terrain et vraisemblablement d'une erreur d'implantation de leur maison, il ne pouvait être imposé à M. Y... ni de réaliser des travaux sur sa propriété à l'effet de remédier à ces désordres, ni d'assumer le coût des travaux à entreprendre ; qu'en conséquence, le jugement était infirmé en ce qu'il avait enjoint à M. Y... de procéder aux travaux préconisés par l'expert (1ère solution en page 8/14 de son rapport) et les époux X... étaient déboutés de leur demande (v. arrêt attaqué, p. 4, alinéas 2,3,5, et 7, et p. 5, alinéas 9 et 10) ;
ALORS QUE, d'une part, le propriétaire du fonds servant ne doit pas faire obstacle à la servitude d'écoulement des eaux dont le propriétaire du fonds dominant est titulaire ; qu'en décidant que les inondations affectant le terrain des exposants ne résultaient pas d'une violation de la servitude grevant le fonds voisin, tout en constatant pourtant que l'ardoise mise en place par le voisin à l'extrémité de la buse présentait une saillie de quelques centimètres par rapport au niveau du terrain naturel qui ne permettait pas le libre écoulement des eaux de ruissellement, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, en violation de l'article 640 du code civil ;
ALORS QUE, d'autre part, le juge doit statuer conformément à l'objet du litige tel que déterminé par les prétentions respectives des parties ; qu'en l'espèce, les exposants demandaient expressément le rétablissement de la servitude en faisant valoir que « l'expert a(vait) considéré que la continuité naturelle des deux terrains devait être maintenue pour permettre l'écoulement des eaux provenant naturellement (de leur) terrain » et que «c'(était) ainsi que l'expert préconis(ait) l'enlèvement de l'ardoise pour permettre l'écoulement des eaux » (v. leurs conclusions signifiées le 27 septembre 2010, p. 7, in fine, et p. 8, alinéas 1 et 2), ce dont il s'évinçait qu'ils sollicitaient l'enlèvement de l'ardoise litigieuse pour permettre l'écoulement naturel des eaux ; qu'en décidant cependant que l'enlèvement de l'ardoise empêchant le libre écoulement des eaux de ruissellement n'était pas sollicité par les exposants, la cour d'appel a méconnu les termes du litige, en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;
ALORS QUE, enfin, le juge ne peut statuer par voie de simple affirmation ; qu'en se bornant à déclarer que les exposants ne pouvaient reprocher à leur voisin d'avoir comblé le fossé qui longeait leur fonds puisque, en creusant ce fossé, ils avaient aggravé la servitude d'écoulement naturel des eaux de pluie, de sorte qu'ils ne pouvaient en exiger le rétablissement, sans justifier en fait cette appréciation, d'autant moins que le rapport d'expertise indiquait le contraire en soulignant l'absence d'aggravation de ladite servitude depuis la construction du réseau d'évacuation des eaux pluviales par la mairie en 2005 (v. rapport d'expertise, p. 7, point 2), la cour d'appel a insuffisamment justifié sa décision au regard de l'article 640 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 11-14328
Date de la décision : 03/04/2012
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 01 février 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 03 avr. 2012, pourvoi n°11-14328


Composition du Tribunal
Président : M. Terrier (président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.14328
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