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29/03/2012 | FRANCE | N°10-28158

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 29 mars 2012, 10-28158


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé en qualité de médecin généraliste assistant par la Fondation Georges Boissel, établissement privé de santé participant au service public hospitalier ; qu'il a été licencié pour faute grave par lettre du 27 juin 2008 ;
Vu les articles 1er, 43, 44 et 45 du décret n° 95-569 du 6 mai 1995 dans leur rédaction alors applicable ;
Attendu que pour dire le licenciement du salarié sans cause r

éelle et sérieuse et condamner la Fondation à lui verser diverses sommes au titre d...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé en qualité de médecin généraliste assistant par la Fondation Georges Boissel, établissement privé de santé participant au service public hospitalier ; qu'il a été licencié pour faute grave par lettre du 27 juin 2008 ;
Vu les articles 1er, 43, 44 et 45 du décret n° 95-569 du 6 mai 1995 dans leur rédaction alors applicable ;
Attendu que pour dire le licenciement du salarié sans cause réelle et sérieuse et condamner la Fondation à lui verser diverses sommes au titre de la rupture, l'arrêt retient que les dispositions des articles 43, 44 et 45 du décret n° 95-569 du 6 mai 1995 s'appliquent aux médecins recrutés par les établissements de santé privés participant au service public hospitalier et que l'irrespect par l'employeur de la procédure disciplinaire instituée par ces textes constitue une violation d'une règle de fond dans la mesure où le salarié n'a pu assurer utilement sa défense devant l'organisme consultatif ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la procédure disciplinaire instituée par le chapitre IX du décret susvisé ne s'applique qu'aux praticiens adjoints contractuels des établissements publics de santé, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, sans qu'il soit nécessaire de statuer sur les autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 20 octobre 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Chambery ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf mars deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils pour la Fondation Georges Boissel
MOYEN UNIQUE DE CASSATION
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR dit le licenciement de Monsieur X... sans cause réelle et sérieuse, d'AVOIR condamné la Fondation GEORGES BOISSEL à lui payer les sommes de 26.334,18 euros d'indemnité de préavis, 2.633,41 euros de congés payés afférents, 1.463,01 euros de rappel de salaire de la mise à pied, 146,30 euros de congés payés afférents, 32.851,60 euros d'indemnité conventionnelle de licenciement, 26.334,18 euros de dommages-intérêts pour licenciement abusif, 1.000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en première instance et 1.500 euros en cause d'appel et de l'AVOIR condamné aux dépens ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « le décret n° 95-569 du 6 mai 1995 relatif aux médecins, aux pharmaciens et aux chirurgiens dentistes recrutés par les établissements publics de santé, les établissements de santé privés participant au service public hospitalier et l'Établissement français du sang, modifié par décret du 6 décembre 2002, s'applique non seulement aux médecins recrutés par les établissements publics de santé en application des articles 60 et 61 de la loi du 27 juillet 1999 sur la couverture maladie universelle (article 1er), mais également aux médecins recrutés par les établissements de santé privés participant au service public hospitalier (article 3), ce qui est le cas en l'espèce. Les articles 43, 44 et 45 de ce décret, relatifs à la discipline, prévoient que : - le directeur d'établissement qui envisage une procédure disciplinaire doit convoquer l'intéressé, - la commission médicale d'établissement et le médecin inspecteur régional sont immédiatement informés de la procédure, - le licenciement est prononcé par le directeur après avis de la commission médicale d'établissement et du médecin inspecteur régional, - en cas d'urgence ou si l'intérêt du service l'exige le directeur de l'établissement peut, jusqu'à l'intervention des avis ci-dessus prévus, suspendre le praticien de ses fonctions, après avis du président de la commission médicale d'établissement pour une durée qui ne peut excéder un mois. Abdelhak X... a été convoqué à un entretien préalable par lettre du 16 juin 2008 remise en mains propres le jour même. La présidente de la commission médicale d'établissement (CME), le docteur Y..., a été informée, non de l'engagement d'une procédure disciplinaire, mais de l'incident du 12 juin et des difficultés rencontrées avec Abdelhak X..., par une copie de la lettre du médecin chef, le docteur Z..., à Madame A..., directrice de l'établissement, en date du 17 juin 2008. Le 21 juillet 2008, elle a écrit à Madame A... pour s'étonner de ne pas avoir reçu d'information, en sa qualité de présidente de la CME, sur les suites données au courrier du docteur Z.... La Fondation GEORGES BOISSEL, qui ne s'explique pas sur ce point, ne justifie pas avoir requis l'avis de la commission médicale d'établissement, ni du médecin inspecteur régional préalablement à la décision de licencier Abdelhak X..., alors même que son attention avait été attirée dès le 18 juin 2008 par un courrier du docteur B..., en tant que représentant des médecins assistants auprès de la CME, sollicité par le docteur X.... Celui-ci verse également aux débats une lettre du docteur B... qui atteste que la commission n'a pas été officiellement saisie préalablement au licenciement et n'en a été informée que lors d'une commission ultérieure. L'irrespect de cette formalité constitue une violation d'une règle de fond, dans la mesure où le salarié n'a pu assurer utilement sa défense devant l'organisme consultatif, et prive le licenciement de cause réelle et sérieuse. Le jugement doit donc être confirmé tant en ce qu'il a dit le licenciement sans cause réelle et sérieuse que sur le montant des sommes allouées, les premiers juges ayant exactement évalué le préjudice subi par Abdelhak X... en fixant les dommages-intérêts à l'équivalent de six mois de salaire. L'équité commande d'allouer à Abdelhak X... une somme de 1.500 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile » ;
AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « ATTENDU que Monsieur Abdelhak X... n'a précédemment au 12 juin 2008, fait l'objet d'aucun reproche ni sanction disciplinaire ; ATTENDU qu'en qualité de médecin Monsieur Abdelhak X... est seul juge de sa décision de poursuivre ou non une prise en charge d'un malade ; Qu'il n'a pas, par exemple, à obtenir l'autorisation des autres membres de l'équipe présente ; ATTENDU que l'infirmière présente, Mademoiselle C..., est intervenue contredisant les propos du Docteur X..., laissant entendre au patient que la décision du Docteur n'était pas définitive et serait examinée le lundi suivant lors d'une réunion hebdomadaire ; ATTENDU que cette intervention a provoqué la colère justifiée du Docteur X... ; ATTENDU que la Docteur X..., le patient étant sorti de la salle, a demandé des explications à Mademoiselle C... qui a refusé de lui répondre ; ATTENDU que le Docteur X... suivait ce patient depuis 2003 et qu'il connaissait particulièrement bien le contexte psychique et familial de celui-ci ; ATTENDU que sa décision de ne plus poursuivre la prise en charge de ce malade était due à la non-participation active de sa mère, vouant à l'échec tout travail ; Que l'article du code de déontologie des médecins précise que « le médecin peut refuser ses soins pour des raisons professionnelles (il est connu de tout médecin que certains malades ne nous permettent pas de faire de la vraie médecine et nous proposent dans les faits toute autre chose ce qui est invivable professionnellement : il faut choisir) » ; Le Docteur X... était dans ce cas ; ATTENDU que le docteur X... a informé le patient qu'il serait pris en charge par un autre médecin de la Fondation GEORGES BOISSEL ce qui garantissait ledit patient de la continuité des soins ; ATTENDU que de nombreuses attestations émanant de confrères témoignent du professionnalisme du Docteur X..., de son respect de la déontologie et de la confraternité nécessaire dans la prise en charge globale des patients présentant une souffrance physique ; ATTENDU que la FONDATION GEORGES BOISSEL-CENTRE PSYCHOTHERAPIQUE DU VION n'a pas cru devoir organiser une rencontre entre la direction et les médecins assistants ou leurs représentants afin d'éclaircir cette affaire, la demande de cette rencontre ayant pourtant été faite par le Docteur T. B... ; ATTENDU qu'aucune procédure contradictoire avec les membres du personnel concernés par cette affaire n'a été faite ; ATTENDU que la Commission Médicale d'Etablissement n'a pas été consultée préalablement au licenciement » ;
1°) ALORS QUE les articles 43 à 45 du décret du 6 mai 1995 relatif aux médecins, aux pharmaciens et aux chirurgiens-dentistes recrutés par les établissements publics de santé, les établissements de santé privés participant au service public hospitalier et l'Etablissement français du sang n'instituent une procédure disciplinaire qu'au bénéfice des seuls praticiens adjoints contractuels des établissements publics ; que l'article 1er du décret définit les praticiens adjoints contractuels comme désignant « les médecins et pharmaciens recrutés par les établissements publics de santé (...) » ; qu'en estimant néanmoins cette procédure applicable au licenciement de Monsieur X... de sorte que son non-respect privait le licenciement intervenu de cause réelle et sérieuse alors que, embauché par un établissement privé participant au service public hospitalier, il n'était pas un praticien adjoint contractuel, la Cour d'appel a violé l'article 1er, ensemble les articles 43, 44, 45 du décret du 6 mai 1995 dans sa rédaction alors applicable ;
2°) ALORS QU'en l'absence de procédure spéciale, l'employeur est seulement tenu d'observer la procédure légale de licenciement ; qu'en reprochant à la Fondation GEORGES BOISSEL de ne pas avoir organisé une rencontre entre la direction et les médecins assistants ou leur représentants et de ne pas avoir organisé une procédure contradictoire entre le médecin dont le licenciement était envisagé et ses accusateurs quand aucun texte légal ou conventionnel ne prescrivait une telle procédure, la Cour d'appel a violé l'article L. 1332-2 du Code du travail ;
3°) ALORS QUE les juges du fond sont tenus d'examiner tous les griefs formulés dans la lettre de licenciement ; qu'en l'espèce, l'employeur ne se prévalait pas seulement de l'absence de concertation avec l'équipe préalable à la décision du médecin de cesser la prise en charge du patient et de la colère dont il avait fait preuve postérieurement à l'intervention de l'infirmière, mais encore d'avoir adopté un comportement inutilement agressif à l'égard de la mère du patient et d'avoir manqué à ses obligations les plus fondamentales en signifiant avec une brutalité inacceptable au patient la fin de sa prise en charge, ce qui, au demeurant, avait justifié que l'infirmière intervienne ; qu'en se contentant, en l'espèce, d'écarter d'une part le grief tiré de la cessation non concertée de prise en charge du patient, d'autre part ceux relatifs à l'attitude agressive du médecin, contredit par l'infirmière, sans examiner le grief tiré de son comportement à l'égard du patient et de sa mère avant toute intervention de l'infirmière, la Cour d'appel a violé l'article L. 1232-6 du Code du travail ;
4°) ALORS QUE les juges sont tenus de préciser l'origine des constatations de fait ayant servi à motiver leur décision ; qu'en affirmant péremptoirement « que le docteur X... a informé le patient qu'il serait pris en charge par un autre médecin de la Fondation GEORGES BOISSEL ce qui garantissait ledit patient de la continuité des soins » sans indiquer quel élément lui permettait de considérer un tel fait comme établi, la Cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de motif et violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
5°) ALORS subsidiairement QUE les juges sont tenus de répondre aux conclusions des parties ; qu'en l'espèce, la fondation employeuse faisait valoir, preuve à l'appui, que si l'article 47 du Code de déontologie autorisait un médecin à refuser ses soins pour des raisons personnelles et professionnelles, il ne lui permettait pas de mettre arbitrairement un terme à la prise en charge d'un patient au sein du Centre Médico Psychologique Consultation Adulte (CMPA) de PONT DE CHERUY en ce qu'une telle décision impliquait une concertation préalable avec l'équipe et plus particulièrement avec l'infirmière-binôme ; qu'en omettant de répondre à ce moyen déterminant des conclusions de la Fondation GEORGES BOISSEL, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code procédure civile ;
6°) ALORS en toute hypothèse que le fait pour un médecin, cadre référent d'un établissement privé de santé, de tenir des propos violents et agressifs et de proférer des menaces à l'encontre d'autres membres du personnel, ce comportement aurait-il été provoqué par une infirmière ayant tenté d'atténuer devant un patient fragile la décision du médecin qui venait de lui annoncer qu'il refusait désormais de la suivre, constitue une faute grave ou à tout le moins une cause réelle et sérieuse de licenciement, le médecin aurait-il jusqu'à cet incident fait preuve de professionnalisme et n'aurait-il aucun antécédent disciplinaire ; qu'en décidant du contraire, la Cour d'appel a violé les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-28158
Date de la décision : 29/03/2012
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Grenoble, 20 octobre 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 29 mar. 2012, pourvoi n°10-28158


Composition du Tribunal
Président : M. Frouin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:10.28158
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