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28/03/2012 | FRANCE | N°11-30454

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 28 mars 2012, 11-30454


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article R. 2 du code de procédure pénale, ensemble la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III et les articles L. 551-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Attendu que M. X..., de nationalité marocaine, faisant l'objet d'une obligation de quitter le territoire français en date du 14 janvier 2011, a été interpellé, le 10 juin 2011, sur la demande du préfet de la Seine-Maritime et, en exécution d'une décis

ion prise le jour même par ce dernier, placé en rétention administrative ...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article R. 2 du code de procédure pénale, ensemble la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III et les articles L. 551-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Attendu que M. X..., de nationalité marocaine, faisant l'objet d'une obligation de quitter le territoire français en date du 14 janvier 2011, a été interpellé, le 10 juin 2011, sur la demande du préfet de la Seine-Maritime et, en exécution d'une décision prise le jour même par ce dernier, placé en rétention administrative ; qu'un juge des libertés et de la détention a prolongé cette mesure ;
Attendu que, pour infirmer cette décision et dire n'y avoir lieu à prolonger la rétention administrative, le premier président retient que l'interpellation et le placement en rétention administrative de M. X... ont été opérés sur ordre de la préfecture, sans intervention du parquet dont dépendent les services de police, et que le préfet ne disposait d'aucune compétence juridique pour donner des instructions de police judiciaire à ces services quant à une interpellation ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'interpellation aux fins de placement en rétention administrative d'un étranger faisant l'objet d'une mesure d'éloignement ressortit à la police administrative, le premier président a violé les textes susvisés ;
Vu l'article L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire ;
Et attendu que les délais légaux de rétention étant expirés, il ne reste plus rien à juger ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'ordonnance rendue le 13 juin 2011, entre les parties, par le premier président de la cour d'appel de Rouen ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'ordonnance cassée ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit mars deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par le procureur général près la cour d'appel de Rouen.
Moven unique de cassation : violation de la loi
II est fait grief à la décision attaquée d'avoir infirmé l'ordonnance du Juge des libertés et de la détention du Tribunal de grande instance de Rouen en date du 11 juin 2011 ayant autorisé le maintien en rétention de Monsieur Brahim X... pour une durée de quinze jours à compter du 12 juin 2011 à 10 heures 45 et au plus tard jusqu'au 27 juin 2011 à la même heure
Aux motifs que : " aux termes de I'article R. 2 du code de procédure pénale, les officiers de police judiciaire, à I'occasion d'une enquête ou de I'exécution d'une commission rogatoire ne peuvent solliciter ou recevoir des ordres ou instructions que de l'autorité judiciaire dont ils dépendent. En l'espèce, il ressort du procès-verbal dressé par le brigadier-chef VARlN le 10 juin 2011 à 10 heures 15 que les services de police se sont présentés au domicile de Madame A...sur instructions reçues de la Préfecture de Seine-Maritime concernant l'obligation de quitter le territoire prise le 14 janvier 2011 à l'encontre de Mr X... ; ledit procès-verbal ne fait nullement référence à une quelconque intervention du Parquet.

Ces instructions émanant de la Préfecture, en date du 27 mai 2011, demandaient aux services de police de s'assurer de la présence en France de Mr X...et de prendre attache avec la Préfecture afin d'organiser son éloignement.
Ainsi, I'interpellation, puis le placement en rétention administrative de I'intéressé ont été opérés sur ordre de la Préfecture et sans intervention du Parquet dont dépendent les services de police.
Dans la mesure où le Préfet ne disposait d'aucune compétence juridique pour donner des instructions de police judiciaire aux services de police quant à une interpellation, la procédure ayant suivi cette interpellation irrégulière doit être déclarée nulle et de nul effet, si bien qu'il convient d'ordonner la remise en liberté de l'intéressé, sans qu'il soit nécessaire d'évoquer les autres moyens de nullité soulevés par son conseil, "
Alors que les agents de la force publique n'ont agi, dans le cas d'espèce, à I'occasion ni d'une enquête, ni de l'exécution d'une commission rogatoire, au sens de l'article R. 2 du Code de procédure pénale ;
Qu'ils ont exécuté des instructions données par une autorité relevant du pouvoir exécutif, chargée de la police administrative spéciale résultant de la législation et de la réglementation sur les étrangers ;
Que, dans le cadre des attributions ainsi confiées au préfet, celui-ci avait non seulement le droit, mais encore le devoir de mettre en oeuvre les moyens nécessaires pour s'assurer qu'une décision prise par lui et devenue exécutoire était respectée ;
Que, contrairement à ce qu'affirme I'ordonnance entreprise, les magistrats du Parquet n'ont pas à intervenir dans le contrôle d'opérations effectuées par des agents d'exécution d'une police administrative spéciale relevant de la seule compétence de l'autorité préfectorale, même si, de manière erronée, dans les procès-verbaux qu'ils ont rédigés, l'un d'entre eux a fait usage de sa qualité d'officier de police judiciaire ; qu'en tout état de cause, la légalité de actes effectués dans un tel cadre est soumise à l'appréciation des juridictions administratives ;
Qu'au surplus, le terme d'interpellation utilisé par la décision attaquée est inadéquat, les fonctionnaires de police s'étant assurés de l'identité, puis de la personne de Monsieur Brahim X..., afin de le placer immédiatement en rétention administrative, conformément à la mission qui leur avait été assignée par le préfet ;
Qu'en conséquence, en infirmant I'ordonnance du Juge des libertés et de la détention du Tribunal de grande instance de Rouen, la décision du délégué du Premier président de la Cour d'appel de Rouen a violé l'article R. 2 du Code de procédure pénale, en méconnaissant le sens et la portée de ce texte.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 11-30454
Date de la décision : 28/03/2012
Sens de l'arrêt : Cassation sans renvoi
Type d'affaire : Civile

Analyses

SEPARATION DES POUVOIRS - Compétence judiciaire - Exclusion - Cas - Litige relatif à une opération de police administrative - Police administrative - Objet - Détermination - Portée

SEPARATION DES POUVOIRS - Compétence judiciaire - Exclusion - Cas - Litige relatif à une opération de police administrative - Police administrative - Objet - Cas - Interpellation aux fins de placement en rétention administrative d'un étranger faisant l'objet d'une mesure d'éloignement ETRANGER - Mesures d'éloignement - Rétention dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire - Interpellation aux fins de placement en rétention - Compétence - Police administrative - Portée

L'interpellation aux fins de placement en rétention administrative d'un étranger faisant l'objet d'une mesure d'éloignement ressortit à la police administrative


Références :

article R. 2 du code de procédure pénale

loi des 16-24 août 1790

décret du 16 fructidor an III

articles L. 551-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile

Décision attaquée : Cour d'appel de Rouen, 13 juin 2011

Sur la compétence de la police administrative, à rapprocher :Tribunal des conflits., 12 décembre 2005, pourvoi n° 05-03494, Bull. 2005, T. conflits, n° 38


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 28 mar. 2012, pourvoi n°11-30454, Bull. civ. 2012, I, n° 79
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2012, I, n° 79

Composition du Tribunal
Président : M. Charruault
Avocat général : M. Sarcelet
Rapporteur ?: M. Suquet

Origine de la décision
Date de l'import : 06/12/2012
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.30454
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