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28/03/2012 | FRANCE | N°11-20121

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 28 mars 2012, 11-20121


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal d'instance de Paris 17e, 17 juin 2011), qu'au cours de l'année 2009, les sociétés Assystem France et Assystem Eos qui font partie du même groupe, ont envisagé une réorganisation de leur activité énergie qui a pris la forme, le 1er janvier 2010, d'un transfert partiel d'activité de la société Assystem France vers la société Assystem Eos ; que dans le cadre de cette opération, le contrat de travail de M. X..., élu au sein de la société Ass

ystem France et délégué syndical de l'établissement Région Ile-de-France...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal d'instance de Paris 17e, 17 juin 2011), qu'au cours de l'année 2009, les sociétés Assystem France et Assystem Eos qui font partie du même groupe, ont envisagé une réorganisation de leur activité énergie qui a pris la forme, le 1er janvier 2010, d'un transfert partiel d'activité de la société Assystem France vers la société Assystem Eos ; que dans le cadre de cette opération, le contrat de travail de M. X..., élu au sein de la société Assystem France et délégué syndical de l'établissement Région Ile-de-France Nord de cette société, a été transféré, le 1er mars 2010, à la société Assystem Eos ; que la Fédération CFDT communication, conseil, culture (F3C CFDT) l'y a désigné en qualité de délégué syndical d'entreprise, le 11 mars 2011 ;
Attendu qu'il est fait grief au jugement d'annuler cette désignation, alors, selon le moyen :
1°/ que lorsqu'après la tenue d'élections, le salarié a été transféré d'une entreprise à une autre, l'appréciation de la condition tenant à l'audience électorale personnelle dont il doit justifier pour être désigné en qualité de délégué syndical ne peut être limitée aux seules élections organisées dans l'entreprise où il est transféré ; que les exposants avaient justifié que M. X... avait recueilli plus de 10 % des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections professionnelles organisées dans la société Assystem France avant son transfert, et que de nouvelles élections n'avaient pas été organisées dans la société Assystem Eos depuis qu'il y avait été transféré en application de l'article L. 1224-1 du code du travail, ces deux entreprises appartenant au même groupe ; que le tribunal a affirmé que la représentativité personnelle d'un salarié acquise au sein d'une tierce société ne saurait être considérée au sens de l'article L. 2143-3 du code du travail ; qu'en statuant comme il l'a fait, alors que M. X... se prévalait de l'audience électorale obtenue avant son transfert en application de l'article L. 1224-1 du code du travail tandis que de nouvelles élections n'avaient pas été organisées, depuis son transfert, dans l'entreprise où il avait été transféré, le tribunal a violé l'article L. 2143-3 du code du travail ;
2°/ que l'obligation faite aux syndicats représentatifs de choisir, en priorité, le délégué syndical parmi les candidats ayant obtenu au moins 10 % des voix, tend à assurer la détermination par les salariés eux-mêmes des personnes les plus aptes à défendre leurs intérêts dans l'entreprise et à conduire les négociations pour leur compte ; qu'il résulte des constatations du tribunal que, s'agissant de la scission d'une branche de l'activité absorbée par l'entreprise au sein de laquelle était opérée la désignation, la nouvelle communauté de travail était constituée pour sa majorité des salariés de la société Assystem France auprès desquels M. X... avait recueilli plus de 10 % des suffrages lors des dernières élections organisées avant le transfert ; qu'en annulant néanmoins la désignation de M. X..., le tribunal a violé l'article L. 2143-3 du code du travail ;
3°/ que le syndicat F3C CFDT et M. X... ont fait valoir que, si le score obtenu lors des élections par celui-ci ne pouvait être pris en considération en application de l'alinéa 1er de l'article L. 2143-3 du code du travail, seuls deux candidats présentés par le syndicat CFDT lors des élections professionnelles de la société Assystem Eos remplissaient les conditions pour être désignés délégués syndicaux : l'un d'eux (M. Y...) a été désigné en qualité de délégué syndical et le second (M. Z...) n'a pas souhaité être désigné en qualité de délégué syndical-ce dont il résultait que M. X... pouvait être désigné en qualité de délégué syndical en sa qualité d'adhérent et ce, conformément aux dispositions de l'alinéa 2 du même article ; que le tribunal a annulé la désignation de M. X... aux motifs que " ne saurait démontrer suffisamment ni le refus de M. Z... d'être nommé délégué syndical, ni du reste le défaut de son adhésion au syndicat le mail transmis le 25 mai 2011 sous son timbre apparent à M. X..., lequel n'est étayé d'aucun autre élément " ; qu'en faisant dépendre la validité de la désignation de M. X... d'une déclaration plus explicite de M. Z... alors que le syndicat CFDT et M. X... indiquaient clairement dans leurs conclusions communes, confirmées par les notes en délibéré et corroborées par le mail de M. Z..., que ce dernier ne souhaitait pas être désigné en qualité de délégué syndical par le syndicat CFDT, le tribunal a violé l'alinéa 2 de l'article L. 2143-3 du code du travail ;
4°/ que le syndicat étant apte à désigner trois délégués, le seul fait que M. Z... ait pu être désigné ne faisait pas obstacle à la désignation de M. X... en qualité de 3e délégué ; qu'en le refusant la cour d'appel a encore violé l'article L. 2143-3 du code du travail ;
Mais attendu, d'abord, que le tribunal devant lequel il n'était pas contesté que le transfert ne portait pas sur une entité susceptible d'emporter maintien des mandats représentatifs, a exactement décidé que le salarié, élu au sein d'une autre entité du groupe, ne remplissait pas la condition relative à l'obtention d'un score d'au moins 10 % des suffrages exprimés dans l'entreprise pour pouvoir être désigné délégué syndical dans cette même entreprise, posée par l'article L. 2143-3 du code du travail ;
Attendu, ensuite, qu'ayant constaté, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation, que l'organisation syndicale, qui n'avait désigné initialement qu'un seul délégué syndical, ne justifiait pas, à la date de la désignation contestée, du refus par le second candidat aux élections professionnelles d'être désigné en cette qualité, et retenu que le syndicat ne pouvait, au prétexte qu'il pouvait désigner comme troisième délégué syndical un simple adhérent, s'affranchir, pour la désignation du deuxième de l'ordre de priorité posé par l'article L. 2143-3 du code du travail, le tribunal a légalement justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et signé par M. Béraud, président, conformément aux articles 452 et 456 du code de procédure civile, en l'audience publique du vingt-huit mars deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils pour le syndicat CFDT F3C et M. X....
Le moyen reproche au jugement attaqué d'AVOIR a annulé la désignation du 14 mars 2011 par la fédération CFDT communication, conseil, culture de Monsieur Pierre X... en qualité de délégué syndical au sein de la société par actions simplifiée Assystem EOS ;
AUX MOTIFS QUE selon l'article L 2143-3 du code du travail, chaque organisation syndicale représentative dans l'entreprise ou l'établissement de cinquante salariés ou plus, qui constitue une section syndicale, désigne parmi les candidats aux élections professionnelles qui ont recueilli au moins 10 % des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections au comité d'entreprise ou de la délégation unique du personnel ou des délégués du personnel, quel que soit le nombre de votants, dans les limites fixées à l'article L 2143-12, un ou plusieurs délégués syndicaux pour la représenter auprès de l'employeur ; s'il ne reste, dans l'entreprise ou l'établissement, plus aucun candidat aux élections professionnelles qui remplit les conditions mentionnées ci dessus, une organisation syndicale représentative peut désigner un délégué syndical parmi les autres candidats ou, à défaut, parmi ses adhérents au sein de l'entreprise ou de l'établissement ; il est acquis aux débats que Monsieur Pierre X... était salarié jusqu'au 1er mars 2010 de la société Assystem France, au sein de laquelle il détenait plusieurs mandats électifs, et qu'à cette date après l'apport de la branche d'activité où il exerçait, le 1er janvier 2010, à la société par actions simplifiée Assystem EOS, son contrat de travail était transféré au sein de cette entreprise ; il est ensuite constant que la société par actions simplifiée Assystem EOS mettait en place en février et mars 2009 des élections professionnelles pour les membres du comité d'entreprise, aux termes desquelles la CFDT, qui présentait 2 candidats, obtenait plus de 10 % des suffrages exprimés au 1er tour, ces candidats réunissant tous 2 cette condition ; en application de l'article R. 2143-2 du même code, sur la base non contestée d'un effectif d'environ 2. 300 salariés, chaque organisation syndicale est habile à désigner au sein de la société par actions simplifiée Assystem EOS 3 délégués syndicaux ; il est constant qu'hormis monsieur Pierre X..., la fédération CFDT communication, conseil, culture, dont la représentativité dans l'entreprise n'est pas contestée, désignait monsieur Y... ; ceci dit, contrairement à ce qu'indiquent les défendeurs, et en dépit des prévisions largement conçues du législateur de la représentativité personnelle de la personne accessible au mandat de délégué syndical, il ne s'évince des dispositions précitées de l'article L. 2143-3 que cette légitimité électorale puisse trouver son fondement dans un autre périmètre que celui du mandat, ici l'entreprise ; de cela, il s'induit que la représentativité personnelle d'un salarié acquise au sein d'une tierce société ne saurait être considérée au sens de cette disposition, même au cas de la scission d'une branche de son activité absorbée par l'entreprise au sein de laquelle est opérée la désignation, et même si la nouvelle communauté de travail est constituée pour sa majorité des salariés de cette tierce société, puisque la détermination de cette représentativité n'est pas une notion de fait à la disposition des parties mais un concept juridique, dont les contours sont précisément déterminés par la loi ; ce faisant, en tant qu'il n'était candidat aux dernières élections professionnelles dans l'entreprise, tenues postérieurement à la loi du 20 août 2008, et du motif tiré de l'alinéa 1er de l'article L. 2143-3 précité, la fédération CFDT communication, conseil, culture n'est pas habile à désigner monsieur Pierre X... en qualité de délégué syndical ;
ALORS QUE lorsqu'après la tenue d'élections, le salarié a été transféré d'une entreprise à une autre, l'appréciation de la condition tenant à l'audience électorale personnelle dont il doit justifier pour être désigné en qualité de délégué syndical ne peut être limitée aux seules élections organisées dans l'entreprise où il est transféré ; que les exposants avaient justifié que Monsieur X... avait recueilli plus de 10 % des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections professionnelles organisées dans la société ASSYSTEM FRANCE avant son transfert, et que de nouvelles élections n'avaient pas été organisées dans la société ASSYSTEM EOS depuis qu'il y avait été transféré en application de l'article L 1224-1 du Code du Travail, ces deux entreprises appartenant au même groupe ; que le Tribunal a affirmé que la représentativité personnelle d'un salarié acquise au sein d'une tierce société ne saurait être considérée au sens de l'article L 2143-3 du Code du Travail ; qu'en statuant comme il l'a fait, alors que Monsieur X... se prévalait de l'audience électorale obtenue avant son transfert en application de l'article L 1224-1 du Code du Travail tandis que de nouvelles élections n'avaient pas été organisées, depuis son transfert, dans l'entreprise où il avait été transféré, le Tribunal a violé l'article L 2143-3 du Code du Travail ;
ALORS en outre QUE l'obligation faite aux syndicats représentatifs de choisir, en priorité, le délégué syndical parmi les candidats ayant obtenu au moins 10 % des voix, tend à assurer la détermination par les salariés eux-mêmes des personnes les plus aptes à défendre leurs intérêts dans l'entreprise et à conduire les négociations pour leur compte ; qu'il résulte des constatations du Tribunal que, s'agissant de la scission d'une branche de l'activité absorbée par l'entreprise au sein de laquelle était opérée la désignation, la nouvelle communauté de travail était constituée pour sa majorité des salariés de la société ASSYSTEM FRANCE auprès desquels Monsieur X... avait recueilli plus de 10 % des suffrages lors des dernières élections organisées avant le transfert ; qu'en annulant néanmoins la désignation de Monsieur X..., le Tribunal a violé l'article L 2143-3 du Code du Travail ;
Et AUX MOTIFS QUE pour autant, il est vrai qu'à défaut de personnes accessibles à cette représentativité personnelle de premier rang, elle a la faculté de désigner d'abord un autre candidat, sinon, un adhérent ; or, équivaut à une impossibilité, dont n'est maître l'organisation syndicale, de désigner tout autre candidat la circonstance que ce dernier s'oppose à cette désignation ; par ailleurs, la volonté légale d'assurer la détermination par les salariés eux-mêmes des personnes les plus aptes à défendre leurs intérêts dans l'entreprise ne saurait avoir pour conséquences d'éluder leur possible représentation au gré des désistements, renonciations ou démissions des candidats aux fonctions électives ; au contraire, force est de constater qu'à défaut de pouvoir désigner tout candidat, reste la possibilité de nommer un adhérent, ce en quoi la ratio legis entend combler la lacune à laquelle pourrait conduire l'application de la règle première ; toutefois, ne saurait démontrer suffisamment ni le refus de monsieur Z... d'être nommé délégué syndical, ni du reste le défaut de son adhésion au syndicat le mail transmis le 25 mai 2011 sous son timbre apparent à monsieur Pierre X..., lequel n'est étayé d'aucun autre élément ; pas plus, il n'est vrai qu'il aurait renoncé à se présenter au second tour des élections des membres titulaires du comité d'entreprise, le procès verbal du mars 2009 témoignant du contraire ; par ailleurs, en tant que l'organisation syndicale n'a désigné qu'un seul délégué syndical, et qu'elle a présenté aux dernières élections 2 candidats, elle ne saurait exciper pour désigner le second délégué syndical et éluder l'ordre posé par la loi de sa possibilité, au cas d'un 3ème, de le choisir parmi les adhérents, cette occurrence restant fictive ; aussi, force est de constater que la fédération CFDT communication, conseil, culture n'est non plus habile en vertu du 2ème alinéa de l'article L. 2143-3 du code du travail de désigner monsieur Pierre X... en qualité de délégué syndical au sein de la société par actions simplifiée Assystem EOS ; en conséquence, il y a lieu d'annuler la désignation querellée ;
ALORS QUE les exposants ont fait valoir que, si le score obtenu lors des élections par Monsieur X... ne pouvait être pris en considération en application de l'alinéa 1er de l'article L 2143-3 du Code du Travail, seuls deux candidats présentés par le syndicat CFDT lors des élections professionnelles de la société ASSYSTEM EOS remplissaient les conditions pour être désigné délégués syndicaux : l'un d'eux (Monsieur Y...) a été désigné en qualité de délégué syndical et le second (Monsieur Z...) n'a pas souhaité être désigné en qualité de délégué syndical-ce dont il résultait que Monsieur X... pouvait être désigné en qualité de délégué syndical en sa qualité d'adhérent et ce, conformément aux dispositions de l'alinéa 2 du même article ; que le Tribunal a annulé la désignation de Monsieur X... aux motifs que « ne saurait démontrer suffisamment ni le refus de monsieur Z... d'être nommé délégué syndical, ni du reste le défaut de son adhésion au syndicat le mail transmis le 25 mai 2011 sous son timbre apparent à monsieur Pierre X..., lequel n'est étayé d'aucun autre élément » ; qu'en faisant dépendre la validité de la désignation de Monsieur X... d'une déclaration plus explicite de Monsieur Z... alors que le syndicat CFDT et Monsieur X... indiquaient clairement dans leurs conclusions communes, confirmées par les notes en délibéré et corroborées par le mail de Monsieur Z..., que ce dernier ne souhaitait pas être désigné en qualité de délégué syndical par le syndicat CFDT, le Tribunal a violé l'alinéa 2 de l'article L 2143-3 du Code du Travail.
ET ALORS en tout cas QUE le syndicat étant apte à désigner 3 délégués, le seul fait que Monsieur Z... ait pu être désigné ne faisait pas obstacle à la désignation de Monsieur X... en qualité de 3ème délégué ; qu'en le refusant la Cour d'appel a encore violé l'article L 2143-3 du Code du Travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-20121
Date de la décision : 28/03/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Tribunal d'instance de Paris 17ème, 17 juin 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 28 mar. 2012, pourvoi n°11-20121


Composition du Tribunal
Président : M. Béraud (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Masse-Dessen et Thouvenin, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.20121
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