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28/03/2012 | FRANCE | N°11-19021

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 28 mars 2012, 11-19021


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal d'instance de Martigues, 26 mai 2011), que les élections des membres du comité d'établissement et des délégués du personnel de l'établissement de Marignane de la société Eurocopter se sont tenues le 20 mars 2011 ; que compte tenu des conditions matérielles de déroulement du vote, un avenant aux protocoles préélectoraux a été conclu le jour des élections décidant de reporter d'une heure la clôture du scrutin initialement fixée à 18

heures ;
Attendu que les syndicats CGT et UGICT-CGT font grief au jugement de ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal d'instance de Martigues, 26 mai 2011), que les élections des membres du comité d'établissement et des délégués du personnel de l'établissement de Marignane de la société Eurocopter se sont tenues le 20 mars 2011 ; que compte tenu des conditions matérielles de déroulement du vote, un avenant aux protocoles préélectoraux a été conclu le jour des élections décidant de reporter d'une heure la clôture du scrutin initialement fixée à 18 heures ;
Attendu que les syndicats CGT et UGICT-CGT font grief au jugement de les débouter de leur demande en annulation de ces élections, alors, selon le moyen :
1°/ que le protocole d'accord préélectoral signé pour une élection de représentants du personnel ne peut être révisé que par l'ensemble des signataires ; qu'en retenant que la stipulation des deux protocoles préélectoraux signés par les cinq syndicats représentatifs dans l'établissement, fixant à 18 h 00 l'heure de clôture des élections se tenant le 10 mars 2011, avait pu être modifié par un avenant fixant la clôture à 19 h 00, signé le 10 mars 2011 par trois seulement des signataires, le tribunal a violé les articles L. 2324-4-1, L. 2314-23, L. 2314-3-1 et L. 2261-7 du code du travail ;
2°/ qu'une révision de l'accord préélectoral ne peut survenir, dès lors que le scrutin est ouvert, qu'avec l'accord de la totalité des signataires initiaux ; qu'en retenant que les stipulations des deux protocoles d'accord préélectoraux du 10 janvier 2011 fixant l'heure du scrutin du 10 mars 2011 à 8 h 30 pour l'ouverture et 18 h 00 pour la clôture, avaient pu valablement être modifiées par le report de l'heure de clôture à 19 h 00 avec l'accord de trois seulement des cinq syndicats signataires, le tribunal d'instance a violé les articles L. 2324-4, L. 2324-4-1, L. 2314-3 et L. 2314-3-1 du code du travail ;
3°/ que l'élection des institutions représentatives a lieu pendant le temps de travail, sauf accord contraire conclu entre l'employeur et l'ensemble des organisations syndicales représentatives existant dans l'entreprise ; qu'en retenant qu'avait pu être valablement passé par trois seulement des cinq syndicats signataires un avenant aux protocoles d'accord préélectoraux reportant de 18 à 19 h la clôture du scrutin, sans s'expliquer sur le fait allégué par la CGT que les ouvriers relevant du premier collège électoral terminaient leur journée de travail à 18 h 00, le tribunal n'a pas donné de base légale à sa décision en regard des articles L. 2314-23, L. 2314-22 et L. 2324-20 du code du travail ;
4°/ qu'en s'abstenant de répondre au moyen soutenu par la CGT dans ses écritures, soutenant que les modalités du vote électronique ne permettaient pas aux salariés de ne choisir que la liste des titulaires ou celle des suppléants, puisque lorsqu'ils procédaient ainsi, leur vote n'était pas enregistré sauf à ce qu'ils indiquent au préalable qu'ils n'entendaient voter que pour les titulaires ou les suppléants et que cette sujétion avait gravement affecté le secret du vote, le tribunal d'instance a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu que des modifications négociées entre le chef d'entreprise et les organisations syndicales intéressées peuvent être apportées à un protocole préélectoral, tant que cela paraît utile au bon déroulement du vote, par un avenant soumis aux mêmes conditions de validité que le protocole lui-même ;
Et attendu que le tribunal a constaté que l'avenant satisfaisait à ces conditions ; que le moyen, nouveau et mélangé de fait et de droit en sa troisième branche et partant irrecevable, et manquant en fait en sa dernière branche, n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit mars deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils pour le syndicat CGT et UGICT-CGT de la société Eurocopter Marignane.
Il est reproché à la décision attaquée d'AVOIR débouté le Syndicat C.G.T. et le Syndicat U.G.I.C.T.-C.G.T. de leur demande d'annulation des élections des membres du Comité d'établissement et des délégués du personnel qui ont eu lieu le 10 mars 2011 au sein de l'établissement EUROCOPTER de MARIGNANE
AUX MOTIFS QUE la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale a subordonné la validité du protocole électoral à une double condition de majorité car :
- il doit être signé par la majorité des organisations syndicales ayant participé à sa négociation,
- parmi ces organisations signataires, doivent se trouver les organisations syndicales représentatives ayant recueilli la majorité des suffrages exprimés lors des dernières élections professionnelles ou, lorsque ces résultats ne sont pas disponibles, la majorité des organisations syndicales représentatives dans l'entreprise ;
QU'il est constant que l'adoption d'un protocole préélectoral ne fait pas obstacle à ce que des modifications négociées entre le chef d'entreprise et les organisations syndicales intéressées lui soient apportées, ces modifications ne pouvant résulter que d'un avenant soumis aux mêmes conditions de validité que l'accord lui-même ;
QU'en l'espèce, deux accords préélectoraux ont été signés le 18 janvier 2011 par l'ensemble des organisations syndicales en prévision des élections des membres du Comité d'établissement et des délégués du personnel au sein de l'établissement EUROCOPTER de MARIGNANE qui prévoyaient que le scrutin se déroulerait entre 8h30 et 18h00 ; que le jour de l'élection, trois des cinq organisations syndicales qui avaient négocié cet accord ont signé un avenant n° 4 modifiant l'article XII du protocole du 18 janvier 2011 de la façon suivante : « Tenant compte de l'affluence aux bureaux de vote, l'heure de clôture du scrutin initialement fixée à 18h00 est reportée à 19h00 » ; que les syndicats demandeurs contestent la validité de cet avenant en soutenant qu'il aurait dû être signé par l'ensemble des syndicats qui avaient négocié le protocole et ce, en application du principe du « parallélisme des formes » ; que cet avenant était cependant soumis aux mêmes conditions de validité que le protocole d'accord préélectoral modifié ; que, pour être valable il suffisait que le protocole préélectoral ait été signé par la majorité des organisations syndicales ayant participé à sa négociation, dont celles ayant recueilli la majorité des suffrages exprimés lors des dernières élections professionnelles ; que la circonstance que l'accord préélectoral ait été signé par toutes les organisations syndicales n'a pas pour effet de modifier cette règle de double majorité pour les avenants qui pouvaient y être apportés sauf à imposer, sous couvert de « parallélisme des formes », une unanimité qui n'est pas requise par les textes ; que dès lors qu'il a été signé par trois organisations syndicales sur les cinq qui avaient participé à la négociation et qu'il remplit la double condition de majorité, l'avenant n° 4 au protocole d'accord préélectoral du 18 janvier 2011 est valable ; qu'ainsi, l'horaire du vote ayant régulièrement été modifié par un avenant au protocole préélectoral, les élections ne peuvent être annulées du seul chef du non-respect de l'accord initialement conclu ; qu'en tout état de cause, il est constant que si les heures de vote initialement fixées doivent être respectées, la modification des horaires ne peut entraîner l'annulation que si elle a eu une incidence sur le résultat des élections ou, depuis l'entrée en vigueur de la loi n° 2008-789 du 20 août 2008, si elle a été déterminante de la qualité représentative des organisations syndicales dans l'entreprise ; que les Syndicats C.G.T. et U.G.I.C.T.-C.G.T. ne reprochent pas une clôture anticipée du scrutin ayant empêché des salariés d'exprimer leurs suffrages, mais la prolongation de la durée du vote aux motifs que cela aurait permis essentiellement à des sympathisants d'autres syndicats de se déplacer et aurait modifié les taux de représentativité atteints à 18h00 ; qu'en effet, ils soutiennent que leur électorat n'aurait pas été avisé du report de l'heure de clôture du scrutin, que les horaires de bus ne permettaient pas de quitter l'entreprise après 18h00 et que seul le troisième collège qui ne lui est pas favorable aurait pu voter pendant cette prolongation ; qu'il est démontré par la S.A.S. EUROCOPTER que l'argument tiré de l'absence de moyens de transport est erroné puisque plusieurs lignes de bus et navettes ont quitté l'entreprise après 18 heures (85 salariés en sont partis par bus, 120 par navettes) ; qu'il est également établi qu'il n'y a pas eu de discrimination dans la transmission de l'information quant à la prolongation du vote puisqu'un mail a été adressé à tous les salariés et qu'il a été donné des instructions aux responsables hiérarchiques afin qu'ils la répercutent notamment aux membres des premier et deuxième collèges dont certains ont d'ailleurs participé à l'élection après 18h00 ; que dès lors que tous les électeurs ont librement pu voter en faveur de la liste de leur choix pendant la prolongation des opérations électorales et que les scores atteints à 18h00 par les différentes organisations syndicales ne pouvaient pas être connus, les suffrages exprimés après cet horaire n'ont pas pu, par leur existence même, « fausser » les résultats des élections ; qu'il ne peut d'ailleurs être tenu pour acquis que le surcroît de suffrages exprimés pendant la prolongation des opérations (dont le pourcentage est relativement faible) a été défavorable aux listes présentées par les syndicats demandeurs ; quand bien même, les enjeux liés à la représentativité syndicale ne peuvent permettre de discuter le choix souverain des électeurs à raison du collège auquel ils appartiennent ; qu'ainsi, les postulats purement hypothétiques sur lesquels les demandeurs fondent leur argumentation (dont l'obtention de 10 % des suffrages exprimés à 18h00 ne leur permettent pas de démontrer qu'ils auraient « probablement » été représentatifs sans le report de l'heure de clôture du scrutin ; que par conséquent, les élections des membres du Comité d'établissement et des délégués du personnel au sein de l'établissement EUROCOPTER de MARIGNANE ne seront pas annulées du chef de la prolongation de la durée de vote ;
QUE, sur les autres moyens d'annulation, il convient de rappeler que dès lors qu'un syndicat a signé un protocole d'accord préélectoral et ses avenants, il ne peut pas en contester l'application ; qu'en l'espèce, les syndicats demandeurs ont signé « l'accord relatif au vote avec des machines à voter pour les élections professionnelles des délégués du personnel et des membres du Comité d'établissement de MARIGNANE » le 18 janvier 2011 détaillant les modalités d'utilisation de ces machines et qui stipule expressément dans son paragraphe 3.1 que « les parties conviennent que les ratures et les surcharges ne seront pas prises en compte à travers l'utilisation des machines à voter » ; que dès lors, les Syndicats C.G.T. et U.G.I.C.T.- C.G.T. ne peuvent pas contester l'utilisation es machines à voter qui ont été employées conformément à l'accord préélectoral qu'ils ont signé, la possibilité de « pirater » les données enregistrées par ces machines agréées par le ministère de l'Intérieur n'étant par ailleurs aucunement démontrée ; que de même, les syndicats demandeurs, qui ont signé l'avenant n° 2 du 15 février 2011 prévoyant que les élections se dérouleraient au « bâtiment R2 » pour l'ensemble du personnel, ne sont pas recevables à critiquer l'organisation des élections dans ce lieu ; qu'enfin, le protocole préélectoral du 18 janvier 2011 prévoyait qu'un membre de la Direction assisterait aux opérations à titre consultatif si bien que les demandeurs ne peuvent reprocher à celui-ci d'avoir été présent, conformément aux prévisions de l'accord, alors que, de surcroît, aucune pièce du dossier ne permet d'établir qu'il aurait tenté d'influencer les votes ; que ne demeurent que les critiques sur l'organisation matérielle des élections, les demandeurs soutenant que le temps d'attente aurait dissuadé des électeurs de voter et que certains représentants syndicaux auraient favorisé le vote de leurs sympathisants ; qu'il ressort de l'audience et des pièces du dossier que les élections se sont déroulées dans des conditions matérielles difficiles ; que toutefois, si les témoignages versés aux débats par les demandeurs indiquent « qu'une grande partie des salariés » aurait été découragée par la file d'attente, 36 des 37 témoins qui attestent en ce sens ont cependant attendu pour voter et il ne leur est pas possible de certifier que les électeurs qu'ils ont vu partir ne se soient pas représentés plus tard au bureau de vote ; qu'en outre, le favoritisme « syndical » évoqué par quelques attestations n'a pas fait l'objet d'aucune observation sur les procès-verbaux des élections et n'a pu, compte tenu du taux très élevé de participation, fausser les résultats du scrutin, que, dès lors, ni la matérialité des irrégularités invoquées ni leur éventuelle incidence sur les résultats de scrutin ne sont établies ; que, par conséquent, la demande d'annulation des élections des membres du Comité d'établissement et des délégués du personnel qui ont eu lieu le 10 mars 2011 au sein de l'établissement EUROCOPTER de MARIGNANE sera rejetée ;
ALORS, D'UNE PART, QUE le protocole d'accord préélectoral signé pour une élection de représentants du personnel ne peut être révisé que par l'ensemble des signataires ; qu'en retenant que la stipulation des deux protocoles préélectoraux signés par les cinq syndicats représentatifs dans l'établissement, fixant à 18h00 l'heure de clôture des élections se tenant le 10 mars 2011, avait pu être modifié par un avenant fixant la clôture à 19h00, signé le 10 mars 2011 par trois seulement des signataires, a violé les articles L.2324-4-1, L.2314-23, L.2314-3-1 et L.2261-7 du Code du travail ;
ALORS, D'AUTRE PART, SUBSIDIAIREMENT, QU'une révision de l'accord préélectoral ne peut survenir, dès lors que le scrutin est ouvert, qu'avec l'accord de la totalité des signataires initiaux ; qu'en retenant que les stipulations des deux protocoles d'accord préélectoraux du 10 janvier 2011 fixant l'heure du scrutin du 10 mars 2011 à 8h30 pour l'ouverture et 18h00 pour la clôture, avaient pu valablement être modifiées par le report de l'heure de clôture à 19h00 avec l'accord de trois seulement des cinq syndicats signataires, le Tribunal d'instance a violé les articles L.2324-4, L.2324-4-1, L.2314-3 et L.2314-3-1 du Code du travail ;
ALORS, DE TROISIEME PART, QUE l'élection des institutions représentatives a lieu pendant le temps de travail, sauf accord contraire conclu entre l'employeur et l'ensemble des organisations syndicales représentatives existant dans l'entreprise ; qu'en retenant que n'avait pu être valablement passé par trois seulement des cinq syndicats signataires un avenant aux protocoles d'accord préélectoraux reportant de 18 à 19 h la clôture du scrutin, sans s'expliquer sur le fait allégué par la C.G.T. que les ouvriers relevant du premier collège électoral terminaient leur journée de travail à 18h00, le Tribunal n'a pas donné de base légale à sa décision en regard des articles L.2314-23, L.2314-22 et L.2324-20 du Code du travail ;
ET ALORS, ENFIN, QU'en s'abstenant de répondre au moyen soutenu par la C.G.T. dans ses écritures, soutenant que les modalités du vote électronique ne permettaient pas aux salariés de ne choisir que la liste des titulaires ou celle des suppléants, puisque lorsqu'ils procédaient ainsi, leur vote n'était pas enregistré sauf à ce qu'ils indiquent au préalable qu'ils n'entendaient voter que pour les titulaires ou les suppléants, et que cette sujétion avait gravement affecté le secret du vote, le Tribunal d'instance a violé l'article 455 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-19021
Date de la décision : 28/03/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Tribunal d'instance de Martigues, 26 mai 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 28 mar. 2012, pourvoi n°11-19021


Composition du Tribunal
Président : M. Béraud (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Fabiani et Luc-Thaler, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.19021
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