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28/03/2012 | FRANCE | N°10-23562

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 28 mars 2012, 10-23562


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article 1134 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu sur renvoi après cassation (Soc. 19 novembre 2008, n° 07-42. 866), que Mme X..., employée depuis le 25 septembre 1992 par la société France informatique en dernier lieu en qualité de " programmeuse éditique ", a été licenciée pour faute le 27 janvier 2003, après avoir fait l'objet d'un avertissement notifié le 8 janvier précédent ;
Attendu que pour dire le licenciement dénué de cause réelle et sérieus

e et condamner l'employeur à verser des dommages-intérêts à la salariée à ce tit...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article 1134 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu sur renvoi après cassation (Soc. 19 novembre 2008, n° 07-42. 866), que Mme X..., employée depuis le 25 septembre 1992 par la société France informatique en dernier lieu en qualité de " programmeuse éditique ", a été licenciée pour faute le 27 janvier 2003, après avoir fait l'objet d'un avertissement notifié le 8 janvier précédent ;
Attendu que pour dire le licenciement dénué de cause réelle et sérieuse et condamner l'employeur à verser des dommages-intérêts à la salariée à ce titre et à rembourser aux organismes sociaux des indemnités de chômage, l'arrêt énonce que la faute professionnelle reprochée commise par la salariée courant décembre 2002 a nécessairement été connue de l'employeur au stade de l'édition-impression du travail fourni, dès le bon à tirer, avant l'expédition de la commande et l'émission de la facture correspondante, ainsi que de sa prise de contact le 10 janvier 2003 avec son assureur, et que la société, qui ne prouve pas qu'elle n'avait pas déjà connaissance du fait nouveau lors de la précédente sanction disciplinaire, a épuisé par cette sanction son pouvoir disciplinaire ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la lettre du 14 janvier 2003 à laquelle elle se référait, adressée par l'employeur à la société Pascal Z..., répondait à la réclamation faite téléphoniquement le 10 janvier courant par le client lésé par l'erreur de la salariée, soit postérieurement à la date de la notification à cette dernière de la précédente sanction disciplinaire, la cour d'appel, qui a dénaturé ladite pièce, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 juin 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit mars deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Coutard et Munier-Apaire, avocat aux Conseils pour la société France informatique.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR dit que le licenciement de Madame X... était dénué de cause réelle et sérieuse, D'AVOIR condamné la société FRANCE INFORMATIQUE à lui payer la somme de 38 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et D'AVOIR ordonné le remboursement par l'employeur aux organismes concernés de tout ou partie des indemnités de chômage payées au salarié licencié du jour de son licenciement au jour du prononcé de l'arrêt, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage ;
AUX MOTIFS QUE « il résulte de la lettre de licenciement du 27 janvier 2003, qui fixe les limites du litige, que, bien que faisant référence à un précédent avertissement du 19 décembre 2002 notifié " pour les mêmes motifs ", la société FRANCE INFORMATIQUE retient comme faute professionnelle motivant la rupture du contrat de Madame X..., le grief d'une " erreur de votre part dans le programme de personnalisation laser que vous avez écrit pour le mailing " VOEUX 2003 " plus de 6500 clients des salons de coiffure Pascal Z...ont reçu des coupons de réduction sans date de validation, de ce fait, " Pascal Z..." nous demande des dommages et intérêts pour tous les coupons qui seront utilisés après la date de validation qui aurait dû être imprimée ; la faute professionnelle n'est pas tant l'erreur que vous avez laissée dans votre programme mais surtout le fait de ne pas avoir vérifié les variables au moment des contrôles d'usage " ; que le grief ainsi reproché et non daté précisément dans la lettre de rupture, constitue un motif disciplinaire de licenciement ; qu'il résulte des pièces versées aux débats que l'erreur reprochée à la salariée, qualifiée par l'employeur de, faute professionnelle, a été commise courant décembre 2002 et, bien que de même nature, est distincte de celle précédemment commise le 15 novembre 2002, ayant. fait l'objet d'un avertissement écrit le 19 décembre 2002, mentionnant : " nous nous voyons dans l'obligation de vous signifier un avertissement pour les faits suivants : aux environs du 15 novembre 2002 vous n'avez pas contrôlé sérieusement le mailing " ANAIS " que vous aviez programmé pour notre client ÎDP ; de ce fait, vous ne vous êtes pas aperçue que la personnalisation des prénoms, conditionnée par la présence du prénom, dans le fichier en entrée, ne fonctionnait pas correctement ; c'est l'absence de contrôle que nous tenons à sanctionner par cet avertissement ; vous auriez dû vous apercevoir de votre erreur dans le contrôle de la personnalisation car il y avait 9 adresses sans prénom parmi les 100 premières et la première arrivait en dixième position ; avec l'espoir que cet avertissement soit vite oublié et que votre travail nous donne à nouveau entière satisfaction " ; par ailleurs que la lettre susvisée porte la mention manuscrite " Reçu le 8/ 01/ 03 ", suivie de la signature de la salariée, emportant notification à cette date de la sanction disciplinaire ; qu'il s'agit bien dès lors de faits distincts de même nature et réitérés, le second. fait motivant le licenciement notifié par l'employeur ; que sont produits-Une, facture du 11 décembre 2002 à en-tête FRANCE INFORMATIQUE, adressée au client PASCAL Z...COIFFURE SAS mentionnant une proposition du 2 décembre 2002 ayant trait au mailing VOEUX 2003 ;- Un avoir du 28 janvier 2003 à en-tête FRANCE INFORMATIQUE, adressé au client PASCAL Z...COIFFURE SAS mentionnant " avoir de la facture... du 11. 12. 2002. Notre courrier du 14. 01. 2003- Votre courrier du 27. 01, 2003 ;- Un courrier du 27 janvier 2003 à en-tête SAS PASCAL Z...COIFFURE mentionnant " Suite à votre courrier du 14 janvier 2003, nous acceptons la forme de votre indemnisation, à savoir une annulation de la. facture relative au mailing où l'erreur a été faite... Cette dernière portant le numéro... A été payée par notre service comptabilité le 8 janvier 2003';- Un courrier du 14 janvier 2003 à en-tête FRANCE INFORMATIQUE, adressé au client SAS PASCAL Z...COIFFURE mentionnant " Suite à notre conversation téléphonique du 10 courant, nous nous sommes rapprochés de notre assureur pour couvrir l'indemnité que vous réclame... " ; Qu'il en ressort que la. faute professionnelle ayant motivé la rupture de la relation de travail et commise dans le cadre de la commande du client SAS PASCAL Z...COIFFURE a été nécessairement réalisée avant l'envoi de la facture correspondante du 11 décembre 2002 ; que le société FRANCE INFORMATIQUE, qui a pour objet : " Traitements Bancaires-Micrographie-Impression Laser-Saisie-Gestion de vente par correspondance-Mailing " a eu elle même nécessairement connaissance au stade de l'édition-impression du travail fourni, dès le bon à tirer, de l'erreur commise, avant l'expédition de la commande et l'émission de la facture correspondante, ainsi que de sa prise de contact le 10 janvier 2003 avec son assureur ; que si la réitération par un salarié d'un. fait nouveau autorise l'employeur à se prévaloir de faits similaires, y compris ceux ayant déjà été sanctionnés, dès lors que des griefs nouveaux sont établis, il n'en reste pas moins qu'il ne peut, dès lors qu'il a eu connaissance du fait nouveau, sanctionner les seuls faits initiaux sauf à épuiser par la même son pouvoir disciplinaire ; que la société, à qui il appartient d'apporter la preuve qu'elle n'avait pas déjà connaissance du fait nouveau lors de la première sanction disciplinaire, ne produit aucun élément en ce sens ; qu'il en résulte que la société FRANCE INFORMATIQUE était informée de l'ensemble des. faits reprochés à sa salariée en lui adressant l'avertissement en date du 19 décembre 2002, notifié le 8 janvier 2003, et en la sanctionnant ainsi pour l'un seul d'entre eux ; que dès lors, la société doit être réputée avoir épuisé par cette sanction son pouvoir disciplinaire et ne pouvait donc prononcer le 27 janvier 2003 le licenciement de Madame X... pour des faits antérieurs à cette date ; qu'à défaut de tout autre. fait nouveau retenu dans la lettre de licenciement comme ayant pu survenir depuis l'avertissement le licenciement est donc dénué de toute cause réelle et sérieuse ; il convient donc d'infirmer le jugement et d'indemniser le préjudice résultant de la rupture en application des dispositions de l'article L. 122-14-4 devenu L. 1235-3 du Code du travail, l'entreprise occupant plus de 11 salariés ; que Madame X... était âgée de 27 ans au moment de la rupture et bénéficiait d'une ancienneté de plus de 10 ans dans l'entreprise, qu'elle est restée deux ans sans emploi, il convient de lui allouer la somme de 38 000 euros en indemnisation de la rupture ; qu'en outre le licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse, que l'entreprise occupant plus de 11 salariés, il est fait application des dispositions de l'article L. 122-14-4, devenu l'article 1235-3 du Code du travail, que l'employeur doit être condamné au remboursement des indemnités de chômage versées à la salariée, dans la limite de six mois, en application des dispositions de l'article L. 2235-4 du même Code » ;

1°/ ALORS, D'UNE PART, QUE l'employeur peut sanctionner tout fait fautif en engageant des poursuites disciplinaires à l'encontre du salarié dans les deux mois du jour où il en a eu connaissance ; qu'en l'espèce, pour dire que le pouvoir disciplinaire avait été épuisé à l'égard de l'ensemble des faits reprochés à la salariée lors de l'avertissement notifié le 8 janvier 2003, la cour d'appel s'est bornée à énoncer que la société FRANCE INFORMATIQUE avait nécessairement eu connaissance de la faute commise, dès le bon à tirer, avant l'envoi de la commande et de la facture et son contact le 10 janvier 2003 avec l'assureur (arrêt, p. 5, dernier alinéa) ; que par ces motifs, qui ne constatent pas la connaissance par l'employeur ou le supérieur hiérarchique de Mme X... de la faute commise, la cour d'appel, qui n'a pas non plus recherché si Mme X... n'était pas précisément chargée du contrôle et de l'envoi du mail litigieux, de sorte que sa faute n'avait été découverte par l'employeur que le 10 janvier 2003 par la plainte du client, a privé sa décision de base légale au regard des articles L 1235-3, L 1332-4 et L 1332-5 du Code du travail et de la règle non bis in idem ;
2°/ ALORS, D'AUTRE PART, QUE la motivation par voie de pure affirmation équivaut à une absence de motivation ; qu'en l'espèce, en énonçant que la société FRANCE INFORMATIQUE avait eu « nécessairement connaissance de la faute commise au stade de l'édition-impression du travail fourni, dès le bon à tirer, avant l'expédition de la commande et l'émission de la facture correspondante », la cour d'appel a statué par voie de pure affirmation en violation de l'article 455 du Code de procédure civile ;
3°/ ALORS, AUSSI, OU'il est interdit au juge de dénaturer les documents de la cause ; qu'en l'espèce, la société FRANCE INFORMATIQUE avait produit aux débats l'avertissement notifié le 8 janvier 2003 à Mme X..., les consignes de personnalisation laser signées par la salariée, responsable des contrôles d'impression, et le courrier qu'elle avait adressé au client le 14 janvier 2003, tous éléments de nature à établir que, en raison de la responsabilité des contrôles des envois de Mme X..., l'employeur n'avait pu avoir connaissance de la faute qu'elle avait commise à cet égard que lorsque le client s'était plaint le 10 janvier 2003 ; qu'en affirmant que la société, à qui il appartient d'apporter la preuve qu'elle n'avait pas déjà connaissance du fait nouveau lors de la première sanction disciplinaire, ne produit aucun élément en ce sens (arrêt, p. 6, alinéa 1er), la cour d'appel a dénaturé les pièces susvisées et violé l'article 4 du Code de procédure civile ;
4°/ ALORS, ENFIN, QU'il appartient au salarié qui soulève l'exception non bis in idem pour s'opposer aux poursuites disciplinaires introduites dans les deux mois du fait fautif, d'établir que l'employeur avait déjà connaissance d'un fait nouveau lors de la notification de la précédente sanction disciplinaire et qu'il a renoncé à le sanctionner ; qu'en l'espèce, en affirmant qu'il appartenait à la société FRANCE INFORMATIQUE d'apporter la preuve qu'elle n'avait pas déjà connaissance du fait nouveau lors de la première sanction disciplinaire, la cour d'appel a fait peser sur l'employeur la charge d'une preuve négative impossible, quand il incombait à la salariée qui alléguait cette connaissance et excipait de la renonciation de l'employeur à sanctionner, de les prouver ; qu'elle a violé ainsi les articles 1315 du Code civil et L 1332-4 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-23562
Date de la décision : 28/03/2012
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nîmes, 15 juin 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 28 mar. 2012, pourvoi n°10-23562


Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats (président)
Avocat(s) : SCP Coutard et Munier-Apaire, SCP Richard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:10.23562
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