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22/03/2012 | FRANCE | N°10-18491

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 22 mars 2012, 10-18491


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 31 mars 2010), que par contrats successifs conclus de mai 1994 à janvier 1996, la société Ellipse programme aux droits de laquelle vient la société Ellipsanimé productions, a confié à M. François X... l'écriture de la musique et à M. François Y... celle des paroles ainsi que la réalisation audiovisuelle de deux cent cinq comptines qui ont fait l'objet d'une première exploitation télévisuelle pour une série intitulée "Bonjour Baba

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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 31 mars 2010), que par contrats successifs conclus de mai 1994 à janvier 1996, la société Ellipse programme aux droits de laquelle vient la société Ellipsanimé productions, a confié à M. François X... l'écriture de la musique et à M. François Y... celle des paroles ainsi que la réalisation audiovisuelle de deux cent cinq comptines qui ont fait l'objet d'une première exploitation télévisuelle pour une série intitulée "Bonjour Babar", avant de confier à ces mêmes auteurs l'écriture de la musique et des paroles d'autres comptines et du générique de l'émission "Bonjour les petits loups" ; que la société Citel a acquis le 25 octobre 2004 , les droits d'édition vidéographique de la série de comptines "Bonjour Babar", et a édité une collection de trente-huit DVD intitulés "Les aventures de Babar" ; que faisant grief aux sociétés Ellipsanimé production, Citel vidéo et Expand, de procéder à une exploitation de leurs oeuvres en méconnaissance de leurs droits d'auteur, MM. X... et Y... les ont assignées en résiliation des contrats d'édition, en annulation de la cession des vidéogrammes et en contrefaçon ; que l'arrêt les déclare irrecevables en leurs prétentions tendant à la défense de leurs droits patrimoniaux, faute pour eux d'avoir appelé dans la cause l'ensemble des coauteurs de l'oeuvre audiovisuelle intitulée " Les aventures de Babar" ;
Attendu que MM. X... et Y... font grief à l'arrêt d'avoir statué comme il l'a fait, alors, selon le moyen, que sont des oeuvres de l'esprit au sens de l'article L. 112-2 du code de la propriété intellectuelles, les compositions musicales avec ou sans paroles ; que les auteurs d'une composition musicale et des paroles assorties, ayant créé une oeuvre musicale propre, sont recevables à exercer leurs droits patrimoniaux, peu important le mode de diffusion de cette oeuvre musicale ; que la recevabilité de leur action ne peut être subordonnée à la mise en cause des auteurs d'une oeuvre audiovisuelle dont sont extraites les images venant illustrer les comptines ; qu'en affirmant que MM. X... et Y..., auteurs de la musique et des paroles de comptines pour enfants en vertu de contrats de commande d'oeuvres musicales, n'étaient que les coauteurs d'oeuvres audiovisuelles et qu'ils devaient mettre en cause les autres coauteurs de ces dernières, au motif que les comptines avaient été diffusées par vidéogrammes illustrés par des images d'une série audiovisuelle antérieure, la cour d'appel a violé les articles L. 112-2, L. 113-3 et L. 113-7 du code de la propriété intellectuelle ;
Mais attendu que, par une interprétation nécessaire, partant souveraine, des conventions liant les parties et de l'attestation produite aux débats, la cour d'appel a estimé que les comptines avaient été spécialement conçues pour être associées à des images, peu important que celles-ci fussent préexistantes, et constituaient avec elles des oeuvres audiovisuelles ;
Qu'elle en a exactement déduit que, faute d'avoir appelé dans la cause l'ensemble des coauteurs de l'oeuvre audiovisuelle litigieuse, MM. X... et Y... étaient irrecevables en leur demande tendant à la défense de leurs droits patrimoniaux ;
Que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne MM. X... et Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux mars deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Baraduc et Duhamel, avocat aux Conseils pour MM. X... et Y....
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevables l'ensemble des demandes de monsieur François X... et de monsieur François Y... tendant à la défense de leurs droits patrimoniaux, à défaut de mise en cause de l'ensemble des coauteurs de l'oeuvre audiovisuelle intitulée « Les aventures de Babar » ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE les musiques commandées à monsieur X... et les paroles commandées à monsieur Y... ont été dès l'origine conçues pour être associées à des images pour constituer finalement une oeuvre répondant à la définition donnée par l'article L 112-2 du Code de la propriété intellectuelle, selon laquelle les oeuvres audiovisuelles consistent en « des séquences animées d'images, sonorisées ou non » ; que cette analyse est confirmée par l'attestation de madame B..., responsable des programmes jeunesse de France 3, expliquant la genèse des comptines par l'idée originale de réutiliser les images d'une série préexistante, en l'espèce celles de la série « Ruppert l'ours », comme, dans un deuxième temps, celles des « Aventures de Babar » pour constituer, après « habillage », c'est-à-dire après avoir associé paroles et musiques à ces sélections d'images, des modules éducatifs donnant aux enfants de petits conseils de savoir-vivre sous forme de comptines musicales ; qu'ainsi, selon les termes mêmes de l'attestation, il s'agissait d'un détournement d'images pour lequel il était nécessaire que la société chargée de la production audiovisuelle, en l'espèce Ellipse Programmes, obtînt l'autorisation des auteurs et de leurs ayants-droit, soit madame Mary C..., s'agissant de « Ruppert l'ours » et les représentants légaux de la famille de Jean de D..., créateur du personnage de Babar ; que cette réalité est corroborée par l'examen de l'ensemble des contrats par lesquels la société Ellipse Programme, désignée dans ces actes comme « producteur d'une série d'animation », a commandé les musiques à monsieur X..., qui exposent : « le présent contrat a pour objet de déterminer les conditions dans lesquelles Ellipse confie au compositeur, qui accepte, la composition de la partition originale des comptines ainsi que sa fixation sur support magnétique DAT prêt à mixer sur le support image » ; que, dans le même sens, les contrats de commandes à monsieur Y... précisent que : « le parolier cède (…) le droit de reproduire l'enregistrement des textes des comptines, associé aux images de la série en vue d'établir tous originaux, doubles et copies, sur tous supports, notamment pellicule film, bande vidéo ou tout autre inconnu à ce jour… » ; que c'est donc par une exacte appréciation des circonstances de la cause et sans dénaturer les contrats que le tribunal a jugé que messieurs X... et Y... ont écrit et composé les textes et les musiques des comptines spécialement pour être assemblées avec les images tirées de séries préexistantes et qu'ils sont, à ce titre, coauteurs d'oeuvres audiovisuelles ; qu'il résulte des dispositions de l'article L 113-7 alinéa 2 du Code de la propriété intellectuelle, que les oeuvres audiovisuelles sont présumées réalisées en collaboration ; que l'alinéa 3 du même article précise que « lorsque l'oeuvre audiovisuelle est tirée d'une oeuvre ou d'un scénario préexistants encore protégés, les auteurs de l'oeuvre originaire sont assimilés aux auteurs de l'oeuvre nouvelle » ; qu'il résulte de l'article L 113-3 du Code de la propriété intellectuelle que le tribunal a jugé à bon droit que messieurs X... et Y... ne pouvaient valablement introduire leur action sans appeler dans la cause l'ensemble des coauteurs et déclaré irrecevables les demandes tendant à la défense de leurs droits patrimoniaux ;
ET AUX MOTIFS REPUTES ADOPTES QU' il résulte expressément des contrats de commande versés aux débats, que la société Ellipse, producteur d'une série de 60 comptines d'une durée d'une minute environ, intitulée provisoirement ou définitivement « Bonjour Babar », a confié la composition et la réalisation de la musique originale de la série, en ce compris le générique, à monsieur X... et l'écriture des paroles, en ce compris le générique, à monsieur Y... ; que ledit contrat de commande du 11 mai 1994 conclu avec monsieur X... stipule que « le présent contrat a pour objet de déterminer les conditions dans lesquelles Ellipse confie au compositeur qui accepte, la composition de la partition originale des comptines de la série ainsi que sa fixation sur support magnétique DAT prêt à mixer sur le support image » ; que de même, le contrat de commande conclu également le 11 mai 1994 avec monsieur Y... indique que « le présent contrat a pour objet de déterminer les conditions dans lesquelles Ellipse confie au parolier qui accepte, l'écriture des comptines de la série » et « le parolier s'engage à céder le droit de reproduire les enregistrements des textes des comptines, associés aux images de la série en vue d'établir tous originaux, doubles et copies, sur tous supports, notamment pellicule film, bande vidéo ou tout autre inconnu à ce jour… » ; qu'il en résulte que messieurs X... et Y... ont donc spécialement écrit et composé les textes et les musiques des comptines et qu'ils sont coauteurs des oeuvres audiovisuelles ; qu'il ne peut être valablement soutenu que les comptines litigieuses sont des oeuvres musicales qui ont ensuite été fixées sur vidéogrammes dès lors que les contrats sus-indiqués précisent dès l'origine le cadre de la commande puis de la réalisation de ces oeuvres audiovisuelles ; que les demandeurs ne peuvent pas plus tirer profit d'un courrier électronique de la SACEM en date du 11 septembre 2006 qui ne peut avoir qu'une portée générale ; qu'il résulte de l'article L 113-3 du Code de la propriété intellectuelle que messieurs X... et Y... ne pouvaient valablement introduire la présente action sans mettre dans la cause l'ensemble des coauteurs de ces oeuvres ; qu'à défaut il y a lieu de déclarer irrecevables l'ensemble des demandes tendant à la défense de leurs droits patrimoniaux ;
ALORS QUE, sont des oeuvres de l'esprit au sens de l'article L 112-2 du Code de la propriété intellectuelles, les compositions musicales avec ou sans paroles ; que les auteurs d'une composition musicale et des paroles assorties, ayant créé une oeuvre musicale propre, sont recevables à exercer leurs droits patrimoniaux, peu important le mode de diffusion de cette oeuvre musicale ; que la recevabilité de leur action ne peut être subordonnée à la mise en cause des auteurs d'une oeuvre audiovisuelle dont sont extraites les images venant illustrer les comptines ; qu'en affirmant que messieurs X... et Y..., auteurs de la musique et des paroles de comptines pour enfants en vertu de contrats de commande d'oeuvres musicales, n'étaient que les coauteurs d'oeuvres audiovisuelles et qu'ils devaient mettre en cause les autres coauteurs de ces dernières, au motif que les comptines avaient été diffusées par vidéogrammes illustrés par des images d'une série audiovisuelle antérieure, la cour d'appel a violé les articles L 112-2, L 113-3 et L 113-7 du Code de la propriété intellectuelle.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 10-18491
Date de la décision : 22/03/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 31 mars 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 22 mar. 2012, pourvoi n°10-18491


Composition du Tribunal
Président : M. Charruault (président)
Avocat(s) : Me de Nervo, SCP Baraduc et Duhamel, SCP Hémery et Thomas-Raquin, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:10.18491
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