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21/03/2012 | FRANCE | N°10-25690

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 21 mars 2012, 10-25690


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé par contrat à durée indéterminée le 19 juin 1975 en qualité de coupeur, par la société Papeteries des Chatelles aux droits de laquelle se trouve la société Les Chatelles ; qu'il a été licencié pour faute grave le 19 novembre 2008, son employeur lui reprochant une absence injustifiée ; que contestant le bien fondé de son licenciement, il a saisi la juridiction prud'homale

de diverses demandes ;
Attendu que pour dire fondé sur une cause réelle et série...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé par contrat à durée indéterminée le 19 juin 1975 en qualité de coupeur, par la société Papeteries des Chatelles aux droits de laquelle se trouve la société Les Chatelles ; qu'il a été licencié pour faute grave le 19 novembre 2008, son employeur lui reprochant une absence injustifiée ; que contestant le bien fondé de son licenciement, il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Attendu que pour dire fondé sur une cause réelle et sérieuse le licenciement du salarié, l'arrêt retient que celui-ci s'est absenté de son travail pendant plus de quinze jours pour suivre une cure thermale sans l'accord de son employeur et en lui imposant ses dates d'absence après l'en avoir informé deux jours avant son départ effectif ;
Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions selon lesquelles il ne pouvait être exigé du salarié la production d'un arrêt de travail par son médecin traitant lequel s'était vu interdire par la caisse primaire d'assurance maladie des Vosges un tel arrêt en pareille circonstance, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit fondé sur une cause réelle et sérieuse le licenciement et déboute M. X... de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt rendu le 10 septembre 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Nancy ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Metz ;
Condamne la société Les Chatelles aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Les Chatelles à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un mars deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Fabiani et Luc-Thaler, avocat aux Conseils pour M. X....
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir dit que le licenciement du salarié était fondé sur une cause réelle et sérieuse et d'avoir limité les condamnations de la SARL LES CHATELLES aux sommes de 22.811,29 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, de 3.561,24 € à titre d'indemnité conventionnelle de préavis, de 356,12 € au titre des congés payés afférents et de 289,94 € à titre de rappel de prime et congés payés inclus ;
AUX MOTIFS QUE la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige doit être suffisamment motivée et viser des faits et griefs matériellement vérifiables, sous peine de rendre le licenciement dénué de cause réelle et sérieuse ; que la faute grave, qui seule peut justifier une mise à pied conservatoire, est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; qu'il appartient à l'employeur qui l'invoque de rapporter la preuve de l'existence d'une faute grave ; que la lettre de licenciement est ainsi rédigée : « le 15 septembre 2008 à 12 heures, lors de la prise de votre poste, vous informez votre supérieur hiérarchique de ce que vous deviez vous absenter à 14 heures sans aucune justification. Celui-ci refuse en présence de Monsieur Y... Vous avez abandonné votre poste de travail sans autorisation et n'avez jamais fourni le moindre justificatif. C'est pourquoi, le 16 septembre 2008, nous vous avons convoqué à un entretien préalable devant se dérouler le 23 septembre 2008. Vous nous avez alors informés seulement la veille, soit le 22 septembre 2008, de ce que vous pariez en cure et de ce que vous ne pourriez être présent à l'entretien précité. Vous indiquiez que votre absence s'étendrait du 22 septembre 2008 au 17 octobre 2008 et que votre justificatif était votre lettre de réservation de la société de cure datant du mois d'avril, ajoutant également que pour vous, cela ferait office d'arrêt de travail. Force est de constater qu'une fois encore, vous n'avez pas fourni le moindre justificatif et pour cause. En effet, durant l'entretien, vous avez indiqué "qu'ils n'avaient pas voulu vous donner d'arrêt maladie", après demande de ma part sur ce que représentait le "qui", vous avez répondu "la sécurité sociale et le médecin". A ma question "donc le médecin et la sécurité sociale ont refusé de vous délivrez un arrêt de travail", vous avez répondu "oui". C'est donc délibérément et malgré l'absence d'arrêt maladie que vous vous êtes absenté pendant plus de 3 semaines. Cela constitue une faute grave. Vous n'ignorez pas que vos absences tant intempestives qu'injustifiées ont particulièrement désorganisé un atelier de l'entreprise car c'est vous qui approvisionnez "la salle". Nous considérons que ces faits constituent une faute grave rendant impossible votre maintien, même temporaire, dans l'entreprise » (Sic) ; qu'en premier lieu, M. X... invoque la nullité de son licenciement pour discrimination syndicale ; que cependant, il n'est pas contesté que le salarié n'a plus de mandat syndicale et n'a plus le statut de salarié protégé depuis 2004 ; qu'en outre, il ne présente aucun élément de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte liée à ses anciennes fonctions de représentant des salariés ou à ses engagements syndicaux ; qu'il s'ensuit que M. X... doit être débouté de sa demande de nullité du licenciement et de réintégration, le premier jugement étant confirmé sur ce point ; que sur la validité du licenciement, il est reproché au salarié de s'être absenté 3 semaines pour une cure thermale sans l'accord de son employeur et sans arrêt de travail pour maladie ; qu'il résulte du courrier de M. X... reçu par son employeur le 22 septembre 2008 que suite à la convocation à un entretien préalable, le salarié a « informé son employeur qu'à la date prévue pour cet entretien, il sera absent de l'entreprise et éloigné de son domicile pour suivre une cure de soins thérapeutiques, que la durée de son absence était prévue du 22 septembre au 17 octobre 2008 et qu'il en justifiera par l'envoi d'un arrêt de travail pour maladie » ; que l'employeur produit également l'attestation de M. Z..., secrétaire de la délégation unique ayant assisté à l'entretien préalable du 13 novembre 2008, qui indique que M. X... a clairement exprimé n'avoir ni arrêt maladie de son médecin, ni acceptation de la Sécurité sociale pour la cure ; qu'il est rappelé qu'en dehors des cas où la prescription médicale fixe les dates de la cure, le salarié ne peut imposer à son employeur les dates de son absence et les conditions de l'absence doivent être fixées en commun par les parties au contrat de travail ; qu'en l'espèce, il est constaté que M. X... ne justifie d'aucune prescription médicale pour une cure, ni d'aucun courrier demandant à son employeur de convenir de ses dates d'absence ; que le fait que la cure soit prise en charge par la Sécurité sociale est indifférent ; qu'il s'ensuit que le salarié s'est absenté de son travail pour suivre une cure thermale sans l'accord de son employeur et en lui imposant ses dates d'absence, étant observé que l'employeur n'a été informé de cette absence que deux jours avant le début effectif de la cure qui s'est déroulée du 24 septembre au 14 octobre 2008 ; qu'il ne démontre avoir demandé une autorisation que pour le 22 septembre 2008, mais pas pour la période de la cure ; que l'absence du salarié pendant plus de quinze jours pour une cure thermale non autorisée par l'employeur constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement et non une faute grave, l'employeur ne produisant aucune pièce pour démontrer la désorganisation du service invoquée dans la lettre de licenciement ; que le jugement ayant débouté le salarié de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement abusif est confirmé ;
ALORS, D'UNE PART, QUE la lettre de licenciement fixant les limites du litige, les juges du fond ne peuvent conclure au bien fondé de la rupture qu'en s'assurant que le motif qui y est énoncé est avéré et de nature à la justifier ; qu'en concluant, dès lors, au bien fondé du licenciement de M. X... au motif que le salarié se serait absenté de l'entreprise pour suivre une cure thermale sans l'accord de son employeur, alors que le motif énoncé dans la lettre de notification du licenciement ne tenait pas au fait que le salarié n'aurait pas demandé l'autorisation sur la date de son absence, mais au fait qu'il n'aurait délivré aucun justificatif d'arrêt de travail, la Cour d'appel a d'ores et déjà violé l'article L.1235-1 du Code du travail ;
ALORS, D'AUTRE PART (et subsidiairement), QUE M. X... avait rappelé dans ses écritures (p. 4 § 7 et p. 5, § 3) que l'accord préalable de la Sécurité sociale à son départ en cure, daté du 11 juillet 2008, avait été immédiatement remis à la secrétaire du service du personnel et que ses demandes de jours de congés payés pour effectuer les trajets aller et retour vers l'établissement thermal avaient été acceptées le 19 septembre 2008 par le service du personnel ; qu'il s'évinçait de ces développements, corroborés par la production des pièces correspondantes, que la Société avait au moins implicitement accepté l'absence du salarié du 22 septembre au 17 octobre ; qu'en se contentant, dès lors, d'affirmer, pour conclure au caractère justifié du licenciement, que l'absence du salarié n'aurait pas été autorisée par l'employeur, sans même répondre au moyen des conclusions de l'exposant tiré de l'existence d'un accord implicite, la Cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du Code de procédure civile ;
ALORS, ENSUITE, QUE M. X... avait exposé dans ses écritures (p. 4 et suivantes) que la Caisse primaire d'assurance maladie des Vosges avait rappelé à son médecin traitant, M. A..., par lettre en date du 7 juillet 2008 dûment versée aux débats, que le formulaire d'accord de prise en charge de cure thermale qu'elle délivrait et le bulletin de présence fourni par l'établissement thermal en fin de cure tenaient lieu d'arrêt de travail et de justificatif d'absence pour les employeurs et avait exigé du praticien qu'il cesse d'établir des arrêts de travail pour des cures thermales ; qu'en considérant néanmoins comme justifié le licenciement de M. X... fondé sur l'absence de production d'un justificatif d'arrêt de travail, alors que l'employeur ne pouvait exiger du salarié la communication d'une pièce que son médecin traitant avait l'interdiction de rédiger, la Cour d'appel a une nouvelle fois violé l'article L.1235-1 du Code du travail ;
ALORS, ENCORE, QU'en statuant de la sorte, la Cour n'a, de surcroît, pas répondu au moyen des écritures de l'exposant tiré de ce qu'il ne pouvait être exigé de lui la production d'un arrêt de travail par son médecin traitant avant son départ en cure dans la mesure où la Caisse primaire d'assurance maladie des Vosges avait interdit à ce dernier d'établir un arrêt de travail en pareille circonstance ; qu'elle a dès lors également méconnu les exigences de l'article 455 du Code de procédure civile ;
ET ALORS, ENFIN (et subsidiairement), QUE la Cour d'appel qui, constatant que le salarié avait une ancienneté de 33 ans dans l'entreprise, que son absence, qu'il ne pouvait justifier formellement qu'au terme de sa cure par la production du bulletin de présence de l'établissement thermal, n'avait duré que trois semaines et qu'il n'était pas démontré qu'elle aurait désorganisé le service auquel il appartenait, a néanmoins conclu à l'existence d'une cause réelle et sérieuse de licenciement, n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé en conséquence les dispositions de l'article L.1235-1 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-25690
Date de la décision : 21/03/2012
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nancy, 10 septembre 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 21 mar. 2012, pourvoi n°10-25690


Composition du Tribunal
Président : M. Chollet (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Fabiani et Luc-Thaler, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:10.25690
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