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21/03/2012 | FRANCE | N°10-17957

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 21 mars 2012, 10-17957


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu selon l'arrêt attaqué (Paris, 18 mars 2010), que Mme X... a été engagée par la société Heidrick et Struggles en qualité de secrétaire bilingue le 5 juin 1979 ; que, devenue consultante, elle a été promue "Partner senior" ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail en reprochant notamment à son employeur, sur le fondement du principe "à travail égal, salaire égal", la modification du mode de calcul de

son bonus ; qu'elle a été licenciée pour faute grave le 15 mai 2007 ;

Atte...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu selon l'arrêt attaqué (Paris, 18 mars 2010), que Mme X... a été engagée par la société Heidrick et Struggles en qualité de secrétaire bilingue le 5 juin 1979 ; que, devenue consultante, elle a été promue "Partner senior" ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail en reprochant notamment à son employeur, sur le fondement du principe "à travail égal, salaire égal", la modification du mode de calcul de son bonus ; qu'elle a été licenciée pour faute grave le 15 mai 2007 ;

Attendu que la société fait grief à l'arrêt d' accueillir la demande de la salariée, alors, selon le moyen :

1°/ qu'il appartient au salarié qui invoque une atteinte au principe « à travail égal, salaire égal » de soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération ; qu'en faisant droit à la demande de la salariée, qui n'invoquait aucune discrimination autre que salariale, après avoir constaté que celle-ci s'était bornée à présenter des éléments de fait « laissant supposer » l'existence d'une discrimination dans la mise en oeuvre du plan de rémunération, la cour d'appel a violé l'article 1315 du code civil par refus d'application et l'article L. 1134-1 du code du travail par fausse application, ensemble le principe « à travail égal, salaire égal » ;

2°/ que ne laissent supposer et, a fortiori, ne caractérisent, l'existence d'une inégalité de traitement, ni le message électronique par lequel un des partners auquel la salariée se compare renonce à un traitement de faveur et demande à être rémunéré selon les mêmes modalités que ses homologues ni le refus de l'employeur de communiquer les fiches de bonus des dix partners auxquels elle se compare ; qu'en estimant, dès lors, que Mme X... présentait des éléments de fait qui laissent supposer l'existence d'une discrimination dans la mise en oeuvre du plan de rémunération, la cour d'appel a violé le principe « à travail égal, salaire égal » et l'article 1315 du code civil ;

3°/ que la résiliation du contrat de travail ne peut être prononcée aux torts de l'employeur que si le comportement de celui-ci à l'égard du salarié était d'une gravité suffisante pour rendre impossible la poursuite des relations contractuelles ; qu'en se fondant, pour prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur, sur une méconnaissance du principe « à travail égal, salaire égal » dont elle n'a pas apprécié la gravité, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1184 du code civil ;

4°/ que, selon le contrat de travail liant les parties, un bonus, dont l'attribution n'est pas garantie, peut être attribué par le conseil d'administration à la salariée en fonction des résultats de la société et de ses performances ; qu'il découle de ces stipulations contractuelles que le principe et les modalités de calcul du bonus sont fixés chaque année en fonction des résultats de la société et des performances du salarié ; que, dès lors, en se fondant sur le coefficient de commissionnement retenu au titre de l'année 2004 pour déterminer le droit de la salariée à un rappel de bonus au titre des années 2005 et 2006, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;

Mais attendu qu'ayant examiné les éléments de fait présentés par la salariée, susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération, la cour d'appel a estimé qu'ils laissaient supposer l'existence d'une inégalité dans la mise en place du plan de rémunération dans la partie relative au bonus ; qu'elle a retenu que l'employeur ne justifiait pas de raisons objectives susceptibles de justifier une telle inégalité et a, en conséquence, d'une part, prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur et, d'autre part, alloué à la salariée la somme correspondant au bonus qui avait été versé aux autres consultants qui se trouvaient dans une situation identique ; que le moyen, nouveau en sa deuxième branche, manquant en fait dans sa troisième branche et inopérant dans sa quatrième branche, n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Heidrick et Struggles aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Heidrick et Struggles à payer à Mme X... la somme de 2 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un mars deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par Me Haas, avocat aux Conseils pour la société Heidrick et Struggles.

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR prononcé au 15 mai 2007 la résiliation judiciaire du contrat de travail liant la société Heidrick et Struggles et Mme X... et D'AVOIR condamné la société Heidrick et Struggles à payer à Mme X... un rappel de bonus au titre des années 2005 et 2006 et diverses sommes à titre d'indemnités de rupture et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

AUX MOTIFS QU'au regard du principe « à travail égal, salaire égal » invoqué par la salariée et qui s'applique même lorsque le bonus est qualifié de discrétionnaire et d'aléatoire, l'employeur ne peut opposer son pouvoir discrétionnaire pour se soustraire à son obligation de justifier, de façon objective et pertinente, une différence de rémunération ; que Mme maillot verse copie d'un message électronique adressé par M. Z... le 22 mars 2005 relatif à son bonus aux termes duquel celui-ci « renonce à un traitement de faveur » et demande à « être payé aux mêmes conditions et avec le même système de calcul de bonus que les autres partenaires européens » ; que Mme X... justifie aussi avoir vainement fait sommation de communiquer les fiches de bonus 2004 de dix autres partners européens nommément désignés ; que Mme X... présente ainsi des éléments de fait qui laissent supposer l'existence d'une discrimination dans la mise en oeuvre du plan de rémunération dans sa partie relative au bonus ; qu'au vu de ces éléments, il appartient à la société Heidrick et Struggles de justifier du montant du bonus effectivement attribué aux partners européens visés par Mme X... et de prouver que les différences sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; que la société Heidrick et Struggles n'a fait aucune observation sur le message électronique de M. Z... et ne s'est pas expliquée sur les éléments objectifs qui auraient été de nature à justifier le « traitement de faveur » qui lui a été proposé ; que l'employeur ne peut pas se contenter d'affirmer que la salariée a eu le même traitement que les consultants placés dans sa situation alors qu'il lui incombe de démontrer que le plan de rémunération pour cette catégorie de salarié a été mis en oeuvre sans discrimination ; que l'attestation de Mme A..., directeur financier de la région Europe, Moyen Orient, Afrique qui ne fait que rappeler les termes du plan de rémunération est privée de pertinence dès lors qu'elle ne permet pas aux juges d'appel d'exercer leur contrôle ; qu'il en va de même du message électronique du 13 mars 2008 par lequel elle confirme que les partners visés par Mme X... ont tous perçu un bonus calculé sur un critère de performance de 75 % alors que cette affirmation n'est étayée par aucun élément objectif ; qu'en conséquence, il convient de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail de Mme X... aux torts exclusifs de l'employeur ; qu'eu égard à la discrimination dont elle a été victime, la salariée est fondée à demander que sa rémunération annuelle soit fixée en appliquant un commissionnement de 85 % ; qu'il sera fait droit aux demandes de rappel de bonus qui ne sont critiquées qu'en leur principe ; que la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur produit les effets d'une licenciement sans cause réelle et sérieuse ; qu'en l'absence de contestation de leur montant, il sera fait droit aux demandes d'indemnités de rupture ; que compte tenu de l'effectif de l'entreprise, de l'ancienneté et de l'âge de la salariée ainsi que des conséquences matérielles et morales du licenciement, il sera alloué une somme de 500.000 euros à titre de dommages-intérêts ;

ALORS, 1°), QU'il appartient au salarié qui invoque une atteinte au principe « à travail égal, salaire égal » de soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération ; qu'en faisant droit à la demande de la salariée, qui n'invoquait aucune discrimination autre que salariale, après avoir constaté que celle-ci s'était bornée à présenter des éléments de fait « laissant supposer » l'existence d'une discrimination dans la mise en oeuvre du plan de rémunération, la cour d'appel a violé l'article 1315 du code civil par refus d'application et l'article L. 1134-1 du code du travail par fausse application, ensemble le principe « à travail égal, salaire égal » ;

ALORS, 2°) et subsidiairement, QUE ne laissent supposer et, a fortiori, ne caractérisent, l'existence d'une inégalité de traitement, ni le message électronique par lequel un des partners auquel la salariée se compare renonce à un traitement de faveur et demande à être rémunéré selon les mêmes modalités que ses homologues ni le refus de l'employeur de communiquer les fiches de bonus des dix partners auxquels elle se compare ; qu'en estimant, dès lors, que Mme X... présentait des éléments de fait qui laissent supposer l'existence d'une discrimination dans la mise en oeuvre du plan de rémunération, la cour d'appel a violé le principe « à travail égal, salaire égal » et l'article 1315 du code civil ;

ALORS, 3°), QUE la résiliation du contrat de travail ne peut être prononcée aux torts de l'employeur que si le comportement de celui-ci à l'égard du salarié était d'une gravité suffisante pour rendre impossible la poursuite des relations contractuelles ; qu'en se fondant, pour prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur, sur une méconnaissance du principe « à travail égal, salaire égal » dont elle n'a pas apprécié la gravité, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1184 du code civil ;

ALORS, 4°) et en tout état de cause, QUE, selon le contrat de travail liant les parties, un bonus, dont l'attribution n'est pas garantie, peut être attribué par le conseil d'administration à la salariée en fonction des résultats de la société et de ses performances ; qu'il découle de ces stipulations contractuelles que le principe et les modalités de calcul du bonus sont fixées chaque année en fonction des résultats de la société et des performances du salarié ; que, dès lors, en se fondant sur le coefficient de commissionnement retenu au titre de l'année 2004 pour déterminer le droit de la salariée à un rappel de bonus au titre des années 2005 et 2006, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-17957
Date de la décision : 21/03/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 18 mars 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 21 mar. 2012, pourvoi n°10-17957


Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats (président)
Avocat(s) : Me Haas, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:10.17957
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