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15/03/2012 | FRANCE | N°11-16009

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 15 mars 2012, 11-16009


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Poitiers, 22 mars 2011), que M. X..., technicien EDF, a été victime, le 1er juillet 2003, alors qu'il intervenait sur une ligne à haute tension, d'un accident qui a été pris en charge au titre de la législation professionnelle ; qu'il a saisi une juridiction de sécurité sociale en reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur ;

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de le débouter de cette demande, alors,

selon le moyen, que la faute de la victime n'a pas pour effet d'exonérer l'emplo...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Poitiers, 22 mars 2011), que M. X..., technicien EDF, a été victime, le 1er juillet 2003, alors qu'il intervenait sur une ligne à haute tension, d'un accident qui a été pris en charge au titre de la législation professionnelle ; qu'il a saisi une juridiction de sécurité sociale en reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur ;

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de le débouter de cette demande, alors, selon le moyen, que la faute de la victime n'a pas pour effet d'exonérer l'employeur de la responsabilité qu'il encourt du fait de sa faute inexcusable ; qu'il est indifférent que la faute de l'employeur ait été déterminante de l'accident survenu au salarié, mais qu'il suffit qu'elle en soit la cause nécessaire pour que sa responsabilité soit engagée, quand bien même d'autres fautes auraient concouru au dommage ; que l'arrêt attaqué a énoncé que, au vu de l'enquête pénale, le salarié avait commis deux fautes professionnelles, en entreprenant l'ascension du poteau avec un support non conforme et en ne vérifiant pas l'absence de tension sur la ligne sur laquelle il intervenait, qui étaient la cause directe de l'accident ; qu'en s'abstenant de rechercher, compte tenu de la configuration des lieux insuffisamment entretenus, des conditions météo dégradées ce jour-là, des difficultés de repérage par liaison radio de la zone d'intervention, de l'absence de numéro de support, du procédé que le salarié avait été contraint d'utiliser pour parvenir à la hauteur adéquate de la panne, si l'employeur, qui avait nécessairement conscience du danger auquel le salarié était exposé au cours de son intervention, avait concouru à la réalisation du dommage, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale ;

Mais attendu qu'ayant relevé, par motifs propres et adoptés, que l'employeur, qui avait conscience du danger auquel était exposé son salarié, avait néanmoins pris les mesures nécessaires pour l'en préserver en mettant en oeuvre les précautions générales de sécurité adéquates et en mettant à disposition du salarié des moyens d'intervention suffisants, eu égard à son expérience professionnelle, sa formation et son niveau de compétence, la cour d'appel a pu en déduire, abstraction faite du motif erroné mais surabondant critiqué par le moyen, que l'employeur n'avait pas commis de faute inexcusable ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze mars deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils pour M. X...

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir débouté un salarié (M. X..., l'exposant) de sa demande tendant à la reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur (EDF GDF) ;

AUX MOTIFS QUE les obligations professionnelles de M. X..., amené à intervenir sur des lignes de haute tension, présentaient un réel danger, ce dont son employeur ne disconvenait pas ; qu'il était également acquis que l'employeur se trouvait débiteur à l'égard de ses salariés d'une obligation de résultat ; que la question était de savoir s'il était possible de reprocher à la société EDF une faute inexcusable, c'est-à-dire d'avoir eu conscience du danger auquel ce dernier se trouvait exposé, sans pour autant avoir pris les mesures nécessaires pour l'en protéger ; que M. X... dénonçait successivement des précautions générales insuffisantes relatives aux règles de sécurité à observer, la mise à disposition de moyens inadaptés et des décisions inappropriées prises par les préposés ; qu'en ce qui concernait l'efficience des règles générales de sécurité, EDF exposait qu'il avait remis à chacun de ses agents, contre reçu, un carnet de prescription des risques généraux et des risques électriques, que ce document avait été commenté au cours d'une séance de présentation ; que M. X... avait accusé réception de cette pièce le 29 mars 2001 ; que EDF avait fait dispenser à ses agents, dont M. X..., diverses formations nécessaires pour l'exercice de leurs fonctions de "technicien réseau électricité" à raison d'une formation quasi annuelle entre 1996 et 2002 inclus ; que, de son côté, M. X... exposait que les règles de sécurité prises par l'employeur devaient être pertinentes et leur application conforme aux besoins des salariés ; qu'il émettait dans ses écritures une série de reproches en termes généraux (obligation des agents contraints de s'affranchir de la procédure de sécurité, problèmes récurrents de rangement, manque de matériel, personnel désabusé...) sans démontrer en quoi ces dysfonctionnements auraient pu jouer un rôle quelconque dans l'accident qui lui était survenu en juillet 2003, quand par ailleurs, sur certains points, ses déclarations étaient contredites par son propre collègue de chantier ; que M. X... déclinait encore dans quatre directions la mise à disposition par son employeur de moyens d'intervention inadaptés : *Matériel de localisation non à jour : que ces affirmations étaient réfutées par les constatations du juge d'instruction, du procureur de la République et de la chambre de l'instruction d'où il ressortait que la cartographie mise à la disposition de l'équipe d'intervention était "conforme aux prescriptions d'intervention et en bon état" ; *Procédures supplétives inefficaces : qu'il apparaissait encore que si le guidage radio assuré par un chargé d'exploitation n'avait pas eu l'efficacité souhaitée, tandis que les liaisons téléphoniques entretenues avec le service central avaient été réalisées dans le respect des normes de sécurité en vigueur, c'était à la suite d'une erreur de localisation de la panne imputable tant à M. X... qu'à son collègue qui le reconnaissait ; *Présence 'd'une végétation importante et absence de numéro sur le poteau : que M. Y... avait observé que l'état de la végétation environnante avait eu seulement pour conséquence de ralentir la localisation d'un poteau et que l'expert, qui avait reconstitué l'itinéraire emprunté par les deux agents, précisait que la configuration des lieux et les documents dont ils disposaient leur permettaient de localiser sans ambiguïté le lieu d'intervention par rapport à un chemin et à une route départementale ; *Matériel d'intervention défectueux ou insuffisant : que M. X... affirmait sans le prouver que les échelles emboîtables n'étaient pas adaptées en raison d'un problème de hauteur par rapport à la ligne, quand elles lui auraient permis de s'assurer avec l'aide d'une perche Nevers si la ligne était encore ou non sous tension ; que M. X... affirmait que ces échelles avaient présenté quelques mois avant un défaut de sécurité ; que les sangles avaient cependant été changées et que l'expert, auquel il était reproché de ne pas avoir examiné le matériel mis à disposition, avait pour autant constaté qu'il était conforme aux prescriptions d'intervention et en bon état ; qu'il ressortait enfin des débats et de l'enquête pénale versée au dossier que M. X... avait commis deux fautes professionnelles graves : la première en entreprenant l'ascension du poteau avec un support non conforme et la seconde en ne vérifiant pas l'absence de tension sur la ligne sur laquelle il allait intervenir et ce, en l'absence de toute mise à la terre, en contravention avec le protocole EDF avant travaux ; que, selon l'expert, si l'erreur de localisation était une condition nécessaire à l'accident, elle n'avait pas le caractère de condition suffisante, à partir du moment où, sans ces manquements fautifs, qui apparaissaient comme la cause directe et essentielle de l'accident, celui-ci ne se serait pas produit ;

ALORS QUE, la faute de la victime n'a pas pour effet d'exonérer l'employeur de la responsabilité qu'il encourt du fait de sa faute inexcusable ; qu'il est indifférent que la faute de l'employeur ait été déterminante de l'accident survenu au salarié, mais qu'il suffit qu'elle en soit la cause nécessaire pour que sa responsabilité soit engagée, quand bien même d'autres fautes auraient concouru au dommage ; que l'arrêt attaqué a énoncé que, au vu de l'enquête pénale, le salarié avait commis deux fautes professionnelles, en entreprenant l'ascension du poteau avec un support non conforme et en ne vérifiant pas l'absence de tension sur la ligne sur laquelle il intervenait, qui étaient la cause directe de l'accident ; qu'en s'abstenant de rechercher, compte tenu de la configuration des lieux insuffisamment entretenus, des conditions météo dégradées ce jour-là, des difficultés de repérage par liaison radio de la zone d'intervention, de l'absence de numéro de support, du procédé que le salarié avait été contraint d'utiliser pour parvenir à la hauteur adéquate de la panne, si l'employeur, qui avait nécessairement conscience du danger auquel le salarié était exposé au cours de son intervention, avait concouru à la réalisation du dommage, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 11-16009
Date de la décision : 15/03/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Poitiers, 22 mars 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 15 mar. 2012, pourvoi n°11-16009


Composition du Tribunal
Président : M. Loriferne (président)
Avocat(s) : SCP Masse-Dessen et Thouvenin, SCP Roger et Sevaux

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.16009
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