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13/03/2012 | FRANCE | N°11-85513

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 13 mars 2012, 11-85513


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Angelo X..., partie civile,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de COLMAR, en date du 14 avril 2011, qui a confirmé l'ordonnance du juge d'instruction refusant d'informer sur sa plainte du chef d'extorsion de fonds ;
Vu le mémoire et les observations complémentaires produits ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 312-1 du code pénal, 7, 8, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motif

, manque de base légale violation de la loi ;
"en ce que l'arrêt attaqué a dit...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Angelo X..., partie civile,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de COLMAR, en date du 14 avril 2011, qui a confirmé l'ordonnance du juge d'instruction refusant d'informer sur sa plainte du chef d'extorsion de fonds ;
Vu le mémoire et les observations complémentaires produits ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 312-1 du code pénal, 7, 8, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motif, manque de base légale violation de la loi ;
"en ce que l'arrêt attaqué a dit n'y avoir lieu à informer sur la plainte avec constitution de partie civile formée le 20 avril 2010 par M. X... du chef d'extorsion de fonds ;
"aux motifs que selon l'article 86 du code de procédure pénale, le procureur de la République ne peut saisir le juge d'instruction de réquisitions de non-informer que si, pour des causes affectant l'action publique elle-même, les faits ne peuvent légalement comporter une poursuite ou si, à supposer ces faits démontrés, ils ne peuvent admettre aucune qualification pénale ; qu'il résulte de l'examen de la plainte avec constitution de partie civile déposée auprès du doyen des juges d'instruction le 20 avril 2010 que les faits qualifiés d'extorsion de fonds par M. X... résultaient, selon lui, de ce « qu'à l'occasion d'une opération présentée comme une simple prise de participation, conditionnée par des obligations que MM. François Y... et Pierre Y... ne remplirent jamais, la société Sigma Gestion et M. Angelo X..., son président, sont victimes de faits lesquels ont abouti à la procédure de 2007, commencée de façon occulte, en 2002, par maître Z... » ; qu'illustrant la fausseté de la situation présentée à la société Sigma Gestion dirigée par lui, M. X... faisait valoir l'existence d'éléments de passif non portés à la connaissance des preneurs de participation tels que : - le 13ème mois de salariés partiellement impayé et non provisionné, - le coût de dépollution du site, - la fausseté du chiffre d'affaires reprenant des factures non causées, - la fausseté de l'évaluation du stock, - des anomalies dans la gestion de MM. François et Pierre Y... antérieurement à 1999, ensemble d'éléments qui, s'il les avait connus, l'aurait dissuadé de faire apporter par la société Sigma Gestion plus de 6 millions de francs pour la période considérée ; qu'il ajoutait « l'action en comblement de passif dirigée tant à l'encontre de la société Sigma Gestion, désormais en liquidation de biens, qu'à l'encontre de M. X... condamné à titre personnel à 1 000 000 euros, résulte d'irrégularités et de manoeuvres constitutives d'une extorsion ; que, dans la partie « discussion en droit » de sa plainte, M. X... énonçait : « il en résulte de ces faits, que la signature du protocole du 31 mars 1998 résulte de manoeuvres d'escroqueries, mais également d'extorsion de fonds dans la mesure où les conséquences de l'insuffisance d'actif résultant de cette escroquerie sont, par le rapport de l'expert M. A... et Me Z..., liquidateur de Metallo, et de concert avec les anciens dirigeants, supportées par M. X... (...) avec cette circonstance aggravante que cette extorsion de fonds a été commise en bande organisée, les anciens dirigeants de la société Métallo, le liquidateur et l'expert ayant imputé à M. X... l'insuffisance d'actif de la société Métallo » ; que, selon l'article 313-1 du code pénal, l'extorsion est le fait d'obtenir par violence, menace de violence ou contrainte, un engagement ou une renonciation, soit la révélation d'un secret, soit la remise de fonds, de valeurs ou d'un bien quelconque ; que la jurisprudence admet que les éléments reconnus au titre des manoeuvres d'une escroquerie entrent également dans le champ de la contrainte morale ; que, d'une part, la dissimulation d'éléments de passif, à supposer qu'elle puisse s'analyser en manoeuvres constitutives d'escroquerie et également recevoir la qualification de contrainte morale mentionnée au texte susvisé, remonte aux années 1998 et courant 1999 et était prescrite à la date d'enregistrement de la plainte avec constitution de partie civile, y compris si l'on prend en considération la circonstance de la bande organisée alléguée par M. X... qui relève d'une qualification criminelle ; qu'en effet, la plainte simple adressée au procureur de la République, non suivie d'acte de poursuite, n'a pas eu pour effet d'interrompre la prescription, qu'en outre, la circonstance que la partie civile n'en ait eu la révélation, comme elle le soutient, qu'en 2007 est sans emport dès lors que le crime ou le délit visé constituent des infractions instantanées ; que, d'autre part, il est constant que Me Z..., mandataire liquidateur désigné lors de l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire le 22 décembre 1999, et M. A..., expert comptable, désigné en 2001, sont étrangers aux agissements de 1998 et courant 1999 et que l'emploi d'une voie de droit, s'agissant de l'action en insuffisance d'actif, ne constitue pas, en soi, sur le plan pénal une violence illégitime ; qu'il s'en suit que l'ordonnance du juge d'instruction doit être confirmée en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu à informer et ordonné la restitution de la consignation ;
"1°) alors que le délai de prescription en matière d'extorsion de fonds ne commence à courir qu'à compter de la remise des fonds ; que la remise de fonds n'est pas nécessairement concomitante à l'emploi du moyen destiné à l'extorsion ; que, pour dire prescrite l'action publique du chef d'extorsion de fonds, la cour d'appel s'est bornée à relever que les faits constitutifs de la contrainte morale ayant permis la remise de fonds, remontaient aux années 1998 et 1999 ; qu'en se fondant ainsi sur la seule date à laquelle il avait été fait usage de la contrainte en vue de l'extorsion, sans rechercher à quel moment avait eu lieu la remise de fonds, seul évènement de nature à faire courir le délai de prescription de l'action publique, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;
"2°) alors que si la contrainte morale peut résulter de manoeuvres constitutives d'escroquerie, le délit d'extorsion de fonds n'est consommé qu'à compter de la remise des fonds et le délai de prescription de l'action publique de ce chef ne commence à courir qu'à compter de la date de cette remise ; qu'en se fondant sur la circonstance inopérante de ce que les faits d'escroquerie, constitutifs de la contrainte morale, remontaient aux années 1998 et 1999 et étaient prescrits à la date d'enregistrement de la plainte avec constitution de partie civile, sans rechercher à quel moment était consommée l'infraction d'extorsion de fonds, seul objet de la plainte de monsieur X..., la cour d'appel a, de nouveau, privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;
"3°) alors que, subsidiairement, le délai de prescription de l'action publique ne commence à courir, en cas de dissimulation, qu'à partir du jour où l'infraction est apparue et a pu être constatée dans des conditions permettant l'exercice des poursuites ; que ce principe s'applique en matière d'infractions instantanées ; qu'en retenant, pour en déduire que l'action publique était prescrite, que la circonstance que la partie civile n'ait eu la révélation de l'extorsion de fonds qu'en 2007 était sans emport, au seul motif que le crime ou le délit visé constituait une infraction instantanée, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
"4°) alors qu'en outre, l'usage abusif d'une voie de droit caractérise la contrainte morale constitutive du délit d'extorsion ; que M. X... faisait valoir dans son mémoire produit devant la chambre d'instruction que la contrainte morale, constitutive de l'extorsion de fonds dont il avait été victime, résultait de la mise en oeuvre, de façon occulte, d'une procédure en comblement de passif à son encontre, ne reposant sur aucun fondement juridique sérieux et en violation du droit au procès équitable ; qu'en se bornant à retenir, par une affirmation d'ordre général, que l'emploi d'une voie de droit, s'agissant d'une action en insuffisance d'actif, ne constituait pas, en soi, sur le plan pénal une violence illégitime, sans rechercher si, en l'espèce, la procédure en comblement de passif introduite contre M. X... n'avait pas été exercée de manière abusive, et ne caractérisait pas, dès lors, la contrainte morale constitutive du délit d'extorsion de fonds, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;
"5°) alors que M. X... faisait valoir devant la chambre d'instruction, qu'il avait été victime d'une opération globale, destinée à lui faire supporter le passif de la société Métallo creusé par la précédente direction, laquelle certes été initiée par MM. François et Pierre Y... en 1998, mais qui n'avait abouti que grâce à l'intervention de M. A..., expert judiciaire, et de Me Z..., liquidateur de la société Metallo, sans lesquels la procédure de comblement de passif n'aurait pu être mise en oeuvre ; qu'en se bornant à relever que Me Z... et M. A... étaient étrangers aux agissements de 1998 et courant 1999, sans rechercher si ces derniers n'avaient pas participé en toute connaissance de cause à une opération globale constitutive d'une extorsion de fonds, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés" ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que la société Sigma Gestion SA, présidée par M. Angelo X..., a signé , le 31 mars 1998, un protocole d'accord avec la société Metallo, dirigé par les consorts Y..., par lequel elle devenait l'actionnaire majoritaire de cette société; qu'après que la société Metallo eut été placée en liquidation judiciaire, M. X... a été condamné solidairement avec d'autres personnes, par jugement du 27 mai 2009, au comblement de l'insuffisance d'actif de la société Metallo à hauteur d'un million d'euros; qu'il a porté plainte et s'est constitué partie civile le 20 avril 2010 pour des faits d'extorsion de fonds , le protocole sus-visé ayant été passé alors que les comptes de la société Metallo étaient faux, et que, notamment le coût de la dépollution du site exploité par cette société n'était pas mentionné, des factures n'étaient pas causées et le stock était valorisé à un montant s'avérant faux; que le juge d'instruction a rendu une ordonnance de refus d'informer au motif que les faits dénoncés étaient prescrits ;
Attendu que, pour confirmer l'ordonnance entreprise, l'arrêt énonce que la dissimulation d'éléments de passif, à supposer qu'elle puisse recevoir la qualification de contrainte morale mentionnée à l'article 312-1 du code pénal , remonte aux années 1998 et 1999 et était prescrite à la date d'enregistrement de la plainte avec constitution de partie civile, y compris si l'on prend en considération la circonstance de bande organisée alléguée par M. X... qui relève d'une qualification criminelle ;
Attendu qu'en l'état de ces seuls motifs, la chambre de l'instruction a justifié sa décision, dès lors que les faits d'extorsion objet de la plainte, à les supposer établis, étaient constitués par la contrainte dénoncée et par un résultat qui était, non l'action en comblement de passif évoquée par le plaignant, mais la signature du protocole d'accord du 31 mars 1998 ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, M. Guérin conseiller rapporteur, M. Blondet conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Leprey ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 11-85513
Date de la décision : 13/03/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Colmar, 14 avril 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 13 mar. 2012, pourvoi n°11-85513


Composition du Tribunal
Président : M. Louvel (président)
Avocat(s) : SCP Didier et Pinet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.85513
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