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08/03/2012 | FRANCE | N°10-17900

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 08 mars 2012, 10-17900


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu le principe d'égalité de traitement, ensemble l'article 22-9 de la convention collective de l'industrie pharmaceutique ;

Attendu que la seule différence de catégorie professionnelle ne saurait en elle-même justifier, pour l'attribution d'un avantage, une différence de traitement, résultant d'un accord collectif, entre les salariés placés dans une situation identique au regard dudit avantage, cette différence devant reposer sur des raisons objectives dont le juge doit co

ntrôler concrètement la réalité et la pertinence ; que repose sur une raison...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu le principe d'égalité de traitement, ensemble l'article 22-9 de la convention collective de l'industrie pharmaceutique ;

Attendu que la seule différence de catégorie professionnelle ne saurait en elle-même justifier, pour l'attribution d'un avantage, une différence de traitement, résultant d'un accord collectif, entre les salariés placés dans une situation identique au regard dudit avantage, cette différence devant reposer sur des raisons objectives dont le juge doit contrôler concrètement la réalité et la pertinence ; que repose sur une raison objective et pertinente la stipulation d'un accord collectif qui fonde une différence de traitement sur une différence de catégorie professionnelle, dès lors que cette différence de traitement a pour objet ou pour but de prendre en compte les spécificités de la situation des salariés relevant d'une catégorie déterminée, tenant notamment aux conditions d'exercice des fonctions, à l'évolution de carrière ou aux modalités de rémunération ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée le 2 avril 1973 par les Laboratoires Sandoz devenus la société Novartis Pharma, en qualité d'attachée scientifique pour devenir "délégué hospitalier" avec le statut cadre à compter du 1er juillet 1988 ; qu'à cette date, elle a perdu le bénéfice de la prime d'ancienneté attribuée aux seuls salariés non cadres, selon la convention collective de l'industrie pharmaceutique applicable aux relations contractuelles ; que le 13 novembre 2007 l'employeur a décidé d'attribuer la prime d'ancienneté à tous les salariés du groupe 6, que la salariée qui avait été positionnée comme délégué hospitalier groupe 6C depuis avril 2006, a perçu une prime équivalente à 3 % de son salaire à partir du mois d'avril 2006, de 4 % en 2007 et de 5 % en 2008 ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale afin d'obtenir le paiement d'un rappel de salaire au titre de la prime d'ancienneté conventionnelle pour la période courant de décembre 2002 au mois de juillet 2008, des congés payés afférents et des dommages-intérêts pour exécution fautive du contrat de travail ;

Attendu que pour accueillir la demande de la salariée, l'arrêt retient qu'il importe peu de rechercher si le délégué hospitalier relève du statut cadre ou assimilé cadre ; qu'il convient uniquement de vérifier si l'employeur justifie de raisons objectives permettant de faire bénéficier les salariés du groupe 6 relevant de l'article 4 bis de la prime d'ancienneté et d'exclure ceux relevant de l'article 4 ; que la société Novartis Pharma se contente de faire valoir qu'elle a respecté les dispositions de la convention collective, ce qui ne répond pas à la notion de circonstances objectives permettant de justifier une inégalité de traitement ; que faute pour l'employeur d'établir l'existence de raisons objectives l'autorisant à rémunérer par une prime l'ancienneté de certains salariés et non celle d'autres salariés, il convient de dire Mme X... bien fondée en sa demande tendant au paiement de la prime d'ancienneté conventionnelle ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si la différence de traitement résultant de la convention collective de l'industrie pharmaceutique entre les cadres et les assimilés cadres en matière de prime d'ancienneté n'avait pas pour objet ou pour but de prendre en compte les spécificités de la situation de chacune de ces deux catégories professionnelles distinctes, définies par la convention collective, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 25 mars 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;

Condamne Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Novartis pharma

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR estimé bien-fondé la demande de rappel de salaire formée par la salariée au titre de l'allocation d'une prime d'ancienneté, d'AVOIR, en conséquence, condamné la société NOVARTIS PHARMA à payer à celle-ci les sommes de 43.965, 17 € à titre de rappel de salaire au titre de la prime d'ancienneté et de 4.396, 51 € au titre des congés payés afférents, et d'AVOIR ordonné à la société NOVARTIS PHARMA de remettre à la salariée un bulletin de paie mentionnant le rappel de salaires ;

AUX MOTIFS QUE «Considérant suivant les dispositions de l'article 22 de la convention collective de l'industrie pharmaceutique, qu'une prime d'ancienneté est versée aux salariés classés dans les cinq premiers groupes de classification et aux salariés classés dans le groupe 6 lorsqu'ils bénéficient des dispositions de l'article 4 bis de la convention collective nationale de retraite et de prévoyance des cadres du 14 mars 1947 ; considérant qu'il est établi et non contesté que Madame X... qui occupe un emploi de déléguée hospitalier est classée dans le groupe 6 ; que les parties s'opposent sur le point de savoir si la salariée relèvent des dispositions de l'article 4 bis de la convention collective nationale de retraite et de prévoyance des cadres du 14 mars 1947 (assimilé cadre) ou de l'article (cadre) ; considérant que la seule différence de catégorie professionnelle ne peut à elle seule justifier, pour l'attribution d'un avantage, une différence de traitement entre des salariés placés dans une situation identique au regard dudit avantage ; que cette différence doit reposer sur des raisons objectives dont le juge doit contrôler concrètement la réalité et la pertinence ; que dans ces conditions, il importe peu de rechercher si la déléguée hospitalier relève du statut de cadre ou assimilé cadre ; qu'il convient uniquement de vérifier si l'employeur justifie de raisons objectives permettant de faire bénéficier les salariés du groupe 6 relevant de l'article 4 bis de la prime d'ancienneté et d'exclure ceux relevant de l'article 4 ; considérant que la société NOVARTIS PHARMA se contente de faire valoir qu'elle a respecté les dispositions de la convention collective, ce qui ne répond pas à la notion de circonstances objectives permettant de justifier une inégalité de traitement ; que de son côté, Madame X... rapporte par la preuve, par la production du contrat de travail de Monsieur Y..., délégué hospitalier groupe 6 niveau C, salarié placé dans une situation identique à la sienne qui effectue le même travail pour le même employeur, qu'il perçoit une prime d'ancienneté ; que faute pour l'employeur d'établir l'existence de raisons objectives l'autorisant à rémunérer par une prime d'ancienneté de certains salariés et non celle d'autres salariés, il convient de dire Madame X... bien fondée en sa demande tendant au paiement de la prime d'ancienneté conventionnelle ; sur le montant de la prime d'ancienneté : considérant que Madame X... conclut à la condamnation de la société à lui payer la somme de 49.235, 19 € à titre de rappel de primes d'ancienneté de janvier 2002 à janvier 2010 outre la somme de 4.923, 51 € au titre des congés payés afférents, ce à quoi la société s'oppose en faisant valoir que la prime d'ancienneté a été intégrée au salaire de base à hauteur de 15 % à compter du 1er juillet 1998 et en soutenant qu'à défaut de retenir cet argument, il convient de déduire la somme de 8.867, 26 € versée depuis le mois de décembre 2007 ; considérant que l'examen des bulletins de paie ne permet pas de dire que la prime d'ancienneté a été intégrée au salaire de base à compter de juillet 1988 ; considérant que la prime d'ancienneté conventionnelle pour la période non prescrite comprise entre le mois de décembre 2002 au mois de janvier 2010 s'élève à la somme de 43.965, 17 € après déduction des sommes déjà versées par la société à titre de prime d'ancienneté et qui n'ont pas été intégralement prises en compte dans le décompte établi par la salariée ; qu'il y a lieu en conséquence de condamner la société NOVARTIS PHARMA à lui payer la somme de 43 965, 17 € à titre de rappel de salaire outre celle de 4396, 51 € au titre des congés payés afférents» ;

1) ALORS QUE le juge ne peut modifier les termes du litige tels que déterminés par les prétentions des parties ; qu'en l'espèce, il résulte des conclusions des parties reprises verbalement à l'audience que le litige portait sur la question de savoir si Madame X... avait ou non perdu le statut de cadre à compter de la refonte de la classification conventionnelle mise en place à compter du 1er janvier 1998 et si elle pouvait par conséquent revendiquer le bénéfice de la prime d'ancienneté réservée aux seuls salariés «non-cadres» (assimilés cadres) ; qu'en affirmant pourtant qu'il importait peu de rechercher si la salariée relevait du statut de cadre ou assimilé cadre dès lors que la seule différence de catégorie professionnelle ne pouvait à elle seule justifier, pour l'attribution d'un avantage, une différence de traitement entre des salariés placés dans une situation identique au regard dudit avantage, ce que la salariée n'avait pas soutenu, la Cour d'appel a modifié les termes du litige en violation de l'article 4 et 5 du Code de Procédure Civile ;

2) ALORS QUE le juge devant, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction, il ne peut fonder sa décision sur les moyens qu'il a relevé d'office, sans avoir au préalable inviter les parties à présenter leurs observations ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel, après avoir relevé que les parties s'opposaient sur le point de savoir si la salariée relevait des dispositions de l'article 4 bis de la convention collective nationale de retraite et de prévoyance des cadres du 14 mars 1947 (assimilé cadre) ou de l'article 4 (cadre), ne pouvait, sans inviter au préalable les parties à s'en expliquer, retenir d'office que la seule différence de catégorie professionnelle ne peut justifier une différence de traitement et reprocher en conséquence à l'employeur de ne pas établir de raisons objectives permettant de faire bénéficier de la prime d'ancienneté les salariés du groupe 6 relevant de l'article 4 bis et non ceux relevant de l'article 4 ; qu'en statuant ainsi, la Cour d'appel a violé les dispositions de l'article 16 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

3) ALORS, en tout état de cause, QUE la différence de catégorie professionnelle doit être considérée, à elle seule, comme un critère objectif et pertinent de nature à justifier une différence de traitement, lorsqu'un tel critère a été expressément stipulé par un accord collectif ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a constaté que la convention collective nationale de l'industrie pharmaceutique réservait le bénéfice de la prime d'ancienneté aux seuls salariés «non - cadres» ; qu'en affirmant pourtant que le respect, par l'employeur, des dispositions de la convention collective ne répondait pas à la notion de circonstances objectives permettant de justifier une inégalité de traitement, la Cour d'appel a violé les dispositions de l'article 22, 9, a) de ladite convention collective, ensemble le principe d'égalité de traitement , tel qu'interprété à la lumière de la directive n° 2000/78/CE du 27 novembre 2000, portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail ;

4) ALORS QUE pour établir la disparité de traitement qu'elle alléguait entre sa situation et celle d'un collègue, Monsieur Y..., la salariée n'invoquait et ne produisait qu'un bulletin de paie de ce dernier édité le 28 novembre 2007 ; qu'en affirmant qu'il résultait du contrat de travail de Monsieur Y... qu'il se trouvait dans une situation identique à celle de la salariée, sans s'assurer que cette pièce avait bien été communiquée à l'employeur, la Cour d'appel a violé l'article 16 du Code de procédure civile ;

5) ALORS, subsidiairement, QUE les juges ne peuvent accueillir ou rejeter une demande sans examiner toutes les pièces fournies par les parties à l'appui de leurs prétentions ; qu'en l'espèce, l'employeur justifiait de ce que la prime d'ancienneté de la salariée avait été intégrée à son salaire de base à hauteur de 15 % au moment de sa promotion en qualité de cadre à compter du 1er juillet 1988 en produisant non seulement les bulletins de salaires de la salariée des mois de juin et juillet 1988, mais également la lettre adressée par l'employeur à la salariée le 1er juillet 1988 par laquelle ce dernier l'avait informé de sa promotion en qualité de cadre et de l'augmentation de son salaire à la somme de francs bruts «compte tenu de l'intégration de la prime d'ancienneté et d'une augmentation personnelle de 800 francs» ; qu'en affirmant, au seul vu des bulletins de salaires, que l'employeur ne justifiait pas de l'intégration de la prime d'ancienneté au salaire de base à compter du mois de juillet 1988, sans viser, ni analyser la lettre précitée en date du 1er juillet 1988, qui, confrontée aux bulletins de salaires, établissait ladite intégration alléguée par l'employeur, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-17900
Date de la décision : 08/03/2012
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 25 mars 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 08 mar. 2012, pourvoi n°10-17900


Composition du Tribunal
Président : M. Gosselin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:10.17900
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