LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 1242-1, L. 1242-2 et D. 1242-1 du code du travail ensemble les clauses 1 et 5 de l'accord-cadre sur le travail à durée déterminée conclu le 18 mars 1999 et mis en oeuvre par la directive 1999/70/CE du 28 juin 1999 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée par la société Europcar France selon contrat à durée indéterminée du 15 juillet 2003, puis après avoir démissionné, par une succession de contrat à durée déterminée du 27 septembre 2003 au 21 février 2004 ; que soutenant notamment que les divers contrats à durée déterminée suivants s'analysaient en un contrat à durée indéterminée, elle a saisi la juridiction prud'homale afin d'obtenir la requalification des contrats de travail à durée déterminée en un contrat à durée indéterminée et la condamnation de son employeur au paiement de diverses sommes ;
Attendu que pour débouter la salariée de sa demande de requalification des contrats à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée, l'arrêt retient qu'il est constant que la convention collective applicable des services de l'automobile prévoyait le recours au contrat à durée déterminée d'usage pour l'emploi de convoyeur de véhicules de sorte que la société Europcar était en droit d'embaucher Mme X... par des contrats à durée déterminée successifs pour assurer le convoyage des véhicules ; que les contrats de travail à durée déterminée de Mme X... étaient établis par écrit et comportaient la définition précise de leur motif : «convoyage de véhicules» ;
Attendu, cependant, que s'il résulte de la combinaison des articles susvisés du code du travail que dans les secteurs d'activité définis par décret ou par voie de convention ou d'accord collectif étendu, certains des emplois en relevant peuvent être pourvus par des contrats de travail à durée déterminée lorsqu'il est d'usage constant de ne pas recourir à un contrat à durée indéterminée, en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois, et que des contrats à durée déterminée successifs peuvent, en ce cas, être conclus avec le même salarié, l'accord-cadre susvisé, qui a pour objet, en ses clauses 1 et 5, de prévenir les abus résultant de l'utilisation de contrats à durée déterminée successifs, impose de vérifier que le recours à l'utilisation de contrats successifs est justifié par des raisons objectives qui s'entendent de l'existence d'éléments concrets établissant le caractère par nature temporaire de l'emploi ;
Qu'en se déterminant comme elle l'a fait, sans rechercher si la conclusion de contrats à durée déterminée successifs était justifiée par des éléments concrets établissant le caractère par nature temporaire de l'emploi de convoyeur de véhicules, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a dit que la salariée est mal fondée à remettre en cause sa démission, l'arrêt rendu le 6 mai 2009, entre les parties par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;
Condamne la société Europcar France aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Europcar France à payer à Mme X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du sept mars deux mille douze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Potier de La Varde et Buk-Lament, avocat aux Conseils pour Mme X....
Mme X... fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit qu'elle était mal fondée à remettre en cause sa démission, qu'il n'y avait pas lieu de requalifier ses contrats de travail à durée déterminée en un contrat à durée indéterminée et de l'avoir en conséquence déboutée de ses demandes ;
AUX MOTIFS QUE qu'après sa démission, Mme X... a été réembauchée en qualité non pas de chargée de clientèle mais de convoyeur de véhicule par des contrats de travail écrits qu'elle a signés et qui mentionnaient tous la mission pour lesquels ils avaient été conclus de sorte qu'elle n'a pu se méprendre sur la portée de son réembauchage ; (…) les contrats à durée déterminée qu'elle a souscrits se sont succèdes de manière discontinue jusqu'au 21 février 2004 ; (…) ; il est constant que la convention collective applicable des services de l'automobile prévoyait le recours au contrat à durée déterminée d'usage pour l'employeur de convoyeur de véhicule de sorte que la société Europcar était en droit d'embaucher Mme X... par des contrats à durée déterminée successifs pour assurer le convoyage des véhicules ; les contrats de travail à durée déterminée par Mme X... étaient établis par écrit et comportaient la définition précise de leur motif : « convoyage de véhicules » ; qu'il n'y a pas lieu de requalifier les contrats de travail à durée indéterminée ;
ALORS QUE s'il résulte de la combinaison des articles L. 1242-1, L. 1242-2 3°, L. 1245-1 et D. 1242-1 du code du travail, que dans les secteurs d'activité définis par décret ou par voie de convention ou d'accord collectif étendu, certains des emplois en relevant peuvent être pourvus par des contrats à durée déterminée lorsqu'il est d'usage constant de ne pas recourir à un contrat à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois, et que des contrats à durée déterminée successifs peuvent, en ce cas, être conclus avec le même salarié, l'accord-cadre sur le travail à durée déterminée conclu le 18 mars 1999, mis en oeuvre par la Directive 1999/70/CE du 28 juin 1999, en ses clauses 1 et 5, ayant pour objet de prévenir les abus résultant de l'utilisation de contrats à durée déterminée successifs, impose au juge de vérifier que le recours à l'utilisation de contrats à durée déterminée successifs est justifié par des raisons objectives qui s'entendent de l'existence d'éléments concrets établissant le caractère par nature temporaire de l'emploi ; qu'en se bornant, pour débouter Mme X... de sa demande en requalification, à énoncer que la convention collective applicable des services automobiles prévoyait le recours au contrat à durée déterminée d'usage pour l'emploi de convoyeur de véhicules de sorte que la société Europcar était en droit d'embaucher la salariée par des contrats à durée déterminée successifs, sans vérifier si la conclusion de vingt quatre contrats à durée déterminée successifs sur une période d'à peine sept mois était justifiée par l'existence d'éléments concrets et précis établissant le caractère par nature temporaire de ces emplois de convoyeur de véhicules, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1242-1, L. 1242-2, L. 1245-1 et D. 1242-1 du code du travail, ensemble des clauses 1 et 5 de l'accord-cadre sur le travail à durée déterminée conclu le 18 mars 1999 et mis en oeuvre par la Directive 1999/70/CE du 28 juin 1999.