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07/03/2012 | FRANCE | N°10-21234

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 07 mars 2012, 10-21234


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 25 mai 2010), que Mme X... a été engagée par l'association FJEP - Centre culturel de Sallanches (l'association) en qualité de "chargée de relations aux publics", par contrat à durée déterminée du 27 août 2007 pour le remplacement d'une salariée bénéficiaire d'un congé pour création d'entreprise d'une année renouvelable ; que son employeur ayant rompu de manière anticipée le contrat de travail, le 1er juillet 2008, pour faute grave, elle a saisi la juridiction

prud'homale pour obtenir paiement de dommages-intérêts ;
Sur le premier mo...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 25 mai 2010), que Mme X... a été engagée par l'association FJEP - Centre culturel de Sallanches (l'association) en qualité de "chargée de relations aux publics", par contrat à durée déterminée du 27 août 2007 pour le remplacement d'une salariée bénéficiaire d'un congé pour création d'entreprise d'une année renouvelable ; que son employeur ayant rompu de manière anticipée le contrat de travail, le 1er juillet 2008, pour faute grave, elle a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir paiement de dommages-intérêts ;
Sur le premier moyen :
Attendu que l'association fait grief à l'arrêt de faire droit à la demande et de la condamner au paiement de la somme de 29 353,85 euros pour rupture abusive, alors, selon le moyen :
1°/ que la lettre par laquelle un employeur demande à son salarié de faire un effort pour se ressaisir ne constitue pas une sanction disciplinaire, mais un simple rappel à l'ordre par la voie duquel il n'épuise pas son pouvoir disciplinaire à l'égard des faits qui y sont visés ; que la cour d'appel a constaté que la lettre du 6 mai 2008 constituait un rappel à l'ordre ; qu'en jugeant que les faits visés par cette lettre, en ce qu'ils avaient déjà été sanctionnés, ne pouvaient être invoqués à l'appui du licenciement, la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé l'article L. 1333-1 du code du travail et, par fausse application, le principe non bis in idem ;
2°/ que caractérise une insubordination et une mauvaise volonté délibérée, constitutives d'une faute grave, l'absence d'accomplissement persistant par le salarié, des tâches inhérentes à sa fonction nonobstant les demandes d'exécution réitérées de l'employeur ; que le rappel à l'ordre écrit adressé par l'employeur le 6 mai 2008, auquel se réfère la lettre de licenciement, mentionne de nombreuses tâches inaccomplies durant les mois de mars et avril 2008, et des tâches que la salariée était enjointe d'exécuter dans des délais fixés par les exigences de l'actualité (lettre : production) ; qu'en s'abstenant, d'une part, d'examiner les inexécutions énumérées par ce courrier, et, d'autre part, de vérifier si les tâches dont l'exécution y était demandée, avaient connu ne serait-ce qu'un début d'accomplissement, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard des articles L. 1243-1 et L. 1243-4 du code du travail ;
3°/ que le juge est tenu d'examiner chacun des griefs énoncés à l'appui du licenciement ; que la cour d'appel, sur les quatre griefs qu'elle a retenus comme n'ayant pas déjà fait l'objet d'une sanction disciplinaire, n'en a examiné que deux, délaissant ceux tirés, d'une part, de la parution le 5 mai 2008 dans un quotidien, d'une annonce relative à un concert dont l'annulation avait été décidée au mois d'avril, et, d'autre part, de la parution le 19 mai 2008, d'une annonce relative à un concert le 23 mai 2008, sans que soit indiquée la qualité d'organisateur du centre culturel ; qu'elle a ainsi violé l'article L. 1232-6 du code du travail ;
Mais attendu, d'abord, que contrairement à ce que soutient le moyen, la cour d'appel a examiné l'ensemble des griefs contenus dans la lettre de licenciement ;
Et attendu, ensuite, qu'ayant relevé que la lettre du 6 mai 2008 adressée par l'employeur à la salariée lui reprochait diverses insuffisances professionnelles en l'invitant à se concentrer et en annonçant une procédure de licenciement, la cour d'appel en a exactement déduit que cette lettre sanctionnait un comportement fautif et constituait un avertissement, en sorte que les mêmes faits ne pouvaient plus justifier le licenciement ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé dans aucune de ses branches ;
Sur le second moyen :
Attendu que l'association fait grief à l'arrêt de la condamner à payer une somme en exécution de l'article L. 1243-4 du code du travail, alors, selon le moyen, que la rupture anticipée du contrat à durée déterminée en dehors des cas autorisés par la loi, ouvre droit pour le salarié à une indemnisation forfaitaire d'un montant au moins égal aux rémunérations qu'il aurait perçues jusqu'au terme du contrat, sans préjudice de l'indemnité de fin de contrat prévue par l'article L. 1243-8 du code du travail ; qu'en fixant au 26 août 2009 la date du terme du contrat sans avoir constaté que la salariée pour le remplacement de laquelle Mme X... avait été recrutée pour une durée minimum d'une année, avait renouvelé son congé de création d'entreprise pour une durée de un an à compter du 27 août 2008, date d'échéance de la durée minimum du contrat à durée déterminée, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article L. 1243-4 du code du travail ;
Mais attendu que les dommages-intérêts pour rupture abusive dus en application de l'article L. 1243-4 du code du travail doivent être évalués en fonction de la durée prévisible du contrat de travail à durée déterminée conclu sans terme précis ;
Et attendu qu'ayant constaté que le contrat à durée déterminée avait été conclu pour le remplacement d'une salariée absente bénéficiaire d'un congé de formation d'une année renouvelable, la cour d'appel a pu fixer la durée prévisible du contrat jusqu'au 26 août 2009 et a souverainement évalué le montant des dommages-intérêts dus à la salariée ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne l'association FJEP - Centre culturel de Sallanches aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne l'association FJEP - Centre culturel de Sallanches à payer à Mme X... la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du sept mars deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils pour l'association FJEP - Centre culturel de Sallanches
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR DIT que le licenciement de Madame X... ne reposait pas sur une faute grave en sorte que son contrat à durée déterminée avait été abusivement rompu et par conséquent, D'AVOIR CONDAMNE l'association FJEP-Centre Culturel de Sallanches, à lui payer une somme de 29353,85 euros ;
AUX MOTIFS QU'au regard de la chronologie des relations contractuelles, la faute grave reprochée à Mme X... ne peut reposer que sur des faits survenus entre le 1er et le 23 mai 2008. En effet, les défaillances constatées entre le 3 mars et le 30 avril 2008 ont donné lieu d'une part aux avertissements du 25 mars 2008 et d'autre part au rappel à l'ordre du 6 mai 2008, sans qu'aucune d'entre elles, même considérées globalement, ne justifie la rupture du contrat. Leur existence pouvait certes être rappelée dans la lettre de licenciement, afin éventuellement de caractériser la persistance d'un comportement et la réitération d'errements, mais ne peut être retenue pour apprécier la réalité de la faute grave fondant le licenciement ; seules les pièces 28 et 29 et 34 à 39 du dossier de l'association portent sur des faits de mai 2008 ; c'est à tort qu'il est fait grief à Mme X... de l'absence d'annonce dans le Dauphiné Libéré du 27 mai 2008 du festival "Oh les beaux jours" débutant le lendemain (pièce 39). Ce journal étant un quotidien, elle aurait pu, si elle n'avait pas été mise à pied à compter du 23 mai 2008, utilement rédiger une annonce et demander sa parution pour la veille de l'ouverture de ce festival. Subsistent donc : -la parution dans le Top Annonces des 5, 12 et 19 mai 2008 d'une communication sur le stage "Voix et créativité" dont l'annulation avait été décidé en avril (pièces 34, 36 et 37), -la parution dans le Paru Vendu du 5 mai 2008 (pièce 28) d'une annonce relative à un concert du 9 mai 2008, également annulé en avril, - la parution dans le Top Annonces du 26 mai 2008 d'un spectacle du cirque Pagnozoo également annulé, malgré une fiche de liaison du 7 mai 2008 lui rappelant qu'il convenait de veiller à l'information sur ce point (pièces 35 et 38), - Ia parution dans le Paru Vendu du 19 mai 2008 (pièce 29) d'une annonce relative à un concert du 23 mai 2008, ne mentionnant pas que l'organisateur de celui-ci était le Centre Culturel. Mais Mme X... justifie, par la production des pièces 20 et 21 de son dossier, avoir adressé les 29 avril et 13 mai 2008, un courriel, notamment aux deux hebdomadaires d'annonces gratuites que sont Top Annonces et Paru Vendu, annonçant les annulations du concert du 9 mai 2008 et de la représentation du cirque Pagnozoo et présentant le concert du 23 mai 2008. Tous les autres média destinataires de ces courriels ont pris en compte leur teneur et il existe donc un doute quant à l'imputabilité à Mme X..., du caractère erroné ou incomplet des annonces éditées par ces deux journaux d'annonces gratuites. Si Mme X... ne s'est pas rendue compte que pendant trois semaines consécutives, le journal Top Annonces persistait à annoncer la tenue d'un stage initialement fixé au 24 mai 2008, mais annulé, ce fait, ne constitue pas une faute grave, ce d'autant moins que : - il n'est pas démontré qu'il survienne après de multiples autres défaillances, la plupart de celles listées étant seulement affirmées, sans qu'aucun élément susceptible d'établir leur réalité ne soit communiqué aux débats, et celles qui ont donné lieu aux avertissements du 25 mars 2008 étant contredites d'une part par les articles du Dauphiné Libéré des 18 et 20 mars 2008 (pièce 18 du dossier de l'appelante) et d'autre part par la simple chronologie des faits de l'espèce: il s'est écoulé seulement 7 jours calendaires parmi lesquels 3 jours constituant le week-end de Pâques, entre le 18 mars 2008, date à laquelle il a été demandé à Mme X... de former Mme Y... aux outils informatiques, et le 25 mars 2008, date à laquelle elle a reçu un avertissement pour refus d'obtempérer, refus qu'elle n'a manifestement pas eu le temps d'exprimer ou de manifester en 4 jours de travail qui, plus est, partiellement communs, - la mauvaise volonté dont Mme X... aurait fait preuve à l'occasion de l'exécution de son contrat de travail est démentie par les nombreux témoins qui ont attesté en sa faveur de son dévouement professionnel, de son attachement à ses fonctions et de son enthousiasme communicatif sur la qualité des spectacles et autres manifestations organisées par le centre. Il convient de relever que, jusqu'au jour où il est apparu que la rupture avant terme du contrat à durée déterminée de Mme X... ne pourrait intervenir que sur le fondement d'une faute grave, l'association elle-même a toujours soutenu qu'il y avait une simple inadéquation entre le poste qu'elle avait créée au départ en congé de Mme Z... et la personne de Mme X..., entre ses attentes à l'égard de cette salariée et le résultat de son travail, inadéquation qu'elle expliquait par des faits objectifs ne la mettant pas en cause. Enfin, le Centre Culturel ne justifie absolument pas des conséquences perturbatrices du comportement de Mme X... sur la dynamique de l'équipe et le fonctionnement de l'association ;
ALORS D'UNE PART QUE la lettre par laquelle un employeur demande à son salarié de faire un effort pour se ressaisir ne constitue pas une sanction disciplinaire, mais un simple rappel à l'ordre par la voie duquel il n'épuise pas son pouvoir disciplinaire à l'égard des faits qui y sont visés ; que la cour d'appel a constaté que la lettre du 6 mai 2008 constituait un rappel à l'ordre ; qu'en jugeant que les faits visés par cette lettre, en ce qu'ils avaient déjà été sanctionnés, ne pouvaient être invoqués à l'appui du licenciement, la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé l'article L. 1333-1 du Code du travail et, par fausse application, le principe non bis in idem;
ALORS D'AUTRE PART QUE caractérise une insubordination et une mauvaise volonté délibérée, constitutives d'une faute grave, l'absence d'accomplissement persistant par le salarié, des tâches inhérentes à sa fonction nonobstant les demandes d'exécution réitérées de l'employeur ; que le rappel à l'ordre écrit adressé par l'employeur le 6 mai 2008, auquel se réfère la lettre de licenciement, mentionne et de nombreuses tâches inaccomplies durant les mois de mars et avril 2008, et des tâches que la salariée était enjointe d'exécuter dans des délais fixés par les exigences de l'actualité (lettre : production) ; qu'en s'abstenant d'une part, d'examiner les inexécutions énumérées par ce courrier, et d'autre part, de vérifier si les tâches dont l'exécution y était demandée, avaient connu ne serait-ce qu'un début d'accomplissement, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard des articles L. 1243-1 et L. 1243-4 du Code du travail ;
ALORS ENFIN QUE le juge est tenu d'examiner chacun des griefs énoncés à l'appui du licenciement ; que la cour d'appel, sur les quatre griefs qu'elle a retenus comme n'ayant pas déjà fait l'objet d'une sanction disciplinaire, n'en a examiné que deux, délaissant ceux tirés d'une part de la parution le 5 mai 2008 dans un quotidien, d'une annonce relative à un concert dont l'annulation avait été décidée au mois d'avril, et d'autre part de la parution le 19 mai 2008, d'une annonce relative à un concert le 23 mai 2008, sans que soit indiquée la qualité d'organisateur du centre culturel ; qu'elle a ainsi violé l'article L. 1232-6 du Code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR CONDAMNE l'association FJEP-Centre Culturel de Sallanches, à payer à Madame X... une somme de 29 353,85 euros en exécution de l'article L. 1243-4 du Code du travail ;
AUX MOTIFS QU'en conséquence, la Cour infirmera le jugement déféré et dira que le licenciement de Mme X... était abusif, si bien que sur le fondement de l'article L. 1243-4 du Code du travail, il lui sera alloué la somme de 29 353,85 euros correspondant :

- aux salaires qu'elle aurait dû percevoir du 1er juillet 2008 au 26 août 2009, à raison de 1.800€ par mois :24.909,68 €,
- à l'indemnité de fin de contrat prévue par l'article L. 1234-8 du code du travail, égale à 10 % de la rémunération totale brute d'un montant de 44.441,72 € (soit selon la fiche de salaire de juin 2008, qui est la seule produite, 12.041,72 € au titre des 6 premiers mois de 2008 + 32.400 € pour les 18 autres mois du contrat) : 4.444,17 € ;
ALORS QUE la rupture anticipée du contrat à déterminée en dehors des cas autorisés par la loi, ouvre droit pour le salarié à une indemnisation forfaitaire d'un montant au moins égal aux rémunérations qu'il aurait perçues jusqu'au terme du contrat, sans préjudice de l'indemnité de fin de contrat prévue par l'article L. 1243-8 du Code du travail ; qu'en fixant au 26 août 2009 la date du terme du contrat sans avoir constaté que la salariée pour le remplacement de laquelle Madame X... avait été recrutée pour une durée minimum d'une année, avait renouvelé son congé de création d'entreprise pour une durée de un an à compter du 27 août 2008, date d'échéance de la durée minimum du contrat à durée déterminée, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article L.1243-4 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-21234
Date de la décision : 07/03/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Chambéry, 25 mai 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 07 mar. 2012, pourvoi n°10-21234


Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats (président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:10.21234
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