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06/03/2012 | FRANCE | N°10-21038

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 06 mars 2012, 10-21038


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M.
X...
a été engagé par la société Hitachi Computers Products, le 2 octobre 1999, en qualité de technicien service après vente, réparation, production ; qu'il a été élu, le 5 novembre 2002, délégué du personnel titulaire, puis réélu le 8 novembre 2004 et le 21 novembre 2006 ; qu'en arrêt de travail depuis le 18 janvier 2007 pour un syndrome dépressif, pris en charge au titre de la législation du travail, il a, le 26 octobre 2007, saisi la juridiction prud'homal

e aux fins de résolution judiciaire de son contrat de travail et de condamnati...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M.
X...
a été engagé par la société Hitachi Computers Products, le 2 octobre 1999, en qualité de technicien service après vente, réparation, production ; qu'il a été élu, le 5 novembre 2002, délégué du personnel titulaire, puis réélu le 8 novembre 2004 et le 21 novembre 2006 ; qu'en arrêt de travail depuis le 18 janvier 2007 pour un syndrome dépressif, pris en charge au titre de la législation du travail, il a, le 26 octobre 2007, saisi la juridiction prud'homale aux fins de résolution judiciaire de son contrat de travail et de condamnation de son employeur à lui verser, outre diverses sommes au titre de la rupture du contrat de travail, des dommages-intérêts en réparation d'une discrimination syndicale et de harcèlement moral ; que déclaré inapte à tout poste selon la procédure d'urgence par le médecin du travail, il a été licencié le 21 octobre 2009 ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M.
X...
fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande de dommages-intérêts liés à son préjudice financier et moral sur le fondement d'une discrimination liée à son appartenance syndicale, alors, selon le moyen :
1°/ que la simple concomitance entre le début de l'activité de représentation du personnel et la stagnation de la carrière d'un salarié laisse présager l'existence d'une discrimination directe ou indirecte ; qu'en refusant de retenir la discrimination aux seuls motifs que les autres salariés de l'entreprise, mis en comparaison avec lui, avait connu une évolution de carrière identique, alors même qu'il résultait de ses propres constatations que la stagnation de la carrière de M.
X...
était concomitante avec le début de ses activités de représentation du personnel, la cour d'appel a violé l'article L. 1134-1 du code du travail ;
Sur la stagnation de carrière :
2°/ qu'en matière de discrimination, le juge est tenu d'examiner l'ensemble des éléments de preuve produit par le salarié ; que pour refuser de faire droit à la demande du salarié, la cour d'appel s'est fondée sur le fait que sur neuf techniciens embauchés au même coefficient et encore présents, trois des autres salariés mis en comparaison avec M.
X...
avait le même coefficient que lui ; qu'en ne s'expliquant pas sur le fait, souligné par M.
X...
dans ses écritures, que les salariés en question étaient eux-mêmes représentants du personnel, en sorte qu'ils étaient victimes de la même discrimination, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1134-1 du code du travail ;
3°/ qu'est victime d'une discrimination syndicale le salarié qui n'a pas pu évoluer du fait même qu'il n'a pas bénéficié des actions de formation appropriées ; que pour refuser de faire droit à la demande du salarié, la cour d'appel a notamment considéré que M.
X...
n'avait pas le niveau de maîtrise du poste en termes d'autonomie, de responsabilité et de complexité des tâches réalisées ; qu'en statuant ainsi, alors même que le salarié faisait valoir qu'il n'avait pu acquérir cette maîtrise technique du fait même qu'il avait été privé de formation, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 1134-1 du code du travail ;
4°/ que la discrimination doit être appréciée au regard de l'ensemble des éléments déterminant l'évolution du salarié ; que M.
X...
avait soutenu que s'il avait refusé le poste de team leader, c'était en raison du fait que l'employeur avait refusé de l'autoriser à le cumuler avec celle de technicien d'encadrement-dont il ne pouvait perdre la technicité-alors que cette autorisation avait été donné à d'autres salariés dont la carrière avait ensuite évolué plus favorablement ; qu'ainsi l'employeur lui opposait le résultat de ses propres décisions discriminatoires ; qu'en ne s'expliquant encore pas sur ce moyen déterminant, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 1134-1 du code du travail ;
Sur l'absence de progression du salaire :
5°/ qu'en matière de discrimination, le juge est tenu d'examiner l'ensemble des éléments de preuve produit par le salarié ; que pour refuser de faire droit à la demande du salarié, la cour d'appel a considéré que " La société produit un tableau démontrant que l'âge moyen des techniciens FPR est de 32 ans, l'ancienneté moyenne de sept ans et le salaire moyen de 24 226 euros. M.
X...
se situe au-dessus du salaire moyen de ces techniciens là, ce qui est logique eu égard à son âge, 34 ans et 10 mois, et son ancienneté de huit ans et demi à l'époque étudiée ; l'âge moyen des vingt-huit techniciens au coefficient 285 est de 36 ans et le salaire annuel moyen de 26 197 euros, pour une ancienneté moyenne de neuf ans ; le salaire annuel de M.
X...
, 25 551 euros s'avère légèrement inférieur, ce qui reste cohérent avec l'ensemble des autres plus anciens ; depuis il a bénéficié d'augmentations régulières en salaire :-5, 8 % en mai 2001-2, 5 % en mai 2002-2, 4 % en mai 2003-2, 5 % en mai 2004-2, 9 % en mai 2005, soit plus que la moyenne de 2, 72 %-3, 7 % en mai 2006 soit plus que la moyenne de 3, 29 % " ; que pourtant M.
X...
faisait valoir que si les rémunérations mises en comparaison avec la sienne étaient équivalentes, cela résultait notamment de ce que les salariés mis en comparaison avec lui avaient eu la même progression de carrière, c'est-à-dire une carrière ralentie ; qu'ainsi, en omettant de vérifier si les salariés n'ayant pas eu la même progression de carrière que M.
X...
avaient eu une progression salariale différente, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1134-1 du code du travail ;
Sur l'absence d'action de formation :
6°/ qu'en matière de discrimination, le juge est tenu d'examiner l'ensemble des éléments de preuve produit par le salarié ; que pour refuser de faire droit à la demande du salarié, la cour d'appel a notamment retenu que " Il a accompli 291, 30 heures de formation en sept ans, dont une semaine entière au Japon, ce qui restait privilégié par rapport à la moyenne de ses collègues, et correspondait à peu près à deux mois de travail ; si certaines formations sollicitées n'ont pas été mises en oeuvre c'est qu'elles n'ont pas été jugées nécessaires à la tenue de son poste ; cependant il a bénéficié de 100 heures de formation en anglais de février 2002 à juin 2004, de formations régulières en interne sur l'évolution des produits. Et il a effectué un bilan de compétences en janvier 2006. Il convient de rappeler que ce salarié a cessé de travailler pour Hitachi à peine 34 ans " ; qu'en statuant, ainsi alors que le salarié faisait également valoir que certains salariés, de compétence et d'expérience équivalente à la sienne, avait bénéficié d'actions de formation appropriées, la cour d'appel n'a manifestement pas examiné l'ensemble des éléments de preuve produits par le salarié, privant ainsi sa décision de base légale au regard de l'article L. 1134-1 du code du travail ;
Mais attendu qu'appréciant souverainement la valeur et la portée des éléments de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a retenu que la carrière du salarié, technicien de service après-vente, devenu délégué du personnel en novembre 2002, avait été bridée par son refus manifesté en mai 2001 de continuer à exercer les fonctions de responsable d'équipe, promotion qui lui avait été proposée et qu'il avait acceptée en novembre 2000, démontrant ainsi qu'il ne se sentait pas apte à occuper un poste comportant des responsabilités supérieures, que son salaire avait connu une progression normale, comparable à celle des autres techniciens classés au même coefficient et qu'il avait bénéficié d'un traitement privilégié en matière d'accès à la formation, même si certaines des formations sollicitées n'avaient pas été mises en oeuvre car jugées non nécessaires à la tenue de son poste ; qu'elle a pu en déduire que M.
X...
n'avait pas été victime d'une discrimination liée à ses activités de délégué du personnel ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le deuxième moyen :
Vu l'article 1152-1 du code du travail ;
Attendu que, pour débouter le salarié de sa demande au titre d'un harcèlement moral, l'arrêt retient que les propos et attitudes rapportés, adressés à un délégué du personnel titulaire, ne caractérisent pas un harcèlement moral mais constituent des propos exagérés inutilement agressifs et une attitude fautive de la société, relevant des dispositions de l'article 1382 du code civil ;
Qu'en statuant ainsi, sans rechercher si les agissements qu'elle constatait et sanctionnait, n'étaient pas de nature, ainsi que le soutenait le salarié, à altérer sa santé physique ou mentale ou à compromettre son avenir professionnel, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Et attendu que la cassation à intervenir sur le deuxième moyen entraîne par voie de conséquence la cassation des chefs de la décision visés par le troisième moyen ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a débouté M.
X...
de ses demandes d'annulation du jugement et de dommages-intérêts au titre d'une discrimination syndicale, l'arrêt rendu le 3 juin 2010, entre les parties, par la cour d'appel d'Orléans ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bourges ;
Condamne la société Hitachi Computer Products Europe aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Hitachi Computer Products Europe à payer à M.
X...
la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six mars deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils pour M.
X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté
X...
de ses demandes de dommages et intérêts liés à son préjudice financier et moral sur le fondement d'une discrimination liée à son appartenance syndicale.
AUX MOTIFS QUE, les éléments de l'article L 412-2 du Code du travail, en vigueur à l'époque des faits, seront tenus pour reproduits ici ; l Sur le ralentissement allégué de l'évolution de carrière : le 5 novembre 2002, Monsieur
X...
est devenu délégué du personnel titulaire et il a oeuvré au sein d'HITACHI jusqu'au 18 janvier 2007, date à partir de laquelle il a été mis en arrêt maladie jusqu'à son licenciement pour inaptitude, le 21 octobre 2009 ; il se compare à Messieurs Y..., Z...et A..., qui ont intégré l'entreprise un an avant lui environ et qui ont atteint le coefficient 315 alors que lui est resté à celui de 285 ; Cependant ses trois collègues ont accepté une promotion, alors que lui dans un premier temps, en novembre 2000 accepte de devenir " team leader ", avant d'y renoncer de son propre gré, en mai 2001 car il était attaché à sa fonction antérieure de technicien qualité ; Par ailleurs, sur l'ensemble des neuf techniciens embauchés avec un coefficient de 285 et encore présents dans l'entreprise, trois sont toujours au coefficient de 2 85, dont lui-même. Sur les six techniciens ayant évolué au coefficient 305, en dehors de l'un d'entre eux embauché en 2000, tous les autres ont été intégrés en 1992 ou 1993 et conservent une ancienneté plus importante que Monsieur
X...
; Le coefficient n'est pas seulement lié à l'ancienneté, mais au niveau de maitrise du poste, notamment en termes d'autonomie, de responsabilité et de complexité des tâches réalisées ; Certes les évaluations professionnelles de Monsieur
X...
restent positives, mais ce refus de conserver son poste de " team leader " a bridé sa carrière, en démontrant qu'il ne se sentait pas adapté dans un poste à responsabilités supérieures ; 2. Sur l'absence de progression de salaire normale : La société produit un tableau démontrant que l'âge moyen des techniciens FPR est de 32 ans, l'ancienneté moyenne de sept ans et le salaire moyen de 24. 226 €. Monsieur.
X...
se situe au-dessus du salaire moyen de ces techniciens là, ce qui est logique eu égard à son âge, 34 ans et 10 mois, et son ancienneté de huit ans et demi à l'époque étudiée ; L'âge moyen des 28 techniciens au coefficient 285 est de ans et le salaire annuel moyen de 26. 197 €, pour une ancienneté moyenne de neuf ans ; Le salaire annuel de Monsieur. X..., 25. 551 € s'avère légèrement inférieur, ce qui reste cohérent avec l'ensemble des autres plus anciens ; Depuis il a bénéficié d'augmentations régulières en salaire :-5, 8 % en mai 2001-2, 5 % en mai 2002-2, 4 % en mai 2003-2, 5 % en mai 2004-2, 9 % en mai 2005, soit plus que la moyenne de 2, 72 %-3, 7 % en mai 2006 soit plus que la moyenne de 3, 29 % ; 3. Sur l'absence de propositions de formation : Il a accompli 291, 30 heures de formation en sept ans, dont une semaine entière au Japon, ce qui restait privilégié par rapport à la moyenne de ses collègues, et correspondait à peu près à deux mois de travail ; Si certaines formations sollicitées n'ont pas été mises en oeuvre c'est qu'elles n'ont pas été jugées nécessaires à la tenue de son poste ; Cependant il a bénéficié de 100 heures de formation en anglais de février 2002 à juin 2004, de formations régulières en interne sur l'évolution des produits. Et il a effectué un bilan de compétences en janvier 2006. Il convient de rappeler que ce salarié a cessé de travailler pour HITACHI à peine 34 ans. Il ressort de tous ces éléments que la discrimination syndicale est insuffisamment caractérisée et ne peut donc être retenue. Les dommages-intérêts sollicités de 50. 000 € seront donc repoussés comme infondés.
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE sur le prétendu ralentissement de son évolution de carrière : Monsieur
X...
allègue qu'il aurait subi des discriminations en raison d'un ralentissement de son évolution de carrière 2. 1- en termes de classification ; que les dispositions de la convention collective applicable au sein de la société HITACHI définissent très précisément l'évolution des niveaux de classification de ses salariés pour la catégorie dont relève Monsieur
X...
, soit la catégorie " administratif/ techniciens ", elles prévoient que : " Le classement d'accueil d'un salarié ne sera pas inférieur au 1er échelon du niveau IV (Coefficient 255) pour le titulaire d'un brevet de technicien supérieur, qu'après 6 mois de travail effectif dans l'entreprise, le classement de l'intéressé ne devra pas être inférieur au 2èms échelon du niveau IV (coefficient 270) et qu'après 18 mois de travail effectif dans l'entreprise, le classement de l'intéressé ne devra pas être inférieur au 3ème échelon du niveau IV (coefficient 285) " ; qu'en l'espèce, il est établi que Monsieur
X...
a bénéficié du coefficient 285, alors même que, contrairement à ses collègues, il n'était pas titulaire du brevet de technicien supérieur ; qu'ainsi il apparaît que la société HITACHI, loin de chercher à léser Monsieur
X...
d'une quelconque façon, a, au contraire, agi de façon à ne pas le pénaliser par rapport aux autres ; que la comparaison du coefficient de Monsieur
X...
(285) avec celui des autres techniciens de son service (soit le service " Field Production Repair " soit SAV réparation production) ne permet pas davantage d'établir la moindre discrimination envers Monsieur
X...
par rapport à un ralentissement de l'évolution de sa carrière ; que par ailleurs une évolution vers des responsabilités d'encadrement d'équipe avait été proposée à Monsieur
X...
lorsque le poste de TEAM LEADER lui a été proposé en 2001 et que c'est lui qui a préféré, au bout de sept mois, pour des raisons personnelles qui n'ont jamais été critiquées par la société HITACHI, revenir à ses anciennes fonctions de technicien qualité ; qu'il est évident que l'évolution de postes correspondant à des fonctions exclusivement techniques, telles que celles effectuées par Monsieur
X...
, est nécessairement plafonnée au bout d'un certain temps ; 2. 2- en termes de salaire ; qu'en termes de salaire, Monsieur
X...
ne justifie pas plus avoir été pénalisé en raison de l'exercice de ses fonctions de délégué du personnel ; qu'au contraire, il a bénéficié d'augmentations régulières depuis 2001, soit : 5, 8 % en mai 2001, 2, 5 % en mai 2002, 2, 4 % en mai 2003, 2, 5 % en mai 2004, 2, 9 % en mai 2005, 3, 7 % en mai 2006 ; que ces augmentations qui sont des augmentations individuelles liées à la performance sont tout à fait comparables à celles dont ont bénéficié les autres salariés d'un niveau de performance équivalent ; qu'en effet la comparaison des salaires perçus par les techniciens au même coefficient 285 que celui de Monsieur
X...
(soit 28 personnes au total tous services confondus) aboutit aux constatations suivantes : que l'âge moyen des techniciens bénéficiant du coefficient 285 est de 36 ans, pour un salaire annuel moyen de 26 197 euros et pour une ancienneté moyenne de 9 ans : qu'en l'espèce, Monsieur
X...
est âgé de 34 ans et 10 mois, son ancienneté est de 8 ans et demi et son salaire annuel est de 25 551 euros ; qu'il s'agit donc d'un salaire légèrement inférieur au salaire moyen (98 %), ce qui est cohérent compte tenu de son âge et de son ancienneté ; que la comparaison des salaires perçus au sein du service de Monsieur
X...
, soit le service FPR, permet encore de constater qu'aucune discrimination n'a été subie par Monsieur
X...
dans la mesure où son salaire se situe même au dessus du salaire moyen perçu par les techniciens du service bénéficiant du même coefficient ; qu'aucune volonté de discrimination de la part de la société HITACHI quant à l'évolution de salaire de Monsieur
X...
n'est donc établie ; que Monsieur
X...
prétend que parmi les techniciens qualité entrés en même temps que lui, ceux disposant de mandats représentatifs auraient bénéficié d'évolutions de salaire inférieures ; que cette affirmation est encore parfaitement inexacte ; qu'en effet, au sein de son service, pour les techniciens au coefficient 285, le salaire moyen des RP est de 24 266, 23 euros alors qu'il s'établit à 24 226, 24 euros pour tous les techniciens du même coefficient, soit un montant légèrement supérieur ; que s'agissant de ce deuxième grief, Monsieur
X...
ne démontre pas qu'il aurait été victime de discrimination du fait d'un ralentissement de carrière ; 3/ sur la prétendue absence de proposition de formation que Monsieur
X...
prétend qu'il aurait été victime de discrimination du fait qu'on ne lui aurait pas proposé les formations envisagées au cours de ses entretiens d'évaluation ; qu'il est établi que si certaines formations n'ont pas été mises en oeuvre c'est parce qu'elles n'ont pas été jugées nécessaires à la tenue du poste et n'ont donc pas fait partie des formations retenues au plan de formation de l'entreprise qui intègre avant tout les formations prioritaires pour le poste ; que Monsieur
X...
a toutefois bénéficié d'un certain nombre d'actions de formation depuis 2001 ; qu'ainsi, il a suivi plusieurs formations en anglais d'une durée totale de 100 heures de février 2002 à juin 2004 ; qu'en outre il a bénéficié d'une semaine de formation au Japon qui n'est réservée qu'à très peu de salariés, il a également suivi, tous les ans, des sessions de recyclage secouristes ainsi que des formations régulières en interne sur l'évolution des produits ; qu'en ce qui concerne le bilan de compétences réalisé par Monsieur
X...
en janvier 2006, il sera relevé, contrairement à ce que tente de faire croire Monsieur
X...
, que Madame Sophie B..., la responsable Ressources Humaines, a toujours été favorable aux bilans de compétence ; que l'argumentation de Monsieur
X...
consistant à prétendre qu'il aurait été pénalisé par la Direction de HITACHI du fait de l'absence de proposition de formation est injustifiée ;
1 – ALORS QUE, la simple concomitance entre le début de l'activité de représentation du personnel et la stagnation de la carrière d'un salarié laisse présager l'existence d'une discrimination directe ou indirecte ; qu'en refusant de retenir la discrimination aux seuls motifs que les autres salariés de l'entreprise, mis en comparaison avec lui, avait connu une évolution de carrière identique, alors même qu'il résultait de ses propres constatations que la stagnation de la carrière de M.
X...
était concomitante avec le début de ses activités de représentation du personnel, la Cour d'appel a violé l'article L. 1134-1 du Code du travail ;
Sur la stagnation de carrière :
2 – QU'ENCORE en matière de discrimination, le juge est tenu d'examiner l'ensemble des éléments de preuve produit par le salarié ; que pour refuser de faire droit à la demande du salarié, la Cour d'appel s'est fondée sur le fait que sur neuf techniciens embauchés au même coefficient et encore présents, trois des autres salariés mis en comparaison avec M.
X...
avait le même coefficient que lui ; qu'en ne s'expliquant pas sur le fait, souligné par Monsieur
X...
dans ses écritures, que les salariés en question étaient eux-mêmes représentants du personnel, en sorte qu'ils étaient victimes de la même discrimination, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1134-1 du Code du travail ;
3- QUE est victime d'une discrimination syndicale le salarié qui n'a pas pu évolué du fait même qu'il n'a pas bénéficié des actions de formation appropriées ; que pour refuser de faire droit à la demande du salarié, la Cour d'appel a notamment considéré que M.
X...
n'avait pas le niveau de maitrise du poste en termes d'autonomie, de responsabilité et de complexité des tâches réalisées ; Qu'en statuant ainsi, alors même que le salarié faisait valoir qu'il n'avait pu acquérir cette maitrise technique du fait même qu'il avait été privé de formation, la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 1134-1 du Code du travail ;
4- QUE la discrimination doit être appréciée au regard de l'ensemble des éléments déterminant l'évolution du salarié ; que Monsieur
X...
avait soutenu que s'il avait refusé le poste de team leader, c'était en raison du fait que l'employeur avait refusé de l'autoriser à le cumuler avec celle de technicien d'encadrement – dont il ne pouvait perdre la technicité – alors que cette autorisation avait été donné à d'autres salariés dont la carrière avait ensuite évolué plus favorablement ; qu'ainsi l'employeur lui opposait le résultat de ses propres décisions discriminatoires ; qu'en ne s'expliquant encore pas sur ce moyen déterminant, la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 1134-1 du Code du travail
Sur l'absence de progression du salaire :
5- QUE, en matière de discrimination, le juge est tenu d'examiner l'ensemble des éléments de preuve produit par le salarié ; Que pour refuser de faire droit à la demande du salarié, la Cour d'appel a considéré que « La société produit un tableau démontrant que l'âge moyen des techniciens FPR est de 32 ans, l'ancienneté moyenne de sept ans et le salaire moyen de 24. 226 €. Monsieur.
X...
se situe au-dessus du salaire moyen de ces techniciens là, ce qui est logique eu égard à son âge, 34 ans et mois, et son ancienneté de huit ans et demi à l'époque étudiée ; L'âge moyen des 28 techniciens au coefficient 285 est de 36 ans et le salaire annuel moyen de 26. 197 €, pour une ancienneté moyenne de neuf ans ; Le salaire annuel de Monsieur. X..., € s'avère légèrement inférieur, ce qui reste cohérent avec l'ensemble des autres plus anciens ; Depuis il a bénéficié d'augmentations régulières en salaire :-5, 8 % en mai 2001-2, 5 % en mai 2002-2, 4 % en mai 2003-2, 5 % en mai 2004-2, 9 % en mai 2005, soit plus que la moyenne de 2, 72 %-3, 7 % en mai 2006 soit plus que la moyenne de 3, 29 % » ; Que pourtant M.
X...
faisait valoir que si les rémunérations mises en comparaison avec la sienne étaient équivalentes, cela résultait notamment de ce que les salariés mis en comparaison avec lui avaient eu la même progression de carrière, c'est-àdire une carrière ralentie ; Qu'ainsi, en omettant de vérifier si les salariés n'ayant pas eu la même progression de carrière que M.
X...
avaient eu une progression salariale différente, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1134-1 du Code du travail ;
Sur l'absence d'action de formation :
6- QUE, en matière de discrimination, le juge est tenu d'examiner l'ensemble des éléments de preuve produit par le salarié ; Que pour refuser de faire droit à la demande du salarié, la Cour d'appel a notamment retenu que « Il a accompli 291, 30 heures de formation en sept ans, dont une semaine entière au Japon, ce qui restait privilégié par rapport à la moyenne de ses collègues, et correspondait à peu près à deux mois de travail ; Si certaines formations sollicitées n'ont pas été mises en oeuvre c'est qu'elles n'ont pas été jugées nécessaires à la tenue de son poste ; Cependant il a bénéficié de 100 heures de formation en anglais de février 2002 à juin 2004, de formations régulières en interne sur l'évolution des produits. Et il a effectué un bilan de compétences en janvier 2006. Il convient de rappeler que ce salarié a cessé de travailler pour HITACHI à peine 34 ans » ; Qu'en statuant, ainsi alors que le salarié faisait également valoir que certains salariés, de compétence et d'expérience équivalente à la sienne, avait bénéficié d'actions de formation appropriées, la Cour d'appel n'a manifestement pas examiné l'ensemble des éléments de preuve produits par le salarié, privant ainsi sa décision de base légale au regard de l'article L. 1134-1 du Code du travail ;
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M.
X...
de ses demandes de dommages et intérêts liés à son préjudice financier et moral sur le fondement d'un harcèlement moral.
AUX MOTIFS QUE aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteint à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale, ou de compromettre son avenir professionnel, rappelle l'article L. 122-49 du Code du travail, en vigueur au moment des faits ; Il convient d'écarter l'attestation de l'épouse de Monsieur
X...
, en raison de sa proximité avec lui ; Il a produit un grand nombre d'attestations, dont beaucoup sont référendaires, où est décrit un état de santé psychologique ébranlé, qui ne peuvent être retenues ; Monsieur C...évoque. « une grosse altercation avec N + 2, au point que Monsieur
X...
semblait tétanisé après des discussions tendues » mais elle est insuffisamment précise ; Monsieur Lilian A...rapporte qu'en 2006, son N + 2. lui a lancé « si tu n'es pas carré je t'allume " ; Mme Stéphanie F...établit la comparaison entre certains qui n'avaient pas de remarques s'ils s'éloignaient de leur poste, et Monsieur
X...
à qui son N + 1'a dit : « qu'est-ce que tu fais là tu n'es pas à ton poste » ; Le 17 février 2007, en arrêt maladie, il est revenu à son poste de travail pour oeuvrer dans le cadre de sa délégation du personnel et il lui a été reproché cette présence, qu'il n'aurait rien eu à faire sur son poste sans feuille de délégation ; L'entretien de notation, plus long que les autres, ne signifie rien en soi ; Quant à l'entretien du 18 janvier 2007, il était consécutif à des révélations de certaines de ses collègues qui ont désiré conserver l'anonymat sur les harcèlements sexuels qui auraient pu lui être imputés ; Si aucune attestation directe des victimes n'a pu être recueillie, en revanche Mme Isabelle E...a rapporté avoir reçu des courriels de sa part à connotation pornographique. Mais elle-même en a envoyé de nombreux de ce type à Monsieur
X...
, comme ce dernier le démontre en les produisant à la procédure ; Le devoir d'HITACHI était d enquêter de manière approfondie pour cerner la réalité de ces dénonciations, dont l'Inspection du Travail avait été au courant ; Cependant aucune sanction n'a été infligée à Monsieur
X...
à cet égard ; Il convient de considérer que tous les salariés en cause se tutoient, ce qui autorise une certaine familiarité de langage plus grande, voire un rudoiement plus facile ; Cependant, la Cour discerne dans les propos et attitudes rapportés ci-dessus, adressés à un délégué du personnel titulaire, non un harcèlement moral mais des propos exagérés inutilement agressifs et une attitude fautive de la société, relevant des dispositions de l'article 1382 du Code civil ; Tout bien considéré Monsieur
X...
verra son préjudice, directement causé par cette attitude fautive, réparé par une somme arbitrée à hauteur de 3. 000 €
1- ALORS QUE, la Cour d'appel qui a relevé des propos et attitudes fautives répétés et constaté que le salarié évoquait un état de santé ébranlé, mais n'a pas recherché si ces agissements étaient de nature à porter atteinte à la santé et à la dignité de Monsieur
X...
ou d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L. 1152-1 du Code du travail
2- ALORS encore QU'en matière de harcèlement moral, les juges sont tenus d'examiner l'ensemble des éléments de fait qui leur sont soumis par le salarié ; que pour refuser de faire droit à la demande du salarié, la Cour d'appel n'a retenu que les attestations produites par le salarié, affirmant qu'elles ne permettaient pas de qualifier le harcèlement moral ; que pourtant, le salarié produisait nombre d'autres pièces qui attestaient également son état de santé très dégradé ; qu'en statuant ainsi sans examiner les autres pièces, la Cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 1152-1 du Code du travail.
3- ET ALORS QUE, la faute commise par l'un des cocontractants qui cause un préjudice à l'autre contractant relève du champ de la responsabilité contractuelle et non pas délictuelle ; que la Cour d'appel a fait droit à la demande de M.
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mais sur le fondement de l'article 1382 du Code civil et non pas de l'article 1147 du Code civil ; Qu'en statuant ainsi, la Cour d'appel a violé aussi bien les dispositions de l'article 1382 du Code civil que celles de l'article 1147 du Code civil.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M.
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de résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de son employeur.
AUX MOTIFS QUE, En l'absence de discrimination et de harcèlement moral, les propos exagérés stigmatisés ci-dessus ne sauraient s'analyser comme suffisamment graves pour emporter la résiliation judiciaire du contrat de travail qui sera donc rejetée comme mal fondée.
ALORS QUE, pour refuser de faire droit à la demande de résiliation judiciaire de M.
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, la Cour d'appel a exclu l'existence tant d'une discrimination syndicale que d'un harcèlement moral ; que la cassation à intervenir sur les dispositions du premier moyen, ou du deuxième moyen, ayant dit que l'existence d'une discrimination syndicale ou d'un harcèlement moral n'était pas avérée entraînera, par application de l'article 624 du Code de procédure Civile, celle des dispositions ayant refusé de faire droit au salarié de la résiliation judiciaire.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-21038
Date de la décision : 06/03/2012
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Orléans, 03 juin 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 06 mar. 2012, pourvoi n°10-21038


Composition du Tribunal
Président : M. Bailly (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Fabiani et Luc-Thaler, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:10.21038
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