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22/02/2012 | FRANCE | N°10-28379

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 22 février 2012, 10-28379


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Besançon, 15 septembre 2010), qu'agissant sur le fondement d'une ordonnance portant injonction de payer ayant reçu la certification de titre exécutoire européen, délivrée par un tribunal italien à l'encontre de la société de droit français Extrucable, la société de droit italien SCET, a fait procéder à une saisie-attribution au préjudice de la société Extrucable ; que celle-ci a saisi un juge de l'exécution, en contestant les modalités selon lesquelles la déc

ision italienne portant injonction de payer lui avait été signifiée ;
Sur le ...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Besançon, 15 septembre 2010), qu'agissant sur le fondement d'une ordonnance portant injonction de payer ayant reçu la certification de titre exécutoire européen, délivrée par un tribunal italien à l'encontre de la société de droit français Extrucable, la société de droit italien SCET, a fait procéder à une saisie-attribution au préjudice de la société Extrucable ; que celle-ci a saisi un juge de l'exécution, en contestant les modalités selon lesquelles la décision italienne portant injonction de payer lui avait été signifiée ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Attendu que la société Extrucable fait grief à l'arrêt de constater que la procédure de saisie-attribution diligentée par la société SCET le 12 mai 2009 à son encontre était régulière et de la débouter de l'intégralité de ses prétentions, alors, selon le moyen, qu'une décision ne peut valoir comme titre exécutoire européen si le débiteur n'a pas été dûment informé dans la décision ou dans un document l'accompagnant des exigences de procédure relative au recours, y compris les nom et adresse de l'institution auprès de laquelle le recours doit être formé ; qu'en l'espèce, en validant la saisie-attribution pratiquée sur le fondement du jugement rendu par le tribunal de Turin le 17 novembre 2008, dès lors que celui-ci avait été certifié en tant que titre exécutoire européen, sans rechercher, comme elle y était invitée, si le débiteur avait été dûment informé dans la décision ou dans un document l'accompagnant des exigences de procédure relatives au recours, y compris le nom et adresse de l'institution auprès de laquelle le recours devait être formé, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 17 et 18 du Règlement (CE) n° 805/2004 du 21 avril 2004 ;
Mais attendu qu'ayant exactement retenu que la décision certifiée en tant que titre exécutoire européen dans l'Etat d'origine est reconnue et exécutée dans les autres Etats membres sans qu'une déclaration constatant la force exécutoire soit nécessaire et sans qu'il soit possible de contester sa reconnaissance, la cour d'appel en a exactement déduit, sans avoir à procéder à la recherche prétendument omise, qui était sans incidence sur la solution du litige, que les contestations formées par la société Extrucable à l'encontre du jugement du tribunal italien étaient irrecevables ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que la seconde branche du moyen n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Extrucable aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Extrucable ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux février deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils pour la société Extrucable
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR déclaré l'appel de la société EXTRUCABLE recevable mais non fondé, d'AVOIR confirmé en toutes ses dispositions le jugement de première instance, d'AVOIR constaté que la procédure de saisie-attribution diligentée par la société spa SCET le 12 mai 2009 à l'encontre de la société EXTRUCABLE était régulière et d'AVOIR en conséquence débouté la société EXTRUCABLE de l'intégralité de ses prétentions ;
AUX MOTIFS PROPRES QU' « aux termes de l'article 5 du règlement européen 805/2004 du 21 avril 2004, une décision qui a été certifiée en tant que titre exécutoire européen dans l'État membre d'origine est reconnue et exécutée dans les autres États membres, sans qu'une déclaration constatant la force exécutoire soit nécessaire et sans qu'il soit possible de contester sa reconnaissance ; Attendu qu'il s'ensuit que les contestations formées par l'appelante à I'encontre du jugement du tribunal de Turin du 20 novembre 2008 sont irrecevables, dès lors que ce jugement a été certifié en tant que titre exécutoire européen ; Attendu qu'en tant que de besoin, il y a lieu de constater : - que le jugement du tribunal de Turin pouvait, en vertu de l'article 14 du règlement européen 1393/2007 du 13 novembre 2007 ayant remplacé le règlement 1348/2000 du 29 mai 2000, être notifié par la voie postale, - que cette notification a été régulièrement effectuée comme en font foi I'accusé de réception signé par la société EXTRUCABLE le 23 décembre 2008, ainsi que le rapport établi par I'huissier chargé de cette notification, - qu'il n'a pas été frappé de recours par la société EXTRUCABLE dans le délai qui lui était imparti, ce délai ayant pu être ramené à 20 jours, comme le permet l'article 641 du code de procédure civile italien lorsque la personne réside dans un autre État membre de I'Union Européenne ; Attendu que, pour le surplus, la Cour adopte les motifs du jugement déféré, qui sera donc confirme en ce qu'il a constaté la régularité de la saisieattribution et débouté la société EXTRUCABLE de ses prétentions » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE « la procédure de saisie attribution diligentée le 12 mai 2009 par la Société SCET SPA à l'encontre de la Société EXTRUCABLE a pour fondement l'ordonnance d'injonction de payer délivrée le 20 novembre 2008 et le certificat de titre exécutoire européen en date du 19 février 2009. Le règlement CE n° 805/2004 pose des conditions pour qu'une décision exécutoire soit certifiée en tant que titre exécutoire européen. Aux termes des dispositions de l'article 3.1 de ce règlement, une créance est réputée incontestée :"a. Si le débiteur I'a expressément reconnue...b. Si le débiteur ne s'y est jamais opposé, conformément aux règles de la procédure de l'état membre d'origine, au cours de la procédure judiciaire.c. Si le débiteur n'a pas comparu ou ne s'est pas fait représenter lors d'une audience relative à cette créance après I'avoir initialement contestée au cours de la procédure judiciaire...d. Si Ie débiteur l'a expressément reconnue dans un acte authentique."En I'espèce, la Société EXTRUCABLE s'est vue notifier la décision portant injonction de payer rendue par le Tribunal de Turin en date du 17 novembre 2008 par courrier recommandé avec avis de réception du 23 janvier 2008. Elle ne s'y est pas opposée dans le délai qui lui était imparti, soit 20 jours. La créance de la Société SCET SPA est incontestée, conformément à I'article 3.1 b du règlement CE n° 805/2004. Lorsque le Tribunal de TURIN a délivré le certificat de titre exécutoire européen le 13 février 2009, il a vérifié que la créance de la Société SCET SPA était incontestable, en relevant notamment : "L'ordonnance d'injonction n° 12356/2008 est exécut oire dans l'état membre d'origine. L'ordonnance d'injonction n° 1235 6/2008 ne fait l'objet d'aucune contestation ou opposition. L'ordonnance d'injonction n° 12356/2008 a été notifiée en bonne et due forme selon les termes du règlement CE n° 1308/2000. Le débiteur a eu la possibilité de s'opposer à l'ordonnance d'injonction n° 12356/2008. Le débiteur a omis de s'opposer à I'ordonnance n° 12356/2008". Les articles 12 et suivants du règlement CE n° 805/2004 ont été respectés : La décision d'in jonction de payer rendue par le tribunal de Turin a été notifiée à la Société EXTRUCABLE, celle-ci ayant signé l'accusé de réception ; la traduction française de la décision d'injonction de payer rendue par le tribunal de Turin mentionnait expressément que : "dans les 20 jours suivant la notification du présent arrêt d'injonction, elle pourra proposer une opposition et qu'à défaut il sera procédé à une exécution forcée". La Société EXTRUCABLE était donc parfaitement informée de la possibilité de former opposition. Elle ne l'a pas fait. Il y a lieu dans ces conditions de constater que la procédure de saisie attribution diligentée par la Société SCET SPA est régulière. La Société EXTRUCABLE sera donc déboutée de ses prétentions » ;
1. ALORS QU' une décision ne peut valoir comme titre exécutoire européen si le débiteur n'a pas été dûment informé dans la décision ou dans un document l'accompagnant des exigences de procédure relative au recours, y compris les nom et adresse de l'institution auprès de laquelle le recours doit être formé ; qu'en l'espèce, en validant la saisie-attribution pratiquée sur le fondement du jugement rendu par le Tribunal de Turin le 17 novembre 2008, dès lors que celui-ci avait été certifié en tant que titre exécutoire européen, sans rechercher, comme elle y était invitée, si le débiteur avait été dûment informé dans la décision ou dans un document l'accompagnant des exigences de procédure relatives au recours, y compris le nom et adresse de l'institution auprès de laquelle le recours devait être formé, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 17 et 18 du règlement CE n° 805/2004 du 21 avril 2004 ;
2. ALORS QUE viole le droit d'accès à un tribunal l'exigence, pour une société ayant son siège en France, de former opposition dans un délai de vingt jours, décompté à partir d'un 23 décembre, contre une décision portant injonction de payer devant une juridiction d'un autre État membre de l'Union européenne ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a validé la saisie-attribution pratiquée sur le fondement du jugement portant injonction de payer rendu par le Tribunal de Turin et dont la notification avait été effectuée le 23 décembre 2008, au prétexte que la société EXTRUCABLE n'avait pas frappé ce jugement de recours devant la juridiction italienne dans le délai de vingt jours prévu par l'article 641 du code de procédure civile italien ; qu'en statuant ainsi, la Cour d'appel a violé l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 10-28379
Date de la décision : 22/02/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

PROCEDURES CIVILES D'EXECUTION - Mesures d'exécution forcée - Titre - Titre exécutoire européen - Contestation de la décision certifiée - Contestation devant le juge de l'exécution - Recevabilité (non)

UNION EUROPEENNE - Règlement (CE) n° 805/2004 du 21 avril 2004 - Titre exécutoire européen - Contestation de la décision certifiée - Contestation devant le juge de l'exécution - Recevabilité (non) JUGE DE L'EXECUTION - Compétence - Difficultés relatives aux titres exécutoires - Décision de justice - Décision certifiée en tant que titre exécutoire européen (non)

Lorsqu'une mesure d'exécution est engagée sur le fondement d'une décision certifiée en tant que titre exécutoire européen, en application du règlement (CE) n° 805/2004 du 21 avril 2004, portant création d'un titre exécutoire européen pour les créances incontestées, le débiteur est irrecevable à contester, devant le juge de l'exécution, les conditions dans lesquelles la décision étrangère lui avait été signifiée, avant d'être certifiée en tant que titre exécutoire européen


Références :

Règlement (CE) n° 805/2004 du 21 avril 2004

Décision attaquée : Cour d'appel de Besançon, 15 septembre 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 22 fév. 2012, pourvoi n°10-28379, Bull. civ. 2012, II, n° 36
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2012, II, n° 36

Composition du Tribunal
Président : M. Boval (conseiller le plus ancien non empêché, faisant fonction de président)
Avocat général : M. Mucchielli
Rapporteur ?: Mme Leroy-Gissinger
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 05/12/2012
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:10.28379
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