LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le second moyen, pris en sa troisième branche :
Vu l'article 12 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'après un contrôle fiscal la société JPM plastiques (la société) a fait l'objet par l'URSSAF de Grenoble, devenue URSSAF de l'Isère, d'un contrôle de l'application de la législation en matière de cotisations sociales pour la période du 1er janvier 2002 au 31 décembre 2005 à l'issue duquel plusieurs chefs de redressement lui ont été notifiés ; qu'invoquant des erreurs d'imputation commises par son ancien expert-comptable elle a contesté devant une juridiction de sécurité sociale la contrainte récapitulative décernée par l'organisme de recouvrement à la suite du contrôle ;
Attendu que pour rejeter le recours de la société, l'arrêt retient qu'elle se contente de contester l'affectation de sommes sur le compte courant de l'associée-gérante telle que réalisée par un expert-comptable qu'elle a choisi à la suite de la procédure fiscale et qu'elle ne présente aucune comptabilité certifiée ;
Qu'en se déterminant ainsi sans examiner, même sommairement, les travaux comptables de reconstitution du compte litigieux régulièrement versés aux débats par la société, la cour d'appel a méconnu les exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 9 novembre 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Chambéry ;
Condamne l'URSSAF de l'Isère aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize février deux mille douze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils pour la société JPM plastiques
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir débouté un contribuable (la société JPM PLASTIQUES, l'exposante) de sa demande de sursis à statuer dans l'attente d'une décision de la juridiction administrative sur les sommes retenues à titre de rémunération par l'administration fiscale ;
AUX MOTIFS propres et adoptés QUE, ainsi que l'avait justement relevé le tribunal des affaires de sécurité sociale, le sursis à statuer de l'article L. 277 du code des procédures fiscales n'avait aucun effet suspensif quant au paiement des cotisations URSSAF ; que le recours devant le tribunal administratif n'avait pas d'effet suspensif quant au paiement des cotisations URSSAF ; que, par ailleurs, il y avait lieu de relever que seule une partie du redressement opéré par l'inspecteur de l'URSSAF et portant sur les années 2000 à 2002 avait été effectuée au vu des éléments communiqués par l'administration fiscale ; qu'il y avait donc lieu de confirmer la décision entreprise en ce qu'elle avait rejeté la demande de sursis à statuer (v. arrêt attaqué, p. 3, 3ème attendu) ; que, en application de l'article L. 277 du code des procédures fiscales, le contribuable qui contestait le bien-fondé ou le montant des impositions mises à sa charge pouvait bénéficier d'un sursis à paiement s'il avait constitué des garanties propres à assurer le recouvrement de la créance du Trésor ; que cependant, il était établi en droit que ce sursis à paiement n'avait pas pour effet de conférer au recours devant le tribunal administratif un effet suspensif quant au paiement des cotisations URSSAF ; que dès lors la demande de sursis à statuer était rejetée (v. jugement entrepris, p. 2, alinéas 1 et 2, et p. 3, in limine) ;
ALORS QUE le sursis à statuer tend à satisfaire un souci de bonne administration de la justice ; qu'en refusant de surseoir à statuer au motif juridiquement inopérant que le sursis à paiement de l'article L. 277 du code des procédures fiscales n'avait pas pour effet de conférer au recours devant le tribunal administratif un effet suspensif au paiement des cotisations URSSAF, quand non seulement le cotisant avait formulé non une demande de sursis à paiement des cotisations sociales mais une demande de sursis à statuer, et en outre il existait un lien de dépendance entre l'assiette des impositions fiscales et celle des cotisations sociales, qui commandait le sursis à statuer dans l'attente de la décision administrative portant sur l'assiette des revenus professionnels, la cour d'appel violé l'article 378 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la demande de révision des salaires effectivement perçus par la gérante minoritaire (Mme X...) d'une société (la SARL JPM PLASTIQUES, l'exposante) et, partant, d'avoir écarté sa demande de réduction des charges sociales afférentes auxdits revenus ;
AUX MOTIFS propres et adoptés QUE, ainsi qu'il avait été rappelé, aucune comptabilité relative aux années 2000, 2001 et 2002 n'avait pu être présentée lors de la visite de l'inspecteur de l'URSSAF le 25 mars 2003 ; que les redressements contestés n'avaient pas seulement porté sur les salaires de Mme X... mais également sur ceux de Christophe et Paul X... ; que l'inspecteur de l'URSSAF avait calculé les cotisations relatives aux années 2004-2005 en fonction des salaires comptabilisés par le service comptable dans les grands livres de la SARL JPM PLASTIQUES ; que seul le redressement relatif aux versements de sommes sur le compte courant de la gérante de la société était contesté ; qu'ainsi que l'avait justement relevé le tribunal des affaires de sécurité sociale, la société n'avait pas jugé utile de saisir la commission de recours amiable pour contester le montant du redressement de l'URSSAF ; qu'à ce jour, elle se contentait de contester l'affectation de sommes sur le compte courant de Mme X..., telle que réalisée par un expert-comptable qu'elle avait choisi à la suite de la procédure fiscale ; qu'elle ne présentait cependant aucune comptabilité certifiée ; qu'il convenait en conséquence de confirmer la décision entreprise (v. arrêt attaqué, p. 4, 2ème à 4ème attendus) ; qu'en l'espèce, les chiffres contestés par Mme X... reprenaient les montants inscrits par l'expert-comptable dans le bilan de la société, et le directeur des services fiscaux de l'Isère avait rejeté la réclamation des époux X... par décision du 31 octobre 2006 ; que le rapport de l'administrateur judiciaire du 17 janvier 2006 produit aux débats précisait que la comptabilité n'avait pas été correctement tenue pendant plusieurs années et que la confusion était telle que l'expert-comptable, choisi par Mme X... dans le prolongement d'un contrôle fiscal avait été contraint, en l'absence de justificatifs comptables, d'affecter des mouvements de fonds comme des rémunérations pour la gérante ; que la société JPM n'avait pas jugé utile de saisir la commission de recours amiable pour contester le montant du redressement de l'URSSAF ; que, dans ces conditions, il convenait de débouter Mme X... de sa demande et de valider la contrainte litigieuse à hauteur de 270.525 € (v. jugement entrepris, p. 3, alinéas 1 à 4) ;
ALORS QUE, d'une part, le recours préalable à la commission de recours amiable n'est pas obligatoire lorsque le cotisant forme opposition à contrainte ; qu'en refusant cependant de diminuer le montant des redressements URSSAF au vu du classeur de reconstitution des salaires de la gérante, au prétexte que la société n'avait pas jugé utile de saisir la commission de recours amiable pour contester le montant des redressements litigieux, la cour d'appel a violé les articles R. 133-3 et R. 142-1 du code de la sécurité sociale ;
ALORS QUE, d'autre part, dans le cadre d'une opposition à contrainte, les juges doivent analyser les pièces et explications présentées par le cotisant ; qu'en refusant d'examiner le classeur de reconstitution produit par la cotisante pour la raison qu'elle se contentait de contester l'affectation de sommes sur le compte courant de sa gérante, telle que réalisée par un expert-comptable qu'elle avait choisi à la suite de la procédure fiscale, et ne présentait aucune comptabilité certifiée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1353 du code civil ;
ALORS QUE, enfin, le juge doit préciser le fondement juridique de sa décision afin de permettre au juge de cassation d'exercer son contrôle ; qu'en érigeant en postulat, pour écarter la contestation liée à l'affectation des certaines sommes sur le compte courant de sa gérante, que la cotisante devait présenter une comptabilité certifiée, sans préciser le fondement juridique de sa décision, quand la certification comptable d'une SARL est exigée de plein droit seulement lorsque l'entreprise atteint des seuils légalement déterminés, la cour d'appel a violé l'article 12 du code de procédure civile.