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15/02/2012 | FRANCE | N°10-21330

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 15 février 2012, 10-21330


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Pau, 10 mai 2010), que la Caisse d'épargne des pays de l'Adour (la CEPA), aux droits de laquelle se trouve la Caisse d'épargne Aquitaine Poitou-Charentes (la CEAPC), a signé le 2 septembre 1991 avec plusieurs organisations syndicales un protocole d'accord portant sur le volet social prévoyant l'institution à compter du 1er janvier 1992 d'un contrat groupe mutuelle dont les cotisations seront financées par l'employeur à hauteur de 70 % ; que les mêmes

parties ont signé le 2 décembre 1994 un avenant à cet accord d'une dur...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Pau, 10 mai 2010), que la Caisse d'épargne des pays de l'Adour (la CEPA), aux droits de laquelle se trouve la Caisse d'épargne Aquitaine Poitou-Charentes (la CEAPC), a signé le 2 septembre 1991 avec plusieurs organisations syndicales un protocole d'accord portant sur le volet social prévoyant l'institution à compter du 1er janvier 1992 d'un contrat groupe mutuelle dont les cotisations seront financées par l'employeur à hauteur de 70 % ; que les mêmes parties ont signé le 2 décembre 1994 un avenant à cet accord d'une durée de trois années redéfinissant les modalités de participation financière de l'employeur mettant notamment à sa charge la moitié des cotisations dues par les salariés au titre de la mutuelle ; que réformant le dispositif de protection sociale, la Caisse nationale des caisses d'épargne, ramenant la participation de l'employeur à 50 % des cotisations de prévoyance, a signé le 24 novembre 2005 plusieurs accords nationaux en invitant les partenaires sociaux à adapter à ceux-ci avant le 1er juillet 2007 les dispositifs conventionnels locaux ; que le 30 août 2005, le syndicat du personnel des banques CGT Pays Basque, Landes, Béarn (le syndicat CGT) a adhéré notamment à l'avenant du 2 décembre 1994 ; que prétendant avoir dénoncé auprès de l'ensemble de ses signataires cet avenant par lettre du 30 mars 2006, la CEPA a réduit, à compter du 1er juillet 1997, la part patronale pour les cotisations afférentes à la mutuelle à 50 %; que le syndicat CGT, soutenant n'avoir pas régulièrement reçu la dénonciation de cet avenant, a saisi la juridiction civile d'une demande en annulation de celle-ci et en condamnation de la CEAPC à appliquer ledit avenant à compter du 1er juillet 2007 et à lui payer une somme à titre de dommages-intérêts ;
Attendu que la CEAPC fait grief à l'arrêt de confirmer le jugement en ce qu'il a constaté la nullité de la dénonciation de l'avenant du 2 décembre 1994, de la condamner à rétablir les salariés dans leur situation antérieure, à compter du mois de juillet 2007, et à payer au syndicat CGT une somme à titre de dommages-intérêts, alors, selon le moyen :
1°/ qu'il appartient au juge d'examiner l'ensemble des preuves versées aux débats ; qu'en énonçant qu'il n'était pas démontré que la dénonciation de l'avenant du 2 décembre 1994 avait été effectivement déposée à l'attention de son destinataire, M. X..., sans même examiner l'attestation de Mme Y... établie le 9 novembre 2007 par laquelle elle avait déclaré avoir déposé ce courrier dans une chemise sur laquelle était libellé le nom de M. X..., la cour a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1353 du code civil ;
2°/ que la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs ; qu'en relevant, d'une part, qu'il n'était pas établi que la dénonciation ait touché son destinataire quand elle constatait, d'autre part, qu'elle avait adressé à M. X... une lettre recommandée en date 21 juin 2006, réceptionnée par M. X..., le 22 juin suivant, la cour d'appel s'est prononcée par des motifs contradictoires, et a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ que la lettre recommandée informant de la dénonciation d'un accord collectif et son annexe constituent un tout indivisible ; qu'en considérant que la lettre recommandée du 21 juin 2006 ne constituait pas une dénonciation régulière au motif que la transmission d'une copie d'une dénonciation irrégulière n'était pas de nature à rendre régulière ladite dénonciation, la cour d'appel a violé l'article L. 2261-9 du code du travail ;
Mais attendu qu'ayant retenu que la dénonciation de l'avenant du 2 décembre 1994, arrivé à échéance en 1997, reconduit pour une durée de trois années et volontairement appliqué par la suite entre les parties, suivait les règles en matière d'accord à durée indéterminée, la cour d'appel, qui a constaté que n'était pas établie la remise effective au délégué du syndicat CGT de la lettre du 30 mars 2006 de dénonciation de cet avenant et que c'était seulement une copie de cette lettre, et non une nouvelle dénonciation en original, qu'il avait reçue par la lettre du 21 juin 2006 qui y faisait référence, a, par une décision motivée, jugé à bon droit que la CEPA n'avait pas valablement dénoncé avant le 1er juillet 2007 ledit avenant ; que le moyen, inopérant en sa première branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la Caisse d'épargne Aquitaine Poitou-Charentes aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la Caisse d'épargne Aquitaine Poitou-Charentes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quinze février deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Peignot, Garreau et Bauer-Violas, avocat aux Conseils pour la Caisse d'épargne Aquitaine Poitou-Charentes
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement entrepris en ce qu'il avait constaté la nullité de la dénonciation de l'avenant du 2 décembre 1994 portant révision du volet social de protocole d'accord du 2 septembre 1991 et en ce qu'il avait condamné la Caisse d'Epargne Aquitaine Poitou-Charentes (Ceapc) à rétablir les salarié, dont le salaire avait été indûment amputé, dans leur situation antérieure, à compter du mois de juillet, en leur remboursant les sommes indûment prélevées, au besoin jusqu'au mois de mars 2009, et y ajoutant, d'avoir condamné la Ceapc à payer au syndicat du Personnel des Banques Cgt Pays Basque Landes Béarn la somme de 3 000 € à titre de dommages et intérêts ;
AUX MOTIFS QUE «dans son arrêt du 15 juin 2009 la Cour a relevé que l'avenant du 2 décembre 1994 ne comporte aucune stipulation relative aux modalités de dénonciation et a rappelé que, dès lors, s'agissant d'un accord à durée déterminée, il convient de faire application des dispositions légales, et notamment des articles L. 2222-4 et L. 2222-6 (anciens L. 132-6 et L. 132-8) du Code du travail qui, à défaut de stipulations conventionnelles expresses, n'imposent pas la forme que doit prendre la dénonciation, de sorte que celle-ci peut être adressée en recommandé avec avis de réception, ou remise en mains propres contre décharge, ou encore adressée sous une autre forme qui permettra de s'assurer qu'elle a touché son destinataire ; que constatant que la lettre de dénonciation du 30 mars 2006 à l'adresse de «Monsieur Bernard X..., délégué syndical SPB-CGT caisse d'épargne des pays de l'Adour à Dax», produite aux débats par l'employeur, comporte la mention « lettre recommandée remise en main propre contre décharge», mais ne comporte aucune mention manuscrite de son destinataire valant décharge, et que le courriel de Monsieur Nicolas Z... du 3 juillet 2006, ainsi que le courrier de Madame Valérie Y... du 9 novembre 2007 ne permettaient pas de déterminer si Monsieur Bernard X... avait effectivement reçu ce courrier de dénonciation du 30 mars 2006, une mesure d'instruction a été ordonnée aux fins de procéder à l'audition de ces trois personnes ; qu'il ressort de la mesure d'instruction que : le 30 mars 2006, Monsieur Nicolas Z... a remis à Madame Valérie Y... un courrier destiné à Monsieur Bernard X..., la nature et le contenu de ce courrier n'ont pas été précisés à Madame Valérie Y..., qui l'ignorait donc, Monsieur Nicolas Z... n'a pas dit à Madame Valérie Y... de remettre ce courrier en main propre à Monsieur X..., ledit courrier a été déposé dans les conditions habituelles en un lieu où le courrier destiné à Monsieur X... était soit récupéré pour lui être remis lors de son passage, soit récupéré par Monsieur X... lui-même ; que la bonne foi étant toujours présumée, en présence d'allégations ou de déclarations contraires, seules la convergence des déclarations de plusieurs témoins ou l'existence d'éléments matériels venant conforter une déclaration sont susceptibles de donner à l'une de ces déclarations une force probante supérieure à l'autre ; qu'en l'espèce, il résulte de la mesure d'instruction que :- seul Monsieur Nicolas Z... déclare que le courrier destiné à Monsieur X..., remis le 30 mars 2006 à Madame Valérie Y..., était la dénonciation de l'avenant du 2 décembre 1994, Madame Valérie Y... ignorait la nature et le contenu de ce courrier, en outre, aucun élément ne permet d'affirmer que Monsieur X... a effectivement reçu en main propre ledit courrier ; que le fait que Monsieur X... et Madame Valérie Y... déclarent n'avoir pas connaissance de ce que le courrier qui lui était destiné aurait été récupéré par une autre personne que lui-même n'est pas de nature à exclure la possibilité qu'une autre personne que lui-même ait pris possession d'un courrier qui lui était destiné ; qu'en tout état de cause, en l'espèce, Madame Valérie Y... n'a pu dire si elle avait personnellement remis ledit courrier à Monsieur X..., ou non ; qu'enfin, à supposer même que Monsieur X... ait récupéré lui-même ledit courrier, ce qui en l'espèce n'est pas démontrée, cela ne suffirait pas à démontrer que le contenu de ce courrier était la dénonciation litigieuse ; que par conséquent, il y a lieu de constater qu'il n'est pas démontré d'une part que la dénonciation de l'avenant du 2 décembre 1994 a été effectivement déposée à l'attention de son destinataire, Monsieur Bernard X..., et d'autre part que le courrier supposé constituer cette dénonciation a été effectivement récupéré par son destinataire, Monsieur Bernard X..., de sorte qu'il n'est pas établi que la dénonciation a touché son destinataire ; que la CEAPC prétend avoir régularisé la dénonciation de l'avenant du décembre 1994 en adressant à Monsieur Bernard X... une lettre recomman1ée du 21 juin 2006 dont il a accusé réception le 22 juin 2006 ; que ce courrier du 21 juin 2006 est ainsi rédigé : « faisant suite à votre courrier du 19 juin dernier je vous prie de bien vouloir trouver, ci-joint, copie du courrier de dénonciation de l'avenant du 2 décembre 1994 qui vous a été adressé en son temps. Nous vous en souhaitons bonne réception (...) » ; que la copie jointe à ce courrier est la copie du courrier litigieux du 30 mais 2006 ; que la dénonciation de l'avenant du 2 décembre 1994 est donc ce courrier du 30 mars 2006, et non le courrier de transmission du 21 juin 2006 ; que la transmission d'une copie d'une dénonciation irrégulière, pour n'avoir pas été faite à son destinataire, n'est pas de nature à rendre régulière ladite dénonciation ; que par conséquent, au vu de l'ensemble de ces éléments, il y a lieu de prononcer la nullité de la dénonciation de l'avenant du 2 décembre 1994 portant révision du volet social du protocole d'accord du 2 septembre 1991, de sorte que la CEAPC sera condamnée à rétablir les salariés, dont le salaire a été indûment amputé, dans leur situation antérieure, et ce à compter du mois de juillet 2007, en leur remboursant les sommes indûment prélevées, au besoin jusqu'au mois de mars 2009 ; que l'irrégularité de la dénonciation d'un avenant à un accord collectif cause nécessairement un préjudice à l'intérêt collectif de la profession et à ses membres qui justifie la condamnation de la CEAPC à payer au syndicat CGT la somme de 3 000 € à titre de dommages et intérêts» ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QU' «aux termes de l'article L.132-8 du Code du Travail, l'accord collectif à durée indéterminée prévoit les conditions dans lesquelles il peut être dénoncé par les parties, étant précisé que la dénonciation doit être notifiée par son auteur aux autres signataires de la convention et doit donner lieu à dépôt conformément à l'article L. 132-10 du Code du travail ; qu'en l'espèce le protocole d'accord portant sur le volet social de la CEPA en date du 2 septembre 1991 prévoit au chapitre des dispositions d'application que la dénonciation de l'accord peut intervenir à la demande de l'une des parties au moyen de l'envoi d'une lettre recommandée avec accusé de réception ; que l'avenant du 2 décembre 1994 prévoit en son article 1er que la présente modification porte sur les paragraphes 1) du chapitre 6 et 5), du chapitre 7 du protocole d'accord du 2 septembre 1991 ; qu'ainsi la modification apportée par l'avenant ne concernait pas les modalités de dénonciation de l'accord initial et insérées au chapitre intitulé «dispositions d'application» ; qu'il appartenait dès lors à l'entreprise de notifier la dénonciation aux signataires selon l'envoi d'une lettre recommandée avec accusé de réception ; qu'en l'espèce la CEPA prétend avoir adressé au demandeur la lettre de dénonciation du 30 mars 2006 selon une remise en main propre, au moyen de la navette interne à l'entreprise, mais ne produit aucun accusé de réception de son envoi ; qu'au surplus la CEPA ne justifie d'aucun document signé du syndicat signataire, et attestant de la réception de la lettre par son destinataire ; qu'enfin, l'information du comité d'entreprise par l'employeur de sa décision de dénoncer un accord collectif ne constitue pas la dénonciation régulière prévue par l'article L. 132-8 du Code du travail ; qu'à défaut pour la CEPA de rapporter la preuve de l'accomplissement des formalités prescrites, il convient de considérer que la dénonciation des accords litigieux n'est donc pas régulière et doit être annulée ; qu'en conséquence, eu égard au délai de préavis de trois mois mis en place par l'entreprise, il convient d'ordonner la remise en état des salariés dans la situation antérieure au 1er juillet 2007 et le remboursement des sommes indûment prélevées sur les salaires de juillet 2007» ;
ALORS D'UNE PART QU'il appartient au juge d'examiner l'ensemble des preuves versées aux débats ; qu'en énonçant qu'il n'était pas démontré que la dénonciation de l'avenant du 2 décembre 1994 avait été effectivement déposée à l'attention de son destinataire, Monsieur Bernard X..., sans même examiner l'attestation de Madame Y... établie le 9novembre 2007 par laquelle elle avait déclaré avoir déposé ce courrier dans une chemise sur laquelle était libellé le nom de Monsieur X..., la Cour a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1353 du Code civil ;
ALORS D'AUTRE PART QUE la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs ; qu'en relevant, d'une part, qu'il n'était pas établi que la dénonciation ait touché son destinataire quand elle constatait, d'autre part, que la Ceapc avait adressé à Monsieur X... une lettre recommandée en date 21 juin 2006, réceptionnée par Monsieur X..., le 22 juin suivant, la Cour d'appel s'est prononcée par des motifs contradictoires, et a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
ALORS ENFIN QUE la lettre recommandée informant de la dénonciation d'un accord collectif et son annexe constituent un tout indivisible ; qu'en considérant que la lettre recommandée du 21 juin 2006 ne constituait pas une dénonciation régulière au motif que la transmission d'une copie d'une dénonciation irrégulière n'était pas de nature à rendre régulière ladite dénonciation, la Cour d'appel a violé les articles L. 2261-9 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-21330
Date de la décision : 15/02/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Pau, 10 mai 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 15 fév. 2012, pourvoi n°10-21330


Composition du Tribunal
Président : M. Blatman (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Peignot, Garreau et Bauer-Violas

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:10.21330
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