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15/02/2012 | FRANCE | N°10-20707

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 15 février 2012, 10-20707


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le second moyen :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 19 mai 2010), que M. X... a été engagé à compter du mois d'avril 1991 par la société Institut de sondage Lavialle, en dernier lieu en qualité d'enquêteur mensualisé ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale le 11 décembre 2007 pour revendiquer la qualité d'inspecteur ainsi que le statut de cadre et obtenir la résiliation de son contrat de travail aux torts de l'employeur ainsi que la condamnation de ce dernier à lui payer diverses sommes ;


Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de ses de...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le second moyen :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 19 mai 2010), que M. X... a été engagé à compter du mois d'avril 1991 par la société Institut de sondage Lavialle, en dernier lieu en qualité d'enquêteur mensualisé ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale le 11 décembre 2007 pour revendiquer la qualité d'inspecteur ainsi que le statut de cadre et obtenir la résiliation de son contrat de travail aux torts de l'employeur ainsi que la condamnation de ce dernier à lui payer diverses sommes ;
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes, alors, selon le moyen :
1°/ que toute modification des attributions d'un salarié ayant pour conséquence une diminution significative de sa rémunération constitue une modification de son contrat de travail ; qu'en l'espèce, pour solliciter l'octroi d'un rappel de salaire et obtenir la résiliation judiciaire de son contrat de travail, M. X... faisait valoir que l'employeur avait cessé, à partir de mai 2007, de lui confier toute tâche d'encadrement pour le cantonner à la réalisation d'enquêtes moins bien rémunérées, ce qui avait eu pour conséquence une diminution de sa rémunération ; que la cour d'appel a elle-même constaté la diminution de la rémunération du salarié à compter de juin 2007 et la modification, à la même époque, de ses attributions ; qu'en écartant les demandes du salarié, sans rechercher si la baisse de sa rémunération n'était pas due au fait que l'employeur avait unilatéralement décidé de ne plus lui confier de tâches d'encadrement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil ;
2°/ que les juges du fond ne peuvent pas méconnaître les termes du litige tels qu'ils sont fixés par les prétentions respectives des parties ; qu'en l'espèce, pour justifier sa demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail et solliciter un rappel de salaire, M. X... faisait valoir que son employeur avait minoré dans les contrats d'enquête la durée moyenne prévisionnelle nécessaire à chaque questionnaire afin de réduire la rémunération due au salarié ; qu'ainsi, il ne remettait pas en cause le système mis en place par la convention collective, qui prévoit à son article 32 et son annexe 3 une rémunération minimale des enquêteurs en fonction de la durée moyenne d'interview, mais reprochait au contraire à l'employeur d'avoir indûment limité ses droits au regard d'un tel système en indiquant une durée moyenne irréaliste ; qu'en affirmant que M. X... visait, sans fournir d'éléments suffisants, à remettre en cause le système conventionnel de rémunération permettant d'évaluer de manière uniforme le temps de travail des salariés, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile ;
3°/ que si la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties, il appartient à l'employeur de fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié dès lors que dernier a fourni préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande ; qu'en l'espèce, pour établir que la durée moyenne prise en compte par l'employeur pour chaque enquête était sans commune mesure avec le temps réellement nécessaire, le salarié versait aux débats un constat d'huissier ainsi que de nombreux relevés du temps qu'il devait effectivement passer pour la réalisation de chaque enquête (pièces d'appel n° 11 bis, 16, 17 et 19) ; que c'était là des éléments de nature à étayer ses demandes fondées sur le fait que le temps prévisionnel pris en compte par l'employeur pour déterminer son temps de travail, et partant sa rémunération, était totalement irréaliste ; qu'il appartenait dès lors à l'employeur de justifier des modalités de computation du temps de travail du salarié ; qu'en écartant la demande du salarié au prétexte que la cour ne disposait pas d'éléments suffisants, la cour d'appel a fait peser sur le salarié la charge d'une preuve qui ne lui incombait pas et a violé l'article L. 3171-4 du code du travail ;
4°/ qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au juge de former sa conviction au regard des éléments apportés par les parties, après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ; qu'en se contentant en l'espèce d'affirmer que la cour ne dispose pas d'éléments suffisants lui permettant d'apprécier les critiques adressées par M. X... au système de rémunération, la cour d'appel a méconnu son office et violé l'article L. 3171-4 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui n'a pas méconnu les termes du litige et qui a constaté que le salarié avait refusé de participer à certaines enquêtes alors que la rémunération de celles-ci, d'une part, était prévue par la convention collective, d'autre part, résultait de négociations au sein de l'entreprise, a légalement justifié sa décision ; que le moyen, inopérant en ses deux dernières branches, n'est pas fondé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur le premier moyen qui n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quinze février deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

.
Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour M. X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR confirmé le jugement du Conseil de Prud'hommes de Boulogne Billancourt du 14 octobre 2008 qui avait débouté Monsieur X... de l'intégralité de ses demandes ;
AUX MOTIFS QUE « M. X... sollicite la requalification de son statut d'enquêteur non-cadre, échelon 1. 3. 2 coefficient Etam 230, en statut d'inspecteur cadre, coefficient 150 niveau 2-3.- le contrat de travail de M. X... énonce qu'il est engagé en qualité de " chargé d'enquêtes à compter du 1er avril 2003 " et se réfère à la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils ainsi qu'au règlement intérieur applicable au personnel chargé d'enquêtes ". Son ancienneté est reprise à compter du 1er janvier 1994. Il n'a pas la qualification de cadre. Le contrat précise " Les travaux divers autres que des travaux d'enquête sur le terrain feront l'objet d'un règlement sur une base journalière. ISL s'engage à vous confier mensuellement un nombre d'enquêtes ou de travaux, suffisant pour vous permettre de percevoir la rémunération minimum brute résultant du produit du coefficient 230, par la valeur du point Etam actuellement fixée à 1188 euros-la convention collective :- les fonctions d'enquêteur non-cadre (contractuellement confiées à M. X...) sont ainsi définies par la convention collective : fonctions à dominante d'exécution (réaliser dans le détail des fonctions programmées avec possibilité de choix par l'intéressé entre plusieurs modes opératoires), d'études ou de préparation (mise en oeuvre d'un programme de travail, choix d'une méthode), de conception ou de gestion élargie (l'agent procède du général au particulier par déduction, prise en charge de problèmes complets de caractère classique pour la technique considérée). Le statut d'inspecteur cadre, coefficient 150 niveau 2-3 revendiqué par M. X... est ainsi défini par la convention collective : " ingénieurs ou cadre ayant au moins 6 années de pratique en cette qualité et étant en pleine possession de leur métier ; partant des directives données par leur supérieur, ils doivent avoir à prendre des initiatives et assumer des responsabilités pour diriger les employés, techniciens ou ingénieurs travaillant à la même tâche. " Le " manuel de l'enquêteur province " précise que " les inspecteurs ont une fonction transversale et ne sont pas affectés à une région. Leur rôle consiste à former de nouveaux enquêteurs, à rédiger des instructions d'étude, à animer le cas échéant les briefings enquêteurs si l'étude le nécessite et à faire les contrôles de qualité du travail des enquêteurs ". Les inspecteurs définissent les tests et valident les questionnaires, rédigent les instructions écrites des enquêtes, définissent les contenus des briefings enquêteurs ; les inspecteurs définissent et mettent en place les procédures de contrôle, sur le terrain ; enfin ils font des actions de formation dont ils définissent les programmes, mettant en oeuvre les formations théoriques et pratiques. Ils ont un pouvoir d'initiative et une responsabilité corrélative dans le processus de sondage. Selon la convention collective " le classement professionnel est en tout état de cause déterminé par les fonctions réellement exercées par le salarié " (article 3 du préambule)- statut de M. X... : il résulte clairement des pièces 3, 6, 7 et 8 de la société I. S. L. et il n'est pas contestée par celle-ci, que depuis plusieurs années entre 2000 et avril 2007, des tâches de formation et d'accompagnement d'enquêteurs sur le terrain, ainsi que, ponctuellement, des contrôles sur le terrain ont été confiés à M. X... comme d'ailleurs à d'autres enquêteurs. La société I. S. L. reconnaît que ces tâches occupaient 86 des fonctions du salarié en 2005, 72 en 2006, 78 entre janvier et avril 2007. Les travaux d'accompagnement de contrôle de supervision se rattachant également aux fonctions de cadre représentaient 8 en 2005, 28 en 2006, 22 de janvier à avril 2007, des fonctions de M. X.... M. X... verse aux débats trois attestations rédigées au demeurant en termes identiques, dont il résulte qu'il assurait des tâches de formations initiales, des accompagnements, des tâches de contrôle terrain ou téléphoniques, quelques " briefings ". Il résulte également des attestations produites par la société I. S. L. (pièces 28 et 29) que plusieurs autres enquêteurs ou agents de maîtrise se sont vu confier des tâches relevant des missions confiées habituellement aux inspecteurs, cadres. Or selon la définition conventionnelle du poste d'inspecteur, ainsi que le fait à juste titre observer la société I. S. L., les tâches de l'inspecteur ne se ramènent pas aux tâches qu'effectuait M. X... ; elles comprennent un pouvoir d'initiative et une responsabilité puisque les inspecteurs déterminent les instructions de l'enquête, définissent et mettent en oeuvre les briefings, choisissent les personnes à former, définissent le contenu des formations, décident des contrôles à effectuer, définissent les points sur lesquels portera le contrôle. Toutes tâches que M. X... n'a pas exécutées et dont il ne justifie pas. M. X... ne décidait pas du programme de formation ni des individus qui allaient y être soumis. Il n'exerçait aucun pouvoir hiérarchique sur ceux qu'il formait. Ses tâches en matière de formation restaient essentiellement des tâches d'exécution. Au demeurant la convention collective n'attache pas la qualité de cadre au simple fait d'être formateur. Il en va de même des séances de " briefing " effectuées à partir d'un programme établi avec le directeur terrain. Si les attestations affirment le contraire, M. X... n'apporte pas des éléments de fait, de terrain, permettant d'établir ce rôle d'impulsion attaché au statut de cadre. M. X... invoque son niveau de rémunération, mais celle-ci résulte d'un système très particulier, réglementé avec précision par la convention collective ; elle est en effet variable par nature et dépend de l'attribution de missions de formation. Or précisément dans le cadre d'accords collectifs d'entreprise, des rémunérations de pilotage, contrôle, accompagnement, encadrement formation et briefing " ont été prévues pour les enquêteurs Paris et Province et donc, pour des salariés n'ayant pas la qualité de cadre. (courriers de M. X... du 5 juin et du 15 novembre 2007 pièces 8 et 3). Ces fonctions étaient donc rémunérées de manière spécifique lorsqu'elles n'étaient pas exercées par un cadre ; cette situation était donc prévue, et réglementée. Il résulte par ailleurs des Pièces produites par les deux parties que la rémunération de M. X... ait atteint celle d'un inspecteur-rémunération également variable d'ailleurs-entre 2000 et avril 2007. Les pièces 17 à 19 produites par le salarié établissent au contraire qu'elle lui était inférieure, même si certains mois, elle pouvait se rapprocher de la rémunération de quelques inspecteurs, comme en 2006. Il convient d'ajouter que la rémunération de certains enquêteurs, exclusivement chargés d'enquêtes, était supérieure à celle de M. X.... Dans son courrier du 30 septembre 2007, M. X... sollicite avec vigueur le " respect du barème des salariés enquêteurs ". Et déjà dans son courrier du 17 mai 2007 il écrivait " et l'enquêteur que je suis n'a pas envie d'être obligé de travailler 9 à heures par jour, 6 a 7 jours par semaine pour atteindre son contrat de 1553 € bruts par mois ". M. X... se considère donc bien comme un enquêteur et non comme un inspecteur dont il ne revendique pas le statut dans ces courriers. Au demeurant, des fonctions d'inspecteur lui ont été proposées en 2005 ce qui montre bien qu'elles se distinguaient dans l'esprit de tous et particulièrement dans celui de M. X... qui les a refusées, des fonctions d'enquêteur. Dès lors, M. X... ne peut tenter d'obtenir le bénéfice d'un statut qu'il a refusé, en n'en remplissant que partiellement les conditions. M. X... n'apporte pas d'élément attaché à sa fonction, permettant d'établir, ou même de laisser supposer, qu'il assurait ce pouvoir organisationnel et décisionnel qui caractérise la fonction de l'inspecteur et justifie l'attribution de la qualité de cadre coefficient 150. Ses tâches de formation restaient des tâches d'exécution, en lien avec les tâches qui caractérisent le statut d'enquêteur ; il ne justifie pas avoir conçu et organisé lui-même ces formations. Les " tâches d'encadrement terrain " (pièce 3 de M. X...) qui lui ont été confiées ne représentent qu'une partie des tâches réservées au personnel d'encadrement, une partie que les accords collectifs n'attachent pas à la qualification de " cadre " puisqu'ils prévoient leur exercice par des non cadres ; en sorte que le seul exercice de ces tâches, alors même que M. X... continuait à effectuer des enquêtes, ne lui permet pas de prétendre à la qualification de cadre coefficient 150, salariés qui " doivent avoir à prendre des initiatives et assumer des responsabilités pour diriger les employés techniciens ou ingénieurs travaillant à la même tâche 150 " (annexe des ingénieurs et cadres). Sa demande relative à la requalification de son statut sera donc rejetée » ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QU'« il résulte de l'article 1315 du Code civil que celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver ; or dans le cas d'espèce Monsieur X... ne prouve pas qu'il était inspecteur ; en effet, il ressort des nombreuses pièces du dossier que l'activité de Monsieur X... conforme aux dispositions très spécifiques de la convention collective était celle d'un enquêteur ; la société apporte la preuve que compte tenu de l'expertise de Monsieur X... elle lui a donné des tâches annexes et ponctuelles à effectuer sans pour autant faire de Monsieur X... un inspecteur ; la société apporte la preuve que Monsieur X... a refusé le poste d'inspecteur, car il ne souhaitait pas être basé à Paris ; dans ces conditions, le conseil ne peut pas prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail de Monsieur X... ; monsieur X... ne prouve pas qu'il agissait comme un cadre. La société communique de nombreuses pièces pour montrer l'absence de responsabilité hiérarchique de Monsieur X.... Elle démontre que les tâches de Monsieur X... à l'appui de la convention collective applicable n'étaient pas celles d'un cadre ; il ressort des pièces du débat que Monsieur X... recherche une modification de son statut. Alors que celui-ci est prévu par la convention collective et qu'il a signé un contrat de travail très précis également quant à son statut ; dans ces conditions Monsieur X... sera débouté de l'ensemble de ses demandes » ;
1) ALORS QUE les juges du fond sont tenus de motiver leur décision et à ce titre de préciser l'origine de leurs renseignements ; qu'en affirmant en l'espèce que les inspecteurs terrain définissent les tests, les contenus des briefings enquêteurs, les procédures de contrôle sur le terrain, et les programmes des actions de formation, sans dire d'où elle tirait ces éléments, quand il ne ressortait ni de la fiche de poste inspecteur terrain versée aux débats par l'employeur (production n° 22), ni de la définition du cadre de niveau 2. 3 coefficient 150 telle que visée par la classification des ingénieurs et cadres de la Convention collective Syntec, que les fonctions inspecteur terrain incluaient celles ainsi retenues, la Cour d'appel violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
2) ALORS QUE la qualification professionnelle d'un salarié est fonction des tâches qui lui sont réellement confiées ; qu'en l'espèce, il résultait de la fiche de poste d'inspecteur terrain qu'il a pour « missions principales » de « recruter et former les enquêteurs, assurer le lancement et le suivi du terrain d'étude, contrôler la qualité du travail des enquêteurs » et de la classification de la convention collective Syntec que le cadre coefficient 150 est celui qui partant des directives données par son supérieur, doit avoir à prendre des initiatives et assumer des responsabilités pour diriger les employés, techniciens ou ingénieurs travaillant à la même tâche ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a elle-même constaté que le salarié réalisait des tâches « de formation et d'accompagnement d'enquêteurs sur le terrain » ainsi que des « contrôles sur le terrain », l'employeur reconnaissant que ces tâches occupaient 86 % des fonctions du salarié en 2005, 72 % en 2006, 78 % entre janvier et avril 2007 ; que la Cour d'appel a encore constaté que « les travaux d'accompagnement de contrôle de supervision se rattachant également aux fonctions de cadre représentaient 8 % en 2005, 28 % en 2006, 22 % de janvier à avril 2007 des fonctions de Monsieur X... » ; que la Cour d'appel a donc elle-même constaté que Monsieur X... exerçait effectivement et principalement, à partir des directives de son employeur, des fonctions de formation, d'accompagnement et de contrôle, relevant de la qualification d'inspecteur terrain, qui supposaient initiatives et responsabilités, et correspondaient comme telles à la qualification de cadre coefficient 150 ; qu'en refusant néanmoins d'accorder cette qualification au salarié, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé la classification des ingénieurs et cadres de la convention collective Syntec ;
3) ALORS QUE la contradiction de motif équivaut à une absence de motifs ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel s'est contredite en relevant d'une part que Monsieur X... avait accompli des travaux « se rattachant aux fonctions de cadre », et ce, pour une part majoritaire de son temps entre 2005 et 2007 au moins, tout en affirmant par ailleurs qu'il réalisait des « tâches d'exécution » sans « rôle d'impulsion » ni « pouvoir organisationnel et décisionnel qui caractérise la fonction d'inspecteur et justifie l'attribution de la qualité de cadre coefficient 150 » ; qu'en effet si Monsieur X... réalisait des travaux se rattachant aux fonctions de cadre, c'est bien qu'il faisait preuve de l'initiative ou de l'impulsion nécessaire à la bonne fin de ces travaux et qu'il devait dès lors être qualifié de cadre ; que réciproquement, si Monsieur X... n'avait pas fait preuve d'autonomie, il n'aurait pas pu réaliser des travaux relevant de la catégorie cadre ; qu'en statuant dès lors par des motifs contradictoires, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
4) ALORS QUE la qualification professionnelle d'un salarié est fonction des tâches qui lui sont réellement confiées ; qu'en refusant en l'espèce d'octroyer au salarié la qualification d'inspecteur terrain, cadre coefficient 150, au prétexte que des accords d'entreprises auraient prévu l'exercice et la rémunération de fonctions de « pilotage, contrôle, accompagnement, encadrement formation et briefing » d'une part, que le salarié, qui continuait à effectuer des enquêtes, s'était lui-même désigné comme enquêteur et avait refusé le poste d'inspecteur pour lequel l'employeur exigeait un déménagement en région parisienne d'autre part, que sa rémunération était enfin restée inférieure à celle d'un inspecteur terrain, quand ces circonstances n'étaient pas de nature à priver le salarié de la qualification correspondant effectivement aux fonctions qu'il exerçait réellement et principalement, la Cour d'appel a statué par motifs inopérants et a privé sa décision de base légale au regard de la classification des ingénieurs et cadres de la convention collective Syntec ;
5) ALORS QUE le salarié faisait valoir (conclusions d'appel page 7 et 8) que dans un courrier du 15 novembre 2007, Monsieur Z..., PDG de l'entreprise, reconnaissait lui-même que Monsieur X... avait pour « supérieur hiérarchique direct » le « Directeur terrain », ce qui était caractéristique d'un emploi d'inspecteur terrain, le PDG admettant encore dans le même courrier que Monsieur X... s'était vu confier des « tâches d'encadrement terrain » en raison de l'absence d'un inspecteur terrain, raison pour laquelle il lui avait été proposé de régulariser et d'officialiser sa décision en lui offrant de signer un contrat d'inspecteur sous la condition toutefois qu'il accepte de déménager à PARIS ; que le salarié soulignait encore que le 5 juin 2007, le PDG avait déjà admis l'existence d'« une période assez longue au cours de laquelle nous avons pu vous confier des tâches d'encadrement, contrôles ou accompagnements », ces affirmations confirmant de l'aveu même de l'employeur que Monsieur X... effectuait les tâches d'un inspecteur et avait les responsabilités attachées à ce poste d'encadrement ; qu'en omettant de rechercher s'il ne résultait pas de ces correspondances un aveu de l'employeur de ce que Monsieur X... s'était vu confier des fonctions d'inspecteur terrain, niveau cadre, coefficient 150, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1354 du Code civil, ensemble la classification des ingénieurs et cadres convention collective Syntec.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR confirmé le jugement du Conseil de Prud'hommes de Boulogne Billancourt du 14 octobre 2008 qui avait débouté Monsieur X... de l'intégralité de ses demandes ;
AUX MOTIFS QUE « s'agissant de la rémunération de M. X..., elle est par définition variable et il ne peut prétendre à la qualification le cadre. La consultation de l'évolution de ses salaires laisse cependant apparaître une baisse-irrégulière-de ceux-ci, à compter du mois de juin 2007. Si cette baisse de rémunération résulte du fait de l'employeur, M. X... est en droit d'invoquer une modification de son contrat de travail. Il ne résulte pas cependant des pièces produites et il n'est pas prétendu par M. X... que l'employeur ait cessé de proposer à son salarié l'exécution d'enquêtes. Au contraire. Aux termes de la convention collective (préambule), les chargés d'enquête ne peuvent refuser d'effectuer les enquêtes qui leur sont proposées. Selon l'article 4 de l'annexe " enquêteurs " à la convention collective, du 16 décembre 1991, le contrat de chargé d'enquête intermittent à garantie annuelle n'est pas exclusif d'autres activités ou d'autres engagements fussent-ils de même nature. L'intéressé doit toutefois faire en sorte que l'accomplissement de ses activités ou de ses engagements ne compromette pas la bonne exécution des enquêtes dont il est chargé et ne nuise pas à l'employeur qui les lui a confiées. " Or M. X... a refusé plusieurs enquêtes (pièces 6, 21, 24 de la société I. S. L.) estimant ne pouvoir les mener au rythme qui lui était demandé. M. X... remet ainsi en cause le système mis en place par la convention collective et les négociations intervenues au sein de l'entreprise, quant à l'appréciation du temps nécessaire à l'exécution des enquêtes. Il considère qu'il doit être payé au temps passé ce qui n'est pas le cas selon lui puisque le temps nécessaire à l'exécution des enquêtes ne correspondrait pas au temps réellement passé par lui. Il produit le constat non contradictoire établi par un huissier qui l'a suivi toute une journée pendant qu'il réalisait une enquête. Il résulte des constatations de l'huissier que le salarié ne pourrait pas, dans le temps qui lui est payé selon la convention collective, réaliser la prestation demandée. La cour ne dispose pas d'éléments suffisants lui permettant d'apprécier les critiques adressées par M. X... à ce système régulièrement négocié entre partenaires sociaux, et qui permet d'évaluer de manière uniforme-ce qui est indispensable-le temps de travail des enquêteurs qui effectuent une partie de leurs prestations à leur domicile. Le constat d'huissier produit par M. X... ne peut tenir en échec les termes de la convention collective. Par ailleurs la société établit qu'elle a même dû compléter la rémunération de M. X... qui n'effectuait pas les enquêtes qui lui étaient demandées. Il résulte suffisamment de ces éléments que la baisse de rémunération de Monsieur X... ne résulte pas d'un manquement de l'employeur à ses obligations, en sorte que la demande principale de Monsieur X... relative à la résiliation judiciaire du contrat de travail doit être rejetée » ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QU'« il résulte de l'article 1315 du Code civil que celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver ; or dans le cas d'espèce Monsieur X... ne prouve pas qu'il était inspecteur ; en effet, il ressort des nombreuses pièces du dossier que l'activité de Monsieur X... conforme aux dispositions très spécifiques de la convention collective était celle d'un enquêteur ; la société apporte la preuve que compte tenu de l'expertise de Monsieur X... elle lui a donné des tâches annexes et ponctuelles à effectuer sans pour autant faire de Monsieur X... un inspecteur ; la société apporte la preuve que Monsieur X... a refusé le poste d'inspecteur, car il ne souhaitait pas être basé à Paris ; dans ces conditions, le conseil ne peut pas prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail de Monsieur X... ; monsieur X... ne prouve pas qu'il agissait comme un cadre. La société communique de nombreuses pièces pour montrer l'absence de responsabilité hiérarchique de Monsieur X.... Elle démontre que les tâches de Monsieur X... à l'appui de la convention collective applicable n'étaient pas celles d'un cadre ; il ressort des pièces du débat que Monsieur X... recherche une modification de son statut. Alors que celui-ci est prévu par la convention collective et qu'il a signé un contrat de travail très précis également quant à son statut ; dans ces conditions Monsieur X... sera débouté de l'ensemble de ses demandes » ;
1) ALORS QUE toute modification des attributions d'un salarié ayant pour conséquence une diminution significative de sa rémunération constitue une modification de son contrat de travail ; qu'en l'espèce, pour solliciter l'octroi d'un rappel de salaire et obtenir la résiliation judiciaire de son contrat de travail, Monsieur X... faisait valoir que l'employeur avait cessé, à partir de mai 2007, de lui confier toute tâche d'encadrement pour le cantonner à la réalisation d'enquêtes moins bien rémunérées, ce qui avait eu pour conséquence une diminution de sa rémunération ; que la Cour d'appel a elle-même constaté la diminution de la rémunération du salarié à compter de juin 2007 et la modification, à la même époque, de ses attributions ; qu'en écartant les demandes du salarié, sans rechercher si la baisse de sa rémunération n'était pas due au fait que l'employeur avait unilatéralement décidé de ne plus lui confier de tâches d'encadrement, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil ;
2) ALORS par ailleurs QUE les juges du fond ne peuvent pas méconnaître les termes du litige tels qu'ils sont fixés par les prétentions respectives des parties ; qu'en l'espèce, pour justifier sa demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail et solliciter un rappel de salaire, Monsieur X... faisait valoir que son employeur avait minoré dans les contrats d'enquête la durée moyenne prévisionnelle nécessaire à chaque questionnaire afin de réduire la rémunération due au salarié ; qu'ainsi, il ne remettait pas en cause le système mis en place par la convention collective, qui prévoit à son article 32 et son annexe 3 une rémunération minimale des enquêteurs en fonction de la durée moyenne d'interview, mais reprochait au contraire à l'employeur d'avoir indûment limité ses droits au regard d'un tel système en indiquant une durée moyenne irréaliste ; qu'en affirmant que Monsieur X... visait, sans fournir d'éléments suffisants, à remettre en cause le système conventionnel de rémunération permettant d'évaluer de manière uniforme le temps de travail des salariés, la Cour d'appel a violé l'article 4 du Code de procédure civile ;
3) ALORS en tout état de cause QUE si la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties, il appartient à l'employeur de fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié dès lors que dernier a fourni préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande ; qu'en l'espèce, pour établir que la durée moyenne prise en compte par l'employeur pour chaque enquête était sans commune mesure avec le temps réellement nécessaire, le salarié versait aux débats un constat d'huissier ainsi que de nombreux relevés du temps qu'il devait effectivement passer pour la réalisation de chaque enquête (pièces d'appel n° 11 bis, 16, 17 et 19) ; que c'était là des éléments de nature à étayer ses demandes fondées sur le fait que le temps prévisionnel pris en compte par l'employeur pour déterminer son temps de travail, et partant sa rémunération, était totalement irréaliste ; qu'il appartenait dès lors à l'employeur de justifier des modalités de computation du temps de travail du salarié ; qu'en écartant la demande du salarié au prétexte que la cour ne disposait pas d'éléments suffisants, la Cour d'appel a fait peser sur le salarié la charge d'une preuve qui ne lui incombait pas et a violé l'article L. 3171-4 du Code du travail ;
4) ALORS QU'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au juge de former sa conviction au regard des éléments apportés par les parties, après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ; qu'en se contentant en l'espèce d'affirmer que la cour ne dispose pas d'éléments suffisants lui permettant d'apprécier les critiques adressées par M. X... au système de rémunération, la Cour d'appel a méconnu son office et violé l'article L. 3171-4 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-20707
Date de la décision : 15/02/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 19 mai 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 15 fév. 2012, pourvoi n°10-20707


Composition du Tribunal
Président : M. Blatman (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Fabiani et Luc-Thaler, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:10.20707
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