LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à M. X... de ce qu'il s'est désisté de son pourvoi formé contre l'arrêt du 15 juin 2010 ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 16 du code de procédure civile ;
Attendu que, par décision du 1er juillet 2009, un juge aux affaires familiales a rejeté la requête de M. X... tendant à voir ordonner la résidence alternée des deux enfants qu'il a eus avec Mme Y... ; que M. X... reproche à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé ce jugement ;
Attendu que l'arrêt énonce que, les enfants ayant été entendus, les parties ont été autorisées à déposer une note en délibéré au plus tard le 22 septembre 2010, que Mme Y... a déposé, ce jour-là, une note avec une pièce jointe et que M. X... s'en est abstenu ;
Qu'en statuant ainsi, sans constater que la note et la pièce jointe, sur lesquelles elle s'était fondée pour confirmer le jugement, avaient été communiquées à M. X..., la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure de vérifier que le principe de la contradiction a été respecté ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt du 16 novembre 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Angers ;
Condamne Mme Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. X... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du premier février deux mille douze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Le Prado, avocat aux Conseils pour M. X...
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR confirmé le jugement du 1er juillet 2009 en ce qu'il a débouté Monsieur Pierrick X... de sa demande de résidence alternée ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « des relations ayant existé entre Monsieur Pierrick X... et Madame Karine Y... sont nés William, le 15 juin 1995 et Brenda le 20 avril 1996. Par une décision du 16 février 2000, mentionnant que William a été reconnu par ses père et mère et Brenda par son père, le juge aux affaires familiales du Tribunal de grande instance de GUINGAMP a constaté l'exercice conjoint de l'autorité parentale, ordonné une enquête sociale et, dans l'attente du dépôt du rapport, fixé la résidence des enfants chez le père, accordé un droit de visite et d'hébergement à la mère laquelle a, par ailleurs, été reconnue impécunieuse. Le 29 novembre 2000, il a été décidé d'un examen médico psychologique. Par une deuxième décision du 3 octobre 2001, après rapport d'examen et d'enquête, le juge aux affaires familiales a fixé la résidence des enfants chez le père, accordé un large droit de visite et d'hébergement à la mère, et fixé la contribution de celle-ci à 400 F (60,98 €) par mois. Par une autre décision du 30 juillet 2003, Madame Y... a été déboutée de ses demandes de transfert de résidence ou de résidence alternée. Madame Y... a à nouveau saisi le juge aux affaires familiales aux fins de transfert de résidence avec toutes conséquences utiles. Par jugement du 7 novembre 2007, le juge aux affaires familiales du Tribunal de grande instance de GUIMGAMP a : - rappelé que l'autorité parentale est exercée en commun, - fixé la résidence des enfants chez la mère, - organisé le droit de visite et d'hébergement du père selon les modalités usuelles, - fixé la contribution paternelle à 300 € par mois et par enfant, soit 600 € au total avec indexation. Par arrêt du 7 juillet 2008 la Cour d'appel de Rennes a confirmé cette décision. Saisi par Monsieur X... d'une requête aux fins de résidence alternée des enfants, le juge aux affaires familiales de GUINGAMP, a, par décision du 1er juillet 2009, débouté celui-ci de ses demandes et mis à sa charge une indemnité de 1 500 € pour frais irrépétibles, outre les dépens. Monsieur X... a interjeté appel de ce jugement. Par conclusions du 23 février 2010, il a demandé : - d'infirmer ladite décision, - d'ordonner l'audition de William et Brenda par un magistrat de la Cour, - de dire qu'il en sera dressé procès-verbal et que les parties seront invitées à faire connaître leurs observations, - de dire que si les enfants souhaitent une résidence en alternance celle-ci s'organisera ainsi y compris durant les petites vacances scolaires : * une semaine sur deux chez chacun de leurs parents à savoir chez leur père du vendredi à la sortie des classes les semaines calendaires paires au vendredi suivant les semaines calendaires impaires et chez leur mère du vendredi à la sortie des classes les semaines calendaires impaires au vendredi suivant les semaine calendaires paires, * en ce qui concerne les vacances d'été : chez leur père la première moitié de ces vacances les années paires et la seconde moitié les années impaires et chez leur mère inversement, - de lui donner acte de sa proposition de partager avec Madame Y... l'ensemble des dépenses scolaires et de loisirs des enfants et de lui verser à titre de contribution alimentaire la somme de 100 € par mois et par enfant, - de dire que les enfants auront une garde-robe chez chacun de leurs parents, auquel sera laissée la charge exclusive des frais vestimentaires exposés par lui. Par conclusions du 28 janvier 2010, Madame Y... a demandé : - de confirmer le jugement entrepris, - de condamner Monsieur X... à lui payer une indemnité de 2.000 € par application de l'article 700 du Code de procédure civile (CPC). Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions, il est référé aux dernières écritures des parties susvisées. La clôture de l'instruction a été prononcée le 8 avril 2010. Suivant un arrêt du 15 juin 2010, la Cour a ordonné l'audition des mineurs William et Brenda, a dit que dans le respect de l'intérêt des enfants, il sera fait un compte rendu des auditions soumis au respect du contradictoire, et a réservé l'ensemble des demandes et les dépens. Les enfants ont été entendus le 8 septembre 2010. Les parties ont eu communication des procès-verbaux d'audition et ont été autorisées à déposer une note en délibéré au plus tard le 22 septembre 2010. Madame Y... a déposé une note en délibéré le 22 septembre 2010. Monsieur X... s'en est abstenu dans le délai imparti. La mère a maintenu sa position initiale et proposé très subsidiairement une résidence en alternance » ; SUR CE : pour confirmer la décision du 7 novembre 2007 ayant fixé la résidence habituelle des enfants chez leur mère, la Cour, dans son arrêt du 7 juillet 2008, a noté que le père a utilisé les enfants dans le conflit parental en leur inculquant une image négative de Madame Y..., et ce de manière persistante. Dans la décision déférée du 1er juillet 2009, le premier juge a relevé qu'il n'existe aucun élément nouveau démontrant que les dispositions actuellement en vigueur présentent un caractère perturbant pour les enfants ou ne sont pas conformes à leurs intérêts. Monsieur X... ne justifie pas d'un tel élément à supposer même que William et Brenda se satisferaient, à leurs dires, d'une résidence alternée pour des raisons pratiques à savoir le transport moins fréquent de leurs affaires, alors qu'ils mentionnent l'absence de tout dialogue entre leurs parents. Madame Y... a joint à sa note en délibéré un arrêt de la Cour d'appel de Rennes du 10 décembre 2008 contre lequel un pourvoi en cassation a été déclaré non admis (arrêt du 8 septembre 2009) ayant condamné Monsieur X... pour menaces de mort réitérées à son en droit. L'arrêt souligne la nécessité pour le condamné de se soigner dans le cadre de la mise à l'épreuve assortissant la peine, afin d'éviter la réitération des faits. Monsieur X... ne démontre pas ni même indique qu'il a suivi une thérapie. Si dans le courant de 2009 la mère a été contrainte de proposer au père de prendre les enfants pendant quelques jours par suite d'une hospitalisation, ce qu'il a accepté, on ne saurait en déduire qu'un dialogue s'est instauré entre les parents, significatif d'un changement d'attitude de Monsieur X... à l'égard de Madame Y... et propre à permettre l'organisation d'une résidence alternée conforme à l'intérêt de William et Brenda. Par suite, le jugement déféré sera confirmé » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « I – sur les modalités d'exercice de l'autorité parentale ; en application de l'article 373-2-9, à défaut d'accord des parents, le juge aux affaires familiales détermine le lieu de résidence des enfants, en fonction de ce que commande l'intérêt de l'enfant. La résidence de l'enfant peut être fixée en alternance au domicile de chacun des parents ou au domicile de l'un deux. En application de l'article 373-2-13 du Code civil, les dispositions relatives à la résidence des enfants peuvent être modifiées ou complétées à tout moment par le juge, en cas de survenance d'un élément nouveau depuis la dernière décision qui a eu à en connaître. En l'espèce, il n'est pas produit le moindre élément de preuve de nature à démontrer que les dispositions actuellement en vigueur présentent un caractère perturbant pour les enfants ou qu'elles ne sont pas conformes à leur intérêt. Plus généralement, il n'est pas produit, ni même allégué, le moindre élément de nature à constituer un élément nouveau depuis l'arrêt de la Cour d'appel de Rennes en date du 7 juillet 2008. En outre, les enfants ont demandé à être entendus seuls, hors la présence de leurs parents, par le juge aux affaires familiales. Si leurs propos ne peuvent être retranscrits tels quels sans risquer d'être mal interprétés et à l'origine de la renaissance du conflit parental, ils démontrent cependant que M. Pierrick X... persiste à instrumentaliser Brenda et William dans le conflit qui l'oppose à Madame Karine Y... et qu'il ne parvient pas à dépasser et que le père n'a manifestement toujours pas pris conscience des répercussions psychologiques néfastes de son comportement sur les enfants. En conséquence, M. Pierrick X... sera débouté de l'intégralité de ses demandes » ;
ALORS QUE d'une part, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer, et observer lui-même le principe de la contradiction et qui ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement ; qu'en se fondant en l'espèce, pour rejeter la demande de résidence alternée formée par Monsieur Pierrick X..., sur la note en délibéré produite par Madame Karine Y... faisant état de nouvelles pièces, le jour de la clôture des débats, sans que Monsieur Pierrick X... ait été en mesure d'y répondre contradictoirement, la Cour d'appel a violé, ensemble, les articles 16 et 445 du Code de procédure civile ;
ET ALORS QUE d'autre part, le principe d'égalité des armes impose l'obligation d'offrir à chaque partie une possibilité raisonnable de présenter sa cause et ses preuves dans des conditions qui ne la placent pas dans une situation de net désavantage par rapport à son adversaire ; qu'en se fondant, pour débouter Monsieur Pierrick X... de sa demande de résidence alternée, sur une note en délibéré produite le jour de la clôture des débats, par Madame Karine Y... et faisant état de nouvelles pièces, sans s'assurer que Monsieur Pierrick X... avait eu connaissance d'une telle note et avait été mis en position de faire valoir des observations, la Cour d'appel a violé le principe de l'égalité des armes et de l'article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme ;
ET ALORS ENFIN QUE, la résidence de l'enfant peut être fixée en alternance au domicile de chacun des parents ou au domicile de l'un d'eux ; qu'en retenant, pour débouter Monsieur Pierrick X... de sa demande de résidence alternée, que celui-ci ne justifiait pas d'un élément nouveau susceptible de démontrer que les mesures alors en vigueur quant à la résidence des enfants perturbaient ces derniers, sans rechercher si le fait ou elle constate que William et Brenda, les deux enfants du couple, avaient émis le désir d'une résidence alternée pour des raisons pratiques, savoir le transport moins fréquent de leurs affaires, la proximité du domicile de leurs parents et leur bonne entente avec les compagne et compagnon de ces derniers, et que Monsieur X... avait hébergé ses enfants lors de l'hospitalisation de Madame Karine Y..., à la suite d'un accord avec elle, n'était pas de nature à constituer un élément nouveau, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 373-2-9 du Code civil.