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01/02/2012 | FRANCE | N°10-20906

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 01 février 2012, 10-20906


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 31 mars 2010), que Mme X... a été engagée en qualité d'employée de librairie à compter du 5 août 1991, par la société Jean Legue ; qu'à compter d'avril 2006, elle a été placée en congé de maternité ; qu'après avoir contesté son affectation, au retour de ce congé, à un nouveau poste et sollicité sa réintégration dans son ancien emploi, la salariée, a, par lettre du 11 décembre 2006, pris acte de la rupture de son contrat de trav

ail, puis a saisi la juridiction prud'homale ;
Attendu que Mme X... fait grief à l'...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 31 mars 2010), que Mme X... a été engagée en qualité d'employée de librairie à compter du 5 août 1991, par la société Jean Legue ; qu'à compter d'avril 2006, elle a été placée en congé de maternité ; qu'après avoir contesté son affectation, au retour de ce congé, à un nouveau poste et sollicité sa réintégration dans son ancien emploi, la salariée, a, par lettre du 11 décembre 2006, pris acte de la rupture de son contrat de travail, puis a saisi la juridiction prud'homale ;
Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande, alors, selon le moyen :
1°/ qu'à l'issue du congé de maternité, la salariée retrouve son précédent emploi ou un emploi similaire, la modification du contrat de travail devant être examinée au regard des fonctions exercées par la salariée avant son congé maternité et celles qui lui sont proposées par son employeur à l'issue de celui-ci ;qu'après avoir constaté que, selon la convention collective, une "employée de librairie" «conseille la clientèle» et qu'en l'espèce, avant son congé maternité, Mme X... s'était vue confier «la gestion du rayon Art et Tourisme», la cour d'appel a ensuite constaté, qu'à son retour de congé maternité, l'employeur avait modifié les fonctions de la salariée qui désormais était affectée au sous sol de la librairie, dans un poste de gestion de réception des livres, commandes et mises en rayon ; qu'il en résultait que la salariée avait été privée du contact et du conseil à la clientèle et de la gestion d'un rayon ; qu'en estimant néanmoins que «le fait d'être affecté au sous-sol d'une librairie ne démontre pas en soi une rétrogradation» et «qu'en étant responsable quantitatif des approvisionnements à son retour de "congés payés", Mme X... faisait certes une tache différente de celle qu'elle exécutait antérieurement mais cette tache correspondait bien à sa qualification», la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient pourtant de ses propres constatations, violant ainsi l'article L. 1225-25 du code du travail ;
2°/ que, les juges du fond ne peuvent statuer par un motif d'ordre général, sans justifier en fait leur appréciation, et ils ne motivent pas d'avantage leur décision lorsqu'ils se fondent sur les seules déclarations d'une partie, sans répondre aux conclusions de la partie adverse ; qu'en l'espèce, l'employeur se bornait à affirmer dans ses écritures que «Mme X..., à son retour de congé maternité, a demandé un aménagement d'horaires à son employeur car ses horaires ne lui convenaient plus en raison de cette maternité … c'est en rentrant de congé maternité que Mme X... a demandé l'aménagement de ces horaires» ; que cette affirmation péremptoire était expressément contestée par la salariée qui soulignait dans ses écritures, que «Mme X... n'a jamais sollicité la modification de ses horaires, lesquels lui convenaient parfaitement ; les horaires de Mme X... étaient généralement de 8 heures 30 à 17 heures 45 et c'est en fonction de ces horaires que fut établi le contrat liant Mme X... à l'assistante maternelle à qui fut confiée son enfant ; l'argument invoqué par l'employeur, lequel n'est corroboré par aucune pièce, est donc totalement mensonger» ; qu'en se contentant de relever «que lors de son retour de congé maternité il s'était avéré impossible de redonner à Mme X... exactement les mêmes taches qu'antérieurement notamment pour des raisons d'horaire qui ne lui convenait pas en raison de sa nouvelle situation familiale» et en se fondant ainsi uniquement sur les déclarations de l'employeur, sans répondre aux écritures de la salariée et sans motiver en fait son affirmation, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'après avoir exactement retenu qu'à l'issue du congé de maternité, la salariée retrouve son précédent emploi ou un emploi similaire assorti d'une rémunération au moins équivalente, la cour d'appel, qui a relevé qu'en raison de la situation familiale de Mme X..., il avait été impossible de confier à celle-ci les mêmes tâches que celles exercées avant un tel congé, a, par motifs adoptés, constaté que la nouvelle tâche de responsable des approvisionnements correspondait à sa classification d'employée de librairie ; que, peu important l'absence de contact avec la clientèle, elle a, motivant sa décision, pu en déduire que l'emploi proposé au retour de ce congé de maternité était similaire au précédent emploi ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du premier février deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils, pour Mme X...

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif d'avoir considéré que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail par Madame X... le 11 décembre 2006, devait produire les effets d'une démission et, en conséquence, d'avoir débouté la salariée de l'intégralité de ses demandes tendant à voir constater la nullité de la rupture, et à l'allocation de dommages et intérêts pour licenciement non causé, indemnités de licenciement et de préavis et les congés payés afférents, dommages et intérêts pour remise d'une attestation ASSEDIC erronée et indemnité au titre de l'article 700 CPC.
AUX MOTIFS PROPRES QUE l'article 1225-5 du Code du travail dispose : "à l'issue du congé de maternité, la salariée retrouve son précédent emploi ou un emploi similaire assorti d'une rémunération au moins équivalente" ; dès lors dans le cadre de son pouvoir de direction de l'entreprise, l'employeur conserve la possibilité de modifier les conditions de travail du salarié dans les limites du contrat de travail lui-même ; qu'il est constant dans le cas présent, que Madame Virginie X... était "employée de librairie", que la Convention collective précise que ce poste correspond à un vendeur "ayant une connaissance suffisante du catalogue des éditeurs pour conseiller la clientèle, vendre, effectuer les mises en rayon et les mises à plat justifiant d'au moins trois ans de pratique professionnelle" ; que cet employé de librairie dispose : d'une autonomie dans l'organisation en fonction de directives générales ; que se pose donc à la Cour la question de déterminer si le nouvel emploi de Madame Virginie X... était similaire au précédent comme le requiert la loi ; qu'à cet égard le fait d'être affecté au sous-sol de la librairie ne démontre pas en soi une quelconque rétrogradation, qu'il apparaît en effet à l'examen des pièces produites que Madame Virginie X... continuait à exercer les tâches pour lesquelles elle avait été embauchée et qu'elle exerçait avant son congé maternité, à savoir la gestion de réception des livres, "les réassorts" les commandes clients et aussi "les mises en rayon et les mise à plats"; que s'agissant d'une librairie d'importance moyenne et Madame Virginie X... ayant fait preuve par ailleurs de qualités certaines, son employeur avait pu lui donner ponctuellement des taches particulières telles que la gestion, sous ses directives, du rayon Art et Tourisme sans modifier pour autant les éléments essentiels de son contrat de travail ; que lors de son retour de congé maternité il s'était avéré impossible de redonner à Madame Virginie X... exactement les mêmes taches qu'antérieurement notamment pour des raisons d'horaire qui ne lui convenait pas en raison de sa nouvelle situation familiale, qu'il lui a donc été proposé des fonctions similaires entrant parfaitement dans la définition de son contrat de travail, conforme à sa pratique antérieure et constituant une simple modification de ses conditions de travail que l'employeur était en droit de proposer à sa salariée dans l'intérêt de l'entreprise
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE conformément à l'article L.122-26 du Code du Travail ancien devenu l'article L.1225-25 du Code du Travail nouveau : «A l'issue du congé maternité, la salariée retrouve son précédent emploi ou un emploi similaire assorti d'une rémunération au moins équivalente» ; en conséquence la salariée n'a donc pas un droit de retour sur un poste identique, ses fonctions peuvent parfaitement varier, seule, sa rémunération doit rester la même ; en l'espèce, au moment de la rupture, Madame X... était "employée de librairie", employée qualifiée - coefficient 220 - niveau 5 ; la Convention Collective stipule pour le poste ci-dessus qu'il s'agit d'un "vendeur ayant une connaissance suffisante du catalogue des éditeurs pour conseiller la clientèle, vendre, effectuer les mises en rayon et les mises à plat, justifiant d'au moins 3 ans de pratique professionnelle" ; en étant responsable quantitatif des approvisionnements à son retour de congés payés, Madame X... faisait certes une tâche différente de celle qu'elle exécutait antérieurement mais cette tâche correspondait bien à sa qualification et ne caractérisait pas "une modification du contrat de travail"(Cas. Soc. 18 Juillet 2001-09 Avril 2002) ; la S.A. JEAN LEGUE, dans le cadre de son pouvoir de direction pouvait changer les conditions de travail de Madame X... et la nommer à un poste différent ; la Société JEAN LEGUE a rempli l'ensemble de ses obligations envers Madame X... ; les griefs de Madame X... envers la SA JEAN LEGUE ne sont pas fondés et les faits invoqués par elle non justifiées ; les griefs de Madame X... envers son employeur ne sont pas fondés, la rupture du contrat de travail doit donc être considérée comme une démission de la part de Madame X... ; d'autre part, Madame X... a démissionné le 11 décembre 2006 de la SA JEAN LEGUE et a retrouvé dès le 18 décembre 2006, un emploi de responsable stock en contrat à durée indéterminée sans période d'essai à la S.A. VIRGIN MEGASTORE ; ainsi, Madame X... n'a eu à subir aucun préjudice quelconque ; en conséquence, le Bureau de Jugement constate la démission de Madame X... et ne peut ainsi que la débouter de sa demande de dommages-intérêts pour rupture abusive et de toutes les demandes afférentes .
ALORS QUE, à l'issue du congé de maternité, la salariée retrouve son précédent emploi ou un emploi similaire, la modification du contrat de travail devant être examinée au regard des fonctions exercées par la salariée avant son congé maternité et celles qui lui sont proposées par son employeur à l'issue de celui-ci ; qu'après avoir constaté que, selon la convention collective, une "employée de librairie" «conseille la clientèle» (arrêt p.4 §7) et qu'en l'espèce, avant son congé maternité, Madame X... s'était vue confier « la gestion du rayon Art et Tourisme » (jugement p.2 §32 - arrêt p.2 §6 et p.5 §1), la cour d'appel a ensuite constaté, qu'à son retour de congé maternité, l'employeur avait modifié les fonctions de la salariée qui désormais était affectée au sous sol de la librairie, dans un poste de gestion de réception des livres, commandes et mises en rayon ; qu'il en résultait que la salariée avait été privée du contact et du conseil à la clientèle et de la gestion d'un rayon ; qu'en estimant néanmoins que «le fait d'être affecté au sous-sol d'une librairie ne démontre pas en soi une rétrogradation» (arrêt p.4 §9) et « qu'en étant responsable quantitatif des approvisionnements à son retour de "congés payés", Madame X... faisait certes une tache différente de celle qu'elle exécutait antérieurement mais cette tache correspondait bien à sa qualification » (jugement p.5 §5), la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient pourtant de ses propres constatations, violant ainsi l'article L 1225-25 du code du travail.
ET ALORS ENCORE QUE, les juges du fond ne peuvent statuer par un motif d'ordre général, sans justifier en fait leur appréciation, et ils ne motivent pas d'avantage leur décision lorsqu'ils se fondent sur les seules déclarations d'une partie, sans répondre aux conclusions de la partie adverse ; qu'en l'espèce, l'employeur se bornait à affirmer dans ses écritures que «Madame X..., à son retour de congé maternité, a demandé un aménagement d'horaires à son employeur car ses horaires ne lui convenaient plus en raison de cette maternité … c'est en rentrant de congé maternité que Madame X... a demandé l'aménagement de ces horaires»(conclusions p.2 §8 et p.8 §10) ; que cette affirmation péremptoire était expressément contestée par la salariée qui soulignait dans ses écritures, que « Madame X... n'a jamais sollicité la modification de ses horaires, lesquels lui convenaient parfaitement ; les horaires de Madame X... étaient généralement de 8h30 à 17h45 et c'est en fonction de ces horaires que fut établi le contrat liant Madame X... à l'assistante maternelle à qui fut confiée son enfant (il convient de préciser que c'est le père qui récupère l'enfant le soir, Madame X... n'ayant donc aucune contrainte horaire le soir) ; l'argument invoqué par l'employeur, lequel n'est corroboré par aucune pièce, est donc totalement mensonger» (conclusions p.10-11) ; qu'en se contentant de relever «que lors de son retour de congé maternité il s'était avéré impossible de redonner à Madame Virginie X... exactement les mêmes taches qu'antérieurement notamment pour des raisons d'horaire qui ne lui convenait pas en raison de sa nouvelle situation familiale» et en se fondant ainsi uniquement sur les déclarations de l'employeur, sans répondre aux écritures de la salariée et sans motiver en fait son affirmation, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.


Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 31 mars 2010


Publications
Proposition de citation: Cass. Soc., 01 fév. 2012, pourvoi n°10-20906

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Composition du Tribunal
Président : M. Chollet (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Formation : Chambre sociale
Date de la décision : 01/02/2012
Date de l'import : 15/09/2022

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 10-20906
Numéro NOR : JURITEXT000025293563 ?
Numéro d'affaire : 10-20906
Numéro de décision : 51200390
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.cassation;arret;2012-02-01;10.20906 ?
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