LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 9 novembre 2010), statuant en matière de référé, que Mme X..., épouse Y..., propriétaire de locaux à usage commercial donnés à bail à Mme Z..., épouse A..., a fait délivrer à celle-ci le 25 mars 2009 un commandement, visant la clause résolutoire, de payer un arriéré de loyers ; que la locataire a assigné la bailleresse en nullité de ce commandement et pour être autorisée à conserver l'usage de locaux non inclus dans le bail ; que la bailleresse a reconventionnellement demandé l'expulsion de la locataire de l'intégralité des locaux inclus ou non dans le bail ;
Sur les premier et deuxième moyens réunis, ci-après annexés :
Attendu qu'ayant relevé, d'une part, que Mme Z..., épouse A... ne démontrait pas qu'elle occupait les locaux non inclus dans le bail en vertu d'un accord et , d'autre part, que Mme X..., épouse Y... était propriétaire de ces locaux, la cour d'appel a exactement retenu, sans violer le principe de la contradiction, que cette occupation sans le consentement du propriétaire constituait un trouble manifestement illicite et qu'il y avait lieu d'ordonner l'expulsion de l'occupante ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le troisième moyen:
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que pour ordonner l'expulsion de la locataire des locaux donnés à bail, l'arrêt retient que la résiliation de ce bail est acquise par l'écoulement du délai d'un mois après la signification du commandement visant la clause résolutoire ;
Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de la locataire qui sollicitait la suspension des effets de la clause résolutoire et un délai de grâce jusqu'à la date à laquelle elle avait réglé les causes de ce commandement, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
Casse et annule, mais seulement en ce qu'il a constaté la résiliation du bail et ordonné l'expulsion des locaux loués l'arrêt rendu entre les parties le 9 novembre 2010 par la cour d'appel de Toulouse, remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse, autrement composée ;
Condamne Mme X..., épouse Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne Mme X..., épouse Y... à payer à Mme Muriel Z..., épouse A... la somme de 2 500 euros, rejette la demande de Mme X..., épouse Y....
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un janvier deux mille douze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils pour Mme Z..., épouse A...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
:IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Madame A... de sa demande tendant à être autorisée à conserver l'usage des locaux non inclus dans le bail et d'avoir en conséquence ordonné l'expulsion de Madame A... de ces locaux.
AUX MOTIFS QU' il appartient à celui qui prétend un droit d'en rapporter la preuve ; que Madame A... qui a pris l'initiative de l'action ne démontre pas qu'elle occupe des locaux non compris dans le bail par un prétendu accord de sa bailleresse pour remplacer ceux loués qui ne seraient pas conformes à la destination du bail (exploitation d'un restaurant) alors que ce problème de conformité attesté dans sa réalité par l'expert relève d'un autre contentieux qui échappe aux pouvoirs du juge des référés dès lors que même en présence d'une contestation sérieuse, aucun péril de droit engendrant ou risquant d'engendrer un trouble manifestement illicite au sens de l'article 809 alinéa 1er du Code de procédure civile ou aucune urgence justifiant que le juge du fond n'ait pas encore été saisi au sens de l'article 808 du même code ne sous-tend l'action de la demanderesse ici appelante ; que l'ordonnance déférée sera donc confirmée par substitution de motifs sur ce point de rejet des prétentions de Madame A... à se maintenir dans les locaux en cause qui ne lui sont pas loués ; qu'il sera pris acte dans la même lignée de problèmes de ce que madame A... consent à ne plus se servir de l'incinérateur qui fait son apparition pour la première fois en cause d'appel ;
ALORS QUE les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis, sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties au soutien de leurs prétentions ; que Madame A... produisait devant la Cour d'appel une lettre du 28 janvier 2009 dans laquelle Madame Y... affirmait :« j'ai l'honneur de vous faire connaitre ma décision de ne plus vouloir tolérer l'utilisation de locaux d'espaces ne faisant par partie de la convention de location du restaurant » ; qu'en décidant néanmoins que Madame A... ne démontrait pas que l'occupation des locaux non compris dans le bail résultait d'un accord, sans examiner la lettre du 28 janvier 2009 dont il résultait que Madame Y... avait toléré l'occupation des locaux non compris dans le bail de Madame A... et donc qu'il existait à tout le moins un accord verbal, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
:IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir ordonné l'expulsion de Madame A... et de tous les occupants de son chef pour être sans droit ni titre des lieux non compris dans le contrat de bail, l'exécution de cette mesure étant assortie d'une astreint de 30 euros par jour de retard à compter du quinzième jour après signification de l'arrêt ;
AUX MOTIFS QUE Madame Y... apporte la démonstration de ce qu'elle est propriétaire de locaux qu'elle n'a pas loué et qu'occupe Madame A... sans autorisation ni droit ni titre ; qu'il importe peu que cette occupation puisse se justifier a posteriori et créer ainsi une contestation même sérieuse, dès lors qu'elle est une atteinte au droit de propriété de Madame Y... qui n'y a pas consenti et c'est en cette absence de consentement que réside le trouble manifestement illicite subi par Madame Y... et qu'elle est fondée à faire cesser ; que l'ordonnance déférée sera donc infirmée sur ce point et il sera ordonné à Madame A... de mettre un terme à ce trouble qu'elle apporte manifestement aux droits de Madame Y... de sous astreinte de 30 euros par jour de retard à compter du 15ème jour de la signification du présent arrêt ;
ALORS QUE le juge, doit en toutes circonstances, faire observer et observer lui même le principe de la contradiction ; qu'il ne peut à ce titre, relever un moyen d'office sans avoir préalablement invité les parties à présenter leurs observations ; que Madame Y... demandait l'expulsion des locaux non compris dans le bail en se fondant exclusivement sur l'absence de contestation sérieuse mais ne soutenait pas que l'occupation des locaux entraînait un trouble manifestement illicite ; qu'en relevant d'office l'existence d'un trouble manifestement illicite, sans avoir préalablement invité les parties à présenter leurs observations sur ce moyen, la Cour d'appel a violé l'article 16 du Code de procédure civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
:IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir dit fondée la demande de validation du commandement de payer du 25 mars 2009 visant la clause résolutoire insérée au bail commercial du 9 avril 2004 et d'avoir ordonné l'expulsion de Madame A... des lieux objets du bail résilié de plein droit à compter du 26 avril 2009 faute de paiement des sommes visées au commandement de payer visant la clause résolutoire qui lui a été signifié le 25 mars 2009 et d'avoir débouté les parties de toutes leurs autres demandes ;
AUX MOTIFS PROPRES QU' il résulte du bail par simple lecture sans qu'il soit besoin de l'appréciation d'un juge du fond, que la révision du loyer est prévue tous les trois ans automatiquement et sa calcule selon les variations de l'indice du coût de la construction par référence à l'indice défini de 1203 du 3ème trimestre 2003, la dite stipulation qui ne comporte aucune clause d'échelle mobile, rejoignant ainsi les obligations imposées par une loi d'ordre public ; que Madame A... qui conteste cette simple lecture n'en a pourtant pas saisi le juge des loyers commerciaux sur le fondement de la modification notable des facteurs de commercialité préférant faire part de ses savants calculs à une juge radicalement incompétent pour les apprécier ou pour les dire simplement recevable (le juge des référés à qu'il est demandé de dire que les facteurs locaux de commercialité ont effectivement évolué en profondeur alors qu'il est que le juge de l'apparence) ; qu'il résulte de ce qui précède que le premier juge a eu raison de valider le commandement de payer visant la clause résolutoire de plein droit du bail mais il a omis d'en tirer les conséquences juridiques alors qu'il en était saisi : Madame A... sera expulsée des locaux qu'elle louait à Madame Y... mais qu'elle occupe sans droit ni titre à compter de l'écoulement d'un mois après la signification du commandement de payer visant la clause résolutoire ;
AUX MOTIFS ADOPTES QUE le contrat de bail, article 8, stipule que le bail est consenti moyennant un loyer mensuel de 609,80 euros qui sera révisé à l'expiration de chaque période triennale dans les conditions prévues aux articles 26 et 27 du décret du 30 septembre 1953, l'indice de référence étant celui du 3ème trimestre 2003 s'établissant à 1203 ; qu'à l'évidence le bail fait référence aux dispositions d'ordre public devenues article L.145-38 du Code de commerce instituant une évolution de loyer en cours de bail conformément aux variations de l'indice du coût de la construction lequel est présumé s'appliquer sauf clause d'échelle mobile dans le bail non prévue en l'espèce ; qu'il s'ensuit que la procédure de révision judiciaire du loyer à l'initiative de la locataire n'est nullement le préalable nécessaire à la révision du loyer, que le commandement de payer visant un loyer révisé conformément aux clause du contrat de bail est régulier et valable et que celui-ci doit porter son plein et entier effet ;
1°) ALORS QUE les conventions doivent être exécutées de bonne foi et une clause résolutoire n'est pas acquise, si elle a été mise en oeuvre de mauvaise foi par le créancier ; que Madame A... soutenait, dans ses conclusions d'appel, que Madame Y... ne pouvait se prévaloir du bénéfice de la clause résolutoire en raison de sa mauvaise foi puisque elle tentait de faire résilier le bail afin de s'exonérer des travaux urgents qu'elle devait effectuer (conclusions, p. ); qu'en faisant droit à la demande de Madame Y... sans rechercher, comme elle y était invitée, si la clause résolutoire n'avait pas été mise en oeuvre de mauvaise foi, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision, au regard de l'article 1134 du Code civil.
2°) ALORS QUE les juges saisis d'une demande présentée dans les formes et conditions prévues aux articles 1244-1 à 1244-3 du Code civil peuvent, en accordant des délais, suspendre la réalisation et les effets des clauses de résiliation, lorsque la résiliation n'est pas constatée ou prononcée par une décision de justice ayant acquis l'autorité de la chose jugée ;que Madame A... demandait la suspension des effets de la clause résolutoire jusqu'à la date du paiement intervenue le 3 juillet 2009 sur le fondement des articles 1244-1 à 1244-3 du Code civil ; qu'en omettant de répondre à ce moyen, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
3°) ALORS QUE le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables ; qu'en accueillant la demande en référé de Madame Y... visant à expulser Madame A... des locaux objets du bail, sans préciser le fondement juridique de cette demande, en particulier si elle était fondée sur l'article 808 ou 809 du Code de procédure civile, la Cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle et a privé sa décision de base légale au regard de ces textes.
4°) ALORS QUE dans l'hypothèse où la cour d'appel aurait statué sur le fondement de l'article 808 du Code de procédure civile, le juge des référés ne peut, dans les cas d'urgence, ordonner les mesures sollicitées que si elles ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ; qu'en ordonnant l'expulsion de Madame A..., après avoir pourtant constaté qu'elle était incompétente pour apprécier la modification notable des facteurs de commercialité, invoquée par Madame A..., ce dont il résultait qu'il existait une contestation sérieuse, la Cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 808 du Code de procédure civile ;
5°) ALORS QUE dans l'hypothèse où la cour d'appel aurait statué sur le fondement de l'article 809 du Code de procédure civile, elle n'a aucunement caractérisé ni le dommage imminent ni le trouble manifestement illicite et a privé, en conséquence, sa décision de base légale au regard de l'article 809 du Code de procédure.