LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à la société
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et cie international du désistement de son pourvoi, en ce qu'il est dirigé contre la société Sibaf ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 9 septembre 2010), qu'en 1992, la société Delmas Vieljeux, à laquelle s'est substituée la société Bolloré, et ses filiales, la société Sibaf et la société Forestière de campo (la société HFC), ont conclu un contrat d'agent commercial avec M. X..., auquel s'est ultérieurement substituée la société X... et cie international (la société NCI) ; qu'à la suite de sa liquidation, la société HFC a entendu procéder, en ce qui la concerne, à la résiliation du contrat d'agent commercial, conduisant en 2004 à la signature d'un protocole d'accord entre toutes les parties au contrat, auquel est également intervenue la société Exaf, que la société Bolloré a souhaité se voir substituer dans la poursuite du contrat la liant encore à la société NCI, à l'instar de la société Sibaf ; qu'en exécution de ce protocole, la société HFC s'est acquittée d'une indemnité de résiliation et d'une somme complémentaire calculée en fonction des contrats résiliés ; qu'à la même date, les sociétés Exaf, Sibaf et NCI sont convenues de maintenir les missions de cette dernière en lui confiant un nouveau contrat d'agent commercial tenant compte de ces modifications ; qu'en 2005, la société NCI a contesté en justice le protocole de résiliation de 2004, sollicité la condamnation de chacune des sociétés Bolloré et Sibaf, à lui payer une indemnité de rupture au titre de la résiliation du contrat de 1992, outre une indemnité pour rupture abusive et fautive du contrat de 2004, et demandé qu'il soit constaté que la résiliation du contrat de 2004 était intervenue à l'initiative de la société Exaf dont elle a demandé la condamnation au paiement d'une indemnité pour rupture abusive et fautive évaluée par expert ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la société NCI fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté ses demandes contre la société Bolloré au titre du protocole de 2004, alors selon le moyen, que la seule acceptation par le créancier de la substitution d'un nouveau débiteur au premier, même si elle n'est assortie d'aucune réserve, n'implique pas, en l'absence de déclaration expresse, qu'il ait entendu décharger le débiteur originaire de sa dette ; qu'en se bornant à retenir, pour débouter la société NCI de sa demande tendant à voir condamner la société Bolloré à lui payer une indemnité au titre de la résiliation du contrat d'agent commercial du 15 juillet 1992, que par le contrat du 4 juin 2004, les parties avaient entendu substituer la société Exaf à la société Bolloré dans ses droits et obligations résultant du contrat initial, sans constater que la société NCI avait exprimé sa volonté de décharger la société Bolloré, non partie à ce second contrat, de son obligation au paiement de l'indemnité de résiliation prévue par le précédent contrat du 15 juillet 1992, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134, 1273 et 1275 du code civil ;
Mais attendu qu'il ne résulte ni de l'arrêt, ni des productions, que la société NCI ait invoqué devant la cour d'appel les conditions de la novation pour exclure la substitution de mandant qui était invoquée par la société Bolloré ; que le moyen, nouveau et mélangé de fait et de droit, est irrecevable ;
Et sur le second moyen :
Attendu que la société NCI fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté ses demandes contre la société Exaf au titre du contrat d'agent commercial de 2004, alors selon le moyen :
1°/ qu'en cas de cessation de ses relations avec le mandant, l'agent commercial a droit à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi et ce nonobstant toute clause contraire ; que selon les propres constatations de la cour d'appel, l'article 6 du contrat d'agent commercial du 4 juin 2004 stipulait que sa résiliation par la société Exaf, hors les cas de faute grave de l'agent ou de force majeure, ouvrirait droit au profit de ce dernier à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi ; qu'il résulte encore des constatations de la cour d'appel que la résiliation du contrat était imputable à la société Exaf, laquelle avait versé à cette occasion à la société NCI une somme totale de 151 640 euros correspondant à l'indemnité conventionnelle de résiliation et à une indemnité complémentaire pour contrats annulés ; qu'en déboutant la société NCI de ses demandes, sans rechercher si la somme versée par la société Exaf à titre d'indemnité conventionnelle de résiliation correspondait au préjudice subi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil, ensemble l'article L. 134-12 du code de commerce ;
2°/ qu'il résulte des propres constatations de la cour d'appel que la société Exaf, à qui la rupture du contrat était imputable, n'avait pas respecté le formalisme de l'envoi d'une lettre recommandée avec accusé réception prévu par l'article 5 du contrat ; que le non-respect de ce formalisme contractuel constituait une faute ; qu'en retenant que le caractère abusif de la résiliation n'était pas démontré, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1147 du code civil ;
3°/ que le non-respect par le mandant du formalisme prévu pour la résiliation d'un contrat d'agent commercial entraîne nécessairement, en soi, un préjudice pour l'agent ; qu'en retenant que la société NCI ne démontrait pas le préjudice résultant du non-respect des conditions formelles de la résiliation du contrat par la société Exaf, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1147 du code civil ;
Mais attendu, en premier lieu, qu'il ne résulte ni de l'arrêt ni des productions que la société NCI ait contesté devant la cour d'appel le montant des indemnités qui lui ont été réglées par la société Exaf à l'occasion de la rupture du contrat de 2004 ; que le moyen est nouveau et mélangé de fait et de droit ;
Attendu, en second lieu, qu'ayant retenu, dans l'exercice de son pouvoir souverain, que la société NCI ne démontrait pas l'existence d'un préjudice résultant des conditions formelles de résiliation du contrat, la cour d'appel en a exactement déduit, abstraction faite du motif surabondant critiqué par la deuxième branche que la demande de cette société devait être rejetée ;
D'où il suit que le moyen, qui est irrecevable en sa première branche et ne peut être accueilli en sa deuxième branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société
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et compagnie international aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer aux sociétés Exaf et Bolloré la somme globale de 2 500 euros et rejette sa demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un janvier deux mille douze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils pour la société
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et cie international.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté la société
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et Cie International (NCI) de ses demandes contre la société Bolloré au titre du protocole d'accord du 4 juin 2004 ;
AUX MOTIFS QUE le protocole du 4 juin 2004 expose en préambule que « les sociétés OIT, Sibaf, HFC ont conclu un contrat d'agence commerciale avec NCI le 15 juillet 1992 (…). HFC souhaitant mettre un terme à ce contrat du fait de sa liquidation et OIT souhaitant transférer ses droits à Exaf, le présent protocole a pour objet de définir les termes et conditions d'une part, de la rupture et du transfert du contrat et d'autre part, de la poursuite des relations contractuelles entre les sociétés Exaf, Sibaf et NCI » ; L'article 1 « Résiliation et transfert du contrat d'agent commercial » stipule que « en accord avec NCI et l'ensemble des parties, 1.1. HFC résilie, à effet de la date de signature du présent protocole, le contrat d'agent commercial défini en préambule. OIT transfère à EXAF, qui l'accepte, à effet de la date de signature du présent protocole, ses droits et obligations au titre du contrat d'agent commercial » (…) ;
ET AUX MOTIFS QUE ce protocole tel qu'il est rédigé, et au regard des relations entre les parties telles qu'exposées dans le contrat d'agent commercial, fait ressortir qu'il avait deux objets distincts. Le premier était de régler les conséquences de la résiliation du contrat d'agent commercial par HFC en raison de sa liquidation et seules les dispositions s'y rapportant se sont vu conférer la nature et la valeur d'une transaction (…) Le second objet du protocole était d'organiser la poursuite de la mission d'agent commercial de NCI auprès de toutes les autres parties au contrat d'origine, Exaf étant simplement substituée à Bolloré, en accord avec NCI ; la résiliation évoquée à l'article 5 immédiatement suivie de la signature d'un autre contrat du même jour, n'était qu'une formalité matérielle, sans remise en cause de sa mission telle qu'originellement confiée par SDV OIT substituée par Bolloré elle-même substituée par Exaf, ni perte de clientèle pour NCI. Dans ces conditions de la poursuite des relations, NCI est mal fondée à demander paiement par Bolloré, d'une indemnité conventionnelle au titre d'une résiliation à sa demande, inexistante, du contrat d'agent commercial du 15 juillet 1992 ; que le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a débouté NCI « de ses demandes au titre du protocole d'accord du 4 juin 2004 » à l'encontre de Bolloré ;
ALORS QUE la seule acceptation par le créancier de la substitution d'un nouveau débiteur au premier, même si elle n'est assortie d'aucune réserve, n'implique pas, en l'absence de déclaration expresse, qu'il ait entendu décharger le débiteur originaire de sa dette ; qu'en se bornant à retenir, pour débouter la société NCI de sa demande tendant à voir condamner la société Bolloré à lui payer une indemnité au titre de la résiliation du contrat d'agent commercial du 15 juillet 1992, que par le contrat du 4 juin 2004, les parties avaient entendu substituer la société Exaf à la société Bolloré dans ses droits et obligations résultant du contrat initial, sans constater que la société NCI avait exprimé sa volonté de décharger la société Bolloré, non partie à ce second contrat, de son obligation au paiement de l'indemnité de résiliation prévue par le précédent contrat du 15 juillet 1992, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134, 1273 et 1275 du Code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté la société NCI de ses demandes contre la société Exaf au titre du contrat d'agent commercial du 4 juin 2004 ;
AUX MOTIFS QU'iI est constant qu'en raison de ses difficultés, SIBAF à compter de la fin de l'année 2004 a cessé l'exploitation de ses concessions forestières ; de ce fait EXAF, seul mandant, était dans l'impossibilité d'assurer la poursuite du contrat d'agent commercial ayant pour objet la commercialisation de bois provenant de ces exploitations. L'imputabilité et le caractère inéluctable de la résiliation ne sont pas discutables, ils ont été évoqués par EXAF dans un courrier daté du 12 décembre 2005 ; EXAF, seule susceptible d'être débitrice d'une indemnité de résiliation envers MCI, en sa qualité de seule mandant et en application de l'article 8 du contrat, a effectivement versé à celle-ci, après compensation non critiquée avec une autre créance, une somme de 60.623,61 €, correspondant à une somme totale de 151.640 € représentant non seulement l'indemnité conventionnelle de résiliation, mais également une indemnité complémentaire pour contrats annulés. Il ressort des pièces produites aux débats que EXAF n'avait pas formellement notifié de résiliation du contrat. Des accords étaient en cours de négociations, et MCI, fait elle-même référence à des accords du 5 octobre 2005, dans les notes de débits qu'elle a pris l'initiative d'envoyer unilatéralement à EXAF, ce dont cette dernière a pris acte par courrier du 12 décembre 2005, considérant cet envoi comme une confirmation de la résiliation à effet à cette date. Dans ce courrier EXAF indique que les stocks de SIBAF étant désormais définitivement épuisés, il va de soi que pour les derniers contrats en cours, la commission de MCI sera réglée, et il n'est ni démontré ni prétendu que tel n'aurait pas été le cas. Dans ces conditions. MCI ayant pris l'initiative de la démarche formelle de résiliation, et ayant reçu paiement des indemnités contractuelle de résiliation et complémentaire ayant fait l'objet d'un accord, ne démontre ni le caractère abusif de la résiliation ni l'existence d'un préjudice résultant des conditions formelles de celle-ci. Elle sera en conséquence déboutée de toute demande à rencontre de EXAF en relation avec la résiliation du contrat d'agent commercial du 4 juin 2004, le jugement entrepris étant confirmé de ce chef ;
1) ALORS QU'en cas de cessation de ses relations avec le mandant, l'agent commercial a droit à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi et ce nonobstant toute clause contraire ; que selon les propres constatations de la cour d'appel, l'article 6 du contrat d'agent commercial du 4 juin 2004 stipulait que sa résiliation par la société Exaf, hors les cas de faute grave de l'agent ou de force majeure, ouvrirait droit au profit de ce dernier à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi ; qu'il résulte encore des constatations de la cour d'appel que la résiliation du contrat était imputable à la société Exaf, laquelle avait versé à cette occasion à la société NCI une somme totale de 151.640 € correspondant à l'indemnité conventionnelle de résiliation et à une indemnité complémentaire pour contrats annulés ; qu'en déboutant la société NCI de ses demandes, sans rechercher si la somme versée par la société Exaf à titre d'indemnité conventionnelle de résiliation correspondait au préjudice subi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil, ensemble l'article L. 134-12 du Code de commerce ;
2) ALORS QU'il résulte des propres constatations de la cour d'appel que la société Exaf, à qui la rupture du contrat était imputable, n'avait pas respecté le formalisme de l'envoi d'une lettre recommandée avec accusé réception prévu par l'article 5 du contrat ; que le non-respect de ce formalisme contractuel constituait une faute ; qu'en retenant que le caractère abusif de la résiliation n'était pas démontré, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1147 du Code civil.
3) ALORS QUE le non-respect par le mandant du formalisme prévu pour la résiliation d'un contrat d'agent commercial entraîne nécessairement, en soi, un préjudice pour l'agent ; qu'en retenant que la société NCI ne démontrait pas le préjudice résultant du non-respect des conditions formelles de la résiliation du contrat par la société Exaf, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1147 du Code civil.