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25/01/2012 | FRANCE | N°10-24873

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 25 janvier 2012, 10-24873


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur les premier, deuxième et troisième moyens du pourvoi principal, réunis, ci-après annexé :
Attendu, d'une part, qu'ayant constaté, d'après les copies versées à la procédure, que les attestations de garantie de livraison et d'assurances étaient apparemment régulières et comportaient tous les renseignements nécessaires, ce qui ne permettait pas de mettre en doute leur véracité, retenu que les époux X... ne rapportaient pas la preuve que les paiements n'avaient pas été effectués au vu de

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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur les premier, deuxième et troisième moyens du pourvoi principal, réunis, ci-après annexé :
Attendu, d'une part, qu'ayant constaté, d'après les copies versées à la procédure, que les attestations de garantie de livraison et d'assurances étaient apparemment régulières et comportaient tous les renseignements nécessaires, ce qui ne permettait pas de mettre en doute leur véracité, retenu que les époux X... ne rapportaient pas la preuve que les paiements n'avaient pas été effectués au vu des originaux de ces attestations de garantie de livraison et d'assurances en violation des stipulations contractuelles, et que la banque n'avait procédé au premier règlement de travaux qu'après réception de l'attestation de garantie de livraison, et relevé à juste titre que la nullité de l'offre de prêt du fait d'irrégularités du contrat de construction de maison individuelle n'était pas prévue par la loi, la cour d'appel, qui n'était pas saisie d'une demande de nullité des contrats de construction et de prêt, ni d'une demande de production de l'original des attestations de garantie de livraison et d'assurances, a pu en déduire, par une appréciation souveraine, que le préjudice des époux X... résultant du manquement de la banque à son devoir de contrôle des mentions obligatoires du contrat de construction de maison individuelle consistait en la perte d'une chance de se détourner d'un constructeur peu respectueux de la législation en vigueur ;
Attendu, d'autre part, ayant relevé que l'article L. 312-19 du code la consommation ne prévoyait la suspension du contrat de prêt que lorsque la contestation affecte le contrat de construction et n'avait de vocation à s'appliquer que dans un litige opposant le maître d'ouvrage et le constructeur, la cour d'appel, qui n'était saisie que d'un litige opposant le maître d'ouvrage et le prêteur, en a justement déduit le rejet de la demande de suspension du contrat de prêt des époux X... ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident, ci-après annexé :
Attendu qu'ayant constaté que le contrat de construction de maison individuelle remis à la banque ne comportait aucun récapitulatif général des travaux dont le maître d'ouvrage se réservait l'exécution, alors que la notice descriptive précisait que de nombreux travaux étaient laissés à leur charge dont deux seulement étaient évalués, en violation des dispositions de l'article L. 231-2 d) du code de la construction et de l'habitation, la cour d'appel, par ces seuls motifs et abstraction faite de motifs erronés mais surabondants, a pu en déduire que la banque avait manqué à son obligation de contrôle prévue par l'article L. 231-10 du même code et, faute d'avoir appelé l'attention des époux X... sur cette omission, leur avait causé un préjudice consistant en la perte d'une chance de se détourner d'un constructeur peu respectueux de la législation en vigueur ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Laisse à chaque demandeur la charge des dépens afférents à son pourvoi ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq janvier deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Coutard et Munier-Apaire, avocat aux Conseils pour M. et Mme X... (demandeurs au pourvoi principal)
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR condamné la CAISSE D'EPARGNE DE BOURGOGNE ET FRANCHE COMTE à verser aux époux X... la seule somme de 20. 000 € de dommages et intérêts et de les AVOIR déboutés de leurs autres demandes ;
AUX MOTIFS OU'« aux termes de l'article L. 231-10 du code de la construction et de l'habitation qui régit le contrat de construction de maison individuelle avec fourniture de plan (CCMI) : « Aucun prêteur ne peut émettre une offre de prêt sans avoir vérifié que le contrat comporte celles des énonciations mentionnées à l'article L. 231-2 qui doivent y figurer au moment où l'acte lui est transmis et ne peut débloquer les fonds s'il n'a pas communication de l'attestation de garantie de livraison » ; qu'il résulte de cette disposition que l'obligation du prêteur de deniers est double ; qu'il doit s'assurer, au moment de la remise du contrat, qu'il comporte les énonciations requises par l'article L. 231-2 du code de la construction et de l'habitation, puis, lors du déblocage des fonds, de la fourniture par le constructeur d'une garantie de livraison ; que les époux X... soutiennent que le CCMI ne comporte pas les énonciations exigées par les paragraphes a), d), b), k) et que la notice descriptive annexée est incomplète ; que le § a) prescrit de mentionner le titre de propriété ou les droits réels du maître de l'ouvrage lui permettant de construire et qu'en l'espèce, les clauses correspondantes ne sont pas renseignées ;... que le § d) prescrit d'indiquer le coût total des travaux et l'évaluation, s'il y a lieu, de ceux dont le maître de l'ouvrage se réserve l'exécution ; qu'il résulte de la notice descriptive que de nombreux travaux sont laissés aux époux X..., que deux d'entre eux mentionnent une évaluation, que les autres n'en comportent pas et qu'aucun récapitulatif général ne figure dans le contrat contrairement aux prescriptions du législateur ; que le § h) est relatif aux modalités de financement précisant que le CCMI doit comporter les modalités de financement, la nature et le montant des prêts obtenus et acceptés par le maître de l'ouvrage ; qu'en l'espèce, le seul renseignement figurant au contrat porte sur la rubrique « établissements prêteurs », sous laquelle figure la mention manuscrite « CAISSE D'EPARGNE », ce qui ne répond pas aux exigences légales même si l'article L. 231-4 § c) repris dans les conditions générales prescrivait que le contrat était conclu sous condition suspensive de l'obtention du prêt ; que le § k) concerne les justifications des garanties de remboursement et de livraison apportées par le constructeur, lesquelles doivent être établies par attestations annexées au contrat ; qu'en l'espèce, il ne pouvait être exigé de garantie de remboursement laquelle n'est sollicitée que dans l'hypothèse où les versements sont prévus avant la date d'ouverture du chantier ce qui n'a pas été le cas en l'espèce ; que la garantie de livraison devait cependant être annexée au contrat, ce qui n'a pas été fait ; qu'il en résulte que c'est à bon droit que le premier juge a relevé que la CAISSE D'EPARGNE n'avait pas effectué son devoir de vérification formelle du contrat de construction ; (...) ; que pour établir le lien de causalité entre les fautes relevées et le préjudice subi par les époux X..., les premiers juges ont considéré que la Caisse d'Epargne n'a pas respecté son propre formalisme contractuel, l'offre de prêt subordonnant le versement des fonds à l'obtention des originaux de l'attestation de garantie de livraison et de l'assurance et qu'en « se contentant de simples copies d'attestations sans exiger la production des originaux des attestations d'assurances qui (leur) aurait assurément permis de comprendre que les copies leur ayant été remises étaient des faux, la Banque a failli à ses obligations contractuelles » (...) ; que les époux X... ne peuvent encore soutenir que les irrégularités du CCMI affecteraient sa validité et par voie de conséquence celle de l'offre de prêt, dès lors que cette sanction n'est pas prévue par la loi ; que par contre ils doivent être déclarés bien fondés à soutenir qu'ils auraient pu, si la CAISSE D'EPARGNE avait attiré leur attention sur les différentes omissions relevées, se détourner de ce constructeur peu respectueux de la législation en vigueur ; que leur préjudice s'analyse donc en une perte de chance que la cour dispose d'éléments suffisants d'appréciation pour évaluer à 20. 000 € » (arrêt pp. 3 et 4) ;
1./ ALORS QUE le contrat de construction d'une maison individuelle, qui ne répond pas aux exigences légales impératives et ne comporte pas les énonciations de l'article L 231-2 du Code de la construction et de l'habitation, est atteint d'une nullité d'ordre public, ce qui affecte sa validité et par voie de conséquence celle de l'offre de prêt ; qu'en jugeant le contraire et en affirmant que cette sanction n'est pas prévue par la loi, la cour d'appel a violé, ensemble, les articles L 230-1, L 231-1, L 231-2, L 231-10 du Code de la construction et de l'habitation et l'article 1131 du Code civil ;
2./ ALORS QU'aucun prêteur ne peut émettre une offre de prêt sans avoir vérifié que le contrat comporte celles des énonciations mentionnées à l'article L. 231-2 du code de la construction et de l'habitation qui doivent y figurer au moment où l'acte lui est transmis ; qu'en l'espèce, dès lors qu'il est constant que la CAISSE D'EPARGNE a émis une offre de prêt quand manquaient au contrat de construction plusieurs mentions essentielles légalement exigées de sorte que la loi lui imposait de refuser toute offre de prêt, la cour d'appel ne pouvait juger que sa faute avait eu pour seule conséquence de priver les époux X... d'une chance de se détourner de leur constructeur ; qu'en refusant de juger que la méconnaissance par la banque de ses obligations légales impératives l'avait conduite à émettre fautivement une offre de prêt ce qui avait permis l'opération de construction litigieuse, de sorte qu'elle était bien à l'origine de l'intégralité des dommages subis par les maîtres de l'ouvrage, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les dispositions d'ordre public des articles L 230-1, L. 231-2 et L. 231-10 du code de la construction et de l'habitation, ensemble l'article 1147 du code civil ;
3./ ALORS QUE la garantie de livraison couvre le maître de l'ouvrage contre les risques d'inexécution ou de mauvaise exécution des travaux prévus au contrat et aucun prêteur ne peut émettre une offre de prêt sans avoir eu communication de l'attestation de garantie de livraison ; que constitue une cause du dommage engageant la responsabilité de son auteur, tout fait qui a été une condition nécessaire à la réalisation du dommage, c'est-à-dire sans laquelle celui-ci ne se serait pas produit ; qu'en l'espèce si, du fait de l'absence de garantie de livraison, la banque n'avait pas émis d'offre de prêt, le contrat de construction aurait été caduc et, par voie de conséquence, il n'y aurait pas eu de défaillance du constructeur ; qu'ainsi, après avoir constaté que le contrat de construction ne comportait pas la garantie de livraison et relevé que la banque était fautive en ce qu'elle avait octroyé le prêt sans même vérifier ledit contrat, la cour d'appel devait juger qu'elle était tenue d'assurer elle-même la garantie de livraison ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé, ensemble, les articles L 230-1, L 231-1, L 231-2, L 231-6, L 231-10 du Code de la construction et de l'habitation et l'article 1147 du Code civil.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR condamné la CAISSE D'EPARGNE DE BOURGOGNE ET FRANCHE COMTE à verser aux époux X... la seule somme de 20. 000 € de dommages et intérêts et de les AVOIR déboutés de leurs autres demandes ;
AUX MOTIFS QUE « pour établir le lien de causalité entre les fautes relevées et le prejudice subi par les époux X..., les premiers juges ont considéré que la CAISSE D'EPARGNE n'a pas respecté son propre formalisme contractuel, l'offre de prêt subordonnant le versement des fonds à l'obtention des originaux de l'attestation de garantie de livraison et de l'assurance et qu'en « se contentant de simples copies d'attestations sans exiger la production des originaux des attestations d'assurance qui (leur) aurait assurément permis de comprendre que les copies leur ayant été remises étaient des faux, la banque a failli à ses obligations contractuelles » ; qu'ils en ont déduit que le préjudice subi devait être analysé comme une perte de chance de bénéficier du régime légal de la garantie de livraison et de l'assurance « dommage-ouvrage » et que la CAISSE D'EPARGNE devait se substituer aux assureurs ; mais qu'aucune pièce n'établit que les attestations fournies à la CAISSE D'EPARGNE aient été des copies, ce qu'elle conteste, précisant en page 10 de ses écritures qu'elle n'a pu fournir les originaux qui ont été transmis à la gendarmerie de SENS le 18 septembre 2007 dans le cadre de la plainte pénale déposée par les époux X... contre leur constructeur ; que les attestations produites en copie sont apparemment régulières, que rédigées sur papier à en-tête des assureurs prétendus, elles comportent tous renseignements sur le chantier outre la signature manuscrite du représentant de la société émettrice ne permettant pas à la CAISSE D'EPARGNE de mettre en doute leur véracité ; qu'ainsi, la CAISSE D'EPARGNE s'étant assurée de la souscription d'assurances à même de couvrir toute défaillance du constructeur, elle ne saurait supporter le prejudice consécutif à l'inachèvement de l'ouvrage ou à ses malfaçons » (arrêt pp. 3 et 4) ;
1./ ALORS QU'il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention et à celui qui se prétend libéré de son obligation de justifier le fait qui a produit l'extinction de son obligation ; qu'en l'espèce, l'offre de prêt de la CAISSE D'EPARGNE subordonnant le versement des fonds à l'obtention des originaux de l'attestation de garantie et de livraison et de l'assurance, la cour d'appel ne pouvait, pour écarter toute faute de la banque retenir qu'aucune pièce n'établissait que les attestations qui lui avaient été fournies auraient été des copies, quand il appartenait à la banque de démontrer qu'il s'agissait bien d'originaux et qu'elle avait ainsi rempli ses obligations contractuelles en exigeant la remise des attestations en original et non simplement en copie ; qu'ainsi, la cour d'appel a violé l'article 9 du code de procédure civile, ensemble l'article 1315 du code civil ;
2./ ALORS QU'aucun prêteur ne peut émettre une offre de prêt ni débloquer les fonds sans vérifier que le contrat est régulier au regard tant de l'article L 231-2 du Code de la construction et de l'habitation que de ses propres exigences contractuelles ; qu'en l'espèce, pour écarter toute faute de la CAISSE D'EPARGNE, la cour d'appel s'est fondée sur le fait que la banque affirmait, en page 10 de ses conclusions, qu'elle ne pouvait fournir les originaux des attestations litigieuses qui auraient été transmis à la gendarmerie dans le cadre de la plainte pénale déposée par les époux X... contre le constructeur, quand cette seule circonstance – simplement alléguée-n'était pas de nature à établir qu'elle avait respecté ses obligations légales et contractuelles en exigeant et en obtenant les originaux des attestations litigieuses ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134, 1147 du code civil et L 231-2 et L 231-10 du Code de la construction et de l'habitation ;
3./ ALORS Qu'en retenant, pour écarter la méconnaissance par la CAISSE D'EPARGNE de son obligation contractuelle de se faire délivrer les attestations litigieuses en original, et non en copie, le fait que la banque affirmait, en page 10 de ses conclusions, qu'elle ne pouvait fournir les originaux des attestations litigieuses qui auraient été transmis à la gendarmerie dans le cadre de la plainte pénale déposée par les époux X... contre le constructeur, sans constater que la banque n'aurait pas eu la possibilité matérielle ou morale de se procurer une preuve littérale de l'acte juridique, ou aurait perdu le titre qui lui servait de preuve littérale, par suite d'un cas fortuit ou d'une force majeure, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1348 du code civil, ensemble l'article 9 du code de procédure civile ;
4./ ALORS SUBSIDIAIREMENT ou'à supposer même que la banque se serait trouvée dans l'impossibilité de se procurer les attestations litigieuses, il appartenait au juge de statuer au regard des originaux des attestations litigieuses, essentielles à l'appréciation de la responsabilité de la banque, après en avoir demandé la transmission aux services administratifs qui étaient réputés les détenir ; qu'en statuant en l'absence de ces documents originaux et sans en demander la communication aux services concernés, la cour d'appel a méconnu son office et ainsi privé les maîtres d'ouvrage d'un débat contradictoire sur ces pièces, en méconnaissance de l'article 6 § 1 de la convention européenne des droits de l'homme.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR condamné la CAISSE D'EPARGNE DE BOURGOGNE ET FRANCHE COMTE à verser aux époux X... la seule somme de 20. 000 € de dommages et intérêts et de les AVOIR déboutés de leurs autres demandes et notamment celle de suspension du remboursement du crédit ;
AUX MOTIFS QUE « l'article L 312-19 du Code de la consommation ne prévoit la suspension de l'exécution du contrat de prêt que lorsqu'une contestation affecte le contrat de construction ; qu'il n'a donc vocation à s'appliquer que dans un litige opposant maître de l'ouvrage et constructeur (s) ; que les époux X... seront déboutés de ce chef de demande » ;
ALORS QUE, lorsqu'il est déclaré dans l'acte de prêt que celui-ci est destiné à financer des ouvrages ou des travaux immobiliers au moyen d'un contrat de construction ou d'entreprise, le tribunal peut, en cas de contestation affectant l'exécution des contrats jusqu'à la solution du litige, suspendre l'exécution du contrat de prêt ; qu'en l'espèce, dès lors qu'il est constant que la construction financée par la CAISSE D'EPARGNE a été abandonnée en octobre 2004, et est restée inachevée et que les époux X... doivent assumer le coût de l'achèvement de l'ouvrage et celui des malfaçons, parmi lesquelles une non-conformité au permis de construire, la cour d'appel ne pouvait rejeter la demande de suspension de l'exécution du contrat de prêt au prétexte que l'article L 312-19 du Code de la consommation n'a vocation à s'appliquer que dans un litige opposant maître de l'ouvrage et constructeur ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé le texte précité.
Moyen produit par Me Blondel, avocat aux Conseils pour la Caisse d'épargne de Bourgogne Franche Comté (demanderesse au pourvoi incident)
Il est reproché à l'arrêt partiellement infirmatif attaqué d'avoir condamné la CAISSE D'EPARGNE à payer à Monsieur et Madame X... une somme de 20. 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation d'un préjudice résidant dans la perte d'une chance ;
AUX MOTIFS, pour partie contraires à ceux des premiers juges, QU'aux termes de l'article L 231-10 du Code de la construction et de l'habitation (CCH) qui régit le contrat de construction de maison individuelle avec fourniture de plan (CCMI) : « Aucun prêteur ne peut émettre une offre de prêt sans avoir vérifié que le contrat comporte celle des énonciations mentionnées à l'article L 231-2 qui doivent y figurer au moment où l'acte lui est transmis et ne peut débloquer les fonds s'il n'a pas communication de l'attestation de garantie de livraison » ; qu'il résulte de cette disposition que l'obligation du prêteur de deniers est double, qu'il doit s'assurer, au moment de la remise du contrat, qu'il comporte les énonciations requises par l'article L 231-2 du CCH, puis lors du déblocage des fonds, de la fourniture par le constructeur d'une garantie de livraison ; que les époux X... soutiennent que le CCMI ne comporte pas les énonciations exigées par les paragraphes a), d), h), k) et que la notice descriptive annexée est incomplète ; que le § a) prescrit de mentionner le titre de propriété ou les droits réels du maître d'ouvrage lui permettant de construire et qu'en l'espèce, les clauses correspondantes ne sont pas renseignées ; que la CAISSE D ÉPARGNE ne saurait utilement soutenir que l'article L 231-4 CCH, reprit dans les conditions générales, autorisait la conclusion du contrat sous la condition suspensive de l'acquisition d'un terrain ou de droits réels, cette disposition n'étant applicable que dans l'hypothèse où le maître de l'ouvrage ne serait titulaire sur le terrain que d'une promesse de vente, la loi du 19 décembre 1990 ayant souhaité mettre un terme aux errements antérieurs comme la signature d'un CCMI par un client ignorant l'endroit même où il allait construire ; que le § d) prescrit d'indiquer, le coût total des travaux et l'évaluation, s'il y a lieu de ceux dont le maître d'ouvrage se réserve l'exécution, qu'il résulte de la notice descriptive que de nombreux travaux sont laissés aux époux X..., que deux d'entre eux mentionnent une évaluation, que les autres n'en comportent pas et qu'aucun récapitulatif général ne figure dans le contrat contrairement aux prescriptions du législateur ; que le § h) est relatif aux modalités de financement précisant que le CCMI doit comporter les modalités de financement, la nature et le montant des prêts obtenus et acceptés par le maître de l'ouvrage ; qu'en l'espèce le seul renseignement figurant au contrat porte sur la rubrique « établissements prêteurs », sous laquelle figure la mention manuscrite : « Caisse d'Epargne », ce qui ne répond pas aux exigences légales même si l'article L 231-4 § c) repris dans les conditions générales prescrivait que le contrat était conclu sous condition suspensive de l'obtention du prêt ; que le § k) concerne les justifications des garanties de remboursement et de livraison apportées par le constructeur, lesquelles doivent être établies par attestations annexées au contrat ; qu'en l'espèce, il ne pouvait être exigé de garantie de remboursement laquelle n'est sollicitée que dans l'hypothèse où des versements sont prévus avant la date d'ouverture du chantier ce qui n'a pas été le cas en l'espèce ; que la garantie de livraison devait cependant être annexée au contrat, ce qui n'a pas été fait ; qu'il en résulte que c'est à bon droit que le premier juge a relevé que la CAISSE D'EPARGNE n'avait pas effectué son devoir de vérification formelle de contrat de construction ; que la CAISSE D'EPARGNE n'a procédé au premier règlement de travaux que le 9 août 2004, soit après avoir reçu l'attestation de garantie de livraison prétendument émise par l'assureur « Le Mans Caution » le 29 juillet 2004 satisfaisant ainsi à l'obligation légale prescrite par l'article L 231-10 CCH précité ; que ce document s'est révélé être un faux comme l'assurance dommage ; que leur constructeur ayant été mis en liquidation judiciaire le 25 janvier 2006, il en est résulté un préjudice important pour les maîtres d'ouvrage qui n'ont disposé d'aucun recours pour voir terminer leur chantier abandonné en octobre 2004 ou faire reprendre les malfaçons parmi lesquelles une non-conformité au permis de construire dénoncée par un arrêté interruptif de travaux que leur a notifié la mairie de la Commune de Coulanges la Vineuse le 30 octobre 2005 ; que pour établir le lien de causalité entre les fautes relevées et le préjudice subi par les époux X..., les premiers juges ont considéré que la CAISSE D'EPARGNE n'a pas respecté son propre formalisme contractuel, l'offre de prêt subordonnant le versement des fonds à l'obtention des originaux de l'attestation de garantie de livraison et de l'assurance et qu'en « se contentant de simples copies d'attestations sans exiger la production des originaux des attestations d'assurance qui (leur) aurait assurément permis de comprendre que les copies leur ayant été remises étaient des faux, la Banque a failli à ses obligations contractuelles » ; qu'ils en ont déduit que le préjudice subi devait être analysé comme une perte de chance de bénéficier du régime légal de la garantie de livraison et de l'assurance dommages ouvrage et que la CAISSE D'EPARGNE devait se substituer aux assureurs ; qu'aucune pièce n'établit que les attestations fournies à la CAISSE D'EPARGNE aient été des copies, ce qu'elle conteste, précisant en page 10 de ses écritures qu'elle n'a pu fournir les originaux qui ont été transmis à la gendarmerie de Sens le 18 septembre 2007 dans le cadre de la plainte pénale déposée par les époux X... contre leur constructeur ; que les attestations produites en copie sont apparemment régulières, que rédigées sur papier en-tête des assureurs prétendus, elles comportent tous renseignements sur le chantier outre la signature manuscrite du représentant de la société émettrice ne permettant pas à la CAISSE D'EPARGNE de mettre en doute leur véracité ; que la CAISSE D'EPARGNE s'étant assurée de la souscription d'assurances à même de couvrir toute défaillance du constructeur, elle ne saurait supporter le préjudice consécutif à l'inachèvement de l'ouvrage ou à ses malfaçons et qu'il n'y a pas lieu à faire droit à la demande d'expertise des intimés pour le déterminer ; que les époux X... ne peuvent encore soutenir que les irrégularités du CCMI affecteraient sa validité et par voie de conséquence celle de l'offre de prêt, dès lors que cette sanction n'est pas prévue par la loi ; que par contre, ils doivent être déclarés bien fondés à soutenir qu'ils auraient pu, si la CAISSE D'EPARGNE avait attiré leur attention sur les différentes omissions relevées, se détourner de ce constructeur peu respectueux de la législation en vigueur ; que leur préjudice s'analyse en une perte de chance que la Cour dispose d'éléments suffisants d'appréciation pour évaluer à 20. 000 € ;
ALORS QUE, D'UNE PART, le banquier ne peut voir sa responsabilité engagée pour manquement à l'obligation de vérification prévue à l'article L 231-10 du Code de la construction et de l'habitation que s'il existe un lien de causalité direct et certain entre le manquement et le préjudice subi par le maître de l'ouvrage ; que le juge ne peut, sous le couvert d'indemniser la perte d'une chance, allouer réparation d'un préjudice purement hypothétique ; qu'il s'ensuit qu'en l'absence avérée de tout lien de cause à effet entre les diverses omissions que la Cour relève et reproche à la banque de n'avoir pas signalées et le préjudice subi par les époux X... du fait de l'inachèvement de l'ouvrage et des malfaçons dont il se trouve affecté, la Cour ne pouvait néanmoins entrer en voie de condamnation à réparation au seul motif, purement hypothétique, que si la CAISSE D'EPARGNE avait attiré leur attention sur les différentes omissions relevées, les époux X... auraient pu se détourner d'un constructeur peu respectueux de la législation en vigueur ; qu'en statuant comme elle le fait, la Cour ne justifie pas légalement sa décision au regard des articles 1142 et 1147 du Code et des règles et principes gouvernant l'appréciation du lien de cause à effet et l'indemnisation de la perte d'une chance ;
ALORS QUE, D'AUTRE PART, le prêteur de deniers n'a d'obligation de vérification du contrat de construction que relativement aux énonciations qui doivent y figurer au moment où l'acte lui est transmis ; qu'en particulier, le banquier n'a pas, lors de l'émission de son offre de prêt, à déceler des omissions qui trouvent leur explication dans la stipulation de conditions suspensives autorisées par la loi ; que si la condition suspensive relative à l'acquisition du terrain à bâtir n'est légalement admise qu'autant que le maître de l'ouvrage bénéficie d'une promesse de vente, la CAISSE D'EPARGNE avait ici pris soin de justifier, par la production d'une attestation notariée, de la signature d'un compromis de vente dès la date du 10 mars 2004, attestation qui lui avait été remise avant l'offre de prêt formulée le 30 avril 2004 ; qu'en faisant reproche dans ces conditions à l'établissement de crédit de n'avoir pas décelé un défaut de mention du titre de propriété ou des droits réels du maître de l'ouvrage lui permettant de construire, motifs pris que la CAISSE D'EPARGNE ne pouvait utilement se prévaloir de la condition suspensive relative à l'acquisition du terrain à bâtir, sans s'être expliquée sur le compromis de vente du 10 mars 2004, la Cour ne justifie pas légalement sa décision au regard des articles L. 231-2, § a, L. 231-4 et L. 231-10 du Code de la construction et de l'habitation ;
ALORS QUE, DE TROISIEME PART, le prêteur de deniers n'a d'obligation de vérification du contrat de construction que relativement aux énonciations qui doivent y figurer au moment où l'acte lui est transmis ; qu'en particulier, le banquier n'a pas, lors de l'émission de son offre de prêt, à déceler des omissions qui trouvent leur explication dans la stipulation de conditions suspensives autorisées par la loi ; que la Cour a elle-même constaté que le contrat de construction avait été conclu sous la condition suspensive de l'obtention d'un prêt (arrêt p. 3, 7ème considérant, in fine) ; qu'en reprochant néanmoins à la banque de n'avoir pas décelé l'insuffisance des renseignements portés sur le contrat de construction relativement aux modalités de financements, à la nature et au montant des prêts obtenus et acceptés, la Cour viole les articles L. 231-2, § h et L. 231-10 du Code de la construction et de l'habitation ;
ALORS QUE, DE QUATRIEME PART, le prêteur de deniers n'a d'obligation de vérification du contrat de construction que relativement aux énonciations qui doivent y figurer au moment où l'acte lui est transmis ; que par hypothèse, le contrat de construction subordonné à la condition suspensive de l'obtention d'un prêt ne peut être précisément renseigné, quant à la nature et au montant des prêts obtenus et acceptés par le maître de l'ouvrage, avant que le financement n'ait été accordé par l'établissement de crédit ; qu'à cet égard, les premiers juges eux-mêmes avaient d'ailleurs observé, à juste titre, « qu'il est évident que le maître de l'ouvrage ne pouvait avoir obtenu de prêts puisqu'il devait précisément en solliciter un muni de son contrat de construction auprès de la CAISSE D'EPARGNE DE BOURGOGNE " ; qu'en considérant néanmoins que le contrat de construction présentait quant à ce une lacune, et en faisant reproche à la CAISSE D'EPARGNE de n'avoir pas su la déceler, la Cour viole de nouveau les articles L. 231-2, § h et L. 231-10 du Code de la construction et de l'habitation ;
ALORS QUE, DE CINQUIEME PART, le prêteur de deniers n'a d'obligation de vérification du contrat de construction que relativement aux énonciations qui doivent y figurer au moment où l'acte lui est transmis ; que lorsque le contrat de construction de maisons individuelles est conclu sous la condition suspensive de l'obtention de la garantie de livraison, le banquier n'a pas, lors de l'émission de son offre de prêt, l'obligation de vérifier que cette condition est réalisée ; qu'en faisant encore reproche à la CAISSE D'EPARGNE du défaut d'annexion au contrat de la garantie de livraison, quand le contrat de construction était pourtant assorti quant à ce d'une condition suspensive (cf. l'article IV de la convention), la Cour viole les articles L 231-2, § k, L 231-4 et L 231-10 du Code de la construction et de l'habitation ;
ET ALORS QUE, ENFIN, il ressort de ce qui précède que l'établissement de crédit pouvait tout au plus seulement se voir reprocher de n'avoir pas relevé le défaut de mention du coût des travaux dont le maître de l'ouvrage s'était réservé l'exécution ; que toutefois, faute d'avoir fait ressortir que cette seule omission, si elle avait été révélée aux époux X..., aurait pu suffire à les conduire à faire le choix d'un autre constructeur, la Cour prive de nouveau sa décision de toute base légale au regard des articles 1142 et 1147 du Code civil, ensemble des règles et principes qui gouvernent la détermination du lien de cause à effet entre la faute et le dommage et l'indemnisation de la perte d'une chance.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 10-24873
Date de la décision : 25/01/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 28 janvier 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 25 jan. 2012, pourvoi n°10-24873


Composition du Tribunal
Président : M. Terrier (président)
Avocat(s) : Me Blondel, SCP Coutard et Munier-Apaire

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:10.24873
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