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24/01/2012 | FRANCE | N°10-88138

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 24 janvier 2012, 10-88138


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Paul X...,

contre l'arrêt de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, 7e chambre, en date du 25 juin 2010, qui, dans la procédure suivie contre lui des chefs de violences, a rejeté une exception d'incompétence et prononcé sur les intérêts civils ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 10 janvier 2012 où étaient présents : M. Louvel président, M. Nunez conseiller rapporteur, MM. Arnould, Le Corroller, Mme Radenne, MM. Pers, Fossi

er, Mme Mirguet conseillers de la chambre, Mme Harel-Dutirou, M. Roth conseillers réfé...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Paul X...,

contre l'arrêt de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, 7e chambre, en date du 25 juin 2010, qui, dans la procédure suivie contre lui des chefs de violences, a rejeté une exception d'incompétence et prononcé sur les intérêts civils ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 10 janvier 2012 où étaient présents : M. Louvel président, M. Nunez conseiller rapporteur, MM. Arnould, Le Corroller, Mme Radenne, MM. Pers, Fossier, Mme Mirguet conseillers de la chambre, Mme Harel-Dutirou, M. Roth conseillers référendaires ;

Avocat général : M. Cordier ;

Greffier de chambre : M. Bétron ;

Sur le rapport de M. le conseiller NUNEZ, les observations de Me HAAS, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général CORDIER ;

Vu le mémoire et les observations complémentaires produits ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation de la loi des 16 et 24 août 1790, du décret du 16 fructidor an III, des articles 1382 et 1384 du code civil, 433-5 du code pénal, 2, 3, 73, 591 et 593 du code de procédure pénale, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a rejeté l'exception d'incompétence et a condamné M. X... à indemniser M. Y... de son préjudice à concurrence de 50 % ;

"aux motifs que, sur la compétence, si la responsabilité de l'Etat est engagée en raison des fautes commises par ses agents lorsqu'elles ne sont pas dépourvues de tout lien avec le service, il n'en demeure pas moins que cette responsabilité n'est pas exclusive de celle des fonctionnaires auxquels est reprochée une faute personnelle détachable du service ; qu'en l'espèce, selon les dispositions pénales du jugement devenues définitives, M. X..., agent de police municipale, a été déclaré coupable de violence par un dépositaire de l'autorité publique suivie d'incapacité supérieure à huit jours pour avoir volontairement fait chuter au sol M. Y... en lui attrapant et en lui tirant le bras et la jambe alors que ce dernier se trouvait en hauteur, soit à un mètre du sol sur le hayon de son camion ; qu'il est suffisamment établi que cet acte de violence relevé à la charge de M. X..., dont le caractère volontaire a été retenu par le tribunal dans la déclaration de culpabilité, a présenté un caractère de brutalité et de gravité sans rapport avec les nécessités de l'exercice des fonctions de l'intéressé qui était chargé en l'espèce de faire respecter un arrêté municipal fixant l'heure de départ des marchands ambulants sur un marché forain et de verbaliser les contrevenants, de sorte que cet acte de violence a constitué une faute personnelle de M. X... détachable de son service ; qu'il s'ensuit que le dommage subi par M. Y... qui trouve son origine dans une faute personnelle de M. X... détachable de son service relève bien de la compétence des tribunaux judiciaires et, en l'espèce, de la juridiction répressive, de sorte que l'exception d'incompétence soulevée par M. X... sera rejetée ;

"et aux motifs que, sur le fond, M. Y... a été personnellement et directement victime de l'infraction commise par le prévenu ; qu'il ressort des débats et de la procédure, et en particulier des procès-verbaux d'enquête des gendarmes de la brigade territoriale de Carry-le-Rouet, que le 2 août 2003 à Carry-le-Rouet, M. X..., agent de la police municipale de cette localité qui verbalisait les contrevenants à un arrêté municipal fixant l'heure de départ des marchands ambulants sur un marché, informait M. Y..., exploitant agricole, qu'il lui dressait procès-verbal pour infraction à cet arrêté municipal de l'horaire de départ et était aussitôt insulté par ce dernier qui se trouvait en hauteur sur le hayon de son camion en train de recharger ; que devant son refus de descendre, M. X... le saisissait par le bras ; que M. X... a relaté qu'au moment où il était en train de remplir la contravention, M. Y... avait proféré successivement à son adresse les propos tels que « tu vas pas m'empéguer, je vais partir, je pars », puis « gros pédé d'enculé de connard », que le procès-verbal, il pouvait se « le foutre au cul » ; qu'à partir de ces dernières paroles, il s'était alors dirigé vers lui et lui avait demandé de le suivre car il voulait lui relever un outrage à agent de la force publique, que M. Y... l'avait totalement ignoré et avait continué son travail, qu'il lui avait attrapé la jambe et le bras pour le descendre du hayon qui était à un mètre du sol et son genou avait touché le bitume ; que lors de son audition, M. Y... a reconnu avoir injurié M. X... en ses termes « connard, je vais te torcher le cul avec ton papier » et lui avait dit tout un tas d'injures dont il ne se souvenait plus avant d'être attrapé par le poignet gauche et d'être tiré fort de haut en bas ; qu'il était tombé au sol et sa jambe gauche avait vrillé, ajoutant que le policier municipal lui avait bien demandé de descendre du camion mais ne lui en avait pas laissé le temps car il avait une plante dans les mains et avait été tiré violemment au sol à sa grande surprise ; que les insultes et injures proférées par M. Y... à l'adresse de M. X... sont pleinement confirmées par les témoignages concordants et circonstanciés de MM. Z..., A..., B... et C... ; que M. Z... a en outre précisé que M. X..., qui était très énervé, était venu devant le camion et avait saisi par la jambe M. Y..., lequel n'avait pas tenu compte de ses avertissements et avait continué à ranger, et l'avait fait tomber au sol ; que M. A... a relaté que M. X..., irrité, était arrivé rapidement, avait saisi la cheville de M. Y... et l'avait jeté franchement et violemment au sol, ce qui était confirmé par M. B... qui a ajouté que M. X..., qui était énervé, avait tiré deux ou trois fois M. Y... avant de le faire tomber en le jetant franchement et carrément au sol ; que M. C... a confirmé que M. X..., qui était vindicatif et très agressif, avait jeté violemment au sol M. Y... ; que de la conjonction de ces éléments, il ressort que le comportement provocateur de M. Y..., caractérisé par des propos particulièrement grossiers, insultants et injurieux et réitérés dont la teneur, qui n'est au demeurant pas contestée, étant à l'évidence vexatoire et attentatoire à la dignité et exprimait avec netteté une attitude provocatrice, un manque total de respect et un réel mépris vis-à-vis de M. X..., est constitutif d'une faute, contemporaine aux faits de M. Y..., ayant contribué pour partie à la réalisation de son dommage qui, par son degré, est de nature à réduire de moitié son droit à indemnisation ;

"1°) alors que l'agent d'un service public n'est personnellement responsable des conséquences dommageables de l'acte délictueux qu'il a commis que si celui-ci constitue une faute détachable du service ; que l'usage de la violence par un agent dépositaire de la force publique ne constitue pas une telle faute lorsqu'elle n'est pas sans rapport avec les nécessités l'exercice de ses fonctions ; que n'est pas détachable du service, la faute ayant consisté, pour un agent de police violemment insulté et injurié par un contrevenant à l'encontre duquel il vient de dresser un procès-verbal d'infraction et qui refuse de soumettre à l'injonction qui lui est donnée de le suivre, de le contraindre par la violence à obtempérer ; que la cour d'appel a donc inexactement qualifié les faits de l'espèce ;

"2°) alors que le caractère détachable du service de la faute de M. X... devait être apprécié non seulement par rapport aux nécessités de la mission initiale de l'agent de police municipale, qui consistait à faire respecter un arrêté municipal réglementant l'heure de départ des marchands ambulants sur un marché forain, mais encore et surtout au regard des nécessités de l'appréhension du contrevenant consécutive à des injures révélant un total mépris envers l'autorité publique ; qu'en appréciant le caractère détachable de la faute de l'agent uniquement à l'aune des nécessités de sa mission initiale et non de la nécessité d'appréhender l'auteur récalcitrant d'un délit flagrant d'outrage à agent de la force publique, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision" ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que M. X..., agent de police municipale chargé de la surveillance des marchés forains, a dressé à l'encontre de M. Y... un procès-verbal de contravention pour non-respect d'un arrêté municipal ; qu'après avoir été publiquement outragé par ce contrevenant, il a tenté de l'appréhender et provoqué sa chute lui occasionnant des blessures ; que poursuivie devant le tribunal correctionnel, il a été déclaré coupable de violences par dépositaire de l'autorité publique ;

Attendu que, statuant sur le seul appel de la partie civile, les juges du second degré, pour se déclarer compétents et procéder à un partage de responsabilité, prononcent par les motifs repris au moyen ;

Attendu qu'en cet état, le moyen qui reproche à la cour d'appel de ne pas avoir décliné sa compétence, inopérant dès lors que les faits ont été commis dans le cadre d'une opération de police judiciaire, et qui, pour le surplus, remet en cause l'appréciation souveraine par les juges du fond des faits et circonstances de la cause, ne peut qu'être écarté ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-quatre janvier deux mille douze ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 10-88138
Date de la décision : 24/01/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 25 juin 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 24 jan. 2012, pourvoi n°10-88138


Composition du Tribunal
Président : M. Louvel (président)
Avocat(s) : Me Haas

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:10.88138
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