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18/01/2012 | FRANCE | N°10-11742

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 18 janvier 2012, 10-11742


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 3 décembre 2009) que Mme X... a été engagée par la société Winnovex en qualité d'ingénieur commercial à compter du 1er mars 2000 ; que par avenant du 21 décembre 2004, elle a accédé au poste de responsable opérationnelle, puis a été nommée, le 3 janvier 2006, responsable des ressources humaines ; qu'elle a été licenciée par lettre du 4 juillet 2006 ; qu'une transaction a été conclue le 12 juillet 2006 ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale de deman

des tendant à voir prononcer la nullité de la transaction, déclarer non fondé...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 3 décembre 2009) que Mme X... a été engagée par la société Winnovex en qualité d'ingénieur commercial à compter du 1er mars 2000 ; que par avenant du 21 décembre 2004, elle a accédé au poste de responsable opérationnelle, puis a été nommée, le 3 janvier 2006, responsable des ressources humaines ; qu'elle a été licenciée par lettre du 4 juillet 2006 ; qu'une transaction a été conclue le 12 juillet 2006 ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale de demandes tendant à voir prononcer la nullité de la transaction, déclarer non fondé son licenciement et se voir allouer des indemnités au titre de la rupture ;

Sur le second moyen :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société Winnovex fait grief à l'arrêt d'annuler le protocole signé le 12 juillet 2006, de dire le licenciement de la salariée dépourvu de cause réelle et sérieuse et de la condamner à lui verser diverses sommes au titre de la rupture, alors, selon le moyen :

1°/ que si la lettre de licenciement fixe les limites du litige quant aux griefs articulés à l'encontre du salarié, il appartient cependant au juge de qualifier les faits invoqués dans cette lettre ; que lorsque l'employeur mentionne dans la lettre de licenciement qu'il est contraint de procéder à une rupture immédiate du contrat de travail, l'existence d'une faute grave est nécessairement invoquée ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que l'employeur avait indiqué dans la lettre de licenciement qu'«en prolongement de l'entretien préalable qui s'est déroulé le 04 juillet 2006 à 18 h, je me vois contraint de procéder à la rupture immédiate de votre contrat de travail… Vous recevrez, après présentation par la poste de la présente lettre recommandée votre solde de tout compte, votre certificat de travail et votre attestation Assedic», ce dont il résulte que l'existence d'une faute grave était nécessairement invoquée ; que dès lors, en se fondant sur le fait que ni la lettre de licenciement, ni l'attestation Assedic ne mentionnaient la faute grave, pour retenir que la société Winnovex n'avait pas fait de concessions appréciables dans la transaction, la cour d'appel a violé l'article 2044 du code civil ainsi que les articles L. 1232-6, L. 1234-1 et L. 1234-9 du code du travail ;

2°/ que le fait pour un employeur de verser au salarié une indemnité de licenciement ne le prive pas du droit d'invoquer une faute grave ; qu'en décidant le contraire, pour considérer que la société Winnovex n'avait pas fait de concessions appréciables dans la transaction, la cour d'appel a violé l'article 2044 du code civil ainsi que les articles L. 1234-1 et L. 1234-9 du code du travail ;

3°/ que pour déterminer le caractère réel ou non des concessions contenues dans la transaction, le juge doit seulement rechercher, lorsque l'employeur a prononcé une rupture immédiate du contrat de travail, si les faits invoqués dans la lettre de licenciement sont susceptibles de recevoir la qualification de faute grave ; qu'en considérant pourtant, pour estimer que la société Winnovex n'avait pas fait de concessions appréciables dans la transaction, que les faits de dénigrement et d'insubordination allégués au fondement du licenciement ne constituent pas de plein droit une faute grave, la cour d'appel a violé les articles 2044 et 2052 du code civil ;

Mais attendu, cependant, que pour déterminer le caractère réel ou non des concessions contenues dans la transaction, le juge peut, sans heurter l'autorité de la chose jugée attachée à la transaction, restituer aux faits énoncés dans la lettre de licenciement leur véritable qualification ;

Et attendu qu'appréciant souverainement les éléments de faits et de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel, qui a relevé que ni la lettre de licenciement, ni l'attestation Assedic ne mentionnaient la faute grave, que les faits de dénigrement et d'insubordination allégués au fondement du licenciement ne constituaient pas une telle faute, que cadre ayant plus de deux ans d'ancienneté, elle pouvait prétendre à une indemnité compensatrice de préavis correspondant à trois mois de salaire, ce qui était supérieur à l'indemnité transactionnelle qui lui avait été allouée, a pu en déduire que la société n'avait pas fait de concession appréciable ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Winnovex aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Winnovex à payer à Mme X... la somme de 2 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit janvier deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP de Chaisemartin et Courjon, avocat aux Conseils pour la société Winnovex.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir annulé le protocole d'accord transactionnel signé par les parties le 12 juillet 2006, dit le licenciement de Madame X... dépourvu de cause réelle et sérieuse et d'avoir, en conséquence, condamné la Société WINNOVEX à lui payer une indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents, un solde d'indemnité de licenciement et des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

AUX MOTIFS QU'aux termes de l'article 2044 du Code civil, la transaction est un contrat par lequel les parties terminent une contestation née ou préviennent une contestation à naître ; que sa validité est soumise tant aux conditions générales de validité du consentement qu'à l'existence d'un différend d'issue aléatoire et à l'existence de concessions réciproques non négligeables ; qu'au cas d'espèce, Mme X... fait état d'un management confinant au harcèlement moral et produit un certificat médical indiquant une consultation en mars 2006 pour traitement d'un stress d'origine professionnelle ; que la salariée n'allègue cependant pas d'un consentement vicié par la violence morale de la société ; qu'en tout état de cause, les faits relatés au fondement d'un harcèlement moral intéressaient d'autres salariés de l'entreprise ; que les premiers juges ont retenu la qualification de responsable de ressources humaines de Mme X..., ainsi particulièrement informée de ses droits ; qu'en réalité, la salariée qui n'avait reçu aucune formation juridique, avait été recrutée en qualité d'ingénieur commercial ; qu'appelée ensuite « responsable ressources humaines », elle avait pour mission de recruter, d'assurer le suivi des plans de carrière et d'assurer les réunions commerciales ; qu'aucune pièce ne révèle d'activité juridique dans l'exécution des fonctions de l'appelante dont les objectifs portaient sur le nombre des recrutements ; qu'aucune connaissance sérieuse en droit du travail ne la mettait à l'abri d'une convention négligeant ses intérêts ; que la signature par la salariée d'une clause de non concurrence dépourvue de contrepartie financière et annulée par la suite marque de plus l'ignorance de la signataire ; que les concessions réciproques appréciables doivent être examinées au regard des prétentions des parties au moment de la signature de l'accord ; que ni la lettre de licenciement ni l'attestation Assedic ne mentionnent la faute grave de la salariée alors que l'inexécution du préavis est insuffisante à la caractériser ; que Mme X... a perçu une indemnité légale de licenciement incompatible avec une faute grave ; que les faits de dénigrement et d'insubordination allégués au fondement du licenciement ne constituent pas de plein droit une faute grave ; que les faits se rapportant à la société Optec non visés dans la lettre de licenciement sont hors du différend ; que, cadre ayant une ancienneté supérieure à deux années, Mme X... pouvait prétendre à une indemnité compensatrice de préavis correspondant à trois mois de salaire soit 10.749,99 € et 1.074,99€ supérieurs à l'indemnité transactionnelle ; que la société n'a pas accordé de concessions appréciables ; que la transaction doit être annulée ; que la demande de Mme X... tendant à l'examen du bien-fondé de son licenciement est recevable ;

1) ALORS QUE si la lettre de licenciement fixe les limites du litige quant aux griefs articulés à l'encontre du salarié, il appartient cependant au juge de qualifier les faits invoqués dans cette lettre ; que lorsque l'employeur mentionne dans la lettre de licenciement qu'il est contraint de procéder à une rupture immédiate du contrat de travail, l'existence d'une faute grave est nécessairement invoquée ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a constaté que l'employeur avait indiqué dans la lettre de licenciement qu'« en prolongement de l'entretien préalable qui s'est déroulé le 04 juillet 2006 à 18h, je me vois contraint de procéder à la rupture immédiate de votre contrat de travail… Vous recevrez, après présentation par la poste de la présente lettre recommandée votre solde de tout compte, votre certificat de travail et votre attestation ASSEDIC », ce dont il résulte que l'existence d'une faute grave était nécessairement invoquée ; que dès lors, en se fondant sur le fait que ni la lettre de licenciement, ni l'attestation ASSEDIC ne mentionnaient la faute grave, pour retenir que la Société WINNOVEX n'avait pas fait de concessions appréciables dans la transaction, la Cour d'appel a violé l'article 2044 du Code civil ainsi que les articles L. 1232-6, L. 1234-1 et L. 1234-9 du Code du travail ;

2) ALORS QUE le fait pour un employeur de verser au salarié une indemnité de licenciement ne le prive pas du droit d'invoquer une faute grave ; qu'en décidant le contraire, pour considérer que la Société WINNOVEX n'avait pas fait de concessions appréciables dans la transaction, la Cour d'appel a violé l'article 2044 du Code civil ainsi que les articles L. 1234-1 et L. 1234-9 du Code du travail ;

3) ALORS QUE pour déterminer le caractère réel ou non des concessions contenues dans la transaction, le juge doit seulement rechercher, lorsque l'employeur a prononcé une rupture immédiate du contrat de travail, si les faits invoqués dans la lettre de licenciement sont susceptibles de recevoir la qualification de faute grave ; qu'en considérant pourtant, pour estimer que la Société WINNOVEX n'avait pas fait de concessions appréciables dans la transaction, que les faits de dénigrement et d'insubordination allégués au fondement du licenciement ne constituent pas de plein droit une faute grave, la Cour d'appel a violé les articles 2044 et 2052 du Code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit le licenciement de Madame X... dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamné la Société WINNOVEX à lui payer une indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents, un solde d'indemnité de licenciement et des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

AUX MOTIFS QUE la lettre de licenciement fonde cette mesure sur des motifs non circonstanciés dont l'imprécision ne permettait pas à la salariée de connaître suffisamment la teneur des reproches ; que la nouvelle direction de la société reproche à Mme X... « une attitude de défiance et de retrait », « des critiques en interne et à l'extérieur », enfin, le refus d'exécuter l'avenant du contrat de travail soit « une véritable provocation et insubordination de votre part » ; qu'à l'appui de ces reproches, l'intimée verse la lettre transmise par la salariée le 31 janvier 2006 à l'inspection du travail indiquant précisément des décisions managériales qu'elle estimait blâmables sans que leur caractère mensonger soit établi ; que l'attestation d'un salarié de l'entreprise (M. Y...) qui estime que l'appelante « paraissait en profond désaccord et opposée à la direction a priori » n'établit pas de manière précise et circonstanciée la réalité de critiques en interne et le refus prétendu d'exécuter sa prestation de travail ; que la carence de travail avancée en cours d'audience, outre qu'elle n'est pas établie, ne figure pas dans la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige ; que le mail de Mme Garchery en date du 21 mars 2006 ne comporte aucune marque de dénigrement ; que les motifs du licenciement ne sont pas fondés ; que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

ALORS QUE la lettre de licenciement, qui reprochait à la salariée son attitude de défiance et de retrait, le fait d'avoir critiqué en interne et auprès des clients et fournisseurs tant la nouvelle direction que ses méthodes et son mode de fonctionnement, ainsi que son refus d'exécuter les termes de l'avenant de son contrat de travail, ce qui confinait à une véritable provocation et insubordination de sa part, énonçait des motifs précis de licenciement ; qu'en considérant pourtant que la lettre de licenciement fondait cette mesure sur des motifs non circonstanciés, dont l'imprécision ne permettait pas à la salariée de connaître suffisamment la teneur des reproches, la Cour d'appel a violé les articles L. 1232-6 et L. 1235-1 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-11742
Date de la décision : 18/01/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 03 décembre 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 18 jan. 2012, pourvoi n°10-11742


Composition du Tribunal
Président : Mme Mazars (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Piwnica et Molinié, SCP de Chaisemartin et Courjon

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:10.11742
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