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12/01/2012 | FRANCE | N°10-19611

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 12 janvier 2012, 10-19611


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 1232-6 du code du travail et le principe de l'autorité, au civil, de la chose jugée au pénal ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., engagée le 1er juillet 1985 en qualité de secrétaire par la société d'avocats Y...- Z..., a été licenciée pour faute grave le 16 juin 2003 ; qu'il lui était reproché d'avoir imité la signature d'un des associés pour pouvoir inscrire son enfant auprès d'une mutuelle santé ; que par arrêt du 2 février 2009 la c

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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 1232-6 du code du travail et le principe de l'autorité, au civil, de la chose jugée au pénal ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., engagée le 1er juillet 1985 en qualité de secrétaire par la société d'avocats Y...- Z..., a été licenciée pour faute grave le 16 juin 2003 ; qu'il lui était reproché d'avoir imité la signature d'un des associés pour pouvoir inscrire son enfant auprès d'une mutuelle santé ; que par arrêt du 2 février 2009 la cour d'appel de Grenoble l'a relaxée des faits de faux et usage de faux pour lesquels elle était poursuivie ;

Attendu que pour dire le licenciement de Mme X... fondé sur une cause réelle et sérieuse et la débouter de ses demandes tendant au paiement de dommages-intérêts, l'arrêt retient qu'elle a imité la signature d'un des associés de la société sans son autorisation et qu'il importe peu que ce fait ait été qualifié à tort de faux en écriture par l'employeur dans la lettre de licenciement ;

Qu'en statuant ainsi alors qu'il résultait de ses propres constatations que la lettre de licenciement reprochait à la salariée l'infraction de faux en écriture dont elle avait été relaxée par une décision de la juridiction pénale devenue définitive, la cour d'appel a violé le texte et le principe susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 27 avril 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;

Condamne la société Y...
Z... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Y...
Z... et la condamne à payer à Mme X... la somme de 2 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze janvier deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Peignot, Garreau et Bauer-Violas, avocat aux Conseils, pour Mme X...

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir, confirmant le jugement du conseil de prud'hommes de CHAMBERY, dit que le licenciement de Mme X... reposait sur une cause réelle et sérieuse et de l'avoir déboutée de ses demandes tendant au paiement des sommes de 66. 747, 84 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et 40. 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire,

AUX MOTIFS QUE " sur l'imitation de la signature de Maître Y... sur la fiche de liaison destinée à l'inscription de la fille de Mme X... auprès de la mutuelle, ce document constituant la pièce 1 du dossier de la SCP, est daté du 16 janvier 2003 et a été reçu par la mutuelle le 20 janvier 2003. Il n'a pas été reproché à Mme X... de l'avoir antidaté. En conséquence, ce point n'a pas lieu d'être examiné.

Mme X... admet avoir signé cette fiche aux lieu et place de Maître Y..., sans aucune formule indiquant qu'elle signait en son nom avec un pouvoir à cet effet ; elle reconnaît, en outre, avoir effectivement imité la signature de Maître Y....

Il importe peu que ce fait ait été qualifié à tort de faux en écriture par l'employeur dans la lettre de licenciement. Le faux n'existe pas mais le fait subsiste.

En conséquence, ce grief est établi, étant observé que Mme X... n'a pas pu justifier de l'existence d'une pratique relative à la signature des documents du cabinet, connue voire encouragée par la SCP, susceptible de légitimer son comportement, ce d'autant plus qu'en janvier 2002, lors de l'affiliation à la mutuelle de son compagnon en qualité d'ayant-droit, elle avait signé en utilisant son propre paraphe.

Seul ce dernier fait peut fonder le licenciement de Mme X....

Eu égard à la foi attachée à la signature d'un avocat et à la qualité de clerc de Mme X..., il constitue une cause sérieuse de rupture du lien contractuel.

En revanche, dans la mesure où le document litigieux était étranger à l'activité du cabinet, et où la qualification de faux en écriture a été rejetée notamment pour absence de préjudice, ce fait unique commis par une salariée ayant presque 18 ans d'ancienneté, ne constitue pas une faute grave qui justifiait son exclusion immédiate du cabinet.

En conséquence, le jugement déféré sera confirmé en toutes ses dispositions, les sommes allouées correspondant strictement à celles que la SCP Y...- Z... lui aurait spontanément servies si elle avait motivé son licenciement sur une cause réelle et sérieuse et non sur une faute grave, et n'étant d'ailleurs subsidiairement pas discutées " (arrêt p. 4 et 5),

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES, QUE " l'imitation de la signature de son employeur par Mme Evelyne X... est incontestable et reconnue par cette dernière, il s'agit d'un fait pouvant être constitutif d'une faute grave.

Mais attendu que comme l'ont montré les débats, et comme l'ont constaté le Tribunal Correctionnel de Grenoble puis la Cour d'appel de Chambéry, Mme Evelyne X... était autorisée à signer des documents urgents en imitant la signature de Maître Y....

Attendu que l'employeur peut difficilement qualifier de faute grave une situation qu'il admet selon les circonstances " (jugement p. 4),

ALORS QUE les décisions de la juridiction pénale ont au civil l'autorité de chose jugée à l'égard de tous et il n'est pas permis au juge civil de méconnaître ce qui a été jugé par le tribunal répressif ; que le juge civil ne peut donc, pour considérer que le licenciement d'un salarié repose sur une cause réelle et sérieuse, retenir des faits pour lesquels le salarié a été poursuivi devant une juridiction répressive et définitivement relaxé ; qu'en l'espèce, pour dire que le licenciement de Mme X... reposait sur une cause réelle et sérieuse, la cour d'appel s'est fondée sur des faits, à savoir l'imitation de la signature de Me Y..., pour lesquels elle avait été poursuivi devant la juridiction répressive avant d'être relaxée par un jugement rendu le 2 octobre 2007 par le tribunal correctionnel de GRENOBLE, confirmé sur le seul appel de la partie civile par arrêt rendu le 2 février 2009 par la cour d'appel de GRENOBLE de sorte qu'en statuant ainsi, elle a violé le principe de l'autorité de la chose jugée au pénal sur l'action portée devant la juridiction civile, ensemble l'article 1351 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-19611
Date de la décision : 12/01/2012
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Chambéry, 27 avril 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 12 jan. 2012, pourvoi n°10-19611


Composition du Tribunal
Président : M. Bailly (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Peignot, Garreau et Bauer-Violas

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:10.19611
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