LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail, 11 mars 2010), que consécutivement à l'accident du travail dont il avait été victime le 24 novembre 2003, M. X..., employé de la société Sécuritas France (la société) a reçu notification de l'attribution d'une rente correspondant à un taux d'incapacité permanente partielle de 15 %, prenant effet au 3 août 2006 ; que le capital représentatif de cette rente ayant été imputé sur le compte employeur de la société, la caisse régionale d'assurance maladie d'Alsace-Moselle a mis à la charge de celle-ci, au titre de l'assurance des accidents du travail, un taux de cotisation de 1,65% pour l'exercice de l'année 2009 ; que contestant cette décision en arguant de ce que cette rente avait été attribuée après rechute, la société a saisi d'un recours la Cour nationale ;
Attendu que la société fait grief à l'arrêt de la débouter de son recours alors, selon le moyen :
1°/ que le juge est tenu de motiver sa décision ;qu'en se fondant sur le postulat selon lequel « le 7 avril 2004, le salarié a déclaré une rechute qui n'a pas été prise en charge au titre de la législation professionnelle », sans préciser sur quel élément de preuve produit aux débats elle fondait cette affirmation, la CNITAAT n'a pas motivé sa décision en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
2°/ qu'il résulte des articles R. 441-10 et R. 441-16 du code de la sécurité sociale que lorsqu'elle est saisie d'une déclaration de rechute, la CPAM dispose d'un délai de 30 jours pour prendre une décision ; qu'en l'absence de décision dans ce délai, le caractère professionnel de la rechute est reconnu ; que prive sa décision de base légale au regard des textes susvisés, la CNITAAT qui énonce que la rechute déclarée par le salarié le 7 avril 2004 n'a pas été prise en charge au titre de la législation professionnelle, sans constater l'existence d'une décision de refus de prise en charge de la rechute par la CPAM ;
3°/ que les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties à l'appui de leurs prétentions ;qu'au cas présent, la société fondait sa prétention sur l'existence d'un courrier de la CPAM de Strasbourg du 6 décembre 2006 faisant état des conclusions d'un expert désigné « conformément aux dispositions des articles L. 141-1, R. 141-1 et suivants du Code de la sécurité sociale et pour faire suite à une contestation» de M. X... ; que ce courrier indiquait que l'expert a émis l'avis suivant : concernant l'accident du travail du 24/11/2003, la rechute avec arrêt de travail à compter du 07/04/2004 peut être consolidée le 02/08/2006 en l'absence d'évolution de la symptomatologie ces derniers mois » ; qu'il résultait donc de ce document déterminant l'existence d'une contestation d'ordre médical concernant la date de consolidation ; qu'en estimant «qu'aucun désaccord relatif à la date de consolidation n'existe entre le médecin conseil de la caisse primaire et le médecin traitant de la victime», la CNITAAT qui s'est abstenue d'examiner l'ensemble des éléments de preuve qui lui étaient proposés, a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu que seule la victime peut invoquer le défaut de réponse de la caisse dans le délai de trente jours après une déclaration de rechute pour faire reconnaître le caractère professionnel de celle-ci ;
Et attendu que l'arrêt retient, d'une part, qu'en l'absence de désaccord entre le médecin-conseil et le médecin traitant de la victime, la fixation au 2 août 2006 de la consolidation est opposable tant à cette dernière qu'à l'employeur, d'autre part, que le certificat médical de "rechute" est antérieur à la consolidation ;
Que de ces énonciations, la Cour nationale a exactement déduit, par une décision suffisamment motivée, que l'arrêt de travail à compter du 7 avril 2004 ne résultant pas d'une rechute, c'est le capital représentatif de la rente fixée après la consolidation intervenue le 2 août 2006 qui devait être porté au compte employeur de la société ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Securitas France aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande présentée par la société Securitas France et la condamne à payer la somme de 2 500 euros à la caisse régionale d'assurance maladie d'Alsace-Moselle ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize décembre deux mille onze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils pour la société Securitas France
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR « constaté » que la rente a été attribuée à Monsieur X... à la date de consolidation initiale des séquelles de son accident du travail du 24 novembre 2003, dit en conséquence y avoir lieu à maintenir le capital représentatif de rente sur le compte employeur 2007 de la société SECURITAS FRANCE et rejeté la demande de la société SECURITAS FRANCE de rectification de son taux de cotisation pour l'exercice 2009 ;
AUX MOTIFS QUE : «Sur le fond : les dispositions des articles L.143-1 et L.143-4 du Code de la sécurité sociale instituent une organisation du contentieux technique de la sécurité sociale. Cette organisation règle les contestations relatives aux décisions des caisses régionales d'assurance maladie et des caisses de mutualité sociale agricole concernant, en matière d'accident du travail agricole et non agricole, la fixation du taux de cotisation, l'octroi de ristournes, l'imposition de cotisations supplémentaires et, pour les accidents régis par le livre IV du code de la sécurité sociale, la détermination de la contribution prévue à l'article L 437-1 du présent code. Les contestations mentionnées au 4° de l'article L. 143 -1 sont soumises en premier et dernier ressort à la cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail prévue à l'article L. 143-3 ; qu'en application des dispositions de l'article D. 242-6-3 du Code de la sécurité sociale, le taux brut est calculé d'après le rapport de la valeur du risque propre à l'établissement à la masse totale des salaires payés au personnel, pour les trois dernières années connues. La valeur du risque comprend les capitaux représentatifs des rentes notifiées au cours de la période triennale de référence aux victimes atteintes, à la date de consolidation initiale de leur état de santé, d'une incapacité permanente afférente à l'accident ou à la maladie concernés, à l'exception de l'incapacité permanente reconnue après rechute. L'ensemble des dépenses constituant la valeur du risque est pris en compte par les caisses régionales d'assurance maladie dès que ces dépenses leur ont été communiquées par les caisses primaires, sans préjudice de l'application des décisions de justice ultérieures ; la cour nationale est donc compétente pour régler les différends relatifs à la fixation du taux de cotisation et en l'espèce pour apprécier si c'est à bon droit que la caisse régionale d'assurance maladie d'Alsace-Moselle a imputé au compte employeur de la société SECURITAS FRANCE le capital représentatif de la rente attribuée à M. X... et notifié le taux de cotisation de l'année 2009 en conséquence, en application des dispositions de l'article D.242-6-3 du Code de la sécurité sociale ; qu'il ressort des pièces figurant au dossier, qu'aucun désaccord relatif à la fixation de la date de consolidation de l'état de santé de M. X... n'existe entre le médecin conseil de la caisse primaire et le médecin traitant de la victime ; ainsi, seule cette date du 02 août 2006, non contestée, est applicable, tant à la victime qu'à l'employeur comme date de consolidation initiale de la blessure ; qu'il apparaît que le certificat médical de rechute du 07 avril 2004 du médecin traitant sur lequel se fonde la société SECURITAS FRANCE, d'une part est antérieur à la date de consolidation du 02 août 2006, et d'autre part et a fortiori n'a pas été pris en compte à ce titre par la caisse primaire d'assurance maladie. De ce fait, l'article D.242-6-3 du Code de la sécurité sociale qui se réfère à la rechute, postérieure à la date de consolidation et prise en charge au titre de l'accident de travail initial par la caisse primaire d'assurance maladie, ne trouve pas à s'appliquer en l'espèce ; que par ailleurs, il appartient à la société, qui fait valoir d'une part que l'état de M. X... n'a pas été apprécié à la date de consolidation initiale mais suite à une rechute dont les séquelles auraient été prises en compte, et d'autre part que le rapport d'évaluation des séquelles ne lui a pas été communiqué, de faire valoir ses droits et de contester le taux d'incapacité permanente partielle devant la juridiction compétente du contentieux technique de la Sécurité Sociale. La société ne produit toutefois aucune justification de l'engagement parallèle d'une telle action dont l'issue serait éventuellement susceptible de remettre en cause la tarification contestée et n'a sollicité aucun sursis à statuer ; que la caisse régionale d'assurance maladie d'Alsace-Moselle, conformément aux dispositions de l'article D.242-6-3 du Code de la sécurité sociale, a porté sur le compte employeur 2007 de la société SECURITAS FRANCE les sommes communiquées par la caisse primaire d'assurance maladie au titre de la rente servie à M. X.... Suite à la contestation de la société, la caisse régionale d'assurance maladie a interrogé la caisse primaire d'assurance maladie qui a confirmé que la rente avait été attribuée après consolidation de l'accident initial et non après rechute ; que c'est donc à juste titre que la caisse régionale d'assurance maladie a inscrit sur le compte employeur 2007 de la société SECURITAS les sommes communiquées par la caisse primaire d'assurance maladie au titre de la rente servie à M. X..., sans avoir à se faire juge du bien fondé de celles-ci, et calculé le taux de cotisation de l'exercice 2009 en conséquence ; qu'en conséquence, il y a lieu de maintenir le capital représentatif de la rente attribuée à M. X... à la date de consolidation initiale sur le compte employeur 2007 de la société SECURITAS FRANCE et de confirmer le taux contesté » ;
ALORS, D'UNE PART, QUE le juge est tenu de motiver sa décision ; qu'en se fondant sur le postulat selon lequel « le 7 avril 2004, le salarié a déclaré une rechute qui n'a pas été prise en charge au titre de la législation professionnelle » (Arrêt p. 3 al. 4), sans préciser sur quel élément de preuve produit aux débats elle fondait cette affirmation, la CNITAAT n'a pas motivé sa décision en violation de l'article 455 du Code de procédure civile ;
ALORS, D'AUTRE PART ET EN TOUTE HYPOTHESE, QU'il résulte des articles R. 441-10 et R. 441-16 du Code de la sécurité sociale que lorsqu'elle est saisie d'une déclaration de rechute, la CPAM dispose d'un délai de 30 jours pour prendre une décision ; qu'en l'absence de décision dans ce délai, le caractère professionnel de la rechute est reconnu ; que prive sa décision de base légale au regard des textes susvisés, la CNITAAT qui énonce que la rechute déclarée par le salarié le 7 avril 2004 n'a pas été prise en charge au titre de la législation professionnelle, sans constater l'existence d'une décision de refus de prise en charge de la rechute par la CPAM ;
ALORS, ENFIN, QUE les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties à l'appui de leurs prétentions ; qu'au cas présent, la société SECURITAS FRANCE fondait sa prétention sur l'existence d'un courrier de la CPAM de STRASBOURG du 6 décembre 2006 faisant état des conclusions d'un expert désigné « conformément aux dispositions des articles L. 141-1, R. 141-1 et suivants du Code de la sécurité sociale et pour faire suite à une contestation» de M. X... ; que ce courrier indiquait que l'expert a émis l'avis suivant : concernant l'accident du travail du 24112003, la rechute avec arrêt de travail à compter du 07042004 peut être consolidée le 02082006 en l'absence d'évolution de la symptomatologie ces derniers mois » ; qu'il résultait donc de ce document déterminant l'existence d'une contestation d'ordre médical concernant la date de consolidation ; qu'en estimant « qu'aucun désaccord relatif à la date de consolidation n'existe entre le médecin conseil de la caisse primaire et le médecin traitant de la victime » (Arrêt p. 7 al. 3), la CNITAAT qui s'est abstenue d'examiner l'ensemble des éléments de preuve qui lui étaient proposés, a violé l'article 455 du Code de procédure civile.