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30/11/2011 | FRANCE | N°10-11722

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 30 novembre 2011, 10-11722


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Caen, 15 janvier 2010), que des syndicats du secteur de l'agroalimentaire du Calvados ont saisi la juridiction civile d'une demande en paiement par la société Soviba Villers-Bocage d'une indemnité pour violation des dispositions de l'article 46-7 de la convention collective nationale des entreprises de l'industrie et du commerce en gros de viande ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire qu'il a violé les dispositions de cet article et de le

condamner à payer aux syndicats une indemnité à ce titre, alors, se...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Caen, 15 janvier 2010), que des syndicats du secteur de l'agroalimentaire du Calvados ont saisi la juridiction civile d'une demande en paiement par la société Soviba Villers-Bocage d'une indemnité pour violation des dispositions de l'article 46-7 de la convention collective nationale des entreprises de l'industrie et du commerce en gros de viande ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire qu'il a violé les dispositions de cet article et de le condamner à payer aux syndicats une indemnité à ce titre, alors, selon le moyen :
1°/ que l'usage d'entreprise plus favorable aux salariés prime sur les dispositions de la convention collective ; que la preuve de l'usage peut être rapportée par tous moyens ; qu'au cas d'espèce, en niant l'existence d'un usage au sein de la société Soviba VB, selon lequel les temps de pause étaient assimilés à du temps de travail effectif et étaient rémunérés comme tels, motif pris de ce que la société ne démontrait pas l'existence de cet usage, sans s'expliquer, comme il le lui était expressément demandé, sur la circonstance que les syndicats eussent sollicité la cessation de la pratique consistant à rémunérer les temps de pause comme du temps de travail effectif, au profit d'une rémunération spécifique de ces temps, et sur les termes du nouveau protocole d'accord portant sur la négociation annuelle des salaires en date du 23 février 2006, signé par tous les syndicats, et dont l'article 7 prévoyait qu'"à compter du 1er juin 2006, le temps de pause ne sera plus comptabilisé dans le temps de travail effectif", ce qui montrait l'existence d'un usage en ce sens au sein de l'entreprise, les juges du fond n'ont pas donné de base à leur décision au regard des articles L. 1221-1 du code du travail et 1134 du code civil, ensemble l'article 46.7 de la convention collective nationale des entreprises de l'industrie et du commerce en gros des viandes, ensemble le principe fondamental du droit du travail selon lequel, en cas de conflit de normes, c'est la plus favorable aux salariés qui doit recevoir application ;
2°/ qu'en déniant que l'usage d'entreprise, à le supposer avéré, présentât un caractère plus favorable aux salariés, sans rechercher, comme il le leur était encore demandé, si la prise en compte des temps de pause dans le temps de travail effectif n'était pas plus favorable financièrement aux salariés dès lors qu'elle leur permettait d'accéder plus facilement au paiement d'heures supplémentaires, comme le montraient des exemples chiffrés qu'il avait donnés, les juges du fond n'ont pas donné de base légale à leur décision au regard des articles L. 1221-1 du code du travail et 1134 du code civil, ensemble l'article 46.7 de la convention collective nationale des entreprises de l'industrie et du commerce en gros des viandes, ensemble le principe fondamental du droit du travail selon lequel, en cas de conflit de normes, c'est la plus favorable aux salariés qui doit recevoir application ;
Mais attendu qu'ayant rappelé que le texte conventionnel ouvre droit aux salariés à un temps de pause rémunéré de trois minutes par heure de travail effectivement accomplie et que l'usage d'entreprise invoqué, par son assimilation de ces temps de pause à du temps de travail effectif, avait eu pour effet de les intégrer à la modulation annuelle du temps de travail, la cour d'appel, qui a retenu que les salariés n'avaient ainsi plus été rémunérés pour leur temps de pause, qu'ils avaient seulement pu en être indemnisés en jours de repos et qu'il n'était pas établi qu'ils avaient reçu, en fin de période de modulation, une rémunération ajoutant à leur salaire mensuel le paiement des temps de pause, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Soviba Villers-Bocage aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Soviba Villers-Bocage et la condamne à payer aux défendeurs la somme globale de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente novembre deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par Me Foussard, avocat aux Conseils pour la société Soviba Villers-Bocage
L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure ;
EN CE QU'il a dit que la Société SOVIBA VB n'a pas respecté les dispositions de l'article 46.7 de la convention collective nationale des entreprises de l'industrie et du commerce en gros de viande, en assimilant unilatéralement les temps de pause à des temps de travail effectif et en les indemnisant notamment sous forme de récupération, et non en paiement conformément aux dispositions du texte précité, et a condamné la Société SOVIBA VB à verser aux syndicats une certaine somme à titre de dommages et intérêts ;
AUX MOTIFS QU'« en application de l'article 46.7 de la convention collective nationale étendue de l'industrie et du commerce en gros de viandes, « tout salarié affecté aux opérations d'abattage sur chaînes mécanisées ou tributaire d'un poste de saignée fonctionnant à part ou effectuant dans les différents ateliers de l'entreprise ou de l'est des opérations ou travaux qui se déroulent suivant un rythme et une cadence imposés collectivement, a droit à un temps de pause calculé sur la base de trois minutes par heure de travail effectivement accomplie. Cette pause est rémunérée au taux normal sans maj. Un accord d'entreprise ou d'établissement détermine les modalités de la prise effective de cette pause » ; que les salariés soutiennent que pour la période du 15 juin 2001 au 1er juin 2006, ces temps de pause n'ont pas été rémunérés mais que la Société SOVIBA VB a décidé unilatéralement de les considérer comme des temps de travail effectif et de les affecter sur la banque d'heures instituée dans le cadre des accords d'aménagement et de réduction du temps de travail, de sorte que ces temps de pause sont rémunérés en tant que tels ont fait l'objet de journées de repos attribuées en lieu et place du paiement ; que la Société SOVIBA VB soutient avoir assimilé les temps de pause à un temps de travail effectif et les avoir affectés sur la banque d'heures de chaque salarié, de sorte qu'ils étaient, selon elle, effectivement rémunérés soit dans le cadre du paiement du salaire mensuel, même si le salarié ne réalisait pas 35 heures de travail hebdomadaire dans le mois considéré, soit par la prise d'un jour d'absence lorsque le salarié bénéficiait de 7 heures du crédit de sa banque d'heures soit lors du paiement des heures excédentaires à la moyenne de 35 heures en fin de période de modulation ; qu'aucune convention ni aucun accord plus favorable que les termes de la convention collective n'a été conclu pour l'assimilation du temps de pause à du temps de travail effectif ; que l'employeur invoque à cet égard un usage instauré avec l'accord des partenaires sociaux et soutient que cet usage était plus favorable pour les salariés par exemple quant au déclenchement du paiement des heures supplémentaires ; que cependant, la Société SOVIBA VB n'apporte pas la preuve ni de l'accord des syndicats ni surtout du caractère plus favorable en toutes hypothèses de l'usage qu'elle invoque, dès lors que les temps de pause assimilés à du temps de travail effectif étaient inscrits comme tels dans la comptabilisation de la durée du travail, dans le cadre de la modulation du temps de travail, et avaient ainsi nécessairement une incidence sur l'appréciation du temps de travail moyen annuel ; que si l'instauration d'une pause rémunérée ne confère pas nécessairement le droit à un supplément de rémunération, les dispositions de l'article 46.1 (… Les pauses, mêmes payées, ne sont pas assimilées à un temps de travail effectif) interdisaient expressément à la Société SOVIBA VB d'assimiler les temps de pause à du temps de travail effectif et de les intégrer, ce faisant, dans la rémunération du temps de travail effectif, alors qu'elle n'établit pas que ce traitement des temps de pause intégrés dans le cadre de la modulation annuelle du temps de travail aboutissait en toutes hypothèses, en fin de période de modulation, à un résultat plus favorable pour le salarié ; que de même, la Société SOVIBA VB ne pouvait unilatéralement décider d'indemniser ces temps de pause par l'octroi de jours de repos, lorsque le temps de travail effectif en fin de période de modulation excédait 35 heures en moyenne, alors que l'article 46.7 d la convention collective prévoyait expressément qu'ils devaient être rémunérés ; que la Société SOVIBA VB ne démontre pas qu'en fin de période de modulation, les salariés recevaient une rémunération correspondant à 151H67 par mois conformité à leur contrat de travail, à laquelle s'ajoutait le paiement des temps de pause, alors qu'aux termes de la convention collective ces derniers devaient être payés et ne pouvaient être assimilés à du temps de travail effectif ; qu'il en résulte que, contrairement à l'appréciation des premiers juges, les syndicats appelants sont bien fondés à soutenir que l'employeur a fait une application erronée des dispositions de l'article 46.7 de la convention collective (…) » (arrêt, p. 4-5) ;
ALORS QUE, premièrement, l'usage d'entreprise plus favorable aux salariés prime sur les dispositions de la convention collective ; que la preuve de l'usage peut être rapportée par tous moyens ; qu'au cas d'espèce, en niant l'existence d'un usage au sein de la Société SOVIBA VB, selon lequel les temps de pause étaient assimilés à du temps de travail effectif et étaient rémunérés comme tels, motif pris de ce que la société ne démontrait pas l'existence de cet usage, sans s'expliquer, comme il le lui était expressément demandé (conclusions d'appel de la Société SOVIBA VB en date du 30 septembre 2009, p. 4-5), si la circonstance que les syndicats eussent sollicité la cessation de la pratique consistant à rémunérer les temps de pause comme du temps de travail effectif, au profit d'une rémunération spécifique de ces temps, et si les termes du nouveau protocole d'accord portant sur la négociation annuelle des salaires en date du 23 février 2006, signé par tous les syndicats, et dont l'article 7 prévoyait qu' « à compter du 1er juin 2006, le temps de pause ne sera plus comptabilisé dans le temps de travail effectif », ne montraient pas l'existence d'un usage en ce sens au sein de l'entreprise, les juges du fond n'ont pas donné de base à leur décision au regard des articles L. 1221-1 du Code du travail et 1134 du Code civil, ensemble l'article 46.7 de la convention collective nationale des entreprises de l'industrie et du commerce en gros des viandes, ensemble le principe fondamental du droit du travail selon lequel, en cas de conflit de normes, c'est la plus favorable aux salariés qui doit recevoir application ;
Et ALORS QUE, deuxièmement, en déniant que l'usage d'entreprise, à le supposer avéré, présentât un caractère plus favorable aux salariés, sans rechercher, comme il le leur était encore demandé (conclusions d'appel de la Société SOVIBA VB en date du 30 septembre 2009, p. 9-12), si la prise en compte des temps de pause dans le temps de travail effectif n'était pas plus favorable financièrement aux salariés dès lors qu'elle leur permettait d'accéder plus facilement au paiement d'heures supplémentaires, comme le montraient des exemples chiffrés donnés par la société, les juges du fond n'ont, à cet égard encore, pas donné de base légale à leur décision au regard des articles L. 1221-1 du Code du travail et 1134 du Code civil, ensemble l'article 46.7 de la convention collective nationale des entreprises de l'industrie et du commerce en gros des viandes, ensemble le principe fondamental du droit du travail selon lequel, en cas de conflit de normes, c'est la plus favorable aux salariés qui doit recevoir application.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-11722
Date de la décision : 30/11/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Caen, 15 janvier 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 30 nov. 2011, pourvoi n°10-11722


Composition du Tribunal
Président : Mme Mazars (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Foussard, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.11722
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